La réunion

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La commission procède tout d'abord à l'examen du rapport de M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial, sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

La mission « Sport, jeunesse et vie associative » s'enrichit d'un programme cette année. Aux deux programmes traditionnels, c'est-à-dire le programme « Sport » et le programme « Jeunesse et vie associative », s'en ajoutera un nouveau, dénommé « Projets innovants en faveur de la jeunesse ».

La programmation pluriannuelle avait fixé le montant de l'annualité 2014 de la mission à 484,8 millions d'euros. Néanmoins, les crédits demandés pour la mission dans son format traditionnel ont été ajustés à 454 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 460,5 millions en crédits de paiement (CP). Elle participe ainsi pleinement aux efforts de maîtrise de la dépense publique, au-delà même de la programmation.

Le programme « Sport » présente une budgétisation sérieuse et réaliste : sérieuse par sa stabilité en euros courants par rapport à 2013, signe de maîtrise de la trajectoire des finances publiques ; réaliste du fait de la programmation des dépenses, telles que les investissements à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (INSEP), le financement de la première tranche du plan de titularisation des personnels contractuels pour les opérateurs, ou encore le remboursement à l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) de la prise en charge par l'État des cotisations de retraite des sportifs de haut niveau - le ministère se trouvera à l'abri de mauvaises surprises l'année prochaine.

Si le soutien financier aux fédérations sportives revient de 66 millions d'euros à 63,5 millions d'euros, l'enveloppe qui leur est dévolue en faveur du développement du sport pour tous est maintenue.

Le centre national pour le développement du sport (CNDS) doit purger une situation difficile, née de la multiplication d'engagements non maîtrisés durant le précédent quinquennat - la Cour des comptes s'en était fait l'écho en janvier 2012. Les simulations effectuées en novembre 2012 faisaient apparaître un manque de trésorerie de 160 millions d'euros à la fin 2016. Depuis la fin de l'année dernière, un plan de redressement des comptes est prévu, avec une trajectoire budgétaire devant assurer une trésorerie positive pour les exercices 2013 à 2016.

Par ailleurs, il y a tout lieu de se féliciter de l'accord conclu en septembre avec le consortium Stade de France, qui se traduit notamment par la suppression, pour au moins quatre ans, de l'indemnité versée par l'État du fait de l'absence de club résident. L'économie est très substantielle, le montant annuel de la pénalité devant tendre vers 15 à 16 millions d'euros. A l'avenir, pour consolider le modèle économique du stade, l'État devra oeuvrer à la conclusion d'un accord de long terme entre le consortium et la Fédération française de rugby. Cette solution serait nettement préférable à la construction en région parisienne d'un nouveau stade de plus de 80 000 places sans club résident.

En outre, je salue le provisionnement d'un million d'euros au titre des primes aux futurs médaillés des Jeux olympiques et paralympiques de Sotchi. Ce montant apparaît aussi prudent d'un point de vue budgétaire qu'ambitieux au vu des résultats des athlètes français lors des jeux de Vancouver en 2010, qui avaient entraîné le décaissement de 500 000 euros. Cette attitude tranche avec celle du précédent gouvernement, qui n'avait programmé aucun crédit au titre des Jeux de Londres en 2012. Les 4,8 millions d'euros de cette dépense, pourtant prévisible, avaient fortement compliqué l'exécution du programme...

Les crédits de paiement du programme 163, « Jeunesse et vie associative », diminuent de 0, 6 % par rapport à 2013. Les crédits en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire, quant à eux, baissent de 3 millions d'euros ; le soutien au Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP) s'élèvera à 24,9 millions d'euros et l'appui aux associations agréées « jeunesse et éducation populaire » à 9,1 millions. Enfin le développement de la vie associative revient de 13,3 millions à 12,7 millions d'euros. Cette légère baisse ne traduit évidemment pas un manque d'ambition à l'égard de la politique en faveur de la jeunesse, dont l'apparition d'un nouveau programme souligne qu'elle ne se résume pas, loin s'en faut, au programme 163.

La très légère hausse des crédits alloués au service civique, qui passent de 145 millions d'euros à 146 millions traduit la hausse attendue du nombre des volontaires, qui devrait s'établir à 31 000. Son impact sur le budget de l'État sera minimisé par le raccourcissement de la durée moyenne des missions des jeunes. Je soutiens cette volonté de ne pas entraver la progression du service civique malgré la forte pression budgétaire.

Enfin, le nouveau programme « Projets innovants en faveur de la jeunesse » sera doté de 100 millions d'euros, en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, et recevra des fonds en provenance du nouveau programme d'investissements d'avenir (PIA), piloté par le Commissariat général à l'investissement. Cette somme sera intégralement reversée à l'agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), que le ministère a choisie comme prestataire. Par la suite, le déblocage des fonds se fera au fil de l'eau, en fonction de la désignation puis de l'avancement des projets retenus, normalement de 2014 à 2017, ce qu'il conviendra de surveiller attentivement.

Ce programme traduit l'engagement du président de la République en faveur des jeunes ; je m'en félicite, ainsi que de la marque de transparence que constitue l'inscription des crédits correspondants au sein de la mission. Cependant, les crédits en provenance du PIA ne sont pas fongibles avec les autres, ce qui signifie qu'aucun amendement visant à modifier leur montant ne saurait recevoir notre appui dans le cours de l'examen de ce projet de loi de finances. De plus, la mécanique propre au PIA crée un décalage entre l'inscription de la somme que ce projet de loi de finances consacre aux projets innovants en faveur de la jeunesse et les décaissements effectifs en faveur des acteurs de terrain. Il conviendra de rester attentif au développement des projets et de veiller à ce que ses crédits ne soient pas confondus avec des crédits budgétaires normaux. Les investissements d'avenir doivent servir à appuyer des actions qui, à terme, s'autofinanceront ; ils diminueront même les crédits publics en les rendant plus efficaces. Le succès de cette opération dépend du strict respect de ces principes dans le temps.

Je vous recommande d'adopter sans modification les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Votre rapport, Monsieur le rapporteur spécial, est assorti d'un amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Vous savez que l'État, par le biais du CNDS, s'est engagé à soutenir les travaux de construction et de rénovation des stades de football de l'Euro 2016 à hauteur de 160 millions d'euros ; 138 millions en ont d'ores et déjà été attribués, sous réserve de la validation de ce plan de soutien par la Commission européenne. Or, grâce à un amendement de...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

de François Trucy en effet, le CNDS bénéficie d'une ressource spécifique, à savoir un prélèvement complémentaire de 0,3 % sur les mises de la Française des jeux de 2011 à 2015. Son plafonnement à 120 millions d'euros entraîne toutefois un manque à gagner de 40 millions d'euros. Comme le CNDS est engagé dans un plan de redressement très sévère, laisser les choses en l'état reviendrait à détourner ses ressources en faveur des grandes enceintes sportives, ce qui est un peu paradoxal pour un outil censé symboliser la solidarité entre sport professionnel et sport amateur.

J'ai noté avec satisfaction que, pour la première fois, le bleu budgétaire indique clairement le financement des dépenses relatives aux stades de l'Euro 2016 « sera intégralement couvert par des recettes dédiées afin de ne pas peser sur le plan de redressement du CNDS ». Mon amendement concrétise en partie cet engagement en prolongeant jusqu'en 2016 le prélèvement sur les mises de la Française des jeux : cela rapporterait 24 millions d'euros au CNDS.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Les crédits budgétaires et extra-budgétaires alloués au sport sont maintenus à hauteur de 833 millions d'euros ; or, dans la situation actuelle, un budget maintenu est un bon budget. Cela résulte de l'économie de 16 millions d'euros réalisée grâce à l'accord trouvé avec le consortium Stade de France, ainsi que du règlement du dossier du musée national du sport (MNS) : l'État, qui s'était engagé pour l'investissement comme pour le fonctionnement, n'interviendra plus pour celui-ci, soit une économie de 4,5 millions d'euros.

Surtout, la réorientation du CNDS, dont les crédits, depuis quatre ans, dépassent ceux du ministère en faveur du sport, le recentrera sur sa mission originelle, c'est-à-dire le développement de la pratique pour tous et des équipements de proximité. Cette réorientation prendra pleinement ses effets avec le retour général à l'équilibre budgétaire, prévu pour 2016.

Enfin, nous accédons à une vieille requête du comité national olympique et sportif français (CNOSF) en transférant au monde sportif la promotion internationale du sport français, sous la responsabilité de Bernard Lapasset, qui sera assisté d'un nouvel ambassadeur en charge des événements sportifs internationaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Lozach

Je me félicite également de l'anticipation financière des Jeux olympiques à venir, ce qui n'avait pas été prévu pour ceux de Londres.

Debut de section - PermalienPhoto de François Trucy

Le Gouvernement escompte 25 médailles aux Jeux olympiques de Sotchi, c'est peut-être... optimiste : espérons que la prévision budgétaire sera dépassée ! Les pays européens procèdent-ils de la même façon pour budgétiser les performances de leurs athlètes ?

L'indemnité versée au consortium Stade de France avait l'inconvénient de ne pas l'inciter à utiliser au mieux cet équipement. Espérons que sa suppression mènera à des comportements plus raisonnables.

Sur un autre sujet, pouvez-vous me confirmer que l'essentiel des ressources du CNDS provient bien d'un prélèvement sur la Française des jeux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Je poserai différemment la question de François Trucy : compte tenu de la forme physique de nos athlètes, l'anticipation des résultats de Sotchi n'est-elle pas plutôt pessimiste ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

La programmation pluriannuelle retenait le chiffre de 484 millions d'euros pour l'annuité 2014 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Nous voici à 454 millions. Qu'est-ce qui justifie ce nouveau coup de rabot, qui ajoute de la rigueur à la rigueur ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La suppression de l'indemnité versée au consortium Stade de France, dont je me réjouis, résulte d'une négociation. Quelles ont été les contreparties offertes par l'État ?

