Le droit souple est un oxymore, dites-vous ; ne serait-ce pas aussi un mot-valise ? C'est en effet d'abord un pis-aller : on n'est d'accord pour rien, mais pour rassurer l'opinion et ne pas insulter l'avenir, on produit un peu de droit souple. C'est ensuite une manière de prévoir l'adaptation du droit à la réalité, par l'utilisation de la jurisprudence. C'est enfin un phénomène profond depuis une trentaine d'années, qui tend à confier la régulation sociale non plus au droit et à la politique, mais au marché et à l'accord entre les parties. L'objectif de Bruxelles est d'installer la concurrence partout ; comme cette dernière est la forme infantile du monopole, il faut produire un nombre effarant de règles. Pas de régulation - horreur ! - mais un code de bonnes manières entre gens bien élevés. Ainsi surgissent des autorités administratives indépendantes - c'est-à-dire sans aucune légitimité démocratique - qui émettent des normes qui s'imposent sans s'imposer... C'est une révolution dans le fonctionnement de nos sociétés. Il n'est pas anodin de donner un fondement au droit souple : c'est valider une évolution au cours de laquelle le politique devient inutile.