Intervention de Leila Aïchi

Réunion du 31 octobre 2013 à 15h00
Questions d'actualité au gouvernement — Défense des ong environnementales

Photo de Leila AïchiLeila Aïchi :

Ma question s’adressait à M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères.

Depuis six semaines, l’équipage de l’Arctic Sunrise, navire de l’ONG Greenpeace, est en détention provisoire dans la prison de Mourmansk, en Russie. Son crime : avoir dénoncé, de manière non violente, les projets de forage de la société Gazprom au-delà du cercle polaire.

Pouvons-nous laisser condamner des citoyens lanceurs d’alerte, accusés parce qu’ils refusent le saccage de l’Arctique ? Bien évidemment, non !

L’Arctique abrite un écosystème fragile et unique au monde, et de nombreuses espèces protégées y vivent ; elles sont en voie de disparition, alors qu’elles sont nécessaires – ô combien ! – au devenir de l’humanité. Mes chers collègues, songez que, en trente ans, la superficie moyenne de la banquise est passée de 6, 5 à 3, 4 millions de kilomètres carrés, soit une diminution équivalente à près de cinq fois la superficie totale de la France !

Or, dans la mesure où la banquise réfléchit les rayonnements solaires et contribue directement à la régulation des températures, sa disparition marquerait un point de non-retour dans le réchauffement climatique ; elle provoquerait la montée du niveau des eaux et l’acidification des océans, ce qui affecterait nécessairement les ressources halieutiques.

L’Arctique, qui renfermerait 22 % des réserves mondiales d’hydrocarbures, fait l’objet d’une sinistre convoitise de la part des groupes pétroliers et miniers. Plus grave encore : l’accroissement inéluctable des stress environnementaux et énergétiques dans cette région du monde sera source, à terme, de tensions et de conflits ; c’est la raison pour laquelle nous autres, écologistes, plaidons en faveur du concept de green defense.

Alors que, dans deux semaines, la communauté internationale débattra à Varsovie des moyens de faire face au réchauffement climatique, le Premier ministre, actuellement à Moscou, ne peut ignorer les activités néfastes pour l’environnement des groupes pétroliers, notamment de Gazprom, poids lourd de l’industrie russe. Il semblerait qu’il ait prévu d’évoquer le sujet avec les autorités russes. Dont acte !

Il est impératif que notre diplomatie use de toute son influence pour libérer les trente prisonniers et lancer un nouvel élan international en faveur d’une convention maritime mieux adaptée aux problèmes d’aujourd’hui.

Madame la ministre, l’Arctique ne doit pas être un enjeu géoéconomique. Seule la sanctuarisation de cette zone permettra, à terme, de prévenir les risques inhérents à l’exploitation massive des matières premières et à la pêche industrielle, comme les marées noires, et de pallier ainsi les insuffisances de la convention de Montego Bay.

Devant l’indifférence coupable des nations et le dramatique silence de l’ONU et de l’Europe, les ONG environnementales mènent, parfois au péril de la vie de certains militants, une action essentielle pour le bien-être des générations futures et pour la survie de l’humanité. Les « Trente de l’Arctique » ont d’abord été injustement qualifiés de terroristes, de pirates, de hooligans et de vandales ; en réalité, ces militants sont des héros !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion