Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 22 janvier 2009 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2009 — État b

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

J’observerai tout d'abord, en ce qui concerne cet article 3, que le montant des ouvertures de crédits opérées est très nettement supérieur à celui qui a été prévu dans le cadre de la loi de finances initiale. Nous sommes en effet en présence de plus de 10, 5 milliards d’euros d’ouvertures de crédits en autorisations d’engagement, alors que nous avions voté une hausse des dépenses de 4 milliards d’euros à peine dans la loi de finances initiale.

Nous sommes donc en droit de nous demander ce qui motive une telle évolution. À vrai dire, tout se passe comme si les ouvertures de crédit réalisées par le présent texte devaient être analysées au regard du passé et des intentions.

Ainsi, l’essentiel des dépenses se trouve concentré sur des mesures de trésorerie destinées à payer la TVA déductible sur les achats pour les entreprises ; d’autres servent à financer les crédits d’impôt recherche que les grandes entreprises peuvent solliciter encore plus aisément qu’auparavant.

Une seconde catégorie de mesures participe de ce que nous appelons la « session de rattrapage ». Par exemple, la loi de programmation militaire 2003-2008 a si bien été exécutée que nous découvrons que 500 millions d’euros de factures dues aux entreprises sous-traitantes du secteur n’ont pas été honorés. Mes chers collègues, je vous renvoie sur cette question à l’intéressant rapport des députés Patricia Adam, Patrick Beaudouin et Yves Fromion intitulé Programmation militaire 2003-2008 : une exécution sous contrainte.

Les économies budgétaires dont vous vous êtes souvent félicités ces derniers temps, notamment lors de l’examen des collectifs de fin d’année, n’étaient finalement, pour une bonne part, que des retards de paiement.

Cela dit, quand notre collègue Serge Dassault, sur cet article 3, nous propose d’accroître de 500 millions d’euros les ouvertures de crédits d’équipement, il nous permet de vérifier ce que nous pressentions : seuls quelques groupes industriels et financiers bien déterminés, vivant grassement de la commande publique, bénéficieront du plan de relance, bien avant les Françaises et les Français eux-mêmes.

Il y a donc une session de rattrapage parce que, dans bien des domaines, la gestion rigoureuse des comptes publics dont vous vous vantiez il y a peu de temps encore ne faisait, chaque année, qu’accroître les retards dans la réponse aux besoins.

Les déficits baissent, mais les logements sociaux ne sortent pas de terre.

Les déficits baissent, mais nos églises et nos cathédrales gothiques, témoignages parmi d’autres de la riche histoire de la France, croulent et perdent leurs pierres et leurs gargouilles !

Les déficits étaient maîtrisés, mais les prisons sont surpeuplées et les suicides y sont en augmentation constante !

Les déficits étaient maîtrisés, mais les services d’urgence de nos hôpitaux sont en crise permanente, coincés entre l’absence de médecins en nombre suffisant et l’intolérable mépris des praticiens du secteur libre, qui refusent la prise en charge de la CMU pour les malades issus des couches les plus modestes de la population.

Les déficits étaient maîtrisés, mais un train sur six, sur la ligne D du RER, accusait en 2008 un retard supérieur à cinq minutes. Et cela n’a rien à voir avec les grèves de cheminots : le matériel est à bout de souffle et les infrastructures obsolètes.

Cette situation rend d'ailleurs presque incongrue l’obstination du Gouvernement à ne pas financer comme il conviendrait le syndicat des transports d’Île-de-France, au motif peut-être que celui-ci est géré par la majorité de gauche du conseil régional.

Mes chers collègues, lisez donc, comme nous l’avons fait, le rapport, et constatez simplement que nous avions raison, il y a peu de temps, de dénoncer, encore et toujours, cette vision malthusienne de la dépense publique qui alimente, entre autres, la logique de la RGPP, la révision générale des politiques publiques.

Une fois déduites, donc, les mesures de trésorerie destinées aux entreprises et les dispositions liées à la reprogrammation de crédits précédemment annulés, que reste-t-il dans ce collectif budgétaire et dans cet article ? Eh bien, peu de chose !

Le chat est maigre, comme le dit l’adage populaire. En tout cas, ces mesures sont bien insuffisantes pour inverser durablement la tendance à l’aggravation de la crise que nous connaissons, et qui se manifestera dans les mois qui viennent. À tel point, mes chers collègues, que nous sommes presque amenés à vous donner rendez-vous dans quelques mois pour un nouveau collectif budgétaire prenant en compte la dégradation imprévisible, mais probablement accentuée, de la situation. Espérez que nous nous trompons, pour une fois !

Voilà ce qu’il convenait de souligner au sujet de cet article 3.

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