Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 4 novembre 2013 à 21h30
Avenir et justice du système de retraites — Article 20

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

Certes, l’article 20 représente une avancée. Comme il a été indiqué, il s’agit de mettre en œuvre un objectif que la loi de 2003 avait fixé, mais qui n’avait pas pu être atteint. Il n’y a donc aucun malentendu sur le fond : c’est bien dans cette direction qu’il faut cheminer. Simplement, le financement de telles mesures n’est pas clairement identifié ou, devrais-je dire, n’est pas identifié du tout.

Ce que nous savons pour l’instant du projet de financement de la sécurité sociale nous laisse à penser que la revalorisation du minimum retraite dans l’agriculture sera assurée par des prélèvements sur les seules recettes du monde agricole, en particulier de l’exploitation collective. Je pense principalement aux GAEC. Or ce point nous préoccupe. Voilà pourquoi, tout comme M. Watrin, nous ne pouvons pas partager votre optimisme et votre enthousiasme.

S’il s’agit de faire payer la revalorisation des retraites agricoles par les seuls revenus agricoles d’aujourd'hui, il y a tout de même une forme d’injustice, liée aux démographies relatives du monde paysan et de la société française.

Au début des Trente Glorieuses, dans les années cinquante, le monde paysan au sens large représentait, de mémoire, 20 % des actifs, contre moins de 3 % aujourd'hui. Cela signifie que l’exode rural des exploitants, des salariés agricoles ou des aides familiaux a contribué de manière décisive au développement de l’industrie et des services. Leurs enfants – en général, les familles sont plus nombreuses dans le monde agricole que dans le secondaire ou le tertiaire – sont également devenus des salariés de l’industrie ou des services, cotisant donc au régime général.

En d’autres termes, le monde agricole a très largement abondé sur le plan démographique – je reviens toujours au concept d’équilibre démographique – le salariat industriel ou des services. Ce phénomène, même s’il a permis une réduction des effectifs, ainsi sans doute que des gains de productivité, et s’il s’est accompagné d’une indépendance agricole et de réussites à l’exportation, a privé les vieux agriculteurs de recettes qui auraient permis d’améliorer la situation des retraités de l’agriculture.

Certes, le budget annexe des prestations sociales agricoles, ou BAPSA, de vieille mémoire, a permis, par la compensation démographique, d’apporter un soutien aux retraites agricoles. Cependant, selon les informations dont nous disposons à ce stade sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale – je me tourne vers mon collègue Jean-Noël Cardoux, qui a suivi plus particulièrement ce dossier –, ce sont aujourd'hui, semble-t-il, les revenus agricoles existants qui apporteront l’essentiel du financement de ce complément.

Pourtant, au nom de la solidarité nationale, en particulier de la compensation démographique, il eût été logique que les agriculteurs en financent, certes, une partie, mais pas l’essentiel. En effet, c’est le monde agricole qui, par les transferts massifs d’actifs ayant quitté ce secteur, a longtemps permis, et permet aujourd'hui encore, le financement des retraites des vieux salariés de l’industrie ou des services.

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