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Les ressources de l'équitation proviennent du PMU, grâce au Fonds d'encouragement aux projets équestres régionaux ou nationaux (Eperon). Or celui-ci dépend pour partie du ministère de l'agriculture. L'équitation fournit trois disciplines olympiques : ne pourrait-on pas inscrire ces crédits au sein du programme « Sport » ? Enfin, je suis déçu que le rapporteur général n'intervienne pas pour le stade du Brest, qui n'a pas changé depuis que j'y usais mes crampons...

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Les collectivités propriétaires d'équipements sportifs se plaignent des exigences abusives des fédérations, qui interprètent et parfois renforcent les normes - et leur coût. Ne faudrait-il pas que l'État qui leur a délégué assez largement son pouvoir règlementaire recouvre la maîtrise des décisions en la matière et ne s'en remette pas à des gens qui ne sont pas les payeurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

Les recettes du CNDS consistent d'abord en un prélèvement de 1,8 % sur les sommes misées aux jeux de la Française des jeux, hors paris sportifs ; son plafond devrait s'établir 176,3 millions d'euros. Une contribution de 1,8 % sur les mises jouées lors des paris sportifs de la Française des jeux et des opérateurs agréés rapportera 31 millions d'euros. Le prélèvement complémentaire de 0,3 %, plafonné à 24 millions d'euros, soit 120 millions sur l'ensemble de la période 2011-2015, aidera à financer la construction et de la rénovation des stades de l'Euro 2016. S'y ajoute le produit de la contribution de 5 % sur la cession des droits de retransmission de manifestations ou de compétitions sportives, dite « taxe Buffet », évalué à 49 millions compte tenu de l'évolution des contrats signés avec les diffuseurs. D'un autre côté, je rappelle que le CNDS contribue au financement des politiques fédérales de développement de la pratique sportive à hauteur de 19,5 millions d'euros.

L'anticipation des médailles françaises aux jeux olympiques de Sotchi n'est ni optimiste ni pessimiste, mais simplement prudente. Prévoir un financement d'un million d'euros alors que la dépense s'est élevée à 500 000 euros après les Jeux de Vancouver évitera d'avoir à faire face à des surprises.

Le coup de rabot évoqué par Éric Bocquet fait partie de la réduction supplémentaire de 1,5 milliard d'euros décidée par le Premier ministre quand il a envoyé ses lettres-plafonds.

J'indiquerai à Francis Delattre que je ne peux parler qu'à périmètre constant : il ne m'appartient pas d'inscrire le fonds « Eperon » dans la mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Todeschini

S'agissant du Stade de France, Mme Fourneyron avait déjà décidé l'année dernière de ne pas inscrire les crédits pour le consortium au titre de la pénalité pour absence de club résident - même si l'État a, par la suite, respecté ses obligations contractuelles. De plus, elle a obtenu que le consortium et la Fédération française de rugby (FFR) se rassoient à la table de négociation. Cette stratégie a tout simplement payé. Mais il n'y a pas eu de contrepartie en dehors du fait que la FFR organisera des matchs à Saint-Denis pour les quatre années qui viennent.

J'en arrive au sujet des normes. Dans le cadre du contrôle sur le financement public des grands équipements sportifs que j'ai récemment mené avec Dominique Bailly, j'ai entendu beaucoup de monde. Il en ressort que, bien souvent, les normes ne sont pas définies par les fédérations nationales, mais par les fédérations internationales. Il faut, en particulier, se plier à leurs conditions pour organiser des compétitions comme l'Euro 2016 en France. D'ailleurs, en 2020, l'Union européenne des associations de football (UEFA) organisera son championnat d'Europe dans plusieurs pays à la fois, de façon à utiliser les structures aux normes. Tout le monde ne peut pas faire comme le Qatar, qui organisera la coupe du monde de football de 2022 malgré l'absence de public.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Elle adopte l'amendement proposé par M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial, portant article additionnel après l'article 76.

Puis la commission procède à l'examen du rapport de M. Yvon Collin et Mme Fabienne Keller, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Aide publique au développement » et sur le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Pour la deuxième année consécutive, l'OCDE constate pour 2012 une diminution de près de 8 milliards de dollars de l'Aide publique au développement (APD) versée par les pays membres du Comité d'aide au développement (CAD). Cette baisse s'explique par la crise financière de 2008 et les turbulences de la zone euro : l'Espagne (- 50 %), l'Italie (- 35 %), le Portugal, la Belgique et la Grèce ont sensiblement diminué leur aide. À l'inverse, les États non membres du CAD ont accru la leur de près d'1,5 milliard de dollars. C'est ainsi le cas des Émirats arabes unis, qui participent par exemple au financement du TGV marocain, et de la Turquie.

Les États-Unis demeurent le premier pays contributeur, devant le Royaume-Uni, qui dépasse cette année l'Allemagne, puis la France. Rapportée au revenu national brut (RNB), l'aide est la plus élevée dans des pays européens comme le Luxembourg, la Suède, la Norvège, le Danemark, la France étant dixième, derrière notamment le Royaume-Uni, sixième.

Les ressources budgétaires de l'aide publique française baisseront de 600 millions d'euros, dont 200 millions sur cette mission, qui ne représente que 38 % des crédits budgétaires comptabilisés en aide publique au développement. À l'inverse, la contribution des opérations de prêts et de traitement des dettes est en hausse de plus de 900 millions d'euros, malgré une baisse des décaissements. Il est vrai que la contribution nette dépend de l'évolution respective du montant des prêts accordés et des remboursements perçus.

Si la contribution résultant de notre participation au budget communautaire est quasiment stable, l'APD des collectivités territoriales connaîtra une légère hausse de 5 millions d'euros. Enfin, le produit des « financements innovants » devrait augmenter de 63 millions d'euros, grâce à la revalorisation des tarifs de la taxe de solidarité sur les billets d'avions et à l'augmentation de 40 millions de la part du produit de la taxe sur les transactions financières affectée au développement. Nous sommes très favorables à une généralisation de ce type de financement au niveau mondial ou au niveau communautaire. La Commission européenne a présenté un projet de directive en février dernier et nous espérons progresser grâce à une coopération renforcée.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

La France s'est engagée, dans le cadre des objectifs du millénaire des Nations unies, à consacrer 0,7 % de son RNB à l'APD en 2015, avec une étape intermédiaire de 0,56 % en 2010. Il apparaît évident qu'aucun des deux objectifs ne sera atteint. Cela est d'autant plus regrettable que notre voisin britannique ne les a pas abandonnés.

En février dernier, je me suis entretenu à Londres avec Mme Lynne Featherstone, ministre déléguée au développement international, avec le président et plusieurs membres de la commission du développement international de la Chambre des communes et avec le commissaire en chef de l'organisme chargé de l'évaluation de l'aide. Une volonté politique forte a mobilisé autour d'un objectif qui fait l'objet d'un consensus tant au sein des principaux partis qu'au niveau de l'opinion publique, grâce aux efforts accomplis pour assurer l'efficacité des sommes engagées.

Il est nécessaire que la France adopte une trajectoire précise pour atteindre cet objectif. La discussion du projet de loi de programmation sera peut-être l'occasion de la définir. Nous pouvons néanmoins nous réjouir que notre pays n'ait pas, contrairement à certains de ses partenaires européens, appliqué de coupes drastiques dans cette politique.

Selon les chiffres de 2012, notre aide bilatérale a en majorité bénéficié à l'Afrique (52 %) et notamment à l'Afrique subsaharienne (40 %), puis à l'Amérique du Sud (13 %). La Côte d'Ivoire est le principal pays bénéficiaire, du fait des annulations de dette intervenues ces dernières années. L'aide multilatérale, sur laquelle nous avons moins de prise, a bénéficié principalement à l'Inde, à l'Éthiopie, à la République démocratique du Congo et au Kenya.

La mission est dotée par le présent projet de loi de finances de plus de 4 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de près de 3 milliards en crédits de paiement. Le programme 110, « Aide économique et financière au développement », constitue le support de l'APD portée par le ministère de l'économie et des finances.

L'action n° 1, « Aide économique et financière multilatérale », concerne la participation de la France aux banques multilatérales de développement. La hausse considérable de ses autorisations d'engagement (plus d'1,5 milliard d'euros) s'explique essentiellement par la reconstitution des fonds de l'Association internationale de développement (AID), guichet concessionnel de la Banque mondiale, et du Fonds africain de développement (FAD), guichet concessionnel de la Banque africaine de développement. Leurs modalités de reconstitution conduiront à minorer le montant des crédits de paiement inscrits, cette année pour le FAD, l'an prochain pour l'AID.

Les versements de crédits de paiement au FAD étaient traditionnellement répartis de façon égale entre les trois années de reconstitution du fonds ; en 2014, le premier versement sera égal à un peu plus du quart au lieu du tiers, de sorte que les deux versements ultérieurs seront plus importants. Une partie de la reconstitution de l'AID se fera sous forme de prêt, ce qui lissera sur une longue période le versement des crédits de paiement.

L'action n° 2, « Aide économique et financière bilatérale », recouvre notamment la rémunération de l'Agence française de développement (AFD) pour les opérations menées pour le compte de l'État, la rémunération de Natixis pour la gestion de la Réserve pays émergents (RPE), la bonification des prêts accordés par l'AFD ou encore les crédits du Fonds d'études et d'aide au secteur privé (Fasep). La diminution de ses autorisations d'engagement s'explique principalement par une ponction de 100 millions d'euros au titre de la contribution de la France au Fonds pour les technologies propres.

L'action n° 3, « Traitement de la dette des pays pauvres », voit ses autorisations d'engagement augmenter de près de 400 millions d'euros. Ces crédits correspondent aux annulations de la dette des pays subsahariens envers la France qui ont été décidées dans le cadre du Club de Paris ou de l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés.

Le programme 110 présente un décalage important entre l'ouverture des autorisations d'engagement et la consommation des crédits de paiement correspondants. Pour 2014, seuls 10 % des CP concernent des autorisations d'engagement ouvertes cette année, tandis que plus de 40 % seront consommés après 2016.

