Intervention de Mireille Schurch

Réunion du 24 octobre 2013 à 9h30
Accès au logement et urbanisme rénové — Article additionnel après l'article 10 B

Photo de Mireille SchurchMireille Schurch :

Cet amendement tend à interdire toute expulsion locative lorsque le locataire n’est pas en mesure d’accéder à un autre logement par ses propres moyens et n’a pas reçu de proposition de relogement adaptée.

Cette disposition permettrait, d’une part, d’inciter à la recherche de solutions de relogement adaptées lorsqu’un ménage ne peut pas ou ne peut plus faire face au coût de son logement, et, d’autre part, d’éviter la multiplication des expulsions locatives.

Les propriétaires ne seraient pas lésés par la mesure puisque, comme la loi l’indique, le refus de concours de la force publique leur permettrait d’obtenir une indemnisation équivalant au loyer et aux charges du logement. D'ailleurs, madame la ministre, le fonds est particulièrement sous-doté, madame la ministre, et ses crédits ont fondu au fil des années.

Au demeurant, je vous rappelle, mes chers collègues, que les prescriptions internationales en la matière, qu’il s’agisse du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ou encore de la Déclaration universelle des droits de l’homme, directement applicables dans notre droit, ont institué, pour l’État, l’obligation de garantir que personne ne peut être privé de son logement en raison de ressources insuffisantes.

Certains d’entre vous opposent à cette mesure la décision du Conseil constitutionnel de 1998 sur la loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions.

À cet égard, je veux clarifier le débat.

L’inconstitutionnalité d’un tel dispositif n’est pas avérée. En effet, si le Conseil constitutionnel s’est fondé sur le principe de séparation des pouvoirs, selon lequel on ne peut soumettre l’exécution d’une décision de justice à une diligence administrative, je vous rappelle que le droit au logement a également valeur constitutionnelle depuis une décision rendue par les Sages en 1995. Les juges ont donc arbitré entre deux principes de même valeur, en privilégiant l’un par rapport à l’autre.

En outre, la rédaction de notre amendement ne soumet en rien l’exécution d’une décision de justice à une diligence administrative : elle interdit toute décision judiciaire en ce sens.

Enfin, il ne faut pas sous-estimer l’apport de la loi instituant le droit au logement opposable, dite « loi DALO », et le rôle qu’elle a confié à l’État via les préfets.

La question de constitutionnalité se pose donc de manière différente aujourd’hui.

Par ailleurs, la Cour européenne des droits de l’homme a, depuis, sanctionné l’État chypriote pour le non-respect du droit au maintien dans un logement, sur le fondement de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Le contexte juridique est donc très différent, et l’inconstitutionnalité de la mesure que nous présentons n’est pas avérée.

Même si nous reconnaissons que la bataille de fond reste celle de la construction de logements notamment publics et du pouvoir d’achat des ménages, l’adoption de cet amendement serait un grand pas en avant en faveur de la garantie d’un droit au logement.

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