Séance en hémicycle du 29 octobre 2013 à 9h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Michel Berson, auteur de la question n° 479, adressée à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Berson

Madame la ministre, le numérique irrigue aujourd’hui l’ensemble de notre économie et de notre société. Il est au cœur du redressement industriel de notre pays.

Comment développer la compétitivité des écosystèmes numériques ? Comment affirmer l’attractivité de la France en matière de recherche et d’innovation ?

Le crédit d’impôt recherche, le CIR, est un dispositif fiscal particulièrement incitatif qui favorise les efforts de recherche des entreprises, notamment des PME, et tout particulièrement des entreprises du secteur numérique.

Or les contrôles fiscaux relatifs au crédit d’impôt recherche sont en sensible augmentation ces deux dernières années, qu’il s’agisse de contrôles a priori, au moment des déclarations, ou a posteriori. Certes, la croissance de ces contrôles est liée au nombre croissant de sociétés déclarant un CIR, lesquelles sont surtout des PME et, de plus en plus, des entreprises de services informatiques et d’édition de logiciels.

Les contrôles débouchent sur des redressements fiscaux croissants dont le montant peut s’élever à 90 % du crédit d’impôt recherche. Les conséquences financières de ces redressements peuvent remettre en cause le modèle économique des entreprises, voire mettre en danger leur existence.

À l’évidence, il y a une spécificité de la recherche et développement dans le secteur du numérique, ce qui devrait conduire à ouvrir le crédit d’impôt recherche à de nouveaux types d’innovation, que ce soit en termes de service, de design ou de marketing. Cela soulève la question de la nécessité de trouver une définition plus pertinente de la recherche et de l’état de l’art. Madame la ministre, il faudrait aussi que votre ministère intervienne beaucoup plus qu’il ne le fait dans la procédure de contrôle du crédit d’impôt recherche.

Dans la grande majorité des cas, c’est en effet l’administration fiscale qui évalue les travaux de recherche des entreprises pour vérifier qu’ils sont bien éligibles au crédit d’impôt recherche. Or cette administration, à l’inverse du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, ne dispose pas de toutes les compétences scientifiques pour juger du respect des critères d’éligibilité au crédit d’impôt recherche.

Je ferai une dernière réflexion relative à la sous-traitance des dépenses de recherche qui sont plafonnées pour pouvoir bénéficier du crédit d’impôt, ce qui entraîne, par conséquent, un plafonnement du CIR lui-même.

La sous-traitance est source de litiges entre l’administration, les entreprises sous-traitantes et les entreprises donneuses d’ordre. Sans remettre en cause l’esprit de la loi, il conviendrait de supprimer les plafonds et de faire de la sous-traitance collaborative le nouveau support du calcul du crédit impôt recherche, avec des taux modulés entre sous-traitants et donneurs d’ordre.

Il est urgent de répondre à un certain nombre de problématiques qui se posent aujourd’hui dans le mécanisme du crédit d’impôt recherche. Il est bien évident que le crédit d’impôt recherche, qui fait couler beaucoup d’encre, ne doit pas être remis en question.

Cependant, au regard de l’évolution de notre société et de notre économie, il convient d’adapter le crédit d’impôt recherche sur un certain nombre de points, qui ne remettent nullement en cause ses fondements. Le Président de la République a pris en effet l’engagement de sanctuariser le crédit d’impôt recherche parce qu’il contribue efficacement à soutenir la compétitivité et la croissance de notre économie.

Madame la ministre, pourriez-vous préciser quelles mesures le Gouvernement envisage de mettre en œuvre pour fluidifier les relations entre les entreprises et l’administration et pour clarifier la situation du crédit d’impôt recherche, notamment dans l’industrie numérique, qui est l’un des secteurs aujourd’hui les plus actifs en termes d’innovation et de création d’emplois ?

Debut de section - Permalien
Geneviève Fioraso, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Monsieur le sénateur, vous attirez mon attention sur les redressements au titre du crédit d’impôt recherche que connaissent, à la suite de contrôles a posteriori ou a priori – au moment de l’établissement de leur demande –, les entreprises de services informatiques et d’édition de logiciels.

Vous mentionnez aussi les difficultés rencontrées par l’administration fiscale pour qualifier les activités de ces entreprises en matière d’assiette à prendre en compte pour la recherche et développement éligible au titre du CIR. Comme vous, j’ai été interpellée à ce sujet par les sociétés elles-mêmes, en particulier les PMI, les PME, les start-up et les entreprises de taille intermédiaire, ou ETI, et par le président de Syntec numérique. En effet, la pérennité de certaines entreprises peut être compromise par ces redressements.

Je voudrais d’abord rappeler que, en février 2012, une instruction fiscale établie en étroite collaboration avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche a précisé la définition des opérations de recherche et développement pouvant bénéficier du crédit d’impôt recherche. Cette instruction donne des exemples pour cinq secteurs d’activités, dont celui des technologies de l’information et de la communication. Vous l’avez dit, monsieur le sénateur, les entreprises du numérique représentent une proportion importante des entreprises bénéficiaires du crédit d’impôt recherche : il est donc essentiel que ce dispositif soit adapté à leurs enjeux et qu’il soit parfaitement lisible.

Néanmoins, le secteur du numérique est, vous le savez, en évolution technologique rapide, ce qui nécessite un travail permanent de clarification des éléments à prendre en compte au titre de la recherche et développement. J’ai donc relancé un groupe de travail en mai dernier avec les principaux représentants des entreprises de ce secteur et les administrations compétentes. Y participent notamment la direction du contrôle fiscal et la direction générale de la recherche et de l’innovation de mon ministère, laquelle – je vous rassure ! – est présente à toutes les étapes.

Le travail réalisé a permis de constater que les définitions utilisées pour les dépenses de recherche et développement, telles que présentées par les experts scientifiques de mon ministère et ceux des organismes de recherche auxquels nous faisons appel au cas par cas, faisaient l’objet d’un accord général. Ce qui pose problème, en réalité, c’est la lisibilité des procédures de contrôle.

Pour clarifier ces procédures, une annexe sectorielle au bulletin officiel des finances publiques, le BOFIP, est en cours de rédaction par la direction de la législation fiscale, à la suite des travaux du groupe de travail. Elle apportera aux entreprises la clarification nécessaire du périmètre éligible pour limiter autant que possible les différends qui pourraient surgir au moment des contrôles, notamment dans certains secteurs comme celui de la veille technologique, ou dans la définition des développements spécifiques par rapport aux standards et à l’état de l’art, c'est-à-dire au regard de l’état des connaissances au niveau mondial, à la réalité des logiciels. Cette annexe, qui sera opposable à l’ensemble de l’administration fiscale, devrait être finalisée au début de 2014.

Quant à la question de la sous-traitance, elle relève de Bercy. J’ai eu l’occasion, avec d’autres ministres, d’attirer l’attention des services et des ministres concernés. Une réflexion est en cours à ce sujet. Vous l’avez dit, et je ne peux qu’adhérer à votre propos, les rapports entre donneurs d’ordre et sous-traitants sont un véritable sujet.

Je rappelle par ailleurs que le Gouvernement est attaché à améliorer globalement le crédit d’impôt recherche, tout en assurant sa stabilité et sa constance. Les ajustements prévus dans le projet de loi de finances pour 2014 simplifieront l’application du crédit d’impôt recherche pour l’ensemble des entreprises du numérique. Une entreprise qui subit des restrictions globales de personnels en raison de difficultés économiques mais qui maintient ses effectifs de recherche et développement ne sera plus pénalisée concernant le doublement du crédit d’impôt recherche pour l’embauche de jeunes chercheurs, en particulier de jeunes doctorants. Je sais, monsieur le sénateur, que cette question vous tient à cœur.

Le crédit d’impôt recherche est maintenu, ce qui est important dans la période actuelle, et il est constamment révisé, notamment pour les secteurs les plus évolutifs comme celui du numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Berson

Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions. Elles confirment que le Gouvernement reste attaché, comme les entreprises, au crédit d’impôt recherche, lequel doit être adapté en fonction de l’évolution de notre économie.

J’aimerais revenir sur un point qui me paraît aujourd’hui crucial. Le nombre d’entreprises bénéficiaires du crédit d’impôt recherche a été multiplié par deux au cours des cinq dernières années. Aujourd'hui, 20 000 déclarants et 15 000 entreprises bénéficient du crédit d’impôt recherche.

Si cette croissance est très importante et extrêmement positive, le nombre d’experts du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche chargés, conjointement avec l’administration fiscale, du contrôle de ce dispositif n’a quant à lui pas augmenté. Cela pose un véritable problème d’ordre budgétaire : il faut davantage de crédits pour recruter davantage d’experts.

Il s’agit d’une voie de progrès essentiel, je dirais même prioritaire, pour que ces contrôles se passent dans de meilleures conditions et que les entreprises puissent in fine bénéficier du crédit d'impôt recherche auquel elles ont droit et qui leur permette véritablement de financer leurs projets.

Ma seconde remarque concerne le débat contradictoire.

À ma connaissance, aucun décret ne définit, pour l’heure, ce qu’est le débat contradictoire dans les entreprises bénéficiaires du crédit d'impôt recherche. Si le principe du débat contradictoire existe dans notre droit public, il n’est pas véritablement codifié. Je souhaite qu’il puisse l’être de façon précise, de manière à rendre le débat plus serein et, in fine, plus positif pour les entreprises, notamment pour les sous-traitants et les donneurs d’ordre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 361, adressée à M. le ministre des outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Monsieur le ministre, le logement social en Guyane connaît une crise d’une gravité et d’une acuité particulières.

D’après les derniers chiffres, les demandes de logement non satisfaites s’élèvent à 13 000, auxquelles il convient d’ajouter environ 11 000 habitations insalubres, dans lesquelles vivent près de 35 000 personnes.

Ces chiffres sont à rapporter à ceux de la population, estimée à 220 000 habitants. Autrement dit, un quart de la population souffre du mal-logement !

Cette situation s’explique par le dynamisme de la demande, lié à une forte croissance de la population, laquelle est cinq fois plus élevée qu’en métropole, et la plus forte des outre-mer. Elle est également due à une très forte proportion de ménages à faibles ressources et au pourcentage de la population éligible au logement social, qui s’établit à 80 %.

La construction de 3 600 logements par an serait nécessaire pour faire face à cette croissance de la demande.

Or, l’offre ne suit pas. Une progression des constructions avait été enregistrée en 2011, à la suite de la réorientation de la défiscalisation vers le logement social. Mais cet élan – ou cet allant – est vite retombé en raison, d’une part, des difficultés rencontrées par les opérateurs de logements sociaux pour percevoir les versements de la ligne budgétaire unique, la LBU, et, d’autre part, des délais anormaux de traitement des dossiers de défiscalisation par Bercy. Ainsi, au 30 septembre 2013, 38 millions d’euros seraient dus aux sociétés d’économie mixte de Guyane.

Même si la direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement de Guyane a pu récupérer 8 millions d’euros de crédits de paiement, les besoins pour honorer les demandes des opérateurs restent estimés à 45 millions d’euros à la fin de l’année 2013, pour une dotation initiale de 20 millions d’euros.

L’Association régionale des maîtres d’ouvrage sociaux en Guyane, l’ARMOS Guyane, avait très rapidement tenu à informer du niveau des besoins, lesquels s’élevaient à 68 millions d’euros.

Outre les risques sur l’appareil de production et sur l’emploi, c’est toute la dynamique de rattrapage et de construction de logements sociaux qui est atteinte. Les chantiers sont quasiment gelés et les constructions risquent de tomber à 500 ou 600 logements par an, loin de l’objectif, fixé à 3 000 logements par an.

Si l’on ajoute à cela l’arrêt de la production de logements sociaux en accession, les logements évolutifs sociaux, ou LES – c’est une autre singularité de la Guyane –, les conditions semblent réunies pour une explosion sociale dans ce domaine.

Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous faire connaître le montant des crédits de paiement que vous comptez allouer à la Guyane au titre de la LBU et, en cas d’insuffisance, les moyens que vous envisagez de consacrer à l’apurement de cette dette, qui met en défaut de paiement les opérateurs de logements sociaux et, au-delà, met en péril toute la chaire du BTP ?

Un dispositif comparable à celui qui a été mis en place pour la Semsamar, c'est-à-dire un abondement des crédits de paiement, doit être envisagé en 2014 pour les bailleurs et opérateurs de Guyane.

De même, monsieur le ministre, pouvons-nous avoir la certitude que la Guyane sera correctement dotée en autorisations de programme et en crédits de paiement pour l’exercice 2014, eu égard à sa situation de crise ?

Debut de section - Permalien
Victorin Lurel, ministre des outre-mer

Monsieur le sénateur, vous soulevez là une difficulté majeure et récurrente.

La politique en faveur du logement social et de la lutte contre l’habitat insalubre est une priorité du Gouvernement, plus particulièrement de mon ministère.

Dans le contexte budgétaire que vous connaissez, les crédits de la ligne budgétaire unique ont été portés à 244 millions d’euros, soit une augmentation de 18 % par rapport à l’année dernière et de 25 % par rapport à 2011.

La situation du logement en Guyane ne m’a pas échappé.

Dès mon entrée en fonctions, j’ai souhaité, en dépit des contraintes de gestion, renforcer la dotation dont bénéficie ce territoire au titre de la LBU : alors que cette dernière était de 16 millions d’euros en crédits de paiement, je l’ai portée à 20 millions d’euros. En complément, le préfet a redéployé près de 6 millions d’euros vers la LBU, depuis d’autres lignes moins tendues. Au total, en 2012, mon ministère a fait passer la dotation initiale de 16, 5 à 26 millions d’euros, soit une augmentation de près de 60 %.

Nous savions que de telles tensions se reproduiraient en 2013, pour une raison simple : l’accélération des constructions de logements sociaux, permise par le couple LBU-défiscalisation.

Pour y faire face, j’ai d’emblée décidé de porter la dotation initiale pour 2013 à 20 millions d’euros, soit 4 millions d’euros de plus que l’année précédente. Cela n’a pas suffi. Aussi, j’ai autorisé un abondement de 3 millions d’euros supplémentaires en juillet dernier. Les 25 septembre et 11 octobre derniers, devant des tensions persistantes sur les moyens de paiement – vous les avez évoquées –, j’ai demandé un nouvel abondement de 5, 2 millions d’euros.

Vous voyez donc que nous sommes tout sauf inactifs devant cette réalité. En 2013, la dotation initiale est ainsi passée de 20 à 28 millions d’euros.

Au reste, pour le cas où cet effort ne suffirait pas à résoudre tous les paiements en attente, j’ai engagé des discussions avec le ministre chargé du budget pour majorer les crédits disponibles dans le cadre de la fin de gestion. J’espère que les sommes gelées pourront être débloquées très prochainement.

Je ne souhaite pas que ce phénomène se reproduise perpétuellement. Aussi, monsieur le sénateur, pour répondre précisément à votre question concernant les dotations dont bénéficiera la Guyane, au titre de la LBU, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, je vous indique qu’elles seront de 31, 7 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 32 millions d’euros en crédits de paiement, contre 16 millions d’euros en 2012.

Par ailleurs, j’ai déjà annoncé que, compte tenu du dynamisme démographique du département et conformément au mandat que m’a confié le Premier ministre, 100 000 logements seront construits sur les dix prochaines années, à raison de 10 000 logements par an, contre environ 7 400 ou 7 500 aujourd'hui. Tout le problème sera de trouver les moyens pour financer ces nouvelles constructions.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

J’ai bien entendu l’engagement du Gouvernement en faveur du logement social et je sais qu’il s’agit là de l’une des priorités de sa politique en direction des outre-mer.

Je me permets toutefois d’insister, compte tenu de la gravité sans précédent de la situation en Guyane, dans un contexte très sensible.

Ce que je demande, ce n’est pas un doublement de la dotation au titre de la LBU pour le début de l’année 2014 ; c’est un doublement des crédits de paiement nécessaires à apurer la dette et à poursuivre l’effort annuel, afin d’éviter un effet « boule de neige », qui verrait les crédits de paiement pour 2014 rembourser une partie des dettes de 2013, et ainsi de suite. Sur ce sujet, j’ai bien entendu votre réponse, et je pense donc que votre engagement va se traduire concrètement.

