Nous connaissons depuis l'intervention du Premier ministre du 14 octobre dernier les contours et le calendrier du futur projet de loi sur l'adaptation de la société au vieillissement de la population. Mes prédécesseurs se sont souvent préoccupés de cette Arlésienne qu'était la réforme de la prise en charge de la perte d'autonomie ; nous le savons désormais, les engagements pris seront tenus.
Centré sur la prise en charge à domicile, le premier volet de la réforme sera adopté d'ici la fin de l'an prochain. Plus du quart des plans d'aide étant saturés, la réforme de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) favorisera une meilleure prise en compte des besoins des personnes les plus dépendantes et ouvrira une réflexion sur le partage équitable de son financement, qui repose aujourd'hui largement sur les départements.
Plus tard, un second volet sur la prise en charge en établissement traitera la lourde question du reste à charge supporté par les résidents.
Nous avons la garantie que le produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa), créée par la loi de financement pour 2013, sera entièrement consacré au financement de cette réforme à partir de 2015. J'en suis satisfait ; je l'aurais été davantage si, comme prévu initialement, le produit de la Casa avait été mis en réserve dès 2013 au sein d'une section dédiée du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), au lieu d'être redirigé vers le FSV en 2013 comme en 2014, même si l'Assemblée nationale a maintenu l'affectation de 100 millions à la CNSA. Il ne s'agira pas d'ajuster à la marge les dispositifs existants, mais de constituer, selon le Premier ministre, un grand projet de société pour adapter notre protection sociale au vieillissement, et plus largement changer le regard de la société sur les personnes âgées. Il aurait été préférable, de ce point de vue, d'affecter dès l'origine cette contribution pesant sur les retraités à une réforme qui nécessitera un effort financier substantiel.
L'Ondam médico-social progresse de 3 % : c'est moins que les années précédentes, mais plus que l'Ondam général. Avec les ressources propres que mobilisera la CNSA, l'objectif global de dépenses (OGD) sera de 18,8 milliards d'euros, dont 9,5 milliards pour les personnes handicapées et 9,3 milliards pour les personnes âgées. Il sera abondé par un prélèvement de 70 millions sur les réserves de la CNSA, pour renforcer en premier lieu les moyens existants dans les établissements et services médico-sociaux en tenant compte de l'augmentation des salaires et de la hausse des prix.
Le projet de loi consacre 130 millions d'euros à la médicalisation des établissements d'hébergement pour les personnes âgées dépendantes (Ehpad) par l'augmentation du taux d'encadrement des résidents par des personnels soignants. Elle est loin d'être achevée car dépendante du rythme du renouvellement des conventions entre établissements, conseils généraux et ARS. Selon la CNSA, 31 % des Ehpad représentant 26 % des places n'étaient pas encore passés à un mode de tarification fonction du GIR moyen pondéré soins à la fin de 2012.
Près de 155 millions d'euros iront à l'achèvement du programme pluriannuel de créations de places dans le secteur des personnes handicapées, un peu moins de 8 millions au troisième plan autisme et 15 millions à l'achèvement du plan Alzheimer. Le professeur Joël Ankri signalait en juin dernier des marges de progression non négligeables, sur le fonctionnement des maisons pour l'autonomie et l'intégration des malades Alzheimer (Maia), les créations de places d'accueil de jour et d'hébergement temporaire, et l'accompagnement des aidants : voilà une base solide pour un nouveau plan étendu à l'ensemble des maladies neuro-dégénératives - les avis exprimés lors des auditions étaient positifs.
Les améliorations du calendrier de la procédure budgétaire, du suivi des crédits et de leurs modalités d'allocation en matière de création de places devraient limiter la sous-consommation de l'OGD personnes âgées, souvent déplorée par mes prédécesseurs, et qui était de 189 millions en 2012. Nous avons eu une discussion approfondie avec le directeur de la CNSA sur ces mécanismes : avec des prix de journée connus seulement en juin et remis en perspective en novembre, l'année civile était réduite à quelques mois. Nous gagnerons trois mois par rapport à ce calendrier.
Je vous proposerai un amendement améliorant le degré d'information dont dispose le Parlement sur le financement, complexe, des établissements et services médico-sociaux. La refonte de la tarification des établissements pour personnes handicapées, qui vient d'être engagée dans le cadre de la modernisation de l'action publique, pourrait inspirer le secteur des personnes âgées, qui souffre de blocages : la tarification à la ressource, prévue par la loi de financement pour 2009, n'est toujours pas en vigueur, faute de décret...
Le projet de loi initial ne consacrait qu'un article au secteur médico-social, affectant comme depuis 2011 au financement du plan d'aide à l'investissement (PAI) une partie de la contribution de solidarité pour l'autonomie, en l'occurrence un peu moins de 50 millions d'euros. Chaque année, ces crédits sont gelés au titre des mesures de régulation de l'Ondam, puis abondés à partir des réserves de la CNSA. Cela nuit à la lisibilité de la politique d'investissement de la CNSA, dont les réserves diminueront mécaniquement avec la consommation complète de l'OGD dans les prochaines années. Or cette aide, qui a un effet de levier, limite le poids de l'investissement dans les tarifs des établissements, dont 40 % devront pourtant être rénovés dans les dix prochaines années. C'est pourquoi je vous proposerai un amendement pour mieux identifier et sécuriser ces crédits au sein du budget de la CNSA.