Intervention de Cécile Duflot

Réunion du 24 octobre 2013 à 9h30
Accès au logement et urbanisme rénové — Article 8, amendement 569

Cécile Duflot, ministre :

Ou même un mois !

Comme l’a dit M. Mézard, et vous-même également, Monsieur Dallier, si les choses se règlent de gré à gré ou si un plan d’apurement est signé, la GUL, très naturellement, cesse de jouer. La GUL, si je puis dire, vient en « chapeau » de l’ensemble pour résoudre les difficultés qui ne trouvent pas de réponse avec les dispositifs existants. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Par votre amendement n° 569 rectifié, Monsieur Mézard, vous souhaitez supprimer la disposition selon laquelle l’aide versée au titre de la garantie est réduite ou supprimée en cas de déclaration tardive par le bailleur des impayés de loyer. Vous arguez que les choses peuvent être réglées de gré à gré. Je comprends votre logique, mais il vaut bien mieux anticiper : puisque le règlement de gré à gré n’interdit rien, on peut envisager un remboursement de la GUL lorsque le locataire aura repris ses paiements, plutôt que de laisser la situation dériver au risque d’être confronté à un certain nombre de difficultés. On pourrait aussi imaginer que le bailleur soit négligent dans ses déclarations et, dans cette hypothèse, il ne serait pas logique que ce soit la GUL qui pallie ses manquements. Par ailleurs, chacun sait – et, en premier lieu, les élus locaux – qu’il est beaucoup plus facile de gérer des impayés au tout début ; quand la situation s’installe dans la durée, son règlement devient de plus en plus difficile.

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 768 de la commission, qui prévoit que les aides versées au titre de la GUL peuvent donner lieu à une demande de remboursement auprès du locataire en impayé, éventuellement par recours aux instruments de recouvrement du trésor public. Cette mesure est de nature à lever l’inquiétude que peut susciter le possible non-remboursement par le locataire de l’intervention de l’AGUL. Le recouvrement des créances par le trésor public, au titre de son privilège, est la méthode la plus efficace, puisque celui-ci peut intervenir y compris par saisie sur les salaires des personnes concernées. Cette mesure, qui est de nature à sécuriser le dispositif, faisait partie des recommandations importantes du rapport de l’inspection générale des finances.

Monsieur Mézard, votre amendement n° 571 rectifié vise à substituer à la création d’un établissement public une mission de préfiguration. Le risque est que l’on perde du temps, alors que ce temps, un temps politique, est contraint. Je suis entièrement d’accord avec vous quant à la nécessité d’avancer pas à pas et je suis la première à vous dire que les choses ne sont pas complètement bordées, mais je veux essayer de vous convaincre que la méthode que nous avons choisie permet au débat d’avoir lieu de manière totalement transparente au Parlement, sur l’ensemble des questions relatives à ce dispositif. Vous aviez raison, monsieur le rapporteur, de dire qu’il s’agissait essentiellement d’un principe, mais celui-ci est fortifié par une volonté politique, qui, je crois pouvoir le dire, est assez largement partagée. À mesure que les débats avancent, le dispositif gagne en efficacité et en solidité sur le plan opérationnel. Je fais le pari que l’intelligence collective est plus riche que l’imagination d’un seul ou d’une seule.

Dans la mesure, monsieur Mézard, où le Gouvernement a émis un avis favorable sur plusieurs de vos amendements ainsi que sur plusieurs amendements de la commission permettant de fortifier ce dispositif, je souhaiterais que vous retiriez celui-ci. Les choses continueront d’avancer d’ici à la deuxième lecture.

J’émettrai le même avis sur les amendements n° 327 rectifié, 741 rectifié ter et 744 rectifié bis.

Madame Schurch, vous demandez, par l’amendement n° 187, que l’une au moins des deux personnalités qualifiées membres du conseil d’administration de l’AGUL soit un représentant d’une association de consommateurs agréée. C’est une bonne idée et, bien évidemment, nous ne l’excluons pas. Ce serait même assez naturel, puisque les personnalités qualifiées seront choisies à la discrétion du Gouvernement. Cependant, et je parle sous le contrôle de M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, on ne peut pas figer ce principe dans un texte de loi. Les personnalités qualifiées, comme l’indique leur nom, sont choisies pour exercer la mission, très identifiée, confiée au conseil d’administration de l’établissement public ; leur profil sera donc en rapport direct avec cette mission.