S’agissant du guichet unique, sujet sur lequel nous nous sommes rencontrés à plusieurs reprises, je me permets d’insister sur la nécessité d’en installer un en Guyane car, je le rappelle, c’est le seul département d’outre-mer qui n’en dispose pas actuellement.

Or, les besoins en matière d’accession très sociale sont importants : ils s’élèvent à près de 700 logements évolutifs sociaux par an. Pour pouvoir y répondre, la présence, sur place, d’une interface sociale et financière, dans le cadre du montage des dossiers de logements évolutifs sociaux, est essentielle.

Aussi, je réitère ma demande de réouverture du dossier du fonds de garantie habitat Guyane, en espérant qu’il ne s’agira pas d’un vœu pieux.

Sur tous ces points, je compte sur vous, monsieur le ministre ! Vous savez que vous avez toute ma confiance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, auteur de la question n° 523, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Monsieur le ministre, j’ai souhaité attirer l'attention de M. le ministre de la défense sur la différence de traitement existant entre les engagés volontaires ayant servi lors des guerres mondiales, des guerres d'Indochine, de Corée et d'Afrique du Nord, et ceux qui servent actuellement dans nos armées.

Depuis la suspension de la conscription, en octobre 1997, seuls des volontaires servent dans nos armées. Une partie de ceux-ci sont des contractuels qui, venant de la société civile, signent un contrat à durée déterminée pour une armée ou une formation rattachée.

Aux termes de ce « contrat d'engagé », ils peuvent être désignés pour servir sur tout territoire où des troupes françaises sont stationnées ou seraient envoyées. Ils n'en demeurent pas moins des volontaires.

Si, pendant ce contrat initial, après avoir servi en unité combattante, ils obtiennent la médaille commémorative avec agrafe ou la médaille d'outre-mer avec agrafe et la carte du combattant, ils remplissent alors toutes les conditions cumulatives pour pouvoir prétendre à la croix du combattant volontaire créée par la loi du 4 juillet 1935 et attribuée, depuis, à toutes les générations du feu.

Cette décoration symbolique, sans aucun coût pour l'État, récompense l'acte de volontariat initial de ces engagés volontaires, qui ont accepté de leur plein gré de mettre leur intégrité physique et éventuellement leur vie au service de la Nation.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, si, au nom de l'équité et de la reconnaissance que méritent ces volontaires, le Gouvernement envisage d'attribuer la croix du combattant volontaire avec agrafe « missions extérieures » aux engagés volontaires venant directement de la société civile et remplissant les conditions habituelles.

Debut de section - Permalien
Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants

Madame la sénatrice, alors que nous sommes engagés dans un cycle mémoriel, permettez-moi de rappeler que la croix du combattant volontaire a été créée lors du premier conflit mondial pour récompenser les combattants volontaires ayant servi au front dans une unité combattante, alors qu’ils n’étaient astreints à aucune obligation de service, en raison de leur âge.

Le droit à cette décoration a été étendu par la suite, avec la création des barrettes spécifiques à la guerre 1939-1945 et aux conflits d’Indochine, de Corée et d’Afrique du Nord.

Quatre conditions cumulatives sont aujourd'hui exigées pour son attribution : avoir souscrit un engagement sans l’astreinte à une obligation de service, avoir été affecté en unité combattante et être titulaire, à la fois, de la carte du combattant et de la médaille commémorative afférente au conflit donné.

Les conditions d’obtention de cette distinction ont, par ailleurs, été étendues par deux fois au cours des dernières années.

En effet, le décret du 9 mai 2007 en a ouvert le bénéfice aux appelés qui se sont portés volontaires pour participer à une ou plusieurs opérations extérieures répertoriées dans l’arrêté du 12 janvier 1994 modifié fixant la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant. Cette extension a été réalisée pour reconnaître le volontariat caractérisé des appelés de ce que l’on appelle la « quatrième génération du feu ».

De même, le décret du 22 décembre 2011 a étendu aux réservistes opérationnels, dans les mêmes conditions que pour les appelés, le bénéfice de la croix du combattant volontaire avec barrette « missions extérieures ».

Toutefois, madame la sénatrice, il en va différemment des engagés volontaires, qui sont des contractuels de l’armée de terre, de la marine nationale et de l’armée de l’air et dont le statut est tout autre. En effet, conformément à l’article L.4132-6 du code de la défense, ces derniers signent un contrat au titre d’une formation, pour servir en tout temps, en tout lieu et en toutes circonstances. Ils ne peuvent donc se prévaloir d’un volontariat pour participer à une opération dans le cadre d’une mission extérieure, car il s’agit pour eux d’accomplir leur devoir, en vertu et dans le respect de leur contrat.

Leur situation n’est d’ailleurs pas différente de celle des autres militaires recrutés selon d’autres modalités. En effet, les uns comme les autres ont exprimé, à un moment ou à un autre, leur souhait d’être volontaires pour le métier des armes, que cela soit en étant candidat à un concours d’accès à l’une des grandes écoles de formation militaire ou en postulant pour un recrutement par contrat.

En revanche, leur situation n’est en rien comparable avec les situations ouvrant aujourd’hui droit à cette décoration.

Dans ce contexte, madame la sénatrice, l’extension du droit à la CCV avec barrette « missions extérieures » au profit des militaires contractuels aurait pour effet d’introduire une rupture de l’égalité de traitement entre les différentes générations d’anciens combattants.

Toutefois, il convient de souligner – cette hypothèse est en effet possible – que les intéressés sont éligibles à toutes les distinctions et récompenses auxquelles peuvent prétendre les militaires de carrière, sous réserve bien sûr de réunir les conditions d’attribution requises.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Votre définition du volontariat, ce matin, est un peu particulière, monsieur le ministre. Les militaires apprécieront ou non votre réponse.

Nous reviendrons certainement à la charge sur ce point, car il s’agit d’une question récurrente et importante qui fait l’objet, ce matin, d’un mauvais traitement. Je le regrette.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. René-Paul Savary, auteur de la question n° 560, adressée à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le ministre, permettez-moi d’attirer votre attention sur l’allocation de retour à l’emploi, l’ARE, plus particulièrement dans l’hypothèse où la personne concernée travaille et perçoit donc des revenus tirés d’une activité réduite.

Je prendrai un cas particulier qui, en fait, devient une généralité pour bon nombre de nos concitoyens.

Une Marnaise était en contrat unique d’insertion, à vingt heures par semaine, depuis septembre 2012.

De septembre à novembre 2012, travaillant vingt heures par semaine sans heure complémentaire, cet agent a perçu 669 euros nets de son employeur, le CCAS, et 180 euros au titre de l’allocation de retour à l’emploi, versés par Pôle Emploi, soit un montant total de 849 euros nets.

Au cours du mois de décembre 2012, cet agent a effectué douze heures complémentaires : elle a alors touché 763 euros nets du CCAS, et aucune allocation de Pôle Emploi, du fait des douze heures complémentaires. Par conséquent, cette employée, en travaillant plus, a été moins rémunérée !

Je sais ce que vous allez me répondre, monsieur le ministre : en principe, l’exercice d’une activité professionnelle exclut tout droit à une quelconque indemnisation au titre de l’assurance chômage !

Toutefois, un dispositif de cumul de l’allocation d’assurance chômage avec le revenu d’une activité professionnelle, salariée ou non, visant à inciter à la reprise d’emploi a été mis en place par les partenaires sociaux gestionnaires du régime d’assurance chômage, et ce sous le précédent quinquennat : voyez les articles 28 à 32 du règlement général annexé à la convention du 6 mai 2011, relative à l’indemnisation du chômage.

Ainsi, un salarié bénéficiaire de l’aide au retour à l’emploi, qui exerce une activité occasionnelle ou réduite, reprise ou conservée, peut bénéficier, parallèlement à son salaire, d’un maintien partiel ou total de cette allocation.

Bien entendu, le salarié ne doit pas travailler plus de cent dix heures par mois... Surtout pas plus ! Et les revenus que lui procure son activité réduite ne doivent pas excéder 70 % de son salaire brut mensuel... Surtout pas plus également !

Pour en revenir à notre citoyenne marnaise en contrat unique d’insertion, le seuil de cent dix heures n’a pas été dépassé, mais le revenu que lui a procuré son activité réduite a excédé le seuil de rémunération déterminé ! C’est donc en travaillant plus qu’elle a gagné moins !

Monsieur le ministre, pouvez-vous m’expliquer ce que vous comptez faire pour éviter ce genre de situation, qui, loin d’être unique, est plus répandue qu’on ne le croit, et qui se révèle être un frein à l’emploi plutôt qu’une incitation ?

Debut de section - Permalien
Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants

Monsieur le sénateur, j’espère que mon propos apportera quelques compléments aux réponses que vous avez déjà à l’esprit.

La réglementation actuelle de l’assurance chômage permet le cumul partiel d’une rémunération et de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, de façon à ne pas décourager les allocataires de reprendre un emploi.

Ce dispositif dit « d’activité réduite » autorise ce cumul dès lors que cette activité ne dépasse pas cent dix heures par mois – vous venez de le dire – et ne procure pas plus de 70 % des revenus antérieurs. En outre, la durée de ce cumul est limitée à quinze mois.

Ces plafonds peuvent parfois induire des effets de seuil qui interrogent.

Pour autant, la définition de la réglementation d’assurance chômage relève de l’entière responsabilité des partenaires sociaux, gestionnaires du régime, et la renégociation de la convention Unédic débutera dans les prochaines semaines.

Lors de la négociation de 2011, les signataires s’étaient entendus pour approfondir, au travers d’un groupe de travail, certains enjeux, au titre desquels figurait l’activité réduite. Aussi, il y a peu de doute que la réforme du dispositif sera l’un des points de la future convention afin d’en améliorer la lisibilité et de renforcer son caractère incitatif au retour à l’emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je vous remercie, monsieur le ministre des anciens combattants. Cette question ne relève pas de votre spécialité, mais je vois que vous avez travaillé le sujet, ce dont je vous remercie.

Effectivement, c’est l’effet de seuil qui est particulièrement pénalisant à chaque fois. Il serait donc intéressant que cette question soit étudiée au niveau gouvernemental et que des propositions puissent être faites aux partenaires sociaux. En effet, cet exemple montre bien que l’on pénalise véritablement ceux qui sont déterminés à s’engager davantage dans l’emploi.

Il nous appartient donc, à notre niveau, de prendre les mesures permettant à nos concitoyens de comprendre les lois et les mesures qui leur sont proposées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 557, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Monsieur le ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur l’état très préoccupant du service public d’éducation en Seine-et-Marne.

Depuis plus de dix ans, ce département est en constante évolution démographique, ce qui nécessite la création régulière de postes d’enseignant pour accompagner ce mouvement.

Tous les ans, à une exception près, le nombre d’élèves scolarisés à la rentrée est supérieur aux prévisions et le nombre de postes créés inférieur aux besoins. En ce qui concerne la seule école primaire, sur dix ans, le retard accumulé en nombre de postes d’enseignant par rapport à l’évolution démographique s’établit à 366 postes. Cet état de fait a imposé pendant plusieurs années aux inspecteurs d’académie puis aux directeurs académiques des services de l’éducation nationale successifs de procéder à ce que l’on pourrait appeler de la « cavalerie », en créant des postes non budgétés et générant un déséquilibre entre nombre de postes et nombre d’enseignants.

Cette année, les effectifs d’élèves ont encore augmenté : 270 731 élèves ont fait leur rentrée en Seine-et-Marne, soit 1 668 de plus que l’an dernier.

Malgré la dotation de 135 professeurs supplémentaires pour le secteur primaire et 65 pour les collèges, et bien que cela constitue une rupture positive avec les années précédentes, le retard cumulé est très loin d’être résorbé, la surcharge des classes restant réelle dans le département. De plus, les 134 postes du réseau d’aide spécialisée aux élèves en difficulté, ou RASED, dispositif supprimé depuis 2009, font toujours cruellement défaut et, faute de remplaçants en nombre suffisant, la formation continue des enseignants ne sera toujours pas assurée dans le département pour cette année.

La Seine-et-Marne compte encore aujourd’hui plus de 60 % de territoires ruraux. La taille des écoles de ces secteurs et la taille du secteur concerné en font des consommateurs de postes, tant pour les classes par effets de seuils que pour les postes « hors la classe » du fait des temps de trajets. Au niveau des dotations, le ministère de l’éducation nationale considère le département de Seine-et-Marne comme urbain à 99, 4 %, du fait de son appartenance à la région d’Île-de-France. Il semble indispensable de revoir ce mode de calcul pour permettre à ce département de bénéficier de moyens d’enseignement à la hauteur des besoins lors des prochaines décisions budgétaires.

Dans ce contexte, je souhaiterais connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour que la Seine-et-Marne soit enfin dotée de moyens qui tiennent compte de la spécificité de sa situation et que les réponses qualitatives et quantitatives nécessaires soient enfin mises en œuvre pour que les jeunes Seine-et-Marnais bénéficient des moyens indispensables à la réussite de leur parcours scolaire, moyens qui leur font durablement défaut.

Debut de section - Permalien
Kader Arif, ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants

Monsieur le sénateur Billout, refonder l’école, c’est rétablir l’égalité des chances qui est au cœur du pacte républicain, pacte qui, au travers de mon histoire personnelle, m’est cher. En ce sens, la lutte contre la difficulté scolaire a été définie comme une priorité.

C’est pourquoi le Président de la République s’est engagé à refonder notre système scolaire et à recréer en cinq ans 60 000 postes d’enseignants et de personnels éducatifs, médico-sociaux, administratifs et techniques qui sont indispensables à la bonne marche d’un établissement scolaire.

Les postes nouveaux sont répartis dans les académies par les rectorats, dans le souci de l’intérêt général, selon une méthode transparente et juste reposant sur des critères objectifs.

Dans ce cadre, vous évoquez, monsieur le sénateur, la prise en charge de la difficulté scolaire, et plus particulièrement le travail remarquable des enseignants spécialisés des RASED.

Dès l’année 2012, une partie des moyens supplémentaires accordés en urgence pour la rentrée – c’est-à-dire 97 postes sur les 1 000 créés – est venue renforcer la place des RASED dans les écoles qui en avaient le plus besoin. Mais nous savons que cet effort n’a pas été suffisant pour remédier à toutes les situations difficiles.

C’est pourquoi, grâce à la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, nous avons décidé – cela apparaît dans le rapport annexé – d’ouvrir 7 000 nouveaux postes dans les secteurs les plus fragiles, de favoriser l’évolution des pratiques pédagogiques, notamment via le dispositif « plus de maîtres que de classes », de renforcer l’encadrement, d’accompagner les organisations pédagogiques innovantes et de renforcer l’action des RASED et celle des autres dispositifs de remédiation scolaire au service d’une amélioration significative des résultats scolaires.

À ce titre, la scolarisation des enfants de moins de trois ans doit être privilégiée dans les secteurs de l’éducation prioritaire, dans les secteurs ruraux et ceux de l’outre-mer sur la base d’un partenariat impliquant parents, enseignants, services académiques et collectivités territoriales. C’est un enjeu essentiel, vous le savez, de la lutte contre l’échec scolaire.

Enfin, concernant la situation de l’académie de Créteil et plus particulièrement des RASED en Seine-et-Marne, je souhaite, monsieur le sénateur, vous apporter les informations suivantes.

Pour votre académie, après 120 suppressions de poste dans le premier degré à la rentrée de l’année 2011-2012 et 179 à la rentrée de l’année 2012-2013, 405 postes supplémentaires ont été créés à la rentrée scolaire de l’année 2013-2014 dont 135 pour le département de Seine-et-Marne. Parmi ces créations, 11 sont dévolues au dispositif « plus de maîtres que de classes ».

Aujourd’hui, dans votre département, plus une seule école n’affiche le chiffre symbolique de 30 élèves en moyenne par classe.

Vous le voyez à travers ces chiffres, l’effort en la matière est considérable et à la hauteur, me semble-t-il, de vos légitimes attentes. Mais au-delà de cette création nécessaire de postes, il nous faut également nous interroger sur la fonction même des RASED.

Aussi, nous avons mis en place un groupe de travail copiloté par la direction générale de l’enseignement scolaire et l’inspection générale de l’éducation nationale. Celui-ci a réalisé un état des lieux et proposé les évolutions nécessaires dans le fonctionnement des RASED pour leur redonner toute leur place dans le système éducatif. Cette réflexion essentielle se poursuit maintenant dans le cadre du dialogue social avec les organisations représentatives des personnels.