Le programme 209, « Solidarité à l'égard des pays en développement », constitue le support de l'APD mise en oeuvre par le ministère des Affaires étrangères.

L'action n° 2, « Coopération bilatérale », regroupe l'ensemble de la coopération bilatérale dans les domaines des droits fondamentaux de la personne humaine, de l'accès aux soins, à l'éducation, aux structures de base et aux ressources naturelles. On y trouve notamment la rémunération de l'AFD pour les dons projets, les contrats de développement et de désendettement (C2D), ainsi que les crédits et les dons projets de l'AFD, du Fonds de solidarité prioritaire et ceux transitant à travers les ONG. Ses principales évolutions résultent d'une diminution des C2D et d'une hausse des autorisations d'engagement pour subventions aux ONG, conformément à l'engagement du président de la République en faveur de ces dernières.

L'action n° 5, « Coopération multilatérale », retrace les contributions aux fonds multilatéraux de développement. On y trouve les contributions volontaires au système des Nations unies. La diminution de ses autorisations d'engagement s'explique par la baisse des crédits budgétaires affectés au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. La contribution de la France reste cependant inchangée à hauteur de 360 millions d'euros, la différence étant compensée par le produit de la taxe de solidarité sur les billets d'avion et de la TTF. Une ressource fiscale affectée se substitue donc à des crédits budgétaires.

En légère hausse, l'action n° 7, « Coopération communautaire », ne comporte que la contribution française au Fonds européen de développement (FED). Enfin, l'action n° 9, « Actions de co-développement », finance les engagements contractés dans le cadre de l'ancien programme 301, supprimé l'an dernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Le compte spécial « Prêts à des États étrangers » retrace les opérations de prêts pratiqués par l'État en faveur de l'APD et, depuis mai 2010, dans le cadre du soutien financier européen à la Grèce. Bien que son solde doive être négatif à hauteur de 793 millions d'euros à l'issue de l'exercice 2014, il n'a pas vocation à être structurellement déficitaire : il dépend du rythme de versement et de remboursement des prêts mais, à terme, les remboursements des États partenaires devront couvrir les décaissements.

La première section retrace les prêts accordés dans le cadre de la RPE. Servant à financer des projets faisant appel à des biens et services d'origine française, ces crédits sont un outil fondamental pour la présence industrielle française. Aussi regrettons-nous qu'ils baissent de 20 millions d'euros.

La deuxième section retrace les opérations de traitement de dettes consentis par notre pays dans le cadre du Club de Paris ou sur une base bilatérale, ainsi que le refinancement des dettes. L'augmentation de 500 millions d'euros correspond au traitement de la dette du Zimbabwe, du Soudan et de la Somalie.

La troisième section retrace le versement et le remboursement des prêts de long terme octroyés à l'AFD, qui constituent des quasi fonds propres.

Je rappelle que l'AFD est soumise au respect des normes réglementaires de Bâle III, ainsi qu'aux ratios prudentiels qui s'appliquent à tout établissement bancaire : le ratio grand risque, par exemple, l'empêche d'engager plus de 25 % de ses fonds propres pour un même emprunteur ou garant. Ses capacités d'action peuvent en être fortement contraintes. Ainsi au Maroc, où je me suis rendue en avril dernier dans le cadre du contrôle budgétaire, la limite de ces 25 % est déjà atteinte : cela limite la signature de nouvelles conventions de prêts aux remboursements en capital (50 millions d'euros en 2013). Dès 2015, l'AFD ne respectera plus la limite des grands risques dans cinq pays pour les expositions souveraines (Maroc, Tunisie, Vietnam, Brésil, Chine et Kenya), et dans trois pays pour les expositions non souveraines (Afrique du Sud, Turquie et Maroc). Il est nécessaire d'agir sur ses fonds propres pour lui redonner toutes ses marges de manoeuvre.

Enfin, la quatrième section, qui retrace les prêts consentis aux États membres de l'Union européenne dont la monnaie est l'euro, est mise en sommeil : aucun mouvement n'est prévu avant le premier remboursement qui devrait avoir lieu en 2020.

Au total, les engagements de la France sont en recul. À force de ne pas s'occuper du Sud, il revient tôt ou tard vers le Nord... je propose à titre personnel de ne pas voter les crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Compte tenu des observations qui vous ont été présentées, je vous propose, pour ma part, d'adopter les crédits de la mission « Aide publique au développement » et du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Le dossier est sensible, et je partage les inquiétudes des rapporteurs spéciaux à propos de la baisse de la part de l'APD dans le RNB. En dépit d'un contexte déprimé, la France préserve sa démarche d'aide autant que faire se peut. J'irai plutôt dans le sens d'Yvon Collin que dans celui de Fabienne Keller.

L'action n° 3 du programme n° 110, qui porte sur le traitement de la dette des pays pauvres, prévoit une hausse sensible des crédits de paiement. Cela s'explique-t-il par des raisons mécaniques ou objectives ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

A la fin des Trente Glorieuses, l'APD devait atteindre 1 % du RNB, puis la situation économique des grands pays a abaissé cette exigence jusqu'à 0,7 %. L'aide de pays pétroliers comme les Émirats arabes unis, dont vous avez rappelé l'augmentation, n'obéit pas aux mêmes conditions que les nôtres et ne vise pas les mêmes objectifs. Est-ce vraiment de l'APD ?

Il y a deux ou trois ans, j'avais eu, auprès de l'OCDE, à m'intéresser à la réforme de l'AFD. Celle-ci admettait elle-même que sa forme juridique et institutionnelle posait des difficultés. Je ne vois rien arriver ; c'est regrettable. Il est vrai que l'étude qu'elle avait menée sur l'utilisation de l'aide publique dans certains pays n'avait pas plu à tout le monde. Où en est-on ?

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bourdin

Des études ont-elles été effectuées sur l'efficacité des engagements de l'AFD ? Je suis très sensible à ce qu'a dit Fabienne Keller des contraintes de type Bâle III qui pèsent sur l'action de l'agence. Quelles autres pistes qu'une augmentation de ses fonds propres sont-elles ouvertes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

A la différence de la rapporteure spéciale, je juge ce budget...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Non, puisqu'il est loin des 0,7 %, difficiles à atteindre du fait de la rigueur et de l'austérité. Je m'interroge sur la raison qui vous fait appeler, Madame Keller, à voter contre ces crédits. On aurait pourtant pu penser que vous en souhaitiez la baisse - mais vous pouvez avoir plus de générosité sur ce sujet que de cohérence...

La France a une mission. L'AFD a au moins connu une réforme dans ses priorités. Désormais, elle est plus tournée vers les questions sociales, environnementales, énergétiques et de santé. Il est d'ailleurs permis de s'interroger sur le fait que le précédent directeur général, nommé par l'ancien gouvernement, ait pu subventionner la production d'énergie fossile dans le Caucase...

S'agissant des chiffres que vous nous avez exposés, je suis réellement surpris de voir figurer, parmi les pays récipiendaires de l'APD bilatérale, le Brésil au deuxième rang, et la Chine au quatrième...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

qui en attend certainement l'évolution avec anxiété ! Est-il légitime d'accorder à ces pays des crédits bonifiés par le budget de l'État ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

J'aimerais des informations plus précises sur les prêts bilatéraux consentis aux pays membres de l'Union européenne avant que cette pratique ne soit abandonnée au profit du mécanisme européen de stabilité financière. Quels sont ces pays ? Je pense à l'Espagne, la Grèce, le Portugal et l'Irlande qui sont particulièrement en difficulté. Quel est l'encours global de ces prêts ? Le remboursement de la dette grecque, qui est attendu à partir de 2020, repose-t-il sur une échéance contractuelle ? Peut-il évoluer ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Je m'associe aux propos de François Marc sur la pertinence générale de cette politique, et me réjouis que la France maintienne globalement son niveau d'engagement, même si l'objectif général des 0,7 % n'est pas atteint, et même si notre aide est en deçà, par exemple, de celle du Royaume-Uni. Il serait très préjudiciable pour la France de se désengager de ces politiques que je crois être du gagnant-gagnant.

Le traitement de la dette des pays pauvres est soumis à un calendrier extérieur à la mission et dépend des décisions prises dans le cadre du Club de Paris ou d'institutions multilatérales. Une partie des décalages constatés par le rapporteur général est expliquée par le rythme, très variable, de décaissement des crédits de paiement. Les remboursements peuvent être différés : par exemple, un prêt pour 25 ans ne commencera à être amorti qu'après 10 ans.

Pour répondre à Roger Karoutchi, les dépenses des Emirats arabes unis ne sont peut-être pas vraiment de l'APD. Mais nous comptabilisons également des dépenses contestables, qu'il s'agisse de Wallis et Futuna, des réfugiés ou des étudiants... Reconnaissons également que tous les pays font de même.

Lors de notre déplacement à Londres, nous avons dû répondre à de nombreuses questions qui traduisent l'intérêt des Britanniques pour l'AFD, ce bras séculier de notre aide au développement. Si l'outil est perfectible, les aides ont été réorientées en faveur des énergies renouvelables et du développement durable. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette réorientation. Après les assises du développement à l'automne dernier et le rapport de la Cour des comptes, la réflexion se poursuit ; nous aurons une loi de programmation en 2014. La question de la gouvernance de l'AFD et de la multiplicité des intervenants reste en suspens mais n'exclut nullement une évaluation de ses résultats. En notre qualité de membres du conseil d'administration, nous intervenons régulièrement en ce sens et nous menons également des contrôles en tant que rapporteurs spéciaux. Mais il faut reconnaitre que nos amis Anglais ont mis en place des outils ambitieux dont nous pourrions peut-être nous inspirer.

La section des prêts consentis aux Etats de l'Union européenne ne concerne en réalité que le plan de restructuration de la dette grecque : sur 16,8 milliards engagés, seulement 11,4 milliards ont été versés, le Fonds européen de stabilité financière ayant ensuite pris le relais.