En tout état de cause, un comité d’orientation, prévu à l’article 13, appuiera le conseil d’administration et permettra une large représentation de toutes les organisations. En effet, dans un conseil d’administration que l’on souhaite évidemment resserré, il est difficile de choisir dès maintenant la personnalité qualifiée pour y siéger.

Les amendements n° 9 rectifié et 544 rectifié ter m’amènent à vous parler de la contribution des collectivités locales. Celle-ci n’est pas prévue – les choses sont claires –, mais l’exclure en la rendant impossible pourrait freiner certaines interventions.

Chaque année, le montant total du fonds de solidarité pour le logement, ou FSL, s’élève à 135 millions d’euros pour les départements. Le FSL intervient notamment pour pallier des situations d’impayés et remettre à flot certaines familles.

On peut très bien imaginer que des collectivités locales, au premier rang desquelles les départements, souhaitent intervenir à l’intention de publics spécifiques, selon des modalités qu’elles détermineront, dans le cadre de la garantie universelle des loyers. Cette option peut leur être ouverte, sans constituer en aucun cas une obligation. Il serait selon moi préjudiciable de les exclure du dispositif. En effet, intervenir en amont dans le cadre de la GUL peut se révéler moins coûteux que la situation actuelle, dans laquelle les départements interviennent en aval avec la contribution importante que représente le FSL.

C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° 9 rectifié et 544 rectifié ter.

En ce qui concerne l’amendement n° 10 rectifié, monsieur Dallier, l’article offre d’ores et déjà la possibilité d’une recette fiscale. Les dispositions que nous proposons forment ici encore un ensemble très classique dans le cadre de la création d’un établissement public. Nous avons en effet souhaité que cet établissement public soit constitué sur le modèle d’un établissement public classique – je l’ai dit en ce qui concerne le conseil d’administration, et il en est de même en ce qui concerne les recettes.

La détermination de la contribution est à ce jour incomplète. En effet, la détermination des taux, assiette et modalités de recouvrement relève de la loi de finances. En outre, la réflexion du Gouvernement s’oriente désormais vers un financement différent de la GUL, qui n’implique pas forcément la création d’une nouvelle taxe, y compris si celle-ci reposait à égalité sur les propriétaires et les locataires comme le proposent les auteurs de plusieurs amendements. Nous souhaitons progresser dans la détermination du dispositif et des modalités de financement. Cependant, nous ne souhaitons pas décider aujourd’hui d’une contribution qui prendrait la forme d’une taxe à laquelle seraient assujettis propriétaires et locataires.

L’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 10 rectifié est donc défavorable.

L’amendement n° 56 rectifié vise à prévoir les effets de la GUL sur les modalités d’expulsion. Monsieur Dallier, je vous ferai la même réponse qu’à M. Mézard : ces deux sujets sont disjoints. Dès le premier mois d’impayé, le bailleur peut, s’il le souhaite, faire valoir la clause résolutoire du bail qui figure et qui figurera dans le bail type, en entamant une procédure judiciaire.

Il ne faut donc pas penser que la GUL se substituera à toutes les dispositions législatives qui peuvent s’appliquer par ailleurs. L’AGUL interviendra, d’une part, auprès du locataire, afin d’identifier les causes de l’impayé et d’agir si nécessaire et, d’autre part, auprès du propriétaire, pour payer à la place du locataire les impayés de loyer.

Enfin, monsieur Mézard – je l’avais indiqué en rendant mon avis sur un autre amendement –, je suis favorable à votre amendement n° 572 rectifié qui supprime les termes « de toute nature » qui effectivement n’apportent rien au texte.

Sur l’amendement n° 603 rectifié, je vous ai déjà répondu : l’expulsion judiciaire du locataire ne relève pas du champ de la GUL. Le propriétaire conservera tous ses droits et pourra engager une procédure dès le premier mois d’impayé, s’il le souhaite. Notre volonté est de sécuriser le propriétaire en intervenant et en ne le contraignant pas à la procédure judiciaire, s’il comprend la situation de son locataire et souhaite qu’après deux mois d’impayés – dont il aura été indemnisé – un plan d’apurement soit mis en œuvre.

J’espère que mes différentes réponses ont été suffisamment complètes. L’idée est bien de mettre en place un dispositif « chapeau » qui répond à trois questions soulevées depuis des années, mais ne se substitue pas aux procédures judiciaires éventuelles dans le cas des impayés de loyer.

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