Intervention de Cécile Duflot

Réunion du 22 octobre 2013 à 14h30
Accès au logement et urbanisme rénové — Discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Cécile Duflot, ministre :

Pour lutter efficacement contre l’étalement urbain, il faut non seulement définir une politique de maîtrise et d’anticipation foncière intelligente, mais aussi donner aux élus les moyens de cette politique.

Les communes et les intercommunalités doivent disposer de l’ingénierie foncière la plus efficace possible pour répondre aux besoins spécifiques de chaque territoire, ce qui veut dire avoir des moyens qui leur permettront au mieux de concrétiser leurs stratégies de développement et de mettre en œuvre des projets de réhabilitation de leurs centres anciens et des projets d’aménagement résolument tournés vers l’avenir.

C’est la raison pour laquelle je souhaite que les opérateurs fonciers se développent, qu’il s’agisse d’établissements publics fonciers d’État ou d’établissements publics fonciers locaux, les uns comme les autres étant au service des territoires. La différence entre les deux ? C’est que l’État, au nom de l’égalité des territoires et de l’intérêt général, ait la capacité d’intervenir quand la volonté ou les moyens sont défaillants. L’État intervient pour garantir le respect des orientations stratégiques qu’il fixe et qui visent, par exemple, à ce que l’opérateur foncier dont il assure la tutelle permette aux collectivités en situation de carence d’optimiser la ressource foncière pour respecter la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, la loi SRU. En revanche, là où des établissements fonciers publics locaux existent et remplissent déjà leur mission de façon satisfaisante, le projet de loi vient conforter leur mission et étayer leurs outils.

En portant le projet de loi ALUR, je vous présente aujourd’hui un droit de l’urbanisme rénové, un régime de planification réformé et résolument tourné vers la transition écologique des territoires.

Je veux remettre au cœur de l’objectif de la construction de logements la question de l’aménagement du territoire. Trop longtemps, on a refusé de voir que l’urbanisme est un enjeu politique qui se trouve aux confluents de la question de la géographie sociale, de la question environnementale, des questions économiques et de la question sociale. L’urbanisme, c’est l’espace vécu, ressenti, et parfois subi.

Ces dernières années, par choix ou par renoncement, les ménages se sont essentiellement tournés vers la périphérie des villes. Aujourd’hui, ce sont plus de 80 % de la population et des emplois qui trouvent place dans l’espace périurbain. Or, nous le savons, malheureusement, la périurbanisation est synonyme de consommation excessive de nos espaces naturels.

Pourtant, l’urbanisation galopante et la concentration de nos cités ne sont pas une fatalité.

Un autre modèle urbain est indispensable, mais il ne pourra émerger sans un changement d’approche. Tirons les leçons de l’intelligence écologique accumulée depuis de longues années : rien de ce qui détruit indûment des espaces naturels ne saurait être considéré comme durablement profitable à l’intérêt général.

Nos terres naturelles, forestières et agricoles doivent être préservées ; elles sont devenues un bien précieux qui nécessite d’être protégé, un bien commun dont la préservation constitue un devoir républicain à part entière.

Il est temps de mettre un terme à l’artificialisation des sols. Là encore, je fais confiance aux élus pour qu’ils définissent les conditions de constructibilité sur leur territoire au travers de documents de planification. En revanche, il faut mettre un terme à la logique des dérogations partielles, au coup par coup, qui sont le contraire d’une politique durable en la matière. La constructibilité limitée en l’absence de document d’urbanisme est avant tout une invitation aux élus à se doter de documents d’urbanisme et à faire le choix d’exercer pleinement leurs compétences en se dotant d’un outil de planification.

Nous devons être ambitieux en engageant une mutation de notre habitat au sens large, c’est-à-dire de nos quartiers, de nos villes, de nos territoires.

Le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové donne à voir une façon nouvelle de penser, de fabriquer, et, au final, d’habiter la ville. Bien sûr, il s’agit d’une vision à long terme. Le tournant écologique ne se réalisera pas en un jour, mais je prends ma part de cet aggiornamento dans le champ ministériel dont j’ai la charge : la ville durable verra le jour !

Elle dépendra largement de nos stratégies de développement mises en œuvre à travers les politiques d’aménagement et d’urbanisme et de notre capacité à construire plus tout en construisant mieux, c’est-à-dire là où sont les besoins.

Les documents de planification seront demain plus que jamais essentiels à cette démarche de transition écologique des territoires à laquelle nous travaillons. C’est pourquoi ils doivent gagner en sécurité juridique, en lisibilité, et remplir les objectifs qui leur sont assignés à chaque échelle du territoire.

C’est dans ce sens que sera renforcé le schéma de cohérence territoriale, le SCOT. Il assurera, demain, l’intégration de l’ensemble des politiques d’aménagement à l’échelle du bassin de vie. Le plan local d’urbanisme, le PLU, quant à lui, traduira les objectifs du SCOT au niveau opérationnel.

Si le SCOT définit des espaces naturels à préserver, le PLU organise leur protection jusqu’à l’échelle la plus fine, celle des parcelles, en classant les espaces boisés, en adaptant le zonage et son dispositif réglementaire, en formulant des orientations d’aménagement et de programmation spécifiques, ou encore en organisant la maîtrise de l’étalement urbain par la densification des zones déjà bâties.

Cette organisation spatiale de nos territoires sera d’autant plus pertinente qu’elle aura associé à son élaboration l’ensemble des communes à l’échelle intercommunale.

Vous le savez, car cette discussion a eu lieu ici déjà plusieurs fois, je suis convaincue que l’aménagement durable passe par l’élaboration de documents d’urbanisme à l’échelle intercommunale. Je connais, pour les avoir entendues, les réserves qui se sont exprimées sur certaines travées de cet hémicycle et je souhaiterais ici y répondre, en espérant vous convaincre.

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