La question de l'engagement de l'AFD dans des pays émergents comme la Chine ou le Brésil est récurrente. Je l'ai constaté en Chine sur pièces et sur place, l'agence locale de l'AFD, entièrement autofinancée, n'y intervient pas par des taux bonifiés. Les chiffres sont clairs, le coût de ses interventions est nul. En revanche, elle constitue un agent puissant de pénétration du marché chinois, comme lorsqu'un réseau de développement de chaleur pour 80 000 habitants est réalisé avec des produits français. Il serait dommageable qu'elle ne soit pas présente aux côtés de notre ambassadeur. Je pense d'ailleurs que le ministre partage ce point de vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabienne Keller

Pour répondre au rapporteur général, je précise que l'action n° 3 du programme 110 concerne des annulations de dette tandis que le compte spécial retrace des traitements de dette.

Le ministre, qui voulait transformer tous les prêts en subventions, a été obligé de reconnaître que cet outil était moins coûteux en termes budgétaires ; il a également renoncé à l'objectif des 0,7 % et laissé grignoter l'aide de la France au développement. C'est pourtant quand la ressource financière est rare, qu'il faut privilégier le long terme sur le court terme.

Oui, nous avons mené des contrôles sur l'aide publique au développement, qu'il s'agisse d'infrastructures en Tunisie ou d'énergie au Maroc. De grande qualité, les équipes de l'Agence constituent une référence pour les Allemands ou les Britanniques ; elles assurent souvent un rôle de chef de file au niveau européen, suivant un système assez bien organisé.

Si vous avez raison de souligner la nécessité de renforcer les fonds propres de l'AFD pour respecter les normes de Bâle III, je confirme que les prêts consentis au Brésil ou à la Chine ne représentent aucune charge pour l'AFD. Ils consomment certes une partie des fonds propres, mais ils contribuent à nos bonnes relations industrielles en facilitant des montages financiers.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Aide publique au développement », ainsi que du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

La commission procède alors à l'examen du rapport de M. Claude Belot, rapporteur spécial, sur la mission « Médias, livre et industries culturelles » et sur le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Nous avons le plaisir d'accueillir Joëlle Garriaud-Maylam, rapporteure pour avis au nom de la commission des affaires étrangères.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Belot

Ayons d'abord une pensée pour les deux journalistes assassinés il y a quelques jours. Ils travailleraient pour RFI, cette entreprise superbe qui honore notre pays.

La mission « Médias, livre et industries culturelles » est composée d'un empilement d'entreprises aux missions diverses, financées par des ressources propres, dédiées comme la redevance, ou au moyen de crédits budgétaires. Un bon budget n'est pas forcément un budget en hausse. Par les temps qui courent, c'est plutôt l'inverse.

Nous nous sommes livrés avec la Cour des comptes à un important travail sur les aides à la presse, dont il ressort que notre presse est la plus aidée des grands pays industrialisés, et simultanément celle qui accuse le plus mauvais état. Elle ne sait pas se moderniser. La volonté d'augmenter les aides qui lui sont allouées, exprimée à l'occasion des états généraux de la presse en 2008-2009, n'avait pas eu grands résultats.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Belot

Un tableau récapitulatif des aides à la presse figure en page 20 de la note de présentation qui vous a été remise. Les aides à la diffusion, augmentées à l'issue des états généraux, baissent de 33 %. Contrairement à celles au transport postal, les aides au portage, qui fonctionnent correctement, sont maintenues. D'une manière générale, la diminution de ces aides va faire très mal, surtout à la presse spécialisée, essentiellement transportée par voie postale ou ferroviaire. J'ai reçu les représentants du secteur, qui s'interrogent.

Les aides au pluralisme, qui servent souvent d'alibi à l'action publique en faveur de la presse, ne représentent que 3 % à 4 % de l'ensemble des aides. Enfin, les crédits consacrés à la modernisation de la presse sont en baisse. La Cour des comptes a révélé que les soutiens prodigués dans ce domaine ont été détournés ; je pourrais vous citer de nombreux exemples. En toute hypothèse, les résultats n'ont pas été au rendez-vous et les concentrations escomptées n'ont pas eu lieu.

La presse en ligne va remplacer la presse écrite. Le mouvement est déjà en marche aux États-Unis ou au Royaume-Uni. Des quotidiens papiers, et non des moindres, disparaissent. Or la TVA va passer à 20 % sur la presse numérique, contre 2,1 % pour la presse écrite. Ce n'est certes pas le moment, mais l'harmonisation de ces taux - pas à la hausse - est une exigence de cohérence. L'histoire va vite : n'attendons pas que les titres meurent. Les projections faites jusqu'en 2015 confirment ces tendances, lourdes de conséquences.

La dotation de l'Agence France presse (AFP), qui a été légèrement augmentée, s'élève à 123 millions d'euros. C'est une superbe entreprise, la troisième agence de presse dans le monde, et la première en matière de photographie. Il faut néanmoins - je le dis depuis des années - y mettre de l'ordre, car elle n'a pas de statut et fait en définitive ce qu'elle veut.

Un mot sur le programme « Livre et industries culturelles » : pour éviter toute dérive financière, le chantier de rénovation du quadrilatère Richelieu, site historique de la Bibliothèque nationale de France (BnF) devra être suivi avec attention.

La création de la Hadopi résultait des plaintes, légitimes, des producteurs de contenus audiovisuels relatives au piratage. Il fallait créer une instance de contrôle pour dissuader les internautes de ces pratiques. Le système retenu rendait les usagers soupçonnés de piratage, après deux avertissements, passibles de poursuites pénales. À ce jour, peu l'ont été : l'opération de dissuasion a été relativement réussie. Le nouveau Gouvernement a toutefois considéré que ce système portait atteinte aux libertés individuelles. Cela peut se concevoir. Il a chargé Pierre Lescure, grand homme de l'audiovisuel, ancien patron de Canal plus, de réfléchir à la question ; son rapport préconise de supprimer la Hadopi en transférant ses compétences au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), de mieux protéger les intérêts de la production audiovisuelle, mais aussi de créer une taxe sur les smartphones. Cette dernière idée a bien sûr été enterrée - vous connaissez l'enthousiasme actuel pour les nouvelles taxes.... Mais il n'en faut pas moins aller au bout de la logique, et supprimer la Hadopi si on ne lui donne pas les moyens de fonctionner correctement. Ses personnels, désoeuvrés, sont démotivés. De grâce, cessons de dépenser de l'argent public inutilement !

Tous les organes de l'action audiovisuelle extérieure de la France ont été regroupés au sein de France Médias Monde, sous le Gouvernement précédent. C'est cohérent. Ce n'est pas un bouleversement. Le contrat d'objectifs et de moyens de la holding est en voie d'achèvement : compte tenu du bal des egos qui se tenait à France 24, avant l'arrivée de Marie-Christine Saragosse, ce n'était pas gagné d'avance !

Les avances à l'audiovisuel public s'élèvent à 3,6 milliards d'euros, en hausse de 3 % par rapport à 2013. Cette évolution de la contribution à l'audiovisuel public, ancienne redevance, s'explique par son augmentation de deux euros l'année dernière, et par l'actualisation programmée en loi de finances qui correspond à la prévision d'inflation. Mais la redevance n'a plus le dynamisme d'antan, car l'usage de l'ordinateur se répand au détriment de celui du poste de télévision. Une partie de ces avances est redistribuée à Arte France, qui marche convenablement, conquiert des parts de marché, mais dont les crédits seront diminués de 0,8 % ; et une autre partie à Radio France, qui fait du bon travail et a engagé la baisse de ses dépenses. L'année 2014 sera celle de la fin de la rénovation de la Maison de la radio.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Belot

Moi non plus. C'est une aventure de quinze ans. Quant à l'Institut national de l'audiovisuel (Ina), il y a là une affaire qui m'interpelle. Grâce à son équipe jeune, compétente et pêchue, cette entreprise marche bien, dispose de recettes propres importantes et se situe sur un marché mondial puisqu'elle dispose de l'intégralité des contenus de la télévision publique française depuis ses origines. Mieux que cela : elle avait un projet, celui de regrouper ses cinq installations actuelles sur un site unique en Seine-et-Marne, en vue duquel elle accumulait chaque année un peu d'argent.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Belot

C'est notre argent à tous, mais c'est aussi le produit de leur travail. Résultat : le projet auquel les personnels avaient adhéré n'existe plus. Comment encourager l'innovation, la vision, la création de projet dans ces circonstances ? C'est décourageant.

Avec France Télévisions, on aborde les sujets difficiles. L'entreprise a deux sources principales de recettes : les dotations publiques, en particulier la redevance audiovisuelle, et la publicité avant vingt heures, alors que les trois quarts des recettes publicitaires se font après vingt heures. Contrairement à ce qui se dit parfois, les audiences, qui ne sont pas mauvaises, ne sont pour rien dans la faiblesse de ce poste de recettes. Celle-ci tient essentiellement à ces horaires restreints et au marché de la publicité, dont même les chaînes privées déplorent l'atonie.

Il y a quatre ans, le Gouvernement a annoncé que la suppression de la publicité serait compensée par des crédits budgétaires. Un contrat d'objectifs et de moyens a été signé. Mais l'État ne tiendra pas ses engagements en 2014, ni en 2015. Il faut donc ajuster les dépenses. Un avenant au contrat précité a été signé pour la période 2013-2015, et prévoit notamment une réduction de 650 équivalents temps plein à l'horizon 2015. Il faudra veiller à ce que France 3, qui concentre l'essentiel des troupes, ne soit pas seule à payer les pots cassés.

