Cet article prévoit la présentation au Parlement avant 2020 d’un rapport sur l’évolution des conditions de pénibilité auxquelles les salariés sont exposés. Il prévoit également qu’une actualisation des critères de pénibilité, définis par le code du travail, peut intervenir après consultation des organisations syndicales.
Ce rapport est une bonne chose. Il faut cependant être vigilant, pour que la dimension « genrée » de la pénibilité au travail ne soit pas ignorée.
Dans le rapport d’information qu’elle a adopté à l’unanimité, Femmes et travail : agir pour un nouvel âge de l'émancipation, la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes avait souligné l’invisibilité de la pénibilité des métiers féminins.
Il n’est pas inutile de nous arrêter quelques instants sur le sujet et de citer les termes de ce rapport.
« Dans une vision restée très masculine de l’organisation du travail, les emplois occupés par les femmes sont considérés, a priori, comme moins lourds, moins astreignants, moins pénibles, et moins dangereux que ceux occupés par les hommes. De ce fait, la dureté des emplois féminins reste systématiquement sous-évaluée », y compris par les femmes elles-mêmes.
« Les responsables de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail ont présenté un exemple concret, tiré d’une enquête réalisée par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES. À la question : Portez-vous des charges ? , un homme qui soulève des colis de vingt kilos répondra positivement. Mais une femme travaillant dans le secteur des soins à la personne et qui est amenée à soulever des patients bien plus pesants aura tendance à répondre négativement.
« Autrement dit, la construction de l’appareil statistique concourt à l’invisibilité des pénibilités et des risques des emplois à prédominance féminine. »
C’est pourquoi la délégation sénatoriale aux droits des femmes, saisie de ce projet de loi, a tenu à insister une fois de plus sur l’insuffisante prise en compte des facteurs spécifiques de pénibilité auxquels les femmes sont exposées.
À cet égard, notre délégation a adopté trois recommandations dans son rapport d’information.
La première recommandation, relative à l’articulation entre amplitude horaire, temps partiel et pénibilité, n’a pas pu prospérer, l’article 40 ayant été invoqué.
La deuxième vise à assurer que les négociations s’appuient sur des statistiques adaptées aux facteurs de pénibilité auxquels les femmes sont spécifiquement exposées. Ces données chiffrées devraient mettre un terme à cette sous-évaluation systématique de la pénibilité au féminin.
La troisième vise à garantir que les renégociations avec les partenaires sociaux sur l’actualisation des facteurs de pénibilité définis dans le code du travail seront menées sur la base d’une représentation équilibrée des hommes et des femmes. Cet objectif relève à nos yeux de l’évidence.
Mes chers collègues, ces deux recommandations vont être présentées par Mme la rapporteur. Je vous invite naturellement à adopter l’amendement afférent.