Intervention de Joël Labbé

Commission du développement durable, des infrastructures, de l'équipement et de l'aménagement du territoire — Réunion du 6 novembre 2013 : 1ère réunion
Mieux encadrer l'utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

Je salue le travail de Ronan Dantec sur ce texte dans un délai court. Le calendrier était en effet dicté par l'initiative Parlement et citoyens, puisque nous avons soumis cette proposition de loi à la consultation du public à travers cette initiative. J'ai déposé cette proposition de loi dans la continuité de la mission commune d'information du Sénat sur les pesticides et leur impact sur la santé. Il s'agissait de ma première mission, j'ai découvert la méthode de travail du Sénat, riche et pluripolitique. J'ai été admiratif de la manière de travailler du duo moteur de cette mission, Sophie Primas et Nicole Bonnefoy. Le rapport a été approuvé à l'unanimité. Il ne portait pas sur l'impact pour l'environnement, bien que les pesticides aient un impact avéré sur l'air, l'eau, le sol ; la biodiversité, à toutes les échelles, depuis la flore microbienne du sol jusqu'aux oiseaux en passant par les insectes, notamment les pollinisateurs, est touchée. Le plancton, qui est à la base de la chaîne marine, est également très affecté par ces produits sur tout le littoral.

Il y a un coût important de dépollution des eaux. Comme l'a dit Ronan Dantec, l'impact de ces produits sur les voiries et les trottoirs est plus important car ils passent directement dans les eaux. Le coût de dépollution annuel est estimé entre 4,4 et 14,8 milliards d'euro, uniquement pour la pollution induite par les pesticides. Un nouveau rapport de l'Inserm intitulé « Pesticides : effet sur la santé », publié en 2013, conclut aux conséquences provoquées par les pesticides en termes d'allergies, de cancers et d'altération du développement de l'enfant.

Cette proposition de loi est volontairement très simple. Elle sera enrichie par les amendements du rapporteur. Elle ne touche pas aux aspects agricoles de l'usage des pesticides qui seront traités dans la loi d'avenir pour l'agriculture française. Il n'est pas facile d'interdire l'utilisation des produits phytosanitaires dans l'agriculture car il y a des enjeux économiques et socioéconomiques. C'est pourquoi ce texte se concentre sur les usages non agricoles. Les collectivités n'ont, en effet, pas un besoin vital d'utiliser les pesticides. Près de 10 % d'entre elles sont déjà à zéro phyto. Si je prends l'exemple de ma commune, nous sommes à zéro phyto depuis 2007, y compris pour les cimetières. Je sais qu'il existe une sensibilité particulière à l'égard des cimetières ; le fait de les écarter du champ de cette proposition de loi est une bonne chose puisque cela correspond à l'état de l'opinion. Concernant l'entretien des voies ferrées, la SNCF devra évoluer et en est consciente. Mais des questions de sécurité se posent, qui concernent également les aéroports, et qui rendent impossible une interdiction totale de l'utilisation de ces produits pour ces espaces.

L'interdiction de la mise sur le marché des pesticides pour des usages particuliers est un sujet évidemment sensible. En effet, certaines familles dépendent de la production en légumes de leur jardin pour assurer une part de la nourriture de la famille. Il faut le prendre en compte. Dans les jardins familiaux, l'utilisation des produits agricoles au mètre carré est beaucoup plus élevée qu'en zone agricole. Or, le maraîchage biologique montre qu'il est possible de produire des légumes sans utiliser de pesticides. Il est également avéré que les fleurs peuvent être cultivées sans pesticides.

Concernant la date d'entrée en vigueur, nous avions retenu 2018 car cela correspondait à l'échéance fixée par le plan Ecophyto. Certains souhaitaient que ce texte entre en vigueur dès 2015 du fait de la dangerosité des produits. Le rapporteur propose de retenir 2020 pour que cela laisse un mandat municipal plein aux élus. Cela laissera également deux ans de plus aux filières pour écouler les produits et développer des alternatives, notamment par la recherche.

Votre commission, comme la commission des affaires économiques à laquelle j'appartiens, n'aime pas beaucoup les demandes de rapports. Cependant, le rapport prévu à l'article 3 est nécessaire, car nous n'avons pas toutes les réponses sur les PNPP à l'heure actuelle.

Je souhaite avec conviction que ce texte soit adopté afin d'avancer sur ces sujets de santé et d'environnement. Il faut donner un signe à notre société et revenir au bon sens d'antan en intégrant les progrès qui ont été faits.

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