Intervention de Anne-Marie Escoffier

Réunion du 29 octobre 2013 à 9h30
Questions orales — Protection juridique des majeurs

Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation :

Monsieur le sénateur, je vous remercie de soulever un véritable problème au regard des tutelles et des curatelles.

Il n’est pas question de remettre en cause le bien-fondé de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, quelles que soient les difficultés que puissent poser la nouvelle date limite du 1er janvier 2014 prévue par le législateur pour le réexamen des mesures de protection ouvertes avant le 1er janvier 2009, sous peine de caducité.

Au regard de l’importance du volume de dossiers à renouveler – au 1er janvier 2009, 629 078 mesures devaient faire l’objet d’une révision dans les 304 tribunaux d’instance et les 4 tribunaux de première instance –, il y avait là un défi de taille pour les juridictions. Au 31 décembre 2012, 29, 1 % de ces mesures restaient encore à renouveler. Ces chiffres montrent la gravité de la situation.

Dès sa prise de fonction, la garde des sceaux, qui m’a par ailleurs priée de bien vouloir excuser son absence ce matin, monsieur Bas, a été sensibilisée à ce problème et aux inquiétudes des juridictions compétentes pour faire face à cette charge, d’autant qu’il s’agit d’une loi d’une portée sociétale essentielle, qui vise à protéger des personnes vulnérables ou substantiellement vulnérables.

L’évolution de la situation a été suivie avec une extrême attention par le ministère de la justice, qui a veillé à apporter des réponses.

Des moyens ont en effet été mis à disposition des services des tutelles pour assurer la résorption du stock : affectation de magistrats et de greffiers placés, d’assistants de justice et de vacataires, décharge des juges d’instance à l’activité du tribunal de grande instance. En s’appuyant sur ces moyens, ces juges ont fourni un effort remarquable, qu’il faut saluer, si bien qu’une nouvelle mesure de report ne paraît plus nécessaire.

Au 30 septembre 2013, 48 875 mesures restaient à renouveler, et non pas 100 000, comme vous l’avez indiqué. Les projections au 31 décembre prochain font apparaître que de 1 % à 2, 7 % des mesures seulement n’auront pas été renouvelées.

La Direction des services judiciaires travaille désormais pour examiner la nature de ces mesures. En effet, il est apparu que les services des tutelles n’étaient pas en situation de procéder à la révision de certaines d’entre elles du fait de l’impossibilité de convoquer les parties, le plus souvent en raison de l’ancienneté de la mesure ou de déménagements successifs. Nous nous heurtons là à des réalités concrètes.

En tout état de cause, le travail accompli par les juges et les fonctionnaires pour permettre le renouvellement de ces mesures mérite encore une fois d’être souligné et salué.

Par ailleurs, les attentes des juges des tutelles et des associations qui ont fait remonter les lacunes ou difficultés d’application de la loi du 5 mars 2007 ont été véritablement entendues.

Dans le cadre de l’avant-projet de loi habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnances en matière de simplification du droit et des procédures, qui doit être présenté prochainement en conseil des ministres, Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, est prête à apporter plusieurs modifications à la loi du 5 mars 2007 pour alléger ou supprimer les contraintes non nécessaires.

Il s’agirait tout d’abord de permettre au juge de prononcer, sous certaines conditions, des mesures initiales pour une durée supérieure à cinq ans. Cette mesure permettra d’alléger la charge de travail des services des tutelles pour les années à venir, mais répondra surtout à une forte demande des familles et associations, qui comprenaient parfois mal la nécessité d’une révision quinquennale lorsque l’état de santé du majeur protégé ou son handicap ne permettait pas d’entrevoir d’évolution.

Il s’agirait ensuite de modifier les modalités d’arrêt du budget et de contrôle des comptes de gestion des mesures de protection.

Le ministère envisage aussi de substituer, dans les circonstances prévues à l’article 426 du code civil, l’avis d’un médecin extérieur à l’établissement d’accueil au certificat médical circonstancié prévu à l’article 431 du code civil.

Enfin, un nouveau dispositif d’habilitation serait prévu au bénéfice de certains membres de la famille d’un majeur protégé permettant, sous certaines conditions, d’éviter le prononcé d’une mesure de protection judiciaire.

L’effort ponctuel et intense qui a été fourni pour aboutir à la révision de la quasi-totalité des mesures – il n’en resterait plus que de 1 % à 2, 3 % à examiner, je le rappelle – ainsi que les réformes de fond qui sont envisagées laissent entrevoir une nette amélioration des conditions de mise en œuvre de cette loi.

Même s’il ne répond pas à toutes vos préoccupations, monsieur le sénateur, ce dispositif comporte de vraies voies d’amélioration, autant pour les personnes qui souffrent que pour leurs accompagnants.

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