À titre personnel, je ne voterai pas ce budget et m'en remets à la sagesse de la commission. Je ne conteste pas les diminutions de crédits, qui ont leur logique, mais l'indécision relative à la Hadopi ainsi qu'à l'Ina : la forme plus que le fond.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Merci pour cet examen très approfondi et les convictions fortes que vous avez exprimées.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La connaissance historique de Claude Belot nous est précieuse.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

David Assouline, rapporteur de la commission de la culture, nous prie d'excuser son absence. Selon lui, la maquette qui nous est soumise est la moins mauvaise possible. Il estime par conséquent souhaitable de la défendre. Le Gouvernement sollicite en effet tous les acteurs pour redresser nos comptes publics. Une dépêche de ce matin titrait que l'État mettait France Télévisions à la diète...

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Tout de même. Je souhaite également que France 3 soit préservée. Paris a toujours tendance à protéger son pré carré.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Or France 3 a un rôle majeur dans notre pays. Il est essentiel que les gens soient bien informés, et de manière objective.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Oui. Je me réjouis que les aides au pluralisme soient globalement préservées.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Mais les résultats obtenus poussent à s'interroger... Le pluralisme est pourtant une exigence constitutionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je préconise donc l'adoption des crédits de la mission. Il faut accompagner les efforts du Gouvernement pour réduire nos déficits. Nous en avions collectivement fait le voeu l'an passé.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Sur la Hadopi, je partage le souhait de notre rapporteur spécial : il faut sortir de cette situation le plus vite possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mme Garriaud-Maylam se réjouit-elle de la rigueur ou y voit-elle une menace ?

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Je m'en réjouis. En tant que co-rapporteure de la commission des affaires étrangères pour l'action audiovisuelle extérieure de la France, je n'ai guère d'observations particulières à faire. Je tiens simplement à féliciter Claude Belot pour son excellent travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Soyez remerciée de votre participation à nos travaux. J'y vois le signe de la bonne coopération entre nos commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Ce rapport est en effet excellent. Une précision sur les aides au transport postal : leur diminution annoncée de 100 millions d'euros est-elle vraie ou fausse, dès lors que ces crédits sont transférés sur le programme 134 ?

Les crédits de l'AFP augmentent de 3 % : ce n'est pas de la rigueur. Cela témoigne plutôt d'une forte priorité. Certes, c'est une excellente entreprise, mais - chose invraisemblable - elle n'a pas de statut et ne veut pas se réformer. Pour combien de temps encore ?

Je m'inquiète également de la hausse des autorisations d'engagement du programme « Livre et industries culturelles ». Certes, les crédits ne seront pas dépensés cette année, mais des engagements seront pris. J'avais déjà émis des doutes sur le déménagement du ministère de l'écologie à la Défense et, quoique ne connaissant pas bien le dossier du quadrilatère Richelieu ou de la BnF, j'estime qu'il y a là matière à faire des économies.

Les recettes de l'audiovisuel public augmentent de 3 % mais les dotations diminuent : comment expliquer ce décalage ? Et avons-nous vraiment besoin de neuf chaînes de télévision publiques ? Quant à la Hadopi, allons au bout de la logique : déposons un amendement visant à la supprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Vous soulignez dans votre rapport que l'aide au transport postal diminuera fortement en 2014. La Poste va-t-elle accepter, eu égard à son statut, de poursuivre ses efforts ?

Un mot sur les aides au pluralisme. La liste des titres aidés en fait apparaître une dizaine qui sont relatifs aux programmes télévisés. Télépoche reçoit ainsi 5 millions d'euros d'argent public : quel en est l'intérêt ? Dans le même temps, la presse scientifique et technique ne reçoit quasiment rien. Le résultat est désastreux : la presse consacre des pages entières aux détails croustillants de notre vie politique, mais il n'y a rien sur les sujets sérieux comme les organismes génétiquement modifiés (OGM) par exemple. Il serait bon de faire évoluer les choses en la matière.

S'agissant de la taxe sur les smartphones, je suggère au rapporteur général de conseiller le Gouvernement...

La page 40 de la note de présentation relève que le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) sera neutralisé pour Radio France pour 4,5 millions d'euros. Cela annonce-t-il une réforme du CICE ?

Monsieur le rapporteur général, quand le groupe socialiste était dans l'opposition, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, il avait un vrai projet de réforme du secteur des médias, et j'ai pu faire des propositions qui s'en inspirent partiellement. Que les grands groupes médiatiques dépendent à ce point de la commande publique est une anomalie démocratique. Vous aviez raison de le dénoncer à l'époque. Les grands médias ne respectent pas l'exigence de neutralité qui devrait être la leur, surtout en période de campagne électorale. C'était vrai en 2007 à l'égard de Nicolas Sarkozy, comme en 2012 à l'égard de François Hollande.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

En ce moment, je ne vois guère de médias qui soutiennent François Hollande !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Vivre de la commande publique prive de libre arbitre. Ces groupes sont tenus par leurs intérêts et perclus de conflits d'intérêts. Aucune entreprise régionale n'a jamais réussi à tisser de partenariat avec ces groupes nationaux - nous devrions y réfléchir. Si vous repreniez votre texte, je le soutiendrais. Mais il est toujours difficile d'être aussi courageux dans la majorité qu'on l'a été dans l'opposition.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

L'opposition procure un certain confort, que l'on regrette parfois...

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Je remercie à mon tour le rapporteur spécial pour la qualité de son travail. Les aides à la presse représentent près de 7,5 % du chiffre d'affaires du secteur, pour un résultat qui, à l'issue de sa présentation par la Cour des comptes, nous avait édifiés. Le rapporteur spécial souhaite que le débat budgétaire soit l'occasion de trouver le niveau et la forme adéquats de soutien public à la presse. Nous partageons son voeu car l'État n'en a clairement pas pour son argent. Je rejoins Francis Delattre sur le pluralisme. De plus, l'allocation des aides est opaque.

Je suivrai le rapporteur général en soutenant le budget de cette mission, mais en période d'argent public rare, il faut rester vigilant. Le secteur doit se moderniser effectivement, et de sa propre initiative : ce n'est pas aux pouvoirs publics de s'en charger.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Belot

Je partage l'analyse du rapporteur général sur certains points, notamment sur Hadopi.

Monsieur Delahaye, nous déplorons tous la situation de l'AFP, qui est un « ovni » dans le paysage institutionnel français. L'entreprise fonctionne et personne n'a encore eu le courage d'y toucher. Son équilibre financier est assuré par des recettes qui viennent de ses postes du monde entier, surtout d'Amérique et d'Asie - celui de Paris étant déficitaire. J'ai pourtant constaté, notamment à l'occasion d'un contrôle sur pièce et sur place à Hong Kong, le prestige de cette entreprise jalousée dans de nombreux pays.

Rien n'indique que le chantier du quadrilatère Richelieu soit semblable à celui de la Maison de la Radio - il a fallu se débarrasser de l'architecte -, mais restons vigilants.

Au cours de l'audition pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes sur les aides à la presse demandée par notre commission des finances, le numéro deux de La Poste nous a confié que l'aide au transport qu'il recevait était pour lui destinée à soutenir la distribution en milieu rural, dont il se passerait en l'absence d'aide. D'où le transfert de ces crédits sur la mission « Economie » au titre de sa mission de service public. La Poste s'accroche à son contrat d'objectifs et de moyens, valable jusqu'en 2016, en conditionnant le maintien du service en zone rurale à la pérennité de l'aide. En 2012, La Poste était bénéficiaire de 600 millions d'euros, et en touchait 450 au titre de l'aide au transport.

Mais les aides au transport postal diminueront bien de 100 millions d'euros l'année prochaine. Bien qu'elles ne soient plus rattachés au programme 180 « Presse » de la mission « Médias, livre et industries culturelles », j'ai souhaité, dans un souci de transparence, présenter leur évolution afin de vous donner une analyse de la trajectoire de l'ensemble des aides directes à la presse écrite.

Yvon Collin a raison : la presse n'a pas su se moderniser. La situation n'est pas satisfaisante. Elle a conservé le même logiciel technique en vigueur depuis quarante ans, et souffre de la même absence de pluralisme. Suivant les régions, quelques familles ou quelques grands groupes quadrillent le territoire. Soutenir financièrement une modernisation qui n'a pas lieu n'est pas de bonne méthode.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Le rapport de Claude Belot ne sera peut-être pas présenté en séance publique, mais nous veillerons à le diffuser largement.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles », ainsi que ceux du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

La commission procède ensuite à l'examen du rapport de MM. Marc Massion et Jean Arthuis, rapporteurs spéciaux, sur la participation de la France au budget de l'Union européenne (article 41).

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Le rapport relatif à la participation de la France au budget européen aurait dû nous être présenté par Marc Massion et Jean Arthuis, mais ce dernier est retenu au mariage des deux formations du centre.

- Présidence de Mme Michèle André, vice-présidente -

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Je lui ai fait la même remarque, qu'il a tenu à rectifier : c'est un rassemblement, non un mariage.

La contribution française au budget communautaire prend la forme d'un prélèvement sur les recettes de l'État. L'article 41 du projet de loi de finances pour 2014 l'évalue à 20,14 milliards d'euros, soit une augmentation de 2,7 %, ou 540 millions d'euros, par rapport à 2013. L'année dernière et celle d'avant, la hausse s'élevait à 720 millions d'euros.

En juin dernier, à l'occasion d'un point d'étape sur les enjeux et les perspectives budgétaires de l'Union européenne, Jean Arthuis et moi-même avions mis l'accent sur trois aspects : les dépenses administratives de l'Union européenne, les ressources propres du budget communautaire et la gouvernance économique, financière et budgétaire de la zone euro. Mon intervention ne revient pas sur ces éléments qui font, de plus, l'objet d'une reprise dans la note de présentation qui vous a été communiquée.

Le cadre financier pluriannuel 2014-2020, largement issu d'un accord adopté au terme de longues négociations par le Conseil européen les 7 et 8 février 2013, fixe les plafonds suivants : 1 082,55 milliards d'euros en crédits d'engagement (CE) et 1 023,95 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Ces 58,6 milliards d'euros d'écart s'ajoutent au stock déjà préoccupant de restes à liquider (RAL), ces engagements pris par l'Union européenne mais non encore couverts par des paiements. Ce stock est estimé à 225 milliards d'euros fin 2013 et continuera d'augmenter l'année prochaine.

Le nouveau cadre pluriannuel s'inscrit dans une certaine continuité à l'égard du précédent. Seules trois rubriques connaissent des variations importantes : il s'agit des rubriques 1a « Compétitivité pour la croissance et l'emploi », qui croît de 58 % ; 3 « Sécurité et citoyenneté », en augmentation de 45 % ; et 5 « Administration », en hausse de 25 %.

Les négociations entre le Conseil et le Parlement européen ont très peu porté sur les montants des rubriques ou sur la structure des dépenses. Elles se sont concentrées sur la flexibilité entre les années et les rubriques : la marge globale pour les paiements, la marge globale en faveur de la croissance et de l'emploi, la flexibilité pour faire face au chômage des jeunes et renforcer la recherche et, enfin, la marge pour imprévus ont été créées à cette fin.

Je me félicite de la création, dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020, du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD), appelé à succéder au Programme européen d'aide alimentaire aux plus démunis (PEAD). Ce fonds fera désormais partie de la politique de cohésion, alors que le PEAD relevait de la PAC. Sa dotation s'élevait à 500 millions d'euros par an depuis 2009, celle du FEAD sera portée à un niveau maximal de 557 millions d'euros par an, soit une enveloppe totale sur 2014-2020 de 2,8 milliards d'euros que les États membres pourront compléter à hauteur de 1,1 milliard d'euros. En 2013, quatre associations distribuent les produits financés par le PEAD : la Fédération française des banques alimentaires, les Restos du coeur, le Secours populaire et la Croix-Rouge française.

J'en arrive à la négociation budgétaire pour l'année 2014, qui est toujours en cours. L'avant-projet de budget présenté par la Commission européenne au printemps propose une baisse de 6 % des CE par rapport à 2013, soit 142 milliards d'euros. Seuls les crédits de la rubrique 1a « Compétitivité » y progressent de 3,3 %, le financement de la politique de cohésion diminuant de 13,5 %, et les rubriques 3 « Citoyenneté, liberté, justice » et 4 « L'Union européenne, acteur mondial », respectivement, de 9,4 % et 12,5 %. Les CP y affichent, quant à eux, une hausse de 2,1 % pour atteindre 136 milliards d'euros.

Le projet de budget adopté par le Conseil en septembre 2013 se veut plus rigoureux : 310 millions d'euros sont retranchés en CE, ce qui conduirait à une baisse de 6,2 % par rapport à 2013, et 1,06 milliard d'euros en CP, ramenant la hausse pour 2014 à 1,3 % par rapport à 2013. Le 23 octobre 2013, le Parlement européen a voté en séance plénière un budget très proche des propositions de la Commission : baisse de 5,5 % des CE et hausse de 2,2 % des CP.

La proposition d'augmentation des crédits formulée par nos collègues députés européens rendra difficiles les négociations entre les deux branches de l'autorité budgétaire lors de la phase de conciliation, censée aboutir dans le courant du mois de novembre.

Le projet de loi de finances pour 2014 évalue le prélèvement sur recettes au profit du budget de l'Union européenne à 20,14 milliards d'euros, soit une hausse de 2,7 % en un an. En vingt ans, ce montant a été multiplié par cinq. Nous savons d'expérience qu'au terme de l'exécution 2014, des ouvertures nouvelles en crédits de paiement seront intervenues et que le prélèvement effectif ne sera pas celui inscrit en loi de finances.

Le prélèvement a en effet été surestimé de plus de 1,5 milliard d'euros en 2007, sous-estimé de 300 millions d'euros en 2008, sous-estimé à nouveau d'un milliard d'euros en 2009, surestimé de 556 millions d'euros en 2010, légèrement surestimé en 2011 - à hauteur de 5 millions d'euros - puis sous-estimé en 2012 de plus de 170 millions d'euros. En 2013, la sous-estimation du prélèvement s'élèverait à 1,8 milliard d'euros au terme de l'exécution. Le phénomène des restes à liquider explique l'essentiel de ces récents écarts en exécution et laisse planer l'aléa de budgets rectificatifs d'envergure à partir de l'année prochaine. Nous interrogerons le Gouvernement sur l'impact précis des restes à liquider sur notre contribution nationale et sur les mesures qui seront prises pour résoudre ce problème. L'estimation du prélèvement soumise au vote du Parlement doit être plus précise et plus fiable.

J'en viens à la question de notre solde net. La France devrait demeurer en 2014 le deuxième contributeur au budget communautaire derrière l'Allemagne et devant l'Italie, le Royaume-Uni et l'Espagne, avec une contribution équivalant à 16,7 % du total des ressources de l'Union européenne. Mais avec un peu plus de 11 % des dépenses communautaires, elle n'est plus que troisième pays bénéficiaire, derrière l'Espagne et la Pologne. Notre situation se dégrade chaque année et demeure fragile puisque les trois quarts des crédits européens qui nous sont destinés sont des dépenses agricoles.

Notre solde net ne cesse de se dégrader et a été multiplié par dix-huit en douze ans. Il a dépassé en 2011 la barre des 7 milliards d'euros par an. Certes, le solde net ne retrace qu'imparfaitement les gains économiques et en aucune façon les gains politiques de la participation à l'Union européenne, mais cette situation n'en est pas moins préoccupante.

Je recommande toutefois à la commission d'adopter sans modification l'article 41 du projet de loi de finances pour 2014. Jean Arthuis rappelle pour sa part que le vote est sans effet puisque la contribution de chaque État membre de l'Union européenne est fixée par les traités. Au surplus, il souligne que la contribution effective excède régulièrement le montant inscrit en loi de finances. L'exécution 2013 en apporte à nouveau la démonstration. En conséquence, il préconise l'abstention sur l'article 41 du projet de loi de finances pour 2014.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Effectivement, notre vote n'est pas déterminant, puisque les traités définissent notre contribution au budget communautaire. Mais nous sortons d'une période de négociations compliquées, notamment sur la politique régionale et les politiques structurelles, ou encore la PAC, à propos de laquelle la France a défendu honorablement ses positions. Nous avons besoin de grandes politiques d'avenir, en matière de technologies, d'infrastructures et de grands travaux. Sur tous ces chantiers, l'Europe doit être plus dynamique. Le budget européen n'a pas eu l'effet de levier escompté, elle n'a pas été, jusqu'ici, le catalyseur des initiatives conjointes. Plus généralement, je rejoins les analyses du rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je voterai l'article 41. L'Europe est un sujet central. Il faut, en effet, mutualiser les efforts dans les grands secteurs d'avenir. En vérité, le budget européen est un « budget croupion ». Sa faiblesse ne permet de soutenir que des actions ponctuelles. Pourtant, l'Europe constitue une chance pour nous dans la mondialisation. Enfin, je me demande si le chèque britannique est reconduit.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Oui, la correction britannique est conservée dans le cadre 2014-2020.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Massion

Le rabais britannique est de l'ordre de 5,5 milliards d'euros. Mais ce n'est pas le seul : le Danemark, la Suède, les Pays-Bas, ou encore l'Autriche bénéficient de rabais spécifiques sur leurs contributions au budget européen. Il n'en reste pas moins que l'Europe doit exister davantage politiquement, économiquement et diplomatiquement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Merci, nous témoignons ainsi d'une belle espérance en faveur de l'Europe.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, de l'article 41 du projet de loi de finances pour 2014.

- Présidence de M. Philippe Marini, président -

Enfin, la commission procède à l'audition de M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances, sur le bilan du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Il y a un an, une série de mesures dites « Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi » nous étaient présentées, avec huit leviers d'action et trente-cinq mesures, dont la plus significative était le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), annoncé par Louis Gallois, repris par le Gouvernement et adopté à l'occasion du collectif budgétaire fin 2012.

La Banque publique d'investissement, dite Bpifrance, a ensuite été créée, puis un nouveau programme d'investissements d'avenir (PIA) a été annoncé cet été. Soit dit en passant, il serait sans doute utile que vous nous parliez de son financement. En effet, 12 milliards d'euros d'investissements supplémentaires, c'est bien - et certains y verront un satisfecit à l'égard de la méthode qui avait été utilisée par le Gouvernement de François Fillon - mais même s'il ne s'agit pas d'une dépense susceptible d'affecter significativement le solde public dit maastrichien, c'est l'emprunt qui assure le financement des engagements qui sont ou seront pris. Le Premier ministre a évoqué des recettes de privatisation : pourriez-vous nous en dire un peu plus ?

Je reviens aux suites données au CICE, sans doute ce que le Premier ministre a appelé hier une « nouvelle donne pour l'innovation », annonce dont vous aurez à coeur de faire ressortir la cohérence devant notre commission des finances.

Pour terminer cette présentation, je rappellerais que nous vivons une conjoncture économique dans laquelle les tensions les plus vives sur l'euro semblent être apaisées. Il n'en reste pas moins que, par rapport à des pays situés hors zone euro et à l'exception de l'Allemagne, nous devons constater que la plupart des pays de la zone euro connaisse une situation économique et d'emploi décevante.

Au regard de cette conjoncture, que peut-on dire des mesures annoncées l'an dernier - et de celles annoncées depuis lors - pour nous permettre d'engager cette session budgétaire dans des conditions un peu plus confiantes en ce qui concerne la compétitivité de nos entreprises ?

Comme vous le voyez, monsieur le ministre, la commission des finances est au complet, ce qui témoigne de ses incertitudes et de son besoin d'information.

Debut de section - Permalien
Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

Merci pour votre accueil. Cette audition tombe le jour même du premier anniversaire de la remise du rapport Gallois au Premier ministre, rapport suivi dès le lendemain par l'annonce par le Gouvernement du Pacte pour la croissance, la compétitivité et l'emploi qui reprenait la quasi-totalité des propositions de Louis Gallois. Avec Arnaud Montebourg, Fleur Pellerin et Geneviève Fioraso, j'accompagnais hier le Premier ministre à Saint-Étienne pour fêter cet anniversaire.

