Malgré le maintien de la notion de « seuils », particulièrement floue, je salue le premier pas que constitue ce texte en matière de pénibilité. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si c’est un de ses aspects, madame la ministre, qui a obtenu le soutien des organisations syndicales. Nous voudrions, dans cet esprit, contribuer à renforcer les avancées qu’il permet.
Certains considèrent, je le sais, que nous sommes méfiants à l’égard des chefs d’entreprise. Pourtant, au cours de l’examen de ce projet de loi, nous avons avancé des propositions qui permettraient d’encourager certains employeurs, notamment celle visant à moduler les cotisations sociales. L’idée, en bref, est d’encourager les entreprises vertueuses en matière d’emploi, de formation professionnelle et d’égalité entre les femmes et les hommes, et de décourager les chefs d’entreprises voyous, ceux qui ne sont que peu ou pas respectueux des normes sociales et environnementales.
La prise en compte de la pénibilité par la fiche individuelle de prévention des expositions aux risques professionnels, qui suivra le salarié dans tout son parcours professionnel, est une bonne chose. Mais l’expérience prouve – pensons à l’égalité professionnelle, mes chers collègues ! – que des mesures non contraignantes ne sont pas appliquées, aussi justes soient-elles. Or les salariés auront un besoin impérieux de cette fiche, qui permet la traçabilité de leur exposition à la pénibilité. En détenant ce document, qui est opposable, ils pourront justifier de leur histoire de vie au travail.
Il y a fort à parier que les chefs d’entreprise, s’ils doivent respecter cette obligation sans s’exposer à une sanction, auront tendance à minimiser l’exposition à la pénibilité du salarié ou à oublier de lui remettre sa fiche individuelle à son départ.
La peine que nous proposons n’est pas exorbitante, mais elle peut être dissuasive. Alors, ne nous privons pas d’offrir aux salariés une sécurité, une garantie, un « filet social » supplémentaires. De notre point de vue, madame la ministre, le nouvel acquis, que vous souhaitez introduire par la loi, a besoin d’être consolidé.