Intervention de Marc Massion

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 5 novembre 2013 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2014 — Examen du rapport de mm. marc massion et jean arthuis rapporteurs spéciaux sur la participation de la france au budget de l'union européenne article 41

Photo de Marc MassionMarc Massion, rapporteur spécial :

Je lui ai fait la même remarque, qu'il a tenu à rectifier : c'est un rassemblement, non un mariage.

La contribution française au budget communautaire prend la forme d'un prélèvement sur les recettes de l'État. L'article 41 du projet de loi de finances pour 2014 l'évalue à 20,14 milliards d'euros, soit une augmentation de 2,7 %, ou 540 millions d'euros, par rapport à 2013. L'année dernière et celle d'avant, la hausse s'élevait à 720 millions d'euros.

En juin dernier, à l'occasion d'un point d'étape sur les enjeux et les perspectives budgétaires de l'Union européenne, Jean Arthuis et moi-même avions mis l'accent sur trois aspects : les dépenses administratives de l'Union européenne, les ressources propres du budget communautaire et la gouvernance économique, financière et budgétaire de la zone euro. Mon intervention ne revient pas sur ces éléments qui font, de plus, l'objet d'une reprise dans la note de présentation qui vous a été communiquée.

Le cadre financier pluriannuel 2014-2020, largement issu d'un accord adopté au terme de longues négociations par le Conseil européen les 7 et 8 février 2013, fixe les plafonds suivants : 1 082,55 milliards d'euros en crédits d'engagement (CE) et 1 023,95 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Ces 58,6 milliards d'euros d'écart s'ajoutent au stock déjà préoccupant de restes à liquider (RAL), ces engagements pris par l'Union européenne mais non encore couverts par des paiements. Ce stock est estimé à 225 milliards d'euros fin 2013 et continuera d'augmenter l'année prochaine.

Le nouveau cadre pluriannuel s'inscrit dans une certaine continuité à l'égard du précédent. Seules trois rubriques connaissent des variations importantes : il s'agit des rubriques 1a « Compétitivité pour la croissance et l'emploi », qui croît de 58 % ; 3 « Sécurité et citoyenneté », en augmentation de 45 % ; et 5 « Administration », en hausse de 25 %.

Les négociations entre le Conseil et le Parlement européen ont très peu porté sur les montants des rubriques ou sur la structure des dépenses. Elles se sont concentrées sur la flexibilité entre les années et les rubriques : la marge globale pour les paiements, la marge globale en faveur de la croissance et de l'emploi, la flexibilité pour faire face au chômage des jeunes et renforcer la recherche et, enfin, la marge pour imprévus ont été créées à cette fin.

Je me félicite de la création, dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020, du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD), appelé à succéder au Programme européen d'aide alimentaire aux plus démunis (PEAD). Ce fonds fera désormais partie de la politique de cohésion, alors que le PEAD relevait de la PAC. Sa dotation s'élevait à 500 millions d'euros par an depuis 2009, celle du FEAD sera portée à un niveau maximal de 557 millions d'euros par an, soit une enveloppe totale sur 2014-2020 de 2,8 milliards d'euros que les États membres pourront compléter à hauteur de 1,1 milliard d'euros. En 2013, quatre associations distribuent les produits financés par le PEAD : la Fédération française des banques alimentaires, les Restos du coeur, le Secours populaire et la Croix-Rouge française.

J'en arrive à la négociation budgétaire pour l'année 2014, qui est toujours en cours. L'avant-projet de budget présenté par la Commission européenne au printemps propose une baisse de 6 % des CE par rapport à 2013, soit 142 milliards d'euros. Seuls les crédits de la rubrique 1a « Compétitivité » y progressent de 3,3 %, le financement de la politique de cohésion diminuant de 13,5 %, et les rubriques 3 « Citoyenneté, liberté, justice » et 4 « L'Union européenne, acteur mondial », respectivement, de 9,4 % et 12,5 %. Les CP y affichent, quant à eux, une hausse de 2,1 % pour atteindre 136 milliards d'euros.

Le projet de budget adopté par le Conseil en septembre 2013 se veut plus rigoureux : 310 millions d'euros sont retranchés en CE, ce qui conduirait à une baisse de 6,2 % par rapport à 2013, et 1,06 milliard d'euros en CP, ramenant la hausse pour 2014 à 1,3 % par rapport à 2013. Le 23 octobre 2013, le Parlement européen a voté en séance plénière un budget très proche des propositions de la Commission : baisse de 5,5 % des CE et hausse de 2,2 % des CP.

La proposition d'augmentation des crédits formulée par nos collègues députés européens rendra difficiles les négociations entre les deux branches de l'autorité budgétaire lors de la phase de conciliation, censée aboutir dans le courant du mois de novembre.

Le projet de loi de finances pour 2014 évalue le prélèvement sur recettes au profit du budget de l'Union européenne à 20,14 milliards d'euros, soit une hausse de 2,7 % en un an. En vingt ans, ce montant a été multiplié par cinq. Nous savons d'expérience qu'au terme de l'exécution 2014, des ouvertures nouvelles en crédits de paiement seront intervenues et que le prélèvement effectif ne sera pas celui inscrit en loi de finances.

Le prélèvement a en effet été surestimé de plus de 1,5 milliard d'euros en 2007, sous-estimé de 300 millions d'euros en 2008, sous-estimé à nouveau d'un milliard d'euros en 2009, surestimé de 556 millions d'euros en 2010, légèrement surestimé en 2011 - à hauteur de 5 millions d'euros - puis sous-estimé en 2012 de plus de 170 millions d'euros. En 2013, la sous-estimation du prélèvement s'élèverait à 1,8 milliard d'euros au terme de l'exécution. Le phénomène des restes à liquider explique l'essentiel de ces récents écarts en exécution et laisse planer l'aléa de budgets rectificatifs d'envergure à partir de l'année prochaine. Nous interrogerons le Gouvernement sur l'impact précis des restes à liquider sur notre contribution nationale et sur les mesures qui seront prises pour résoudre ce problème. L'estimation du prélèvement soumise au vote du Parlement doit être plus précise et plus fiable.

J'en viens à la question de notre solde net. La France devrait demeurer en 2014 le deuxième contributeur au budget communautaire derrière l'Allemagne et devant l'Italie, le Royaume-Uni et l'Espagne, avec une contribution équivalant à 16,7 % du total des ressources de l'Union européenne. Mais avec un peu plus de 11 % des dépenses communautaires, elle n'est plus que troisième pays bénéficiaire, derrière l'Espagne et la Pologne. Notre situation se dégrade chaque année et demeure fragile puisque les trois quarts des crédits européens qui nous sont destinés sont des dépenses agricoles.

Notre solde net ne cesse de se dégrader et a été multiplié par dix-huit en douze ans. Il a dépassé en 2011 la barre des 7 milliards d'euros par an. Certes, le solde net ne retrace qu'imparfaitement les gains économiques et en aucune façon les gains politiques de la participation à l'Union européenne, mais cette situation n'en est pas moins préoccupante.

Je recommande toutefois à la commission d'adopter sans modification l'article 41 du projet de loi de finances pour 2014. Jean Arthuis rappelle pour sa part que le vote est sans effet puisque la contribution de chaque État membre de l'Union européenne est fixée par les traités. Au surplus, il souligne que la contribution effective excède régulièrement le montant inscrit en loi de finances. L'exécution 2013 en apporte à nouveau la démonstration. En conséquence, il préconise l'abstention sur l'article 41 du projet de loi de finances pour 2014.

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