Monsieur le sénateur, la politique du Gouvernement est de donner à la communauté éducative les justes moyens dont elle a besoin pour rétablir la promesse du pacte républicain que j’évoquais en introduction : l’égalité des chances pour tous les élèves. La lutte contre la difficulté scolaire est une ardente obligation pour l’avenir de notre pays. Ce contrat, nous le devons à nos enfants et à leur famille, mais aussi à notre société.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Billout

Monsieur le ministre, je suis bien conscient des efforts menés actuellement par le Gouvernement pour revenir à l’équilibre qui prévalait avant la suppression de 80 000 postes par le gouvernement précédent.

Cela étant, si la Seine-et-Marne a les mêmes difficultés que les autres départements de la France métropolitaine, elle a également une spécificité : une évolution démographique qui grève particulièrement la situation.

Par conséquent, la réponse que vous m’avez faite ne me rassure pas totalement : je ne suis en effet pas certain que le ministère de l’éducation nationale ait parfaitement intégré cette situation.

Ainsi, sur les 135 postes accordés à ce département à la rentrée, seulement 2 l’ont été en faveur de la scolarisation des enfants de deux ans. C’est extrêmement insuffisant. De même, seulement six postes ont été dédiés à l'expérimentation pédagogique « plus de maîtres que de classes ».

On voit bien que, aujourd'hui, tout est absorbé pour essayer de combler un retard qui existe depuis dix ans. Je suis persuadé que, sans un véritable plan de rattrapage pour ce département – comme cela a notamment été le cas voilà quelques années pour la Seine-Saint-Denis, dans l'académie de Créteil –, on ne pourra pas garantir aux jeunes Seine-et-Marnais la même égalité des chances que partout ailleurs, ce qui est un vrai problème.

D'après moi, il faut au moins maintenir au cours des trois prochaines années – on ne peut pas tout régler sur un seul exercice budgétaire – l'effort consenti cette année. Il conviendrait même, pour l'enseignement primaire, de porter l'effort à 150 créations de poste annuelles pour les trois prochaines années. À défaut, la Seine-et-Marne produira toujours les mêmes inégalités scolaires et sera toujours en retard par rapport à la moyenne nationale, quant à la réussite des élèves.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Christian Bourquin, auteur de la question n° 539, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bourquin

Madame la ministre, ma question s'adresse au ministre de la ruralité et, s'il était ici, je lui dirais la même chose que ce que je vais vous dire.

Le ministre de l’agriculture s'apprête à porter un sale coup à la ruralité dans les Pyrénées-Orientales, au sud du sud de la France. Ce sale coup, c'est de supprimer l'INAO – l’Institut national de l’origine et de la qualité – de Perpignan ! Le supprimer, c'est enlever des aides à tout ce monde de la production de qualité, du label, dans les secteurs de l'élevage, des fruits et légumes, de la viticulture…

Pourtant, grâce à l'INAO, le département des Pyrénées-Orientales est le premier département bio de France. Grâce à l'INAO, le département des Pyrénées-Orientales est l'un des départements qui contribuent le plus à la progression des exportations dans le secteur de de l'agroalimentaire… C'est ça, le sale coup qui est porté !

Supprimer six emplois à Perpignan, c'est en supprimer six cents à Paris : c'est le même impact ! Manifestement, monsieur le ministre de la ruralité, vous êtes embourbé dans un chemin où toute votre technocratie vous a conduit… Je vous propose d'en sortir, mais pas avec les arguments qui sont aujourd'hui les vôtres.

Me dire que c'est le conseil d'administration de l'INAO qui a décidé cette suppression, alors que c'est vous, le ministre de la ruralité, qui maîtrisez ce conseil à 75 %, et que l’État verse à cet institut plus de 16 millions d'euros par an !

Dans la vie, il faut savoir ce que l’on veut ; et il faut savoir si l’on veut une agriculture qui aille de l’avant : là est la question. Moi, en tout cas, je suis du côté des gueux, du côté des paysans, du côté de ceux qui font avancer l'économie de l'agriculture !

J'ai entendu dimanche dernier M. le ministre de l’agriculture dire sur les chaînes de télévision : « Moi, j’avance des propositions et, quand elles ne sont pas comprises par le peuple, je les retire ».

Eh bien, ma question est toute simple : monsieur le ministre, vous avez avancé sur un terrain miné, dans une direction opposée à celle du développement économique. Je vous propose de renoncer à ce projet et de ne pas toucher à ces six emplois de l’INAO qui font le développement de cette ruralité, dans le sud du sud de la France ; et ce n’est pas parce qu'il est éloigné de Paris qu'on doit l'oublier !

Debut de section - Permalien
Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie

Monsieur le sénateur, vous avez souhaité interroger M. le ministre de l’agriculture. Il est, hélas ! retenu à une réunion à Matignon sur l’écotaxe, organisée à la suite de la mobilisation qui a eu lieu en Bretagne à ce sujet. C'est pourquoi l'on m'a demandé de vous répondre pour lui.

L’INAO a effectivement engagé un schéma de modernisation. Ce schéma est souhaité par la profession, approuvé par le conseil permanent de l’Institut et mis en œuvre par son directeur.

La réduction du nombre de sites de vingt-cinq à dix-huit, telle qu’elle est envisagée, traduit le choix d’un maillage du territoire national qui reste dense mais se compose de sites dont les effectifs sont adaptés aux missions d’aujourd’hui, à savoir les nouvelles compétences de l’INAO en matière d’agriculture biologique et de labels de qualité.

Si, historiquement, la présence physique au plus près des exploitations agricoles impliquées dans une agriculture sous signe de qualité était nécessaire, I’INAO a décidé, au regard du succès de cette politique et du bon développement des productions de qualité, de diversifier les compétences des agents et d’optimiser le fonctionnement de sites parmi les plus importants en taille.

À la suite de nombreux échanges avec les représentants des salariés et avec les élus sur le terrain, Stéphane Le Foll a souligné trois éléments qui lui semblent essentiels et sur lesquels il a de nouveau insisté auprès du directeur, dans une lettre qu’il lui a envoyée hier.

Premier élément, une antenne doit être maintenue sur trois sites dont la suppression est prévue mais où les enjeux locaux continuent de justifier une présence au plus près des exploitants : à Nantes, à Bergerac et, comme vous le savez, à Perpignan.

Deuxième élément, Stéphane Le Foll a demandé qu’aucune mobilité géographique ne soit imposée à des agents qui ne le souhaiteraient pas pour des raisons tenant à leur vie personnelle.

À cette fin – c'est le troisième élément –, il a demandé au directeur de mettre en place une commission de suivi de la réorganisation et d’accompagnement de la situation des agents, à laquelle les représentants du personnel participeront.

Pour la région Languedoc-Roussillon, l’unité territoriale de l’INAO sera composée du site de Montpellier et du site de Narbonne, ainsi que d’une antenne à Perpignan. La création d’antennes a été rendue possible à la suite de la demande expresse du ministre de l'agriculture et, comme je l'ai dit, elle ne concernera que trois sites touchés par la réorganisation. L'ensemble des agents seront placés sous l'autorité de la déléguée territoriale, basée à Montpellier.

Cette réorganisation s'inscrit dans la politique générale de l’État du maintien de services publics de qualité à des coûts optimisés. Le rôle de l'INAO vis-à-vis des organismes de défense et de gestion des Pyrénées-Orientales sera bien entendu maintenu auprès des filières viticoles et agricoles dont le dynamisme et la performance sont reconnus de tous et auxquels le Gouvernement – tout comme vous, monsieur le sénateur – est très attaché.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bourquin

Madame la ministre, ma réaction tiendra en trois points.

Premier point, votre réponse est technocratique et guidée par des techniciens. Or, ici, madame, on fait de la politique !

Deuxième point, vous me parlez d'un maillage en France… Alors, qu’on aille pêcher les anchois de Collioure à Dunkerque, qu’on produise le bon vin de Maury et de Collioure à Dijon ! Moi, je n’y peux rien si mon département est un producteur de qualité parce que nous y avons tous travaillé…

Troisième point, une antenne, je n’y crois pas deux instants ! Une plaque ne sera pas sitôt placée qu’un directeur l'enlèvera, et il n’y aura plus d'antenne ni de plaque !

Tout cela, ce ne sont que des mots. Vous ne faites pas de politique ici, et c'est dommage… Je comptais alerter le ministre ; je le ferai dans d'autres circonstances : je suis un tenace et je ne lâcherai rien là-dessus !

Pour l'élevage, si nous sommes parvenus au point où nous nous trouvons, c'est parce que moi et d'autres l'avons défendu, parce que nous avons travaillé ! C’est la même chose pour les fruits et légumes : c'est parce que des gens comme moi, par le passé, ont bossé, qu’ils les ont défendus bec et ongles, tout comme la viticulture, avec les bons Maury, les bons Rivesaltes, les bons Collioure – voilà des noms qui sonnent !

Eh on vient nous dire qu’il faut faire un maillage, que le nord de la France… Je m'arrête là, car je ne veux pas opposer les territoires ! Alors oui, c'est cela, excusez-moi d'avoir une bonne zone de production, qui a envie d'avoir des labels pour mieux vendre dans monde ! C'est évidemment cela qu’on est en train de sacrifier !

Je dirai que votre réponse, dictée par les technocrates du ministère de l'agriculture, est loin d'être satisfaisante. Elle est même vraiment décevante !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, en remplacement de M. Didier Guillaume, auteur de la question n° 546, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Didier Guillaume, qui reçoit aujourd’hui le ministre de l'intérieur dans la Drôme ; ce dernier rencontre les maires des communes qui ont été sinistrées dans le nord de ce département lors des inondations de la semaine dernière.

En l'occurrence, le hasard fait, hélas ! bien les choses, cette question orale portant précisément sur des épisodes climatiques dévastateurs pour la Drôme.

En effet, mon collègue souhaitait attirer votre attention sur un sujet particulièrement sensible pour les agriculteurs : l’assurance de leurs exploitations, et plus particulièrement la difficulté que rencontrent un grand nombre d’entre eux pour souscrire un contrat annuel d’assurance récolte.

Comme vous le savez, le département de la Drôme a été touché plusieurs années de suite par des épisodes de grêle très violents. Ces événements, dont les derniers se sont déroulés en juillet 2013, ont très lourdement sinistré les arboriculteurs et viticulteurs du département de la Drôme, certains ayant perdu la quasi-totalité de leur production annuelle.

Si la protection agricole contre les risques climatiques relève uniquement du secteur privé pour les risques assurables comme, par exemple, la grêle, le gel ou les inondations, et si les agriculteurs sont, régulièrement, fortement incités à s’assurer contre ces risques climatiques malgré les coûts élevés d'une telle adhésion – mon collègue indique une fourchette de 2 000 euros à 2 500 euros par hectare d'arboriculture –, de plus en plus d’exploitants n’y parviennent pas.

Quand de nombreux agriculteurs font l’effort d’être prévoyants et de se couvrir face aux risques et qu’ils se retrouvent dans l’incapacité de souscrire de nouveaux contrats d’assurance – ou alors à des tarifs prohibitifs –, ce sont les pouvoirs publics, et en particulier les collectivités locales, qui sont sollicités pour trouver des solutions face aux difficultés rencontrées.

Cette situation de refus des assurances privées d’assurer des exploitants considérés comme présentant un trop gros risque entraîne une grande instabilité chez ces agriculteurs qui courent chaque année le risque de voir leur production détruite par des événements climatiques de plus en plus fréquents : les terribles inondations que la Drôme et l’Ardèche ont connues il y a quelques jours en sont une nouvelle illustration.

Cette incapacité à se prémunir contre ce risque entraîne un grand découragement chez de nombreux exploitants et emporte des conséquences souvent très lourdes sur la pérennité même des exploitations.

La sélection des risques opérée par les assurances en excluant le climat fait donc supporter la responsabilité des événements liés à la météo aux seuls agriculteurs. Le raisonnement purement financier qui préside à cette sélection n’est pas acceptable.

La question de Didier Guillaume est donc la suivante : madame la ministre, quelles solutions peuvent-elles être envisagées avec les groupes d’assurance pour éviter la multiplication des résiliations ou des refus d’assurer ? Et, plus largement, n’est-il pas nécessaire, pour sortir de ces difficultés récurrentes, de mettre en place un système de généralisation de l’assurance récolte pour éviter non seulement la disparition de dizaines d’exploitations incapables de faire face aux aléas climatiques, mais aussi le découragement des jeunes ayant pour projet de s’installer ?

J’ajoute que beaucoup d'entre nous peuvent se sentir concernés ; ainsi, pour ce qui concerne mon département, la Haute-Vienne, les producteurs de pommes sont nombreux.

Debut de section - Permalien
Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie

Monsieur le « sénateur, vous vous faites l’écho des interrogations de M. Guillaume concernant la difficulté que rencontrent des agriculteurs touchés à plusieurs reprises par des catastrophes climatiques pour trouver une compagnie d’assurance acceptant de couvrir leur exploitation.

M. Le Foll vous rappelle que, si les pertes de récolte liées à la grêle en particulier, considérées comme assurables, ne relèvent pas du régime des calamités agricoles, les pertes de fonds, elles, entrent dans le champ. Ainsi, les calamités agricoles peuvent indemniser une partie des pertes de fonds dont ont été victimes les arboriculteurs et les viticulteurs drômois à la suite d’un ou plusieurs épisodes de grêle.

Typiquement, si des ceps de vigne ou des arbres fruitiers ont dû être taillés après un épisode de grêle d’une manière qui affecte les récoltes suivantes, ces pertes de fonds sont éligibles.

L’assurance des récoltes contre les risques climatiques offre une meilleure couverture que les indemnisations du régime des calamités agricoles. Le soutien de l’État prend la forme d’une prise en charge partielle des primes ou cotisations d’assurance payées par les exploitants agricoles. Depuis 2010, cette aide s’insère dans le cadre du premier pilier de la politique agricole commune, la PAC, et bénéficie à ce titre d’un cofinancement européen. La réglementation européenne permet un taux de prise en charge publique plafonné à 65 % de la prime éligible.

L’enveloppe publique consacrée au développement de l’assurance récolte est passée de 37 millions d’euros en 2008 à 77, 2 millions d’euros en 2013. À partir de 2015, dans le cadre de la future PAC, une enveloppe annuelle de 77 millions d’euros sera consacrée à l’assurance récolte au sein du deuxième pilier, ce qui traduit l’engagement renouvelé de l’État en faveur de l’assurance récolte.

Bien que la diffusion de l’assurance récolte soit en progression d’année en année grâce au soutien public, les résultats font apparaître des taux de diffusion hétérogènes entre les filières, encore limités en viticulture – 18 % – et trop faibles en arboriculture – moins de 3 %. Cette problématique est l’une des préoccupations majeures du ministre de l’agriculture, dans le cadre du groupe de travail qu’il a mis en place au sujet de la gestion des risques.

Ce groupe de travail a tenu quatre réunions depuis cet été, au cours desquelles les bilans de l’assurance récolte et du régime des calamités agricoles ont été dressés. Les réflexions de ce groupe, auxquelles sont associées les organisations professionnelles agricoles et les compagnies d’assurance, ont porté à la fois sur les objectifs des pouvoirs publics pour redéfinir leur intervention en matière de gestion des risques, mais également sur les améliorations pouvant être apportées par le secteur privé au contenu des produits d’assurance offerts aux agriculteurs.

L’objectif est de réussir à élargir la base du nombre d’assurés, pour définir un dispositif susceptible, à l’avenir, d’offrir à l’ensemble des productions la possibilité de disposer d’une couverture adaptée à leurs besoins spécifiques, en particulier dans les filières viticole et arboricole, afin de rendre ces produits d’assurance plus attractifs et de favoriser la poursuite de la diffusion de l’assurance récolte.

Les conclusions de ce groupe de travail seront présentées dans le courant du mois de novembre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Daniel Laurent, auteur de la question n° 570, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur la mise en œuvre d’une procédure de déclassement des massifs boisés en forêt de protection pour cause d’utilité publique ou pour nécessité absolue de travaux.

En application des articles L. 411-1, L. 413-1, R. 411-1 et R. 413-4 du code forestier, peuvent être classés en « forêt de protection » des massifs boisés dont la conservation est nécessaire à la lutte contre l’érosion des sols pour des raisons écologiques ou pour le bien-être de la population.

Or le déclassement d’une partie de forêt de protection nécessite la mise en œuvre d’une procédure longue, complexe et à l’issue favorable incertaine.

Cette procédure, rarement utilisée, doit respecter le parallélisme des formes : enquête publique, avis du ou des conseils municipaux concernés ainsi que de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ; enfin, transmission du dossier au Conseil d’État qui entérinera, ou non, par voie de décret, la réduction de la servitude.

Ainsi, dans le cadre d’un simple projet d’urbanisme ou d’infrastructure en limite de massif ou sur des parcelles couvertes de quelques arbres et friches sans enjeu environnemental, une procédure de douze à dix-huit mois serait nécessaire, pénalisant les collectivités locales dans la conduite de leurs projets d’intérêt général.

Considérant que les études d’impact diligentées par la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, la DREAL, garantissent la prise en compte de tous les risques et enjeux environnementaux liés aux projets des collectivités, ne serait-il pas envisageable de simplifier et d’harmoniser cette procédure, notamment par une déconcentration au niveau des préfets de région ?

En effet, une telle déconcentration de la décision du déclassement au niveau des préfets de région assurerait plus de souplesse tout en garantissant la préservation des objectifs fixés par le législateur

En conséquence, madame la ministre, pouvez-vous me faire part de vos observations sur cette problématique, ainsi que des propositions du Gouvernement en la matière, qui rendraient bien service aux collectivités ?

Debut de section - Permalien
Yamina Benguigui, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée de la francophonie

Monsieur le sénateur, le classement en forêt de protection constitue actuellement l’outil juridique le plus solide pour la protection des forêts menacées. La procédure est centralisée, le classement comme forêt de protection étant prononcé obligatoirement par décret en Conseil d’État. Le projet est soumis à une enquête publique et le dossier doit préciser les motifs du classement et la nature des sujétions et interdictions susceptibles d’être entraînées par le régime forestier spécial.

Les effets principaux du classement sont d’interdire le défrichement, de soumettre la gestion forestière à des règles techniques particulières, de contrôler les droits d’usage et de réglementer l’accès du public. Cette procédure permet d’apporter toute garantie, tant quant à la prise en compte de l’expression de toutes les parties prenantes que relativement à l’intérêt du classement de chacune des parcelles, sous la surveillance du Conseil d’État.

Toute modification est prise par décret en Conseil d’État, suivant donc la procédure du classement. Je tiens à vous préciser que la réglementation ne prévoit pas de déclassement, le statut de forêt de protection étant par nature définitif, puisque l’objectif premier est justement la conservation des forêts.

Le classement comme forêt de protection interdit en effet tout changement d’affectation ou tout mode d’occupation du sol de nature à compromettre la conservation ou la protection des boisements.

Par exemple, en 1995, lorsque le ministre de l’industrie a sollicité une dérogation pour permettre la recherche d’hydrocarbures en forêt de Fontainebleau, le Conseil d’État s’est prononcé défavorablement, en indiquant que les puits de forage devaient être établis hors du périmètre de protection.

En créant le statut de forêt de protection, le législateur a voulu accorder une protection extrêmement forte à des forêts dont la préservation présente un intérêt exceptionnel. Cette procédure, qui ne couvre qu’une infime partie des espaces forestiers nationaux, doit, pour conserver tout son sens, rester strictement appliquée.

Le Gouvernement n’envisage pas de modification de cette procédure.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

Madame la ministre, vous vous doutez bien que cette réponse ne me satisfait pas du tout, elle n’est d’ailleurs pas acceptable.

Je comprends bien qu’il faut garantir la protection de nos forêts, nous y sommes tous favorables, mais ma question était ciblée.

Nous représentons tous des collectivités et nous avons quelquefois besoin, à la marge, dans certains cas précis comme le passage d’une route ou d’une infrastructure, de quelques mètres carrés qui pourraient faire l’objet d’une dérogation. Je connais justement cette situation en Charente-Maritime. Nous pourrions ainsi facilement économiser beaucoup d’argent public. Nous sommes en effet conduits à procéder à des acquisitions de quelques centaines de mètres carrés de terrains souvent constructibles ou habités, très onéreux sur les côtes et le littoral.

Je demande simplement un peu de bon sens en la matière. Tout en préservant, bien sûr, nos belles forêts, nous souhaitons que le Gouvernement réfléchisse à cette possibilité qui pourrait être offerte aux représentants des collectivités que nous sommes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, auteur de la question n° 456, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Ma question était adressée au ministre de l’intérieur, mais je vois que c’est Mme la ministre déléguée chargée de la décentralisation qui va me répondre, avec toute la compétence qu’on lui connaît dans cette maison.

Que penseriez-vous, madame la ministre, d’une situation dans laquelle on dirait à un jeune conducteur qui vient de passer son permis de conduire : « Vous avez désormais un permis probatoire pour parfaire votre façon de conduire avant de recevoir, dans trois ans, votre permis définitif, mais, pendant cette période, vous n’aurez pas le droit de conduire une voiture » ? Devra-t-on lui demander de faire ses preuves en bicyclette ou en trottinette ?...

Avec votre sagesse bien connue, vous diriez, madame la ministre, que c’est amusant mais stupide et digne du royaume du père Ubu. C’est pourtant à peu près la situation dans laquelle se trouvent les jeunes pompiers qui, ayant leur permis de catégorie B, se voient opposer de fait l’interdiction de conduire des véhicules de secours, en intervention et hors intervention, pendant les trois années de leur probation.

Le permis probatoire a été instauré par la loi du 12 juin 2003 dans le but de renforcer la lutte contre la violence routière, et nul ne peut nier qu’il a produit des effets. L’article R. 413-5 du code de la route impose ainsi un certain nombre de contraintes, notamment un capital de six points seulement, un disque A apposé à l’arrière du véhicule, une vitesse limitée.

Il n’est pas question de remettre en cause ces obligations, mais il faut constater qu’une combinaison des articles R. 413-5 du code de la route et R. 6312-8 du code de la santé publique peut aboutir à interdire aux pompiers la conduite d’un véhicule de secours et d’assistance aux victimes, ou VSAV, en intervention comme hors intervention.

L’article R. 413-6 du code de la route fixe une liste de dérogations et notamment exonère les conducteurs des véhicules des unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile, qui pilotent pourtant les mêmes engins de secours que les pompiers civils.

Le ministre de l’intérieur, qui a la responsabilité des sapeurs-pompiers, a-t-il l’intention de préciser que, si l’article R. 6312-8 du code de la santé publique prévoit que des normes minimales applicables aux véhicules de catégorie B sont bien déterminées par arrêté du ministre de l’intérieur, les dispositions dérogatoires de l’article R. 413-5 du code de la route sont applicables aux sapeurs-pompiers, qui seraient ainsi exonérés par le troisième alinéa de l’article R. 413-6 du code de la route, au même titre que les conducteurs d’unité d’instruction et d’intervention de la sécurité civile.

Ce n’est sans doute pas l’affaire du siècle, madame la ministre, mais ce traitement apparaît discriminatoire et en sont victimes non seulement les sapeurs-pompiers de la fonction publique territoriale, mais aussi les volontaires, dont vous connaissez le rôle dans le maillage et l’efficacité des secours sur l’ensemble du territoire, en particulier pour les petits centres en milieu rural.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le président, la ministre déléguée que je suis va donc suppléer successivement le ministre de l’intérieur, M. Manuel Valls, la ministre des affaires sociales et de la santé, Mme Marisol Touraine, le ministre chargé du budget, M. Bernard Cazeneuve, et la garde des sceaux, Mme Christiane Taubira, retenus par d’autres responsabilités et d’autres charges !

Merci donc de bien vouloir me supporter, monsieur le président, et merci à mes anciens collègues sénateurs et sénatrices d’accepter les réponses que je leur ferai en lieu et place des ministres qui n’ont pu être présents ce matin.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. le président. Chacun connaît votre universalité, madame la ministre !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée

Merci, monsieur le président.

Monsieur Peyronnet, Ubu n’est jamais loin de nous, mais le ministre de l’intérieur s’est très sérieusement attaché à cette problématique et je vais développer les éléments de réponse qu’il m’a chargée de vous transmettre.

Institué, comme vous l’avez rappelé, par la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière, et entré en vigueur en mars 2004, le permis probatoire a une durée variable : deux ans si le conducteur a suivi la filière de l’apprentissage anticipé de la conduite ; trois ans pour les conducteurs issus de la filière classique.

Il s’agit exclusivement d’un instrument de prévention visant à diminuer le nombre de points sur le permis de conduire afin d’inciter les jeunes conducteurs à être le plus prudents possible et – surtout – respectueux du code de la route. Il s’inscrit dans une démarche de prévention des accidents de la route dont sont victimes chaque année de très nombreux jeunes.

Le Gouvernement, très attentif à cette question, a donc mis en place une politique volontariste de prévention des accidents de la circulation routière.

Dans cette logique, les dérogations aux dispositifs préventifs tels que le permis probatoire ont été restreintes. Vous l’avez rappelé, les véhicules militaires bénéficient d’une dérogation ; elle est essentiellement liée à la mission militaire. L’armée dispose en effet de structures de formation et d’accompagnement spécifiques, ainsi que de règles propres visant à suivre les jeunes conducteurs incorporés au sein de ses unités.

Les services départementaux d’incendie et de secours sont confrontés à une réalité différente. À l’occasion de leurs 11 600 interventions quotidiennes, les SDIS sont amenés à conduire en situation d’urgence et de stress, ce qui requiert une grande expérience de la conduite automobile afin de limiter les risques.

Les formations dispensées aux sapeurs-pompiers leur rappellent déjà la nécessité impérieuse, pour réussir leur mission, d’arriver d’abord sur les lieux et donc de se montrer particulièrement vigilants aux risques routiers.

Le ministre de l’intérieur a demandé à la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises de procéder à une refonte des programmes de la filière « conduite », afin de prendre mieux en compte la prévention des accidents de circulation.

Par ailleurs, les services départementaux d’incendie et de secours développent également des plans de prévention des risques routiers afin de sensibiliser leurs sapeurs-pompiers à de tels risques. Les jeunes qui s’engagent en qualité de sapeurs-pompiers ont déjà de nombreuses compétences à acquérir afin de mener en toute sécurité les opérations pour lesquelles ils sont sollicités.

Le ministre de l’intérieur, ainsi que le Président de la République qu’il accompagnait à Chambéry à l’occasion du 120e congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, se sont clairement engagés pour le volontariat en le définissant comme une priorité nationale.

Un ensemble de mesures destinées à lever les différents freins au recrutement de sapeurs-pompiers volontaires a été arrêté par les grands donneurs d’ordre du monde pompier. L’État, les collectivités territoriales et la profession se sont fixé comme objectif d’accroître le nombre de sapeurs-pompiers volontaires dans les SDIS.

Au risque de vous décevoir, monsieur le sénateur, il n’est donc pas envisagé, dans le cadre de ces mesures, qu’il faut concilier avec l’apprentissage des règles de sécurité au travail et la politique publique nationale en matière de sécurité routière, de permettre aux jeunes qui souscrivent un engagement de sapeurs-pompiers de conduire un engin de secours en situation opérationnelle en dehors des règles de droit commun.

Nous ne sommes pas tout à fait chez Ubu ; il va falloir s’en tenir là.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Votre réponse ne me satisfait effectivement pas, madame la ministre, vraiment pas du tout !

Nous ne sommes certes pas chez Ubu, mais nous n’en sommes pas très loin. Voilà des gens qui, ayant leur permis, ne pourront pas s’en servir pour conduire des véhicules de secours pendant trois ans ! Où donc vont-ils apprendre ce qui, dans leur métier, concerne la conduite ? Et, au bout de trois ans, d’un seul coup, on leur dira qu’ils ont le droit de conduire tel ou tel véhicule !

Je ne vois pas vraiment l’intérêt de ce dispositif. Il vaudrait mieux leur permettre de conduire ces véhicules lors des retours d’intervention, accompagnés par un collègue expérimenté. Ils éviteraient ainsi les situations de stress auxquelles vous faites allusion et pourraient s’entraîner à cette conduite.

J’ajoute que, dans le milieu rural que vous connaissez bien, cela pose un véritable problème. Vous avez indiqué que le Président de la République s’était engagé en faveur du volontariat. À Chambéry, il a annoncé des mesures tout à fait favorables, je les salue. Toutefois, le gros problème qui se pose, en particulier en milieu rural, est de disposer d’un nombre suffisant de pompiers, notamment de conducteurs.

Comment va-t-on procéder ? Devra-t-on faire appel fréquemment, sinon à chaque intervention, aux services d’un centre voisin parce que tel ou tel jeune, bien que titulaire d’un permis de conduire, ne pourra utiliser le véhicule de secours ? Cette situation n’est pas satisfaisante.

J’ajoute qu’elle est également fort discriminatoire. En effet, si j’ai bien compris, les pompiers militaires – à Paris ou à Marseille – ont le droit, eux, de conduire. Je ne vois pas en quoi ils seraient moins stressés dans les rues de Paris que dans votre campagne ou dans la mienne !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à Mme Catherine Deroche, auteur de la question n° 522, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Je souhaiterais attirer l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur l’utilisation de la technique du crédit-bail par les collectivités territoriales, dans l’intervention publique locale de l’immobilier d’entreprise.

Les intercommunalités, en particulier, mettent à disposition des entreprises désireuses de s’installer dans les zones artisanales intercommunales des bâtiments industriels au moyen du crédit-bail, cette formule apparaissant comme l’une des formes juridiques les plus appropriées.

Or les conditions réglementaires encadrant l’établissement des crédits-bails immobiliers se révèlent aujourd’hui assez restrictives. Ainsi l’article L. 511-5 du code monétaire et financier précise-t-il que la pratique du crédit-bail immobilier ne doit pas revêtir un caractère habituel pour toute personne autre qu’un établissement de crédit.

La jurisprudence, quant à elle, considère que l’habitude commence dès la première répétition.

En conséquence, si les collectivités locales peuvent mettre en œuvre des opérations d’immobilier d’entreprise en crédit-bail dans le cadre de leur pouvoir économique, ces opérations ne peuvent avoir un caractère « habituel » et doivent donc être pratiquées de manière occasionnelle.

Au nombre des sanctions figure notamment la nullité du contrat qui peut être invoquée par le crédit-preneur. C’est ce qui est arrivé dans mon département, le Maine-et-Loire : la communauté de communes Loir-et-Sarthe, propriétaire de douze ateliers relais, dont huit loués en crédit-bail et deux en baux courte durée à transformer, à l’échéance, soit en crédit-bail, soit en bail commercial, s’est vu opposer la nullité de plusieurs contrats en raison du caractère répétitif de cette pratique. Les crédits-preneurs ont ainsi pu éviter de payer les préavis et les indemnités dus en cas de résiliation anticipée.

Il en résulte une véritable insécurité juridique pour les collectivités locales, alors même que ces opérations ont fait l’objet de délibérations et n’ont pas suscité la moindre observation de la part des services de l’État.

Aussi, j’aimerais savoir si le Gouvernement entend prendre des mesures pour aménager la pratique du crédit-bail immobilier.

Cette piste mérite en effet d’être explorée, tant pour permettre aux intercommunalités d’exercer plus sereinement leur compétence en matière de développement économique que pour répondre à la carence des opérateurs privés, qui n’investissent pas forcément dans le milieu rural.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Madame la sénatrice, voilà une question qui relève autant de Manuel Valls que de la ministre déléguée chargée de la décentralisation !

Le contrat de crédit-bail immobilier est défini par l’article L.313-7, alinéa 2, du code monétaire et financier comme une opération par laquelle le crédit-bailleur donne en location, pour une certaine durée, un bien immobilier à un crédit-preneur, l’entreprise, qui aura la faculté de devenir propriétaire de ce bien à l’expiration du contrat de crédit-bail ou par une levée de l’option d’achat, pour un prix fixé contractuellement.

Le crédit-bail consiste donc en une location assortie d’une promesse unilatérale de vente.

Ce mode de financement des investissements à moyen ou long terme est assimilé à une opération de crédit par l’article L. 313-1 du code monétaire et financier et, à ce titre, ne peut être effectué à titre habituel que par des entreprises commerciales agréées en qualité d’établissement de crédit selon l’article L. 515-2 du même code.

À titre exceptionnel, et lorsque l’intérêt local l’exige, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent déroger au principe du monopole bancaire reconnu aux établissements de crédit et effectuer des opérations de crédit-bail en vue d’assurer le développement ou le maintien d’activités économiques.

Cette possibilité ne doit cependant pas revêtir un caractère habituel. Dans l’exemple du département de Maine-et-Loire que vous avez cité, vous avez vous-même mentionné l’existence de huit contrats de crédit-bail. La jurisprudence interprète cette notion de « caractère habituel » de manière très restrictive : il est en général considéré que l’habitude commence dès la première répétition, c’est-à-dire au deuxième contrat de crédit-bail.

Les collectivités territoriales et leurs groupements disposent toutefois, dans le cadre de l’article L. 1511-3 du code général des collectivités territoriales, de la faculté d’intervenir indirectement dans une opération de crédit-bail en accordant des aides à l’immobilier d’entreprise dans des conditions très précises, conformément à l’article R. 1511-4-1 du même code, qui permet d’attribuer des aides, par l’intermédiaire d’un tiers maître d’ouvrage habilité à effectuer des opérations de crédit à titre habituel. C’est à ce dernier qu’il revient de répercuter intégralement ces aides sous forme de rabais sur les annuités de crédit-bail payées par l’entreprise. L’aide donne alors lieu à l’établissement d’une convention.

Dans ces conditions, vous comprendrez, madame la sénatrice, que le respect de la loi s’impose.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Loin de moi l’idée de ne pas respecter la loi ! Mon objectif était de vous sensibiliser aux difficultés que rencontrent les intercommunalités dans le cadre des opérations de crédit-bail. Je m’interrogeais sur la possibilité d’améliorer les textes, de façon à disposer d’un peu plus de souplesse.

Nous savons que la situation économique de la France est catastrophique. Elle inquiète au plus haut point non seulement les Français et les chefs d’entreprise, mais aussi les élus locaux. Dans la guerre que nous devons mener contre le chômage et contre la dégradation de l’emploi, avec toutes leurs conséquences sociales, voire sociétales, je pense qu’il nous faut imaginer des méthodes et des modifications réglementaires ou législatives permettant de libérer les énergies et de supprimer nombre des freins à la création d’emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Philippe Kaltenbach, auteur de la question n° 543, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget .

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement, et plus particulièrement celle du ministre chargé du budget, sur l’inquiétude des professionnels des industries de l’habillement après les propositions formulées cet été par le Conseil des prélèvements obligatoires, visant à supprimer ou plafonner les taxes affectées aux opérateurs parapublics.

En effet, les comités professionnels de développement économique et notamment, dans le secteur de l’habillement, le comité de développement et de promotion des industries de l’habillement, jouent un rôle crucial dans le soutien aux entreprises créatrices d’emplois et de ressources, au moment même où le Gouvernement s’emploie, par la politique qu’il conduit, à infléchir et, nous l’espérons tous, à inverser la courbe du chômage.

Pour mémoire, je veux rappeler que ces comités ont été créés par la loi du 22 juin 1978 pour des professions représentant environ 24 000 entreprises, majoritairement petites et moyennes.

Ces comités sont financés par des taxes affectées, votées par le Parlement en 2004, à la demande expresse des professions, pour remplacer les taxes parafiscales. Alors que ces dernières échappaient à son contrôle, les taxes affectées sont soumises au vote des assemblées dans les lois de finances.

Ces taxes payées par les entreprises pour le développement et la promotion de leur secteur ont permis à l’État, depuis cette date, de réaliser une économie de plus de 300 millions d’euros. Si elles venaient à être supprimées ou plafonnées, comme le préconise le Conseil des prélèvements obligatoires, le financement des précieuses missions que remplissent aujourd’hui les comités professionnels de développement économique incomberait directement au budget l’État.

Or, vous le savez, les efforts entrepris depuis dix-huit mois pour réduire les déficits colossaux légués par le précédent gouvernement seraient incompatibles avec cette nouvelle charge. Les actions actuellement menées par les comités professionnels de développement économique pourraient donc, à terme, se trouver menacées.

Aussi, je voudrais interroger le Gouvernement sur les orientations qui seront retenues par l’État à la suite de la récente publication des propositions formulées par le Conseil des prélèvements obligatoires relatives aux taxes affectées aux opérateurs parapublics, et sur leurs incidences éventuelles sur les comités professionnels de développement économique.

Les professionnels, bien sûr, sont inquiets et souhaiteraient être rassurés.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, je vais tenter de rassurer ces professionnels en vous livrant la réponse que m’a transmise M. le ministre chargé du budget.

Le Gouvernement n’a certainement pas l’intention de supprimer le financement, par des taxes affectées, des centres techniques industriels, les CTI, ou des comités professionnels de développement économique, les CPDE, dont fait partie le comité de développement et de promotion de l’habillement, dénomination officielle du DEFI.

Ces taxes affectées avaient d’ores et déjà été plafonnées par la loi de finances pour 2012. L’instauration d’un plafond sur ces taxes ne vise pas à pénaliser le comité de développement et de promotion de l’habillement, dont nous savons le soutien majeur qu’il constitue pour la filière de la mode, en matière de développement international, de création et d’innovation. Il consiste plutôt à permettre la mise en œuvre d’économies globales auxquelles, compte tenu de notre situation économique, tous les organismes bénéficiaires d’un soutien de l’État doivent aujourd’hui contribuer.

Le rapport confié à MM. Queyranne, Demaël et Jurgensen, dans le cadre de la modernisation de l’action publique, tout comme celui qu’a remis le Conseil des prélèvements obligatoires sur la fiscalité affectée, ont montré le surcalibrage des plafonds des taxes affectées aux CTI et CPDE.

De fait, en 2012, quatre plafonds étaient surévalués au regard de la collecte effective, y compris la taxe affectée au développement et à la promotion des industries de l’habillement, et n’ont pas donné lieu à des dépassements. Depuis 2007, l’exécution des taxes n’a jamais atteint le niveau du plafond global.

De plus, dans le contexte très dégradé de nos finances locales, il est aujourd’hui légitime de veiller à la bonne utilisation de l’argent public, et d’inciter les établissements financés par taxes affectées à plus d’efficience et d’efficacité dans la conduite des politiques dont ils ont la charge.

Conformément aux engagements du Gouvernement, il est donc décidé, pour 2014, d’associer les CTI et CPDE à cet effort. Dans le cadre de l’objectif général de réduction de 10 % des taxes affectées, le projet de loi de finances pour 2014 tient compte de l’importance des interventions, en appliquant un effort budgétaire mesuré et équitable – deux adjectifs importants –, nécessaire au redressement des finances publiques.

Il a été décidé de réduire les plafonds des taxes et des subventions affectées aux CTI et CPDE de cinq millions d’euros, faisant passer le plafond global de 139 millions d’euros à 134 millions d’euros.

La taxe pour le développement des industries de l’habillement, dont bénéficie le comité de développement et de promotion de l’habillement, plafonnée à 10 millions d’euros en 2013, passerait à 9, 5 millions d’euros. Ce niveau de plafonnement a été calculé au plus juste, en fonction des dernières prévisions financières disponibles et des nouveaux objectifs d’économies à réaliser, de telle sorte que les actions que mène le DEFI auprès du secteur de l’habillement ne soient pas remises en cause.

C’est ce message qu’il faut retenir, monsieur le sénateur, même si, nous en sommes tous conscients, la période actuelle nous oblige, les uns et les autres, à faire des économies.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Je vous remercie, madame la ministre, de cette réponse. Je crois qu’il est nécessaire de rassurer les professionnels, qui remplissent leurs missions de manière tout à fait efficiente. Il faut les encourager à poursuivre le développement, sur le territoire, d’une activité industrielle dont les produits peuvent être exportés et contribuer à faire connaître notre savoir-faire à l’étranger.

La crainte, exprimée à la suite de la publication du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires, était de voir supprimer les taxes affectées. Je note que telle n’est pas l’intention du Gouvernement, et je tiens à l’en remercier.

La décision de plafonner les taxes affectées de manière limitée, prise afin que tout le monde contribue à l’effort sur la dépense publique, ne brouille pas le message essentiel, qui est d’encourager les professionnels à poursuivre leurs actions, et de leur garantir des montants qui leur permettent de continuer leur travail.

Je remercie le Gouvernement de ne pas envisager de suppression de ces taxes affectées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 562, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur la distribution du courrier dans les mairies, notamment les mairies de petites communes.

En effet, selon la loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales, « le service de distribution du courrier doit s’effectuer, dans des installations appropriées, au domicile de chaque personne physique ou morale ».

Cela signifie que les courriers adressés aux mairies sont, désormais, distribués dans les boîtes aux lettres dédiées à cet effet et non plus, comme le voulait une pratique sanctionnée par le temps, au domicile du premier magistrat de la commune.

Si, juridiquement, une telle décision est correcte, elle ne va malheureusement pas sans poser de problèmes aux édiles des communes les plus petites, dont les secrétariats de mairie ne sont évidemment pas ouverts tous les jours.

Quand on sait que 28 % des 36 685 communes de notre pays comptent moins de 200 habitants – voire 46 % dans mon département, la Marne –, on imagine aisément que le courrier n’est pas relevé en mairie tous les jours !

Aussi, au moment où le Gouvernement prône un « choc de simplification », je voudrais savoir, madame la ministre, s’il pourrait être envisagé d’aménager cette disposition, source de complications pour de nombreux élus locaux, et d’autoriser, là où c’est nécessaire, la distribution du courrier destiné à la mairie au domicile du maire.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique

Monsieur le sénateur, la loi du 9 février 2010, qui a transformé La Poste en société anonyme, a confirmé les quatre missions de service public confiées à l’entreprise : le service universel postal, le transport et la distribution de la presse, la contribution à l’aménagement du territoire et l’accessibilité bancaire. En tant que prestataire du service universel postal, et conformément à l’article L. 2 du code des postes et des communications électroniques, La Poste est soumise à des obligations particulières, notamment en matière de qualité et d’accessibilité du service.

L’article L. 1 du même code prévoit ainsi que « le service de distribution est effectué, dans des installations appropriées, au domicile de chaque personne physique ou morale », et l’article R. 1-1-5 précise que « la distribution est assurée à l’adresse indiquée par l’expéditeur ».

L’affranchissement acquitté par l’expéditeur rémunère le service d’acheminement et de distribution d’un envoi postal jusqu’à l’adresse mentionnée sur celui-ci. L’installation d’une boîte aux lettres au domicile d’une personne physique ou morale, facilement accessible aux facteurs, permet d’assurer la remise intégrale et en toute sécurité des envois postaux.

Par ailleurs, les municipalités qui le souhaitent peuvent aussi utiliser d’autres solutions proposées par La Poste pour recevoir leurs courriers : la distribution dans les boîtes postales mises en place dans certains bureaux de poste ; le service de garde au bureau de poste ; la souscription à une offre commerciale de La Poste, Itinovia, qui permet notamment aux structures administratives de rediriger la totalité des courriers libellés à différentes adresses postales à une adresse unique choisie par le client ; ou encore la réexpédition temporaire du courrier auprès du bureau de poste le plus proche.

Les équipes de la direction du courrier de Meuse Champagne-Ardenne de La Poste se tiennent à votre écoute, monsieur le sénateur, pour identifier la solution la mieux adaptée à vos besoins. N’hésitez pas à vous rapprocher de mon cabinet si la solution qui vous est proposée ne correspond pas à votre attente.

Le service public universel postal, ce sont aussi des missions de La Poste adaptées au monde rural et aux attentes des élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Cependant, je crois que ce problème requiert une solution globale.

Je l’ai dit, 28 % des communes françaises comptent moins de 200 habitants. Cette affaire, par conséquent, ne concerne pas que la Champagne-Ardenne – ou la Meuse –, dont je dois dire que la direction régionale est tout à fait efficace et le directeur régional très à l’écoute des élus.

Il me semble donc qu’il serait utile que le ministère se penche sur cette question d’ordre général, et donne des consignes de souplesse dans la distribution du courrier.

La loi de 2005 a fait naître un problème qui n’existait pas auparavant, quand le bon sens l’emportait encore sur l’application stricte des textes. Revenons à ce bon sens, nous en avons vraiment besoin !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, auteur de la question n° 561, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé du budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Ma question concerne la situation du secteur des services à la personne.

Le secteur des services à la personne représente, en France, environ 1, 7 million de salariés et 3, 6 millions de particuliers employeurs. Dans la Manche, département dont je suis l’élu, il occupe environ 17 000 salariés pour 32 000 particuliers employeurs. C’est dire si ce secteur et les fluctuations de son activité doivent être surveillés avec attention. Le rôle social de ces emplois ne doit pas, non plus, être négligé, car ces salariés assurent souvent des services indispensables, particulièrement auprès des personnes dépendantes.

Bien que les facteurs susceptibles d’influer sur le secteur des services à la personne soient multiples, on constate que les variations des dispositifs fiscaux et sociaux se répercutent directement et rapidement sur le travail déclaré.

En 2011, l’abattement de 15 points sur les cotisations sociales des ménages qui déclaraient leurs employés à domicile sur la base du salaire réel a été supprimé.

L’année dernière, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, il a été décidé de supprimer la possibilité qui était ouverte aux particuliers employeurs d’opter pour une déclaration au forfait. Cette suppression a été en partie compensée par un allégement de charges de 0, 75 centime d’euro par heure travaillée.

L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, a constaté une baisse de 7, 9 % du nombre d’heures déclarées, de 3, 2 % du nombre d’employeurs et de 6, 6 % de la masse salariale entre le premier trimestre de 2012 et le premier trimestre de 2013.

Si les chiffres du deuxième trimestre de 2013 montrent un léger rebondissement de l’emploi à domicile – stabilisation des heures déclarées, par exemple – on constate malgré tout un net recul des emplois de services en un an.

Ces données sont inquiétantes, car, durant cette période, les besoins n’ont pas disparu. Elles témoignent des conséquences de l’augmentation du coût pour les particuliers employeurs de leurs salariés à domicile, qui ont été importantes : les heures déclarées ont été réduites et certains particuliers se sont séparés de leurs salariés.

Il est donc à craindre que la suppression du forfait, l’année passée, pensée pour renforcer l’égalité des droits sociaux des salariés du secteur, ait eu, à certains égards, des effets contraires à ceux qui étaient recherchés. C’est ce sur quoi j’avais attiré l’attention du Gouvernement il y a un an.

Par la diminution du nombre d’heures déclarées, ces salariés voient justement le niveau de leur protection sociale abaissé, d’autant qu’il s’agit d’un secteur souvent confronté à la précarité : temps partiel subi, réduit parfois à quelques heures, déplacements répétés, perspectives limitées d’évolution de carrière ou de reconversion, rémunérations globalement faibles.

Surtout, on peut s’interroger, madame la ministre, sur l’ampleur du volume de la sous-déclaration, tout à fait contraire à l’esprit qui animait le dispositif du chèque emploi-service universel, le CESU.

Aussi, madame la ministre, je souhaiterais savoir si le Gouvernement envisage de prendre des mesures de soutien à ce secteur– non délocalisable –, dont le poids économique n’est pas négligeable. J’indique, par ailleurs, qu’il concerne des personnes n’ayant pas nécessairement la possibilité d’occuper d’autres postes, dont nous devons assurer la protection sociale et l’emploi.

Debut de section - Permalien
Fleur Pellerin, ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique

Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser Bernard Cazeneuve, que je supplée ce matin.

Vous m’interrogez sur la chute du nombre d’emplois de services déclarés constatée cette année et, plus particulièrement, sur les conséquences de la suppression de la possibilité qui était ouverte aux particuliers employeurs de payer les cotisations sociales non pas sur le salaire réel mais sur un forfait égal au SMIC.

Après avoir fortement progressé, l’emploi dans le secteur des services à la personne a connu un net ralentissement après 2008 et une diminution en 2011. Cette inflexion est largement imputable au contexte économique. Il s’agit là, en effet, de dépenses qui sont parmi les premières à être réduites par les ménages en cas de baisse du pouvoir d’achat.

Les données sur l’emploi des particuliers employeurs au premier trimestre montrent une baisse importante du volume horaire. Toutefois, cette diminution doit être rattachée à une tendance constatée depuis 2009, elle-même liée à la conjoncture et au report vers l’emploi via des prestataires.

Ces données ne portent que sur les particuliers employeurs ; elles ne permettent pas de tirer de conclusions sur l’évolution globale de l’emploi dans le secteur des services à la personne.

Enfin, cette baisse ne doit pas être reliée à l’évolution de la réglementation, notamment à la suppression de l’assiette forfaitaire, puisqu’elle frappe dans des proportions proches les emplois de services pour lesquels les cotisations sociales étaient assises sur le salaire réel ou sur un forfait au SMIC.

Je veux vous rassurer, monsieur le sénateur, l’impact de la suppression du forfait est marginal. La preuve en est que les données publiées sur le deuxième trimestre montrent une stabilisation du nombre d’heures par rapport au premier trimestre de 2013, après cinq trimestres consécutifs de baisse.

La suppression de l’assiette forfaitaire est une réforme juste qui a permis de garantir aux salariés à domicile des droits sociaux renforcés, en rapport avec leur salaire réel. Elle a été accompagnée de la création d’un abattement forfaitaire afin de continuer à soutenir l’emploi dans le secteur des services à la personne.

Le Gouvernement est désormais attaché à la stabilité du cadre législatif des services à la personne afin d’offrir à ce secteur une visibilité lui permettant d’assurer les conditions de sa croissance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Madame la ministre, je ne partage pas votre optimisme. Je rappelle que les personnes qui déclaraient au réel se sont vu supprimer l’abattement de 15 %, ce qui a eu un impact très important.

Je crains que, après réception des feuilles d’impôt, le premier trimestre 2014 ne soit assez difficile dans ce secteur, puisque les employeurs pourront constater le coût supplémentaire exact de ces mesures.

Certes, déclarer au forfait n’était pas très équitable. Voilà pourquoi l’an dernier j’avais préconisé, plutôt que de supprimer la possibilité ouverte aux particuliers employeurs d’opter pour une déclaration au forfait, de valoriser le forfait de 15 % au-dessus du SMIC. Ainsi, tout en augmentant un peu les salaires, les droits sociaux auraient été maintenus.

Le maintien du dispositif actuel, à mon avis, n’est pas la bonne réponse au problème posé. Je suis même convaincu que c’est contraire à l’objectif qui est le nôtre, à savoir éviter les sous-déclarations. Manifestement, ce phénomène que nous avions cru éradiquer grâce au dispositif CESU reprend de l’ampleur. De plus en plus de personnes travailleront sans la couverture sociale à laquelle elles auraient droit, en raison de la déclaration partielle des heures exécutées. Il faut donc impérativement se pencher de nouveau sur la question des emplois de services. J’espère que le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale nous en offrira l’occasion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 234, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, et concerne le bilan à mi-parcours du plan national d’actions contre les accidents vasculaires cérébraux.

Les AVC représentent, ce que peu de personnes savent, la troisième cause de mortalité, derrière les maladies cardiovasculaires et le cancer. Elles sont malheureusement la première cause d’invalidité lourde et la deuxième cause de démence, après la maladie d’Alzheimer.

En France, chaque année, 130 000 personnes sont victimes d’un AVC, la moitié en garderont de graves séquelles et près de 50 000 en meurent.

Aujourd’hui, le nombre de lits en soins intensifs pour accueillir les patients est nettement insuffisant. Les équipes médicales travaillent à flux tendu et doivent trouver des solutions à chaque appel des urgences et du SAMU, pour pouvoir trouver un lit.

Cette filière AVC doit être renforcée avec des équipes médicales et paramédicales spécifiquement dédiées au combat contre ce fléau. L’accès à une imagerie de pointe IRM doit être également facilité vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept, ainsi que le travail des réseaux de soins et les relations entre l’hôpital et la médecine de ville.

L’AVC ne frappe pas que les personnes âgées, c’est un lieu commun qu’il convient de combattre. Chaque année, 10 000 à 15 000 personnes de moins de quarante ans en pleine activité voient leur vie bouleversée par un AVC.

Parallèlement au vieillissement de la population, le nombre d’AVC augmente et représente dès aujourd’hui un grave problème de santé publique.

On constate également de fortes disparités géographiques en matière de séquelles d’AVC, les départements d’outre-mer et le Nord étant jusqu’à deux fois plus touchés que les autres. À l’inverse, la région parisienne affiche une prévalence plus faible que la moyenne.

Malgré ce bilan inquiétant, pour ne pas dire dramatique, l’AVC reste méconnu tant du grand public que des professionnels de santé. Une journée mondiale lui est consacrée aujourd’hui, en ce 29 octobre. L’objectif de cette journée est de sensibiliser le public afin de lui apprendre à réagir plus rapidement, et donc à limiter les conséquences graves de l’AVC. La presse nationale d’aujourd'hui a consacré quelques articles importants à ce sujet.

Dans chaque département, on se mobilise. C’est le cas dans le mien, le Val-de-Marne, puisque les équipes médicales et paramédicales de l’hôpital Henri-Mondor, à Créteil, ont organisé des ateliers et mis en place des stands d’information ; de même est prévue une conférence animée par le professeur Hassan Hosseini, responsable de l’unité neuro-vasculaire, dont je ne peux que saluer l’engagement personnel pour la meilleure connaissance de cette tragique maladie.

Les services de neurologie, de neuroradiologie, de médecine physique, de réadaptation, de diététique, du SAMU et des sapeurs-pompiers se sont mobilisés pour participer à cette journée. Il doit y avoir plusieurs initiatives de ce type dans d’autres départements.

Déjà organisée l’année dernière, cette manifestation propose des outils pour apprendre à réagir efficacement lors des premiers symptômes. Un plan national d’actions contre les AVC 2010-2014 a été mis en place par le précédent gouvernement. Il a pour objet d’inciter la population à prévenir, dépister et traiter les facteurs de risques qui favorisent l’AVC. L’objectif est de réduire le risque de séquelles en apprenant à agir vite face aux premiers symptômes.

Je souhaite donc connaître, madame la ministre, le bilan à mi-parcours du plan national d’actions de lutte contre l’AVC et les mesures de sensibilisation que le Gouvernement veut prendre afin de lutter contre ce grave problème de santé publique.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, votre question était adressée à Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, qui est aujourd'hui retenue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Elle vous prie de bien vouloir l’en excuser et m’a demandé de vous répondre.

Je vous remercie de votre plaidoyer en faveur de la journée mondiale des accidents vasculaires cérébraux. Je salue l’action menée dans votre département. Vous avez cité l’hôpital Henri-Mondor. D’autres départements ont également pris un certain nombre d’initiatives pour faire connaître les dangers de l’AVC, ce véritable fléau qui est non pas la troisième, mais la deuxième cause de mortalité en France, avec près de 180 000 décès annuels.

L’incidence des accidents vasculaires cérébraux reste stable avec non pas 130 000 cas, mais 150 000 cas par an. Il faut noter que ce taux d’incidence est multiplié par deux après cinquante-cinq ans, même si une étude toute récente fait apparaître que les plus jeunes, y compris ceux de vingt ans, sont eux aussi affectés par ce risque.

Les maladies vasculaires cérébrales restent liées principalement à l’athérosclérose, dont l’hypertension artérielle est l’un des principaux facteurs de risque, aux maladies cardiaques emboliques, mais aussi, en amont, ce qui explique les problèmes des jeunes, aux comportements nutritionnels et au tabagisme.

Dans ce cadre, différentes actions de prévention et d’offres de soins ont été menées par le ministère des affaires sociales et de la santé, pour une part de nature générale concernant l’ensemble des pathologies cardio-neuro-vasculaires.

Comme vous l’avez mentionné, le plan AVC 2010-2014 est en cours. Il conviendra, à échéance, d’en assurer l’évaluation. D’ores et déjà, un certain nombre de bilans ont pu être réalisés et des actions structurantes ont été mises en œuvre sans attendre la fin de ce plan.

Les principales réalisations sont de cinq ordres : d’abord, l’ouverture d’unités neuro-vasculaires sur tout le territoire ; la modification de l’autorisation de mise sur le marché du médicament Actilyse ; la diffusion d’un guide méthodologique de l’organisation des filières AVC ; les expériences pilotes régionales du télé-AVC quelles que soient les configurations territoriales, et vous avez insisté sur les différences entre les régions ; enfin, le lancement de nouveaux registres AVC.

Ces cinq mesures sont essentielles.

La campagne annuelle destinée au grand public, dont celle que nous vivons aujourd'hui, autour de la démarche d’appel du 15 en cas d’accident vasculaire aigu, a fait l’objet d’une évaluation qui s’est révélée positive. Cette campagne a donc été renforcée, elle est radiodiffusée, et elle allie désormais les initiatives régionales professionnelles et associatives à l’annonce nationale.

Il faut également rappeler que la ministre des affaires sociales et de la santé a lancé le 31 mai dernier une stratégie globale de lutte contre le tabagisme comprenant de nombreuses mesures pour diminuer la consommation de tabac, notamment chez les jeunes et les femmes.

Enfin, monsieur le sénateur, la nouvelle stratégie nationale de santé lancée le 23 septembre dernier doit permettre une refonte en profondeur du système de santé pour faire face aux défis futurs. Ce nouveau cadre de l’action publique pour les années à venir répondra particulièrement aux enjeux liés aux accidents vasculaires cérébraux, que vous avez bien eu raison d’évoquer en cette journée mondiale qui leur est consacrée.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Je vous remercie de votre intéressante réponse, madame la ministre. Je serai moi-même cet après-midi à l’hôpital Henri-Mondor pour faire part des éléments que vous m’avez communiqués.

Je suis satisfait de constater que cette action, qui a été engagée par le gouvernement précédent, n’a pas été remise en cause, et qu’au contraire vous affirmez vouloir l’intensifier.

Effectivement, les AVC sont un très grave fléau. Il faut intensifier les mesures d’équipement, notamment en matière d’IRM. Plusieurs reportages télévisés ont montré récemment qu’il existait des disparités indignes de notre pays, alors que les États voisins sont manifestement beaucoup mieux dotés que nous. Or le degré de rapidité de la réaction des équipes médicales passe aussi par ce niveau d’investigation. Il y a quinze jours, l’un de mes collaborateurs à la mairie de Saint-Maurice, âgé de moins de quarante ans, a été touché par un AVC ; il restera paralysé.

Je puis vous dire que c’est un véritable drame pour les familles. Je vous encourage évidemment à intensifier vos efforts pour combattre ce fléau. La représentation nationale vous aidera en ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Jacky Le Menn, auteur de la question n° 498, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Depuis quelques années, certains hôpitaux ont plus de difficultés que d’autres à pourvoir les postes médicaux disponibles. Nous assistons à la constitution d’une autre forme de déserts médicaux au sein même des hôpitaux, certains métiers étant délaissés par la jeunesse.

Face à cette pénurie, des hôpitaux ont fait appel à des médecins ayant des diplômes européens ou extra-européens, ou à des agences d’intérim. Parmi ces diplômés, nombreux sont les Français qui sont partis étudier la médecine à l’étranger. Selon Le Figaro, 15 000 étudiants seraient dans ce cas, en particulier en Belgique, en Roumanie ou au Maghreb pour plusieurs raisons, notamment afin de contourner le numerus clausus. Un quart des nouveaux médecins français auraient acquis leurs diplômes à l’étranger, selon le Conseil national de l’Ordre des médecins.

Je souligne, par exemple, que 22, 2 % des médecins diplômés hors de France sont allés en Algérie, 17, 7 % en Roumanie, et entre 8 % et 9 % en Belgique.

Il semble important, aujourd'hui, de faire un bilan de cette situation et d’apporter une vision d’ensemble afin que les jeunes générations n’aient pas à contourner le système éducatif et puissent être dirigées de manière équilibrée sur le territoire et dans les différents services des hôpitaux. Sans oublier qu’un autre désert médical se prépare hors de hôpitaux : d’ici à 2018, il manquera près de 5, 5 % de médecins généralistes !

Comment comptez-vous, madame la ministre, réguler sur notre territoire et même hors des hôpitaux la formation et le choix de carrière de nos futurs médecins ? Je précise que, bien souvent, le corps professoral qui enseigne à l’extérieur est composé de professeurs de médecine français.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, la problématique dont vous traitez est bien connue de la ministre des affaires sociales et de la santé, comme d’ailleurs de moi-même. Les départements ruraux, mais de plus en plus aussi les départements urbains, sont effectivement confrontés aux difficultés que vous avez évoquées, notamment au fait que les étudiants en médecine français partent étudier à l’étranger.

Je vais m’efforcer de vous apporter les éléments de réponse de nature à vous rassurer sur la politique suivie par le Gouvernement, tout spécialement par la ministre des affaires sociales et de la santé, qui a à cœur de défendre et de promouvoir la filière hospitalière. C’est d'ailleurs ce qui l’a conduite, dès septembre 2012, à demander à Édouard Couty d’élaborer un « pacte de confiance pour l’hôpital ».

Les pouvoirs publics agissent sur cinq leviers pour améliorer l’attractivité des carrières médicale.

Le premier levier a trait aux modalités de rémunération. L’indemnité d’engagement de service public exclusif est désormais versée aux praticiens des hôpitaux à temps partiel et aux praticiens attachés. Son extension aux assistants des hôpitaux est envisagée. Les modalités d’une retraite surcomplémentaire pour les personnels enseignants ont, quant à elles, d’ores et déjà été améliorées.

Par ailleurs – c’est le deuxième levier –, il convient de relever les efforts réalisés afin d’améliorer les conditions d’exercice elles-mêmes. Les modalités d’indemnisation de la permanence des soins ont été revues afin de mieux prendre en charge le temps de travail accompli pendant les astreintes, et les modalités d’utilisation du compte épargne temps ont été améliorées.

En outre – c’est le troisième levier –, il faut citer l’amélioration de l’attractivité des carrières médicales, qui passe également par la diversification des modes d’exercice.

Le « pacte territoire-santé » mis en place par la ministre des affaires sociales et de la santé comporte douze engagements cohérents visant à apporter des solutions à ces situations au travers d’évolutions dans la formation et la facilitation de l’installation des jeunes médecins, et par la transformation des conditions d’exercice des professionnels de santé.

Le dispositif novateur proposé dans le pacte prévoit la possibilité, pour un praticien hospitalier, d’exercer une activité ambulatoire dans les territoires fragiles.

Les premiers résultats sont là, comme le montrent par exemple les débuts encourageants des praticiens territoriaux de médecine générale. Alors que ce dispositif est opérationnel depuis le 16 août, plus de cinquante contrats ont été signés, et cent sont en cours de signature. Dans les prochaines semaines, ce sont deux cents médecins généralistes qui viendront renforcer l’offre de soins dans les territoires fragiles.

Ensuite – c’est le quatrième levier –, je rappelle que les médecins à diplôme étranger sont accueillis en France conformément au droit européen, qui organise la reconnaissance automatique de la formation médicale de base et de la formation de médecin spécialiste des ressortissants de l’Union européenne. Les titulaires de diplômes acquis hors Union européenne exerçant en France sont, quant à eux, soumis à la procédure législative d’autorisation d’exercice qui prévoit un concours, un stage en établissement de santé, puis un passage en commission.

Une réflexion est en cours afin de faire évoluer la législation existante.

Enfin – c’est le cinquième levier –, des dispositifs de régulation au niveau de la formation ont été mis en œuvre.

Le doublement du numerus clausus qui avait été tant réclamé – passage de 3 850 à 8 000 places –, associé à la filiarisation des postes pour les épreuves classantes nationales a permis une hausse des effectifs d’internes en formation, notamment dans les spécialités dont la démographie médicale laisse présager des difficultés.

Voilà, monsieur le sénateur, tout un ensemble de mesures qui tendent à une amélioration de la situation dont vous avez dit à quel point elle était grave et pénalisante pour nos territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacky Le Menn

Madame la ministre, j’ai pris note avec beaucoup de satisfaction de toutes les dispositions qui sont actuellement mises en œuvre dans le cadre du pacte territoire-santé.

Néanmoins, je reviens sur le doublement du numerus clausus et aux 8 000 places, pour souligner que la formation d’un médecin requiert tout de même entre huit ans et dix ans. Lors de son instauration en 1971, le numerus clausus rendait possible l’admission en deuxième année de médecine de 8 588 étudiants ; en 1992, on était tombé à 3 500 !

Il faudrait donc augmenter ce numerus clausus beaucoup plus fortement encore pendant un certain nombre d’années, compte tenu du désert qui risque d’apparaître en médecine générale, comme c’est déjà le cas dans certaines parties du territoire, notamment dans votre département, madame la ministre. En effet, entre les départs en retraite et le moment où les étudiants sont en poste dans les établissements, il faut tenir compte de la durée incompressible des études.

Peut-être faut-il réfléchir au numerus clausus lui-même. La sévérité des notations qui conditionnent le passage en deuxième année est selon moi excessive. Les médecins issus des facultés de médecine d’autres pays européens ne sont pas moins bons – tant s’en faut parfois – que les nôtres. Cette question doit être revue profondément. Échouer deux fois à l’admission en deuxième année interdit toute poursuite des études de médecine, ce qui décourage beaucoup de candidats, puisque, ensuite, il n’y a pas véritablement de réorientation possible. Les futurs candidats essaient donc de trouver d’autres voies.

Cette sélection trop exigeante risque de nous pénaliser. Il faut remettre en chantier la réflexion sur le numerus clausus, au-delà de toutes les excellentes dispositions qui ont été prises et que vous avez bien voulu rappeler, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à Mme Anne Emery-Dumas, auteur de la question n° 537, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Émery-Dumas

Madame la ministre, comme beaucoup d’autres départements ruraux, la Nièvre se vide de ses médecins généralistes. Je souhaite attirer plus particulièrement votre attention sur une commune emblématique de la situation nivernaise, Imphy, l’une des communes les plus importantes du département et siège de l’industrie métallurgique locale.

Le dernier médecin installé à Imphy vient d’annoncer son départ. Depuis 2009, la commune s’est pratiquement vidée de ses quatre médecins, malgré l’implication financière et politique de la municipalité pour tenter d’inverser la situation. Les médecins qui ont remplacé ceux qui sont partis à la retraite ne sont pas restés.

Malgré le coût très élevé d’une telle démarche, la ville a pourtant décidé de recruter, via un cabinet de recrutement, ses propres médecins généralistes afin de stopper l’hémorragie. Or tous ces efforts ne peuvent enrayer le processus : en juillet dernier, le dernier médecin généraliste qui exerce à temps plein a fait savoir qu’elle ne resterait pas seule médecin de la commune après le départ de son collègue qui, actuellement, exerce à mi-temps.

Depuis plusieurs années, la commune a tout fait pour assurer l’implantation de nouveaux médecins, mais aujourd’hui, à Imphy comme dans d’autres communes rurales ou périurbaines, les élus sont découragés : leurs efforts se soldent par des échecs répétés.

Une grande partie de la population n’a plus de médecin traitant ; les médecins des communes environnantes, qui sont au maximum de leur quota, refusent de prendre de nouveaux patients ; l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de la commune, qui compte soixante-neuf lits, connaît de graves difficultés, qui ont d’ailleurs conduit le personnel et la direction à engager un mouvement de protestation relayé par la presse locale ; soixante et un patients de cet établissement sont actuellement sans médecin traitant et ont des problèmes très importants de suivi et de renouvellement d’ordonnance.

De plus en plus de communes souffrent de ne plus garantir à leurs administrés l’égalité d’accès aux soins médicaux. La situation d’Imphy n’est malheureusement pas unique dans la Nièvre et bon nombre de communes, bourgs-centres de bassin de vie ruraux, connaissent les mêmes difficultés.

Les autorités locales, les maires, les municipalités se sentent totalement désarmés pour lutter contre ce que l’on ne peut que nommer la « désertification médicale ».

Malgré les interventions de l’Agence régionale de santé, qui rencontre les élus dans le cadre de la préparation du pacte territoire-santé mis en place par Mme la ministre de la santé, peu de solutions sont trouvées pour résoudre les problèmes urgents que rencontrent les territoires.

L’attribution d’un poste de médecin territorial d’ici à juin 2013 a été sollicitée. Pourriez-vous soutenir cette première démarche, madame la ministre ? Elle ne suffira sans doute pas à régler la situation, mais constituerait un signal fort à l’adresse des élus engagés localement.

De manière plus globale, je vous demande, madame la ministre, quelles nouvelles mesures vous envisagez de prendre pour combattre les inégalités d’accès aux soins sur les territoires, pour stopper les départs de médecins généralistes et spécialistes que subissent nos départements et pour soutenir les élus locaux, qui tous les jours se battent pour faire vivre leurs communes.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Au préalable, je souhaite assurer M. Le Menn, ainsi que vous-même, madame Emery-Dumas, que je transmettrai à Mme la ministre de la santé les questions supplémentaires que vous aurez soulevées à l’occasion de cette séance.

La réponse que j’ai faite tout à l’heure à M. Le Menn vaut aussi en partie pour la situation que vous avez évoquée, madame la sénatrice, même si, bien sûr, je vais vous communiquer des informations propres à la Nièvre et à la commune d’Imphy, cette cité métallurgique où l’on rencontre certainement, compte tenu de l’industrie qui s’y est implantée, des pathologies particulières, notamment des maladies professionnelles.

La lutte contre la désertification médicale est une priorité pour le Gouvernement. La situation de la Nièvre, en particulier celle de la commune d’Imphy, illustre les réalités très concrètes auxquelles nous sommes confrontés.

Je le redis, le pacte territoire-santé mis en place par Mme Touraine prévoit douze engagements visant à apporter des solutions à ces situations, au travers d’évolutions dans la formation, par la facilitation de l’installation des jeunes médecins et par la transformation des conditions d’exercice des professionnels de santé.

Les premiers résultats, je l’ai dit tout à l'heure, sont là : cinquante contrats ont déjà été signés et cent sont en cours de signature. Ainsi, dans les prochains mois, deux cents médecins généralistes viendront renforcer l’offre de soins dans les territoires fragiles, dont le vôtre.

La mise en œuvre de ces actions a débuté en Bourgogne, région qui a un peu fait naître les projets. Ainsi, 100 % des étudiants de deuxième cycle feront un stage en médecine générale dès cette année. La médecine générale est la section où l’on a aujourd’hui le plus de difficultés puisqu’elle est devenue en soi une spécialité.

Douze postes de praticiens territoriaux de médecine générale ont été attribués à la région et seront effectifs avant la fin de l’année.

Le soutien à la création de maisons de santé a été renforcé ; trente seront en service à la fin de cette année.

Par ailleurs, le nombre de contrats d’engagement de service public a été augmenté et le dispositif étendu, ce qui est un fait nouveau, aux chirurgiens-dentistes, car la problématique de la désertification vaut également pour eux.

Pour assurer la mobilisation de tous les acteurs, l’ARS a mis en place dans chaque territoire de proximité un groupe d’animation territoriale. Ce groupe a vocation à réunir l’ensemble des acteurs de la santé, auxquels s’ajoutent les élus, les institutionnels, les professionnels de santé et les usagers, afin de mettre concrètement en œuvre ces orientations et les actions qu’elles impliquent.

Pour la Nièvre, notamment le pays Nevers – sud nivernais, une première réunion s’est déroulée le 23 septembre dernier afin de présenter la démarche, engager le travail de lutte contre la désertification et renforcer l’attractivité des zones fragiles. Au cours de cet échange, en présence du maire, la situation d’Imphy a pu être abordée et de premières pistes de réflexion ont été explorées. Une deuxième réunion de ce groupe de travail interviendra avant la fin du mois de novembre.

Enfin, madame la sénatrice, je relaierai auprès de ma collègue Mme Marisol Touraine la demande que vous avez formulée concernant l’attribution d’un poste de médecin territorial, de manière qu’au cours de cette rencontre du mois de novembre la demande très pressante et très précise qui est la vôtre puisse être entendue et prise en compte.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne Émery-Dumas

Madame la ministre, je vous remercie de bien vouloir relayer auprès de Mme Marisol Touraine la demande que j’ai formulée. Elle est effectivement très pressante, car la situation devient extrêmement difficile dans notre département.

Je crains d’ailleurs que le détachement de médecins hospitaliers pour des prestations obligatoires ne suscite également d’autres problèmes, les postes de médecins hospitaliers étant malheureusement loin d’être eux-mêmes pourvus.

L’action que nous menons s’agissant des maisons de santé, voire des maisons publiques de santé - un certain nombre de collectivités pensent à recréer ce que l’on appelait dans le temps des dispensaires, en embauchant directement des médecins - pourrait être une solution et recevoir le soutien du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Hervé Marseille, auteur de la question n° 538, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Madame la ministre, 2014 sera l’année du troisième plan cancer. Économiquement, cette année sera particulièrement difficile pour les établissements de santé dédiés à la lutte contre le cancer.

Malgré une bonne progression de l’activité dans les centres de lutte contre le cancer, on constate en 2012 un déficit de 0, 5 % des recettes, le plus élevé depuis 2008. Aussi les perspectives ne permettent-elles pas d’envisager un comblement de ce déficit, comme cela a été le cas entre 2008 et 2011. Douze des dix-huit centres ont prévu un résultat en 2013 encore plus déficitaire, de près de 4 % pour deux d’entre eux.

Il faut dire que le financement actuel à l’activité est extrêmement complexe : il se caractérise par une forte inertie et se révèle insusceptible d’accompagner les évolutions des pratiques.

L’enveloppe destinée aux missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation, les MERRI, qui sert à financer la validation des innovations et des activités de recours mises en œuvre de façon pionnière par les établissements de santé, est ridiculement petite : 35 millions d'euros pour l’ensemble des établissements de santé sur un ONDAM T2A de 56, 6 milliards en 2013, soit moins de 0, 01 %...

Les centres de lutte contre le cancer sont nombreux à mettre en œuvre des techniques ou des organisations nouvelles. Or, alors que ces innovations pourraient être source d’économies pour l’assurance maladie, elles accroissent paradoxalement aujourd’hui le déficit de ces établissements du fait de modalités de financement inadaptées.

Ainsi, dans le domaine de la radiothérapie, de nouvelles générations d’équipements permettent une irradiation plus précise de la tumeur, avec moins de séances. Pour les femmes atteintes d’un cancer du sein, par exemple, on passe de trente à quinze, voire à dix séances. Cependant, la diffusion de cette innovation, qui va manifestement dans l’intérêt du patient, est freinée par le financement à la séance, ce qui n’incite pas à en réduire le nombre.

Il en est de même dans le domaine de la radiologie interventionnelle, qui vise à délivrer un courant électrique de haute fréquence à travers la paroi thoracique et sous contrôle radiologique pour détruire des métastases, dans le poumon, par exemple, et à éviter des interventions chirurgicales. C’est donc un incontestable bénéfice pour le patient, qui ne subit pas une intervention lourde avec ouverture du thorax et évite ainsi les conséquences potentielles d’une telle opération, notamment la douleur. C’est également un bénéfice en termes budgétaires, puisque le coût d’un tel geste est estimé à 4 300 euros, contre 7 000 euros pour une thoracotomie.

Madame la ministre, ces interventions ne sont pas remboursées par l’assurance maladie. Par conséquent, les huit centres qui mettent en œuvre ces techniques perdent de l’argent, alors qu’ils proposent un meilleur traitement au patient !

Dernier exemple, dans le domaine de l’organisation des soins, des expérimentations d’infirmières de coordination financées par l’Institut national du cancer ont montré une amélioration du parcours de soins des malades et une moindre sensation de rupture entre l’hôpital et la ville. Les neuf centres concernés ont choisi de pérenniser ces postes d’infirmière sur leurs fonds propres, convaincus de leur utilité pour les malades. En revanche, pour ce qui est de leur budget, ils y ont perdu.

Ainsi, l’évolution des techniques et des organisations permet aujourd’hui de réduire le coût de la prise en charge médicale. Madame la ministre, de quelle façon le Gouvernement entend-il procéder à une réforme profonde du financement de la cancérologie, avec une politique publique de financement de l’innovation efficace et réactive, qui soit le moteur, et non le frein, de la lutte contre le cancer ?

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, à l’occasion d’une autre question orale, nous avons ce matin évoqué le fléau que représentent les accidents vasculaires cérébraux, mais le cancer est la première cause de mortalité. Mille nouveaux cas de cancers sont diagnostiqués quotidiennement en France et quatre cents personnes décèdent chaque jour.

De tels chiffres montrent l’absolue nécessité d’intervenir pour faire en sorte que l’incidence des cancers ne continue pas d’augmenter, comme c’est le cas ces trente dernières années. Il faut que, grâce aux progrès thérapeutiques et à des diagnostics plus précoces, la mortalité continue à reculer.

Face à l’ampleur de l’enjeu, deux plans cancer se sont succédé depuis 2003. Le prochain plan cancer devra conforter les avancées réalisées, développer les pistes explorées et engager de nouvelles initiatives afin que de nouveaux progrès soient réalisés. C’est ce que vous appelez de vos vœux, monsieur le sénateur, dans le cadre des innovations purement médicales ou de celles qui sont attachées à la profession d’infirmière. Dans tous les cas, cela suppose des budgets.

Dans ce cadre, les vingt centres de lutte contre le cancer jouent un rôle majeur. Ils traitent en effet 10 % des patients atteints de cancer, en particulier 30 % des femmes atteintes d’un cancer du sein. Ils contribuent par ailleurs fortement à l’innovation et au développement de nouvelles modalités de prise en charge, adaptées aux patients.

Monsieur le sénateur, vous vous interrogez sur l’adaptation de la tarification à l’activité, la T2A, à l’innovation et à l’évolution des modalités de prise en charge. Comme vous le savez, Marisol Touraine a engagé à la fin de l’année 2012, dans le cadre d’un comité de réforme de la tarification hospitalière, une réflexion sur l’évolution des modalités de financement des établissements de santé.

Dans ce cadre, deux mesures relatives aux problématiques que vous avez évoquées sont prévues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 : d’une part, l’expérimentation d’un nouveau modèle de financement sur certains champs qui s’y prêtent plus particulièrement, telle la radiothérapie ; d’autre part, l’accélération de la prise en compte des actes et pratiques innovants dans le modèle de financement.

Bien évidemment, ces premières propositions n’épuisent pas le sujet. La ministre est tout à fait ouverte aux suggestions qui pourraient lui être soumises.

La réflexion se poursuivra dans les prochains mois. La question des chimiothérapies, avec le développement de la chimiothérapie orale et l’impact du transfert vers la ville, ainsi que celle de la chirurgie carcinologique feront l’objet d’un véritable travail collectif.

Cette réflexion portera notamment sur les conditions d’une remontée d’informations permettant un état des lieux et une visibilité des évolutions des actes ou techniques de prise en charge en cancérologie. Elle concernera aussi l’amélioration de la prise en compte de la diversité des modes de prise en charge : consultations pluridisciplinaires ou longues, hôpitaux de jour avec peu d’actes techniques, mais un fort accompagnement psychosocial, etc.

Monsieur le sénateur, j’ai bien entendu vos observations. Je les relayerai également auprès de ma collègue, car elles contribuent à nourrir la réflexion et sont aujourd’hui porteuses d’un véritable espoir pour l’ensemble de nos malades touchés par ce fléau.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Marseille

Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions. Elles conforteront sans nul doute tous les acteurs de ces établissements de santé, qui travaillent au quotidien pour lutter contre ce fléau - vous en avez rappelé les ravages : quatre cents morts par jour – et qui sensibilisent chaque jour davantage les familles. Hélas ! aujourd'hui, personne n’est épargné et chacun connaît malheureusement dans son entourage ou parmi ses proches une personne atteinte de cette terrible maladie.

Les établissements de santé novateurs doivent pouvoir continuer à prendre de l’avance. En attendant que se mettent en place les dispositions prévues par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 et que les évaluations d’expérimentations soient menées, il convient d’envisager des mesures-cadres spécifiques pour financer l’innovation, sans mettre en péril l’équilibre budgétaire de ces centres pionniers, qui accomplissent un travail d’exploration extrêmement important pour les autres établissements de santé.

Sur la réduction du nombre de séances de radiothérapie et ses incidences en matière de tarification, la sophistication des techniques et les contraintes liées au respect des normes de qualité et de sécurité entraînent un allongement de chaque séance qui obère la possibilité d’augmenter le nombre global de patients traités. C’est une préoccupation qu’il faut garder à l’esprit.

Madame la ministre, je compte sur vous pour transmettre les inquiétudes que j’ai exprimées à votre collègue Marisol Touraine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Antoine Lefèvre, auteur de la question n° 558, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Madame la ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur le statut de nos collègues élus locaux bénéficiaires d’une pension d’invalidité. Je me fais leur relais au Sénat en ma qualité de président de l’Union des maires de l’Aisne, département dont je suis l’élu et qui, comme vous le savez, compte 816 communes.

Ce dossier récurrent, sur lequel plusieurs questions écrites ont été déposées depuis 2011 – toujours sans réponse ! –, suscite de plus en plus de remarques de la part de nos élus.

Les bénéficiaires d’une pension d’invalidité sont autorisés à reprendre un travail sans perdre cette pension, dès lors que leur salaire se situe dans la limite de celui qu’ils percevaient avant de devenir invalides, augmenté d’un coefficient fixé par décret. Or, s’ils sont élus, par exemple en qualité de maire adjoint, la sécurité sociale considère qu’ils sont dans la même situation que s’ils reprenaient un travail et ils perdent dès lors le versement de leur pension d’invalidité, avec tous les accessoires rattachés. Par conséquent, ils seraient contraints de choisir une seule des deux sources de revenus.

Or comment analyser les indemnités qui sont censées compenser les frais inhérents à l’exercice d’un mandat politique, montant déterminé par le code général des collectivités territoriales, et la pension d’invalidité, qui vise à la prise en charge par la solidarité nationale des contraintes liées à la situation d’invalidité ?

La législation actuelle peut être considérée comme source d’inégalités entre élus selon leur situation sociale et perçue comme une discrimination envers les personnes handicapées, qui ne peuvent, de ce fait, s’impliquer dans la vie politique.

Récemment, certains élus handicapés percevant l’allocation aux adultes handicapés, l’allocation de logement sociale ou l’allocation de logement familiale, ont vu la caisse d’allocations familiales prendre en compte leurs indemnités d’adjoint pour reconsidérer le montant de leurs ressources. La CAF a d’ailleurs décidé, d’une part, de supprimer le versement de l’AAH et, d’autre part, de réclamer le remboursement du trop-perçu, qui s’élève à plusieurs milliers d’euros.

Je vous relaterai le cas d’un maire adjoint handicapé d’une commune d’un peu plus de 1 700 habitants de mon département bénéficiant de l’AAH, de l’ALS et de la majoration pour la vie autonome. Au mois de juillet 2013, la CAF lui a envoyé un courrier lui annonçant un réexamen de ses droits depuis le mois juillet 2011, soit près de deux années rétroactivement. Résultat, la CAF lui demande aujourd'hui le remboursement de plus de 3 000 euros et procède à des retenues sur ses allocations.

Cette situation est insupportable pour ces élus, actifs dans leur délégation, qui se voient pénalisés du fait de leur handicap ! En outre, cela est de nature à décourager les bonnes volontés qui acceptent encore d’assumer les charges municipales.

Je m’étonne d’autant plus de cette situation que, le 11 octobre dernier, dans le cadre de la discussion du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, l'Assemblée nationale a voté à l’article 12 un amendement du Gouvernement qui clarifie le fonctionnement du cumul emploi-retraite pour les indemnités des élus locaux. En effet, depuis le 1er janvier 2013, ceux-ci sont affiliés au régime général d’assurance vieillesse.

Marisol Touraine a expliqué que « l’application du principe de non-ouverture de nouveaux droits en cas de cumul emploi-retraite conduirait les élus locaux souhaitant liquider leurs retraites à mettre fin à leur mandat ». Je la cite toujours : « Les élus locaux déjà pensionnés du régime général d’assurance vieillesse n’ayant pas atteint l’âge légal ou ayant liquidé leur retraite sans pour autant justifier du taux plein, se trouveraient placés dans une situation de cumul emploi-retraite plafonné et pourraient voir le service de leurs pensions de retraite suspendu en cas de dépassement du plafond. Cela interviendrait alors même que le mandat d’élu local n’est pas une activité salariée. Il est donc proposé d’introduire une dérogation au fonctionnement du cumul emploi-retraite : les indemnités d’élu local, au même titre, par exemple, que les activités à caractère artistique, littéraire, scientifique ou juridictionnel, ne seront pas considérées comme des ressources au sens du cumul emploi-retraite. » Ce sont les propres termes de la ministre !

Madame la ministre, ce qui est possible pour le cumul emploi-retraite par les élus locaux doit être possible pour le cumul des allocations d’invalidité de ces mêmes élus locaux ! Il paraît nécessaire, et évident, d’exclure les indemnités des élus du calcul des revenus suspendant la pension d’invalidité.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, je répondrai à cette très bonne question en vous transmettant les informations que m’a communiquées la ministre des affaires sociales et de la santé. Cela étant, en tant que ministre chargée des collectivités territoriales, je suis particulièrement sensible au sujet que vous avez évoqué et je ne manquerai pas de m’y intéresser avec une attention particulière, notamment dans le cadre de la réflexion à venir sur le statut de l’élu local.

Les allocations de solidarité, comme l’allocation aux adultes handicapés ou l’allocation de logement sociale, constituent un filet de sécurité pour toutes les personnes qui disposent de faibles ressources du fait de leur handicap. Elles visent à permettre à ces dernières d’avoir des conditions de vie décentes.

L’allocation aux adultes handicapés est versée sous condition de handicap. Le critère est un taux d’incapacité permanente de 80 % ou compris entre 50 % et 80 %, avec une restriction substantielle et durable d’accès à l’emploi.

Son versement dépend également des ressources du demandeur et de son conjoint, concubin ou partenaire de PACS : elles ne doivent pas dépasser 9 482 euros pour une personne seule et 18 964 euros pour une personne en couple.

Toute évolution de la situation de l’allocataire – union, séparation, naissance d’un enfant, reprise d’emploi même à temps partiel, arrivée à l’âge de la retraite – est donc susceptible de modifier le versement de l’allocation aux adultes handicapés. Il en va de même pour l’allocation de logement sociale, également versée sous condition de ressources.

Une personne en situation de handicap, si elle perçoit une rémunération en tant qu’élu local, voit ses revenus augmenter. Le montant des allocations en est d’autant diminué.

Les conséquences d’une reprise d’activité ou d’un mandat donnant lieu à une rémunération sont les mêmes pour les allocataires du revenu de solidarité active. Il n’y a donc pas d’inégalité entre les élus percevant un minimum social, qu’ils soient ou non en situation de handicap.

Ces règles n’entraînent pas non plus d’inégalité avec les élus qui exerçaient une activité professionnelle avant leur mandat, et qui continuent d’ailleurs souvent de l’exercer pendant leur mandat.

Telles sont les éléments de réponse que je pouvais vous apporter aujourd’hui, monsieur le sénateur. Je serai bien entendu très vigilante et je n’hésiterai pas à me reporter aux propos de Mme la ministre des affaires sociales que vous avez bien voulu citer, monsieur le sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, même si j’ai bien compris qu’il s’agissait plutôt de celle que les services de Mme la ministre de la santé lui ont préparée, et qui ne peut me donner entière satisfaction, dans la mesure où elle vient contredire selon moi les propos que Mme la ministre a tenus.

Pour autant, je retiens votre engagement, madame Escoffier, vous qui êtes tout spécialement chargée des collectivités territoriales, d’examiner de plus près cette question du cumul des indemnités de fonction avec une pension d’invalidité dans le cadre du prochain projet de loi relatif au statut de l’élu. Ce serait l’occasion, en effet, de nous pencher sur ces inégalités au moment où nous nous apprêtons, au printemps prochain, à connaître une vague de renouvellement des élus municipaux. J’espère que les candidats seront nombreux, car la mission est de plus en plus complexe. Il ne faudrait pas donner le sentiment que certains de nos concitoyens sont traités de façon discriminatoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Philippe Bas, auteur de la question n° 596, adressée à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Madame la ministre, le Parlement a adopté, le 5 mars 2007, une nouvelle loi relative à la protection juridique des majeurs, dont la philosophie consistait à ne pas enfermer dans le statut d’incapables majeurs des centaines de milliers de nos compatriotes lorsque la mesure de protection se justifiait par un état temporaire. Jusqu’alors, en effet, les tutelles et les curatelles restaient définitivement applicables aux personnes à l’endroit desquelles le juge les avait prononcées.

La loi de 2007 a conduit à remettre en question et à réexaminer régulièrement les mesures de protection.

Ce texte, que j’ai eu l’honneur de défendre au nom du Gouvernement devant le Parlement, et qui a été adopté sans aucune opposition, traitait également le cas des personnes qui, à la date de l’entrée en vigueur de la loi, bénéficiaient d’une mesure de protection. Le législateur a estimé que ces personnes devaient, elles aussi, voir leur statut réexaminé au bout d’un certain délai.

Le premier délai était manifestement trop court pour que les juges puissent revoir toutes les situations. Un second délai a donc été fixé par le Parlement, qui a reporté de trois ans la première échéance.

Ce second délai expire le 31 décembre prochain, et nous savons, par une enquête de la Direction des services judiciaires, qu’il y a actuellement plus de 100 000 personnes bénéficiant d’une mesure de protection dont la situation n’aura pas été réexaminée au 31 décembre. Or il s’agit d’une date couperet : toutes les personnes dont la situation n’aura pas été réexaminée à cette date verront la mesure de tutelle tomber, alors même que celle-ci reste nécessaire dans la plupart des cas. Ce serait alors, pour ces personnes en grande difficulté personnelle, entrer dans un univers inconnu et dangereux.

Le Gouvernement compte-t-il prendre des mesures pour reporter une nouvelle fois cette échéance du 31 décembre ? Dans l’affirmative, il doit le faire dans des conditions qui permettront effectivement de réexaminer toutes les situations, afin que les personnes qui auraient recouvré leurs facultés puissent échapper à la mise en œuvre les concernant des mesures de protection les plus fortes.

Debut de section - Permalien
Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée auprès de la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique, chargée de la décentralisation

Monsieur le sénateur, je vous remercie de soulever un véritable problème au regard des tutelles et des curatelles.

Il n’est pas question de remettre en cause le bien-fondé de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs, quelles que soient les difficultés que puissent poser la nouvelle date limite du 1er janvier 2014 prévue par le législateur pour le réexamen des mesures de protection ouvertes avant le 1er janvier 2009, sous peine de caducité.

Au regard de l’importance du volume de dossiers à renouveler – au 1er janvier 2009, 629 078 mesures devaient faire l’objet d’une révision dans les 304 tribunaux d’instance et les 4 tribunaux de première instance –, il y avait là un défi de taille pour les juridictions. Au 31 décembre 2012, 29, 1 % de ces mesures restaient encore à renouveler. Ces chiffres montrent la gravité de la situation.

Dès sa prise de fonction, la garde des sceaux, qui m’a par ailleurs priée de bien vouloir excuser son absence ce matin, monsieur Bas, a été sensibilisée à ce problème et aux inquiétudes des juridictions compétentes pour faire face à cette charge, d’autant qu’il s’agit d’une loi d’une portée sociétale essentielle, qui vise à protéger des personnes vulnérables ou substantiellement vulnérables.

L’évolution de la situation a été suivie avec une extrême attention par le ministère de la justice, qui a veillé à apporter des réponses.

Des moyens ont en effet été mis à disposition des services des tutelles pour assurer la résorption du stock : affectation de magistrats et de greffiers placés, d’assistants de justice et de vacataires, décharge des juges d’instance à l’activité du tribunal de grande instance. En s’appuyant sur ces moyens, ces juges ont fourni un effort remarquable, qu’il faut saluer, si bien qu’une nouvelle mesure de report ne paraît plus nécessaire.

Au 30 septembre 2013, 48 875 mesures restaient à renouveler, et non pas 100 000, comme vous l’avez indiqué. Les projections au 31 décembre prochain font apparaître que de 1 % à 2, 7 % des mesures seulement n’auront pas été renouvelées.

La Direction des services judiciaires travaille désormais pour examiner la nature de ces mesures. En effet, il est apparu que les services des tutelles n’étaient pas en situation de procéder à la révision de certaines d’entre elles du fait de l’impossibilité de convoquer les parties, le plus souvent en raison de l’ancienneté de la mesure ou de déménagements successifs. Nous nous heurtons là à des réalités concrètes.

En tout état de cause, le travail accompli par les juges et les fonctionnaires pour permettre le renouvellement de ces mesures mérite encore une fois d’être souligné et salué.

Par ailleurs, les attentes des juges des tutelles et des associations qui ont fait remonter les lacunes ou difficultés d’application de la loi du 5 mars 2007 ont été véritablement entendues.

Dans le cadre de l’avant-projet de loi habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnances en matière de simplification du droit et des procédures, qui doit être présenté prochainement en conseil des ministres, Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, est prête à apporter plusieurs modifications à la loi du 5 mars 2007 pour alléger ou supprimer les contraintes non nécessaires.

Il s’agirait tout d’abord de permettre au juge de prononcer, sous certaines conditions, des mesures initiales pour une durée supérieure à cinq ans. Cette mesure permettra d’alléger la charge de travail des services des tutelles pour les années à venir, mais répondra surtout à une forte demande des familles et associations, qui comprenaient parfois mal la nécessité d’une révision quinquennale lorsque l’état de santé du majeur protégé ou son handicap ne permettait pas d’entrevoir d’évolution.

Il s’agirait ensuite de modifier les modalités d’arrêt du budget et de contrôle des comptes de gestion des mesures de protection.

Le ministère envisage aussi de substituer, dans les circonstances prévues à l’article 426 du code civil, l’avis d’un médecin extérieur à l’établissement d’accueil au certificat médical circonstancié prévu à l’article 431 du code civil.

Enfin, un nouveau dispositif d’habilitation serait prévu au bénéfice de certains membres de la famille d’un majeur protégé permettant, sous certaines conditions, d’éviter le prononcé d’une mesure de protection judiciaire.

L’effort ponctuel et intense qui a été fourni pour aboutir à la révision de la quasi-totalité des mesures – il n’en resterait plus que de 1 % à 2, 3 % à examiner, je le rappelle – ainsi que les réformes de fond qui sont envisagées laissent entrevoir une nette amélioration des conditions de mise en œuvre de cette loi.

Même s’il ne répond pas à toutes vos préoccupations, monsieur le sénateur, ce dispositif comporte de vraies voies d’amélioration, autant pour les personnes qui souffrent que pour leurs accompagnants.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Votre réponse me rassure, madame la ministre. Depuis la parution de l’étude de la Direction des services judiciaires, on a le sentiment que les juges et les services du ministère de la justice ont en effet mis les bouchées doubles, et c’est heureux.

Les situations résiduelles que vous mentionnez sont sans doute, pour beaucoup d’entre elles, liées aux difficultés concrètes que vous avez rappelées. Ce n’est d’ailleurs pas une raison pour ne pas rechercher un traitement individuel de chacune de ces situations, puisqu’il subsistera inévitablement certains cas extrêmement sensibles où la mesure pourrait tomber alors que son bénéficiaire en aurait toujours besoin.

Vous mentionnez aussi un certain nombre de dispositions que Mme la garde des sceaux a l’intention de proposer pour simplifier les procédures en cours. Je n’y suis pas hostile, à condition toutefois de ne pas remettre en cause le principe d’une révision régulière, à tout le moins pour les situations évolutives. Je conçois que, dans le cadre de la maladie d’Alzheimer ou d’autres affections mentales, on ne puisse guère espérer d’amélioration et que les renouvellements de mesures ne s’imposent pas de la même manière que dans le cas des personnes ayant subi un accident de la vie, dont on peut espérer qu’elles recouvreront leurs capacités.

Si l’on prend ce type de dispositions, on doit veiller à ce qu’elles n’aient pas pour conséquence d’empêcher la prise en compte d’éventuelles améliorations de la situation des personnes concernées. Nous serons bien entendu extrêmement vigilants quant aux caractéristiques techniques et juridiques des dispositions sur lesquelles Mme la garde des sceaux travaille actuellement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je vous remercie, madame la ministre déléguée, d’avoir passé la matinée en notre compagnie et d’avoir répondu, avec tout le brio et l’enthousiasme qui vous caractérisent, aux questions de nos collègues !

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente, pour la suite de la discussion du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Charles Guené.