Au travers de cet amendement – nous en défendrons ultérieurement d’autres qui relèvent du même esprit –, nous revenons sur une idée simple : au moment où l’on réfléchit sur le long terme des retraites pour les régimes obligatoires de salariés qui dépendent d’un employeur, que cet employeur soit l’État ou une entreprise privée – une situation évidemment distincte des personnes qui sont leur propre employeur et qui assume un risque économique –, rapprochons les salariés qui ont un employeur et efforçons-nous d’établir ensemble la démonstration que les régimes sont identiques.
Or vous ne parvenez pas à être crus en dehors de vos troupes les plus fidèles. Pourquoi ? Parce que, comme l’a évoqué hier Philippe Bas au cours de la discussion, la situation des fonctionnaires est très variable selon l’importance relative des primes accordées par le ministère. C’est un facteur considérable.
Nous le savons tous, à Bercy, les primes sont importantes. D’ailleurs, ce n’est pas complètement anormal. En effet, les salaires de la fonction publique doivent évidemment tenir compte des salaires du secteur privé pour éviter une très grande évaporation des fonctionnaires. C’est particulièrement vrai pour les fonctionnaires du ministère des finances dans la mesure où un certain nombre d’entre eux, par les responsabilités économiques qu’ils assument, notamment dans les services fiscaux, peuvent être tentés ou séduits par le privé. En tout cas, ils sont courtisés par des employeurs privés, qui recherchent la compétence de ces hauts fonctionnaires. L’État employeur parvient à garder ses hauts fonctionnaires en leur versant des primes, puisque le statut général lui interdit de leur accorder des avantages structurels. Cependant, ces primes disparaissent de l’assiette du calcul des retraites, et seule la prise en compte des six derniers mois leur permet d’avoir une retraite à peu près convenable.
En définitive, il y a peut-être une égalité de traitement, comme vous le soutenez, madame la ministre, mais l’État employeur est contraint, du fait de ses propres défaillances, à rémunérer ses fonctionnaires d’une manière hasardeuse, incertaine et trop peu transparente ; il en résulte qu’au moment de la retraite nos compatriotes salariés du secteur privé éprouvent un sentiment d’inégalité par rapport aux agents du secteur public.
En fait d’explications, madame la ministre, s’autoriser de la commission Moreau me paraît parfaitement insuffisant !
Pour ce qui nous concerne, nous comptons bien poursuivre ce débat en présentant d’autres amendements ayant le même objet que celui-ci. Nous y sommes d’autant plus déterminés qu’une disposition du projet de loi, que nous examinerons ultérieurement, semble créer une nouvelle différence à l’avantage des fonctionnaires ; j’espère qu’il ne s’agit que d’une impression.
Madame la ministre, qu’avez-vous à perdre à jouer cartes sur table ?
En vérité, l’État employeur, en s’arrangeant avec le statut général de la fonction publique pour tenir compte des réalités, place ses fonctionnaires dans la situation d’être mis en accusation.