Vous avez évoqué, monsieur le Président, la situation économique en Europe. D'après la Commission européenne, huit pays de la zone euro seront en récession cette année et seulement deux l'année prochaine. Les prévisions de croissance de la France sont validées : 0,2 %, au lieu des 0,1 % que nous avions annoncés. Avant l'été, la même Commission européenne prévoyait - 0,1 % pour notre pays et les économistes - 0,3 %. Certes, notre croissance a été heurtée : après un bon deuxième trimestre, le troisième l'a moins été tandis que l'activité repart au dernier trimestre, notamment le marché de l'automobile, avec Renault, mais aussi PSA qui tirent leur épingle du jeu. Le Commission européenne prévoit, comme le Gouvernement, 0,9 % de croissance pour 2014 et 1,7 % en 2015, ce qui permettra d'inverser durablement la courbe du chômage. Ces chiffres valident une stratégie européenne et nationale. Il y a encore un an, certains se demandaient si l'euro allait survivre, si la Grèce et Chypre allaient sortir de la zone euro. Les décisions prises par plusieurs États européens ont permis d'apaiser les tensions et la Banque centrale européenne a garanti la pérennité de l'euro, notamment lorsque son président, Mario Draghi, a dit qu'elle sauverait l'euro quoi qu'il arrive.

En 2013, la France a fait mieux que la zone euro ; elle devrait retrouver en 2014, mais surtout en 2015, une croissance plus soutenue. Vous avez évoqué des pays hors zone euro : la Grande-Bretagne connait effectivement des taux de croissance spectaculaires, mais elle part d'un point beaucoup plus bas que la France.

Nous réduisons notre déficit de manière constante : en 2011, il était de 5,3 % et il eut été à nouveau du même montant en 2012 si nous n'avions pas pris les mesures d'ajustement nécessaires, ce qui nous a permis de le ramener à 4,8 %. En 2013, le déficit sera de 4,1 % et l'année prochaine, dans une fourchette comprise entre 3,6 % et 3,8 %. En 2015, nous serons en-dessous de 3 %. Si la Commission européenne estime à cette date notre déficit à 3,7 %, c'est qu'elle ne tient pas compte des mesures d'ajustement supplémentaires prévues pour 2015.

J'en arrive au Pacte de compétitivité, qui est l'acte économique fondateur de notre politique économique. Le Pacte part du constat de la perte de compétitivité de la France, qu'évoquait déjà François Hollande lorsqu'il était candidat. En juin 2012, lors du débat d'orientation sur les finances publiques, j'avais dit nos inquiétudes à ce sujet. Partant du rapport Gallois, nous avons défini des voies d'action pour redresser la compétitivité française. Je suis persuadé qu'il est possible de renforcer notre tissu productif grâce à une insertion harmonieuse dans les échanges mondiaux grâce à une compétitivité positive et pérenne basée non pas sur l'écrasement des salaires et le moins disant social mais sur l'investissement, l'innovation et la productivité.

Je participais hier soir à un débat à la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, en présence de Louis Gallois. Il nous disait qu'il faut miser sur l'innovation et la montée en gamme et non sur l'austérité. Je fais mienne cette formule.

Depuis un an, le cadre fiscal est favorable à l'investissement et à l'innovation des entreprises, le marché du travail a été réformé, la règlementation a été améliorée et le financement de l'économie répond aux besoins des entreprises en matière d'endettement et de fonds propres. Hier, le Premier ministre a rappelé que le Gouvernement ne faisait pas de cadeaux aux patrons mais qu'il faisait en sorte que les entreprises puissent investir pour embaucher, le but étant d'accroître la productivité globale de l'économie qui a ralenti durant la dernière décennie. Cette politique de l'offre n'est pas exclusive d'une action sur la demande et le pouvoir d'achat, qui s'est d'ailleurs renforcé du fait d'une très faible inflation dans la zone euro. Cette politique permet de réduire les coûts du travail, grâce au CICE, et les coûts de recherche et développement (R&D), grâce à la consolidation et à l'extension du crédit d'impôt recherche.

Pour financer l'économie, l'épargne des entreprises a été réorientée, Bpifrance a été créée et le PEA-PME vous sera proposé à l'occasion du budget pour 2014. Ces politiques s'inscrivent dans la durée afin que les entreprises puissent en tenir compte. La rénovation des structures économiques de notre pays est de grande ampleur et conforte notre modèle social. Louis Gallois avait demandé la sanctuarisation de certains dispositifs fiscaux, dont le crédit d'impôt recherche (CIR).

Le Pacte de compétitivité est donc un choix politique, qu'aucun précédent Gouvernement n'avait osé. La compétitivité des entreprises, c'est l'intérêt de la France, l'intérêt de sa jeunesse.

La très grande majorité des 35 mesures du Pacte a été mise en oeuvre. Le CICE est la mesure phare et son utilisation est totalement transparente. Un comité de suivi partenarial permet d'informer la représentation nationale. Son rapport préliminaire montre que la montée en puissance du dispositif a été rapide : le taux de recours devrait être de 97 % l'an prochain et les entreprises s'approprient le dispositif, n'en déplaise à ceux qui estimaient le CICE trop complexe. Les premiers travaux d'évaluation confirment qu'une part importante du CICE bénéficie à l'industrie : un débat sur le positionnement du curseur avait eu lieu et nous avions choisi une voie moyenne, en le fixant à 2,5 SMIC. Le dispositif bénéficie à hauteur de 20 % à l'industrie. En outre, l'effet de second tour est loin d'être négligeable : le CICE bénéficie à l'ensemble de l'économie grâce à la baisse du prix des consommations intermédiaires. Aujourd'hui, services et industrie sont étroitement liés. Il serait absurde de les opposer.

Le montant des préfinancements de Bpifrance progresse avec constance. Fin septembre, plus de 10 000 dossiers de préfinancement ont été traités pour un montant de 920 millions d'euros, et la majorité des dossiers provenait de petites entreprises. Ne confondons pas CICE et préfinancements : ces derniers s'adressent aux entreprises qui ont besoin de trésorerie pour bénéficier du CICE. Selon l'Insee, le CICE a permis de créer ou de prévenir la destruction d'environ 30 000 emplois.

Enfin, le rapport du comité de suivi souligne qu'à la suite des consignes qui ont été données, les abus des entreprises donneuses d'ordre sont en passe de disparaître.

Le Pacte porte aussi sur le financement des entreprises : j'ai oeuvré à une mobilisation massive de financements et je garde un bon souvenir des débats que nous avons eus au Sénat tant sur la création de Bpifrance que sur la réforme bancaire.

Bpifrance a accompagné près de 60 000 entreprises durant les neuf premiers mois de l'année ; 1,5 milliard d'euros de trésorerie a été injecté dans l'économie, grâce au préfinancement du CICE, du CIR et du dispositif de trésorerie offert par Bpifrance. Ce fut une bouffée d'oxygène pour nos entreprises, surtout pour les PME. L'encours de crédit aux sociétés françaises non financières est aujourd'hui quasiment stable alors qu'il se contracte dans la zone euro, ce qui témoigne de la relative bonne santé de notre économie. Enfin, nos entreprises se financent à des niveaux historiquement bas, inférieurs à la zone euro. La France n'a pas décroché, n'en déplaise aux Cassandre.

Grâce au Gouvernement, les entreprises ont accès à des sources de financement autres que bancaires. Cette évolution est inéluctable : le système va devenir plus désintermédié. Les entreprises vont devoir sortir de leur relation unilatérale avec les banques. C'est pourquoi nous avons réformé le code des assurances et nous vous proposerons la réforme de l'assurance vie lors du collectif budgétaire.

Concernant l'innovation, nous approfondissons les mesures du Pacte de compétitivité : le projet de loi de finances sera l'occasion de lancer un nouveau plan d'investissements d'avenir (PIA), doté de 12 milliards d'euros. Ce plan sera financé par un versement du budget de l'État vers le compte des opérateurs du Trésor en 2014, ce qui ne modifiera pas le besoin de financement car les décaissements seront étalés dans le temps par la montée en puissance des appels à projet du PIA-II fin 2014. Ce plan sera également financé par une gestion active et responsable du patrimoine de l'État, notamment grâce à des cessions de participation. Le solde sera intégré aux besoins de financement de l'État. L'impact sur les finances publiques sera donc limité grâce à des modes de financement vertueux. Des avances remboursables donneront lieu à des retours financiers qui diminueront le déficit maastrichien. Enfin, des dotations non consommables ont un faible impact. Au total, les subventions seront limitées à 32 % du programme total, soit 4,7 milliards d'euros sur la dette et de 3,8 milliards d'euros sur le déficit.

Avec Daniel Raoul, j'ai lancé à Angers le statut de jeune entreprise innovante (JEI) : les exonérations sont dégressives, maintenues pendant huit ans et le dispositif est étendu aux dépenses d'innovation, ce qui permet de s'approcher du marché, élément essentiel pour les JEI.

Le plan innovation, élaboré par Geneviève Fioraso et Fleur Pellerin, a été présenté hier par le Premier ministre et il comprend quatre objectifs : promouvoir l'innovation pour tous, encourager l'innovation ouverte, mobiliser l'innovation pour la croissance, évaluer les politiques d'innovation publique. L'État continuera à financer l'innovation : le fonds national de l'innovation sera doté de 240 millions d'euros et il financera l'innovation sous toutes ses formes. De plus, 1,1 milliard d'euros sera mobilisé par des fonds de capital-risque spécifiquement dédiés aux entreprises innovantes et de croissance.

Ce Pacte de compétitivité est complet et il commence à porter ses fruits. Rétablir la compétitivité est une entreprise de longue haleine qui va mobiliser le Gouvernement et la représentation nationale dans la durée. Ce Pacte est notre meilleure chance pour l'économie, l'emploi et l'investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je vous remercie pour cet exposé exhaustif.

Il y a un an, nous avons auditionné Louis Gallois qui nous a présenté son rapport fort intéressant. Le préfinancement du CICE est un succès : l'objectif de Bpifrance était d'atteindre 800 millions d'euros et elle dépasse un milliard d'euros avec 11 200 dossiers traités fin octobre.

Le rapport du comité de suivi porte en partie sur la sectorisation du CICE : faut-il aider davantage l'industrie et les entreprises exportatrices ? Au-delà des chiffres bruts, il faut tenir compte des effets de second tour. Or, l'industrie bénéficie de prestations émanant de sociétés de service en amont. À supposer que l'on veuille recentrer le CICE, le droit européen le permettrait-il ?

Sur huit des dix dernières années, la France se situe devant l'Allemagne en matière d'investissements étrangers, en stock comme en flux. Les investisseurs internationaux estiment donc que la France reste attractive. Les flux d'investissements s'élèvent à 20 milliards d'euros en 2012, en baisse de 8 milliards d'euros par rapport à 2011, mais à 5 milliards d'euros en Allemagne, en baisse de 30 milliards d'euros.

L'Allemagne pourrait instaurer un salaire minimum d'un montant de 8,5 euros par heure, ce qui pourrait avoir des conséquences sur le différentiel de compétitivité entre nos deux pays. Quelle est votre appréciation sur ce point ? Quelles seraient, à première vue, les conséquences de cette mesure sur la compétitivité ? Plus largement, commet pourrait-elle rétroagir sur le débat sur le SMIC européen ?

La décision n° 32 accompagne le développement des PME innovantes, en mobilisant l'achat public. De nouvelles mesures ont été annoncées hier. En quoi ces dispositifs et ces financements spécifiques de corporate venture répondront-ils aux attentes des PME ?

La BPI dispose de 500 millions d'euros pour garantir les crédits de trésorerie des entreprises : ce produit a été plébiscité par les entreprises. Faut-il en déduire que les banques commerciales deviennent plus frileuses ou que la santé des entreprises françaises se dégrade ? La fédération bancaire française nous a dit mardi dernier que la capacité d'intermédiation bancaire était en recul et qu'il fallait s'attendre à des effets pervers à cause de la règlementation européenne.

Les assises de la fiscalité des entreprises se tiendront en 2014. Pourriez-vous préciser de quelle façon le Parlement sera associé à cet important travail ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Dans son dernier avis public, le Haut Conseil des finances publiques a estimé que le CICE ne permettrait pas de créer 90 000 emplois, rappelant que les effets d'un crédit d'impôt ne sont pas équivalents à ceux d'un allègement de charges. Que pensez-vous de cette analyse ? Le Gouvernement va-t-il modifier le CICE, pour le transformer en un allègement de charges ?

Debut de section - Permalien
Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

Le comité de suivi a démontré que l'industrie et le commerce bénéficiaient tous deux du CICE dont l'objectif est de soutenir à la fois la compétitivité des entreprises et l'emploi. À l'époque, nous nous sommes demandés s'il fallait aller jusqu'à 3,5 SMIC, ce qui aurait eu un effet sur l'industrie, ou descendre à 1,5 SMIC, ce qui aurait avantagé l'emploi. Nous avons voulu viser à la fois l'industrie et les services en fixant le curseur à 2,5 SMIC. Si nous avons besoin d'une industrie forte, n'opposons pas industrie aux services, car nous avons besoin de ces derniers. Aujourd'hui, les industries bénéficient de 20 % du CICE, alors qu'elles ne représentent que 13 % de la valeur ajoutée totale de l'économie. Les entreprises exportatrices perçoivent les deux-tiers du CICE, et si les grandes entreprises exportatrices n'en perçoivent que 10 %, c'est parce que ce chiffre correspond à leur part dans l'emploi marchand total. N'oublions pas non plus les effets de second tour : les entreprises les plus exposées à la concurrence internationale bénéficient indirectement des baisses des prix dans les secteurs les moins exposés. Enfin, le CICE donne un coup de pouce aux entreprises non exportatrices, ce qui leur permet d'accéder à l'international.

Si le CICE ne doit pas être capté par la grande distribution, je n'envisage pas pour autant de taxer spécifiquement ce secteur. En revanche, nous nous employons à ce que les relations commerciales de la grande distribution avec ses fournisseurs fonctionnent correctement. Je sais que la guerre des prix se poursuit et que des PME agroalimentaires souffrent. Les négociations vont donc se poursuivre pour aboutir à un meilleur équilibre. L'un des objectifs de la loi Hamon est d'ailleurs de fixer des règles du jeu plus claires et de sanctionner plus durement les dérives.

Le pacte de coalition en Allemagne sera signé sans doute d'ici un mois : le SPD voulant instaurer un salaire minimum, les inégalités seront réduites et la demande intérieure sera soutenue. Grace à cette avancée, l'Allemagne pourrait contribuer à réduire les déséquilibres dans la zone euro. Il faut une croissance plus coopérative en Europe entre les pays en situation d'excédents et les autres.

Le préfinancement du CICE a mieux fonctionné qu'attendu. Si Bpifrance a tenu ses objectifs, la mobilisation des banques privées a été plus tardive. Elles devront monter en puissance l'an prochain.

Beaucoup a été fait en faveur des PME innovantes, notamment en matière d'achats publics. Concernant le plan innovation annoncé hier par le Premier ministre, l'objectif est de renforcer le financement des PME de croissance en mobilisant 1,1 milliard d'euros de fonds publics, grâce à deux fonds spécifiques, l'un sur les écotechnologies et l'autre sur le capital développement. Le but est d'amener ces PME à devenir des entreprises de taille intermédiaire (ETI) exportatrices et innovantes. Nous souffrons d'un déficit en ce domaine.

De nouvelles mesures seront proposées lors du collectif budgétaire pour inciter les grandes entreprises à investir dans les PME qui réalisent 15 % de R&D. Nous souhaitons que le financement des start up augmente de plus de 30 %.

Les assises de la fiscalité devront moderniser la fiscalité des entreprises. Ces assises s'inspireront de celles de l'entreprenariat : il y aura des groupes thématiques présidés par des personnalités qualifiées proches du milieu de l'entreprise. Il faudra impliquer les parlementaires - en premier lieu les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat - dans les groupes de travail et au sein d'un comité de pilotage et de coordination. Ces assises débuteront à la fin de l'année et se dérouleront jusqu'au printemps prochain, afin d'anticiper sur le projet de loi de finances pour 2015.

Je respecte les travaux du Haut Conseil des finances publiques, mais sa tâche principale est de se prononcer sur la trajectoire des finances publiques. Le comité de suivi a dit que ce dispositif avait permis de créer ou d'éviter la destruction de 30 000 emplois. Nous atteindrons donc les 90 000 emplois initialement fixés.

Enfin, le CICE ne sera pas modifié, car il est essentiel que les entreprises sachent à quoi s'en tenir pour les prochaines années. Elles veulent de la lisibilité et de la stabilité, afin de pouvoir investir, de stimuler la croissance et de muscler l'embauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Avant d'entrer dans cette salle, j'étais pessimiste. Grâce à vous, je ne le suis plus ! Pourtant, un quotidien du soir titre aujourd'hui même : « La France frappée par plus de mille plans sociaux en un an ». Dans mon territoire, les fermetures d'entreprises se multiplient. Lorsque je m'en inquiète, on tente de me rassurer en me disant qu'un délégué au redressement productif veille, et une personne chargée des investissements de plus de trois millions d'euros vient également d'être nommée. Est-il normal que les collectivités soient laissées à l'écart et que tout se traite à Bercy ? Il arrive même que les préfets ne soient pas au courant !

Les entreprises réclament de la stabilité fiscale. Comment s'inscrire dans la durée à cet égard, tant au niveau national que local ?

Vous évoquez la mobilisation des achats publics ; encore faudrait-il que les collectivités territoriales aient les moyens de passer des marchés... Pour l'instant, elles réduisent plutôt leurs investissements.

Les investissements étrangers en France représentent, selon François Marc, 20 milliards d'euros : concernent-ils uniquement l'industrie ou tiennent-ils compte aussi des achats d'immeuble ou du PSG ?

Il y a un écart entre votre discours très volontariste et la réalité. Dans ma région, je n'ai mémoire d'aucun redressement d'entreprise depuis longtemps et aucun responsable de l'État n'est venu assister à l'implantation d'une nouvelle entreprise depuis vingt ans. Je suis surpris de cette nouvelle méthode qui laisse de côté les collectivités territoriales. Si l'on veut avancer, il faut le faire ensemble. J'espère que vos réponses nous remonteront le moral.

Debut de section - PermalienPhoto de Edmond Hervé

Je soutiens totalement votre position. Dans l'agroalimentaire, nous connaissons les voies à suivre pour sortir de la crise : il faut augmenter la valeur ajoutée, ce que beaucoup d'entreprises n'ont pas su faire ; il faut reconstruire des filières, sinon la porte est ouverte à une concurrence effrénée ; il faut enfin tenir compte de tous les acteurs et non seulement des grandes centrales commerciales : l'Allemagne est le pays où le commerce de proximité est le plus développé. Il convient aussi d'identifier en amont les entreprises susceptibles de se développer ou celles pour lesquelles il conviendra de veiller à la succession de l'équipe de direction en cas de transition. Les établissements consulaires ont un rôle à jouer à cet égard. En outre, il est important que les entreprises utilisent les résultats des centres de recherche et d'innovation. Plus les assimilations sont rapides plus le processus est efficace.

L'Allemagne ou les pays nordiques ont basculé une partie de leur fiscalité des entreprises vers les ménages. Où en est-on du rapprochement de la CSG et de l'impôt sur le revenu, qui figurait parmi les engagements du Président de la République ?

Enfin, n'oublions pas les collectivités territoriales, qui représentent 12 à 15 % du PIB. Elles constituent un relais de croissance exceptionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Le déséquilibre dans les relations commerciales entre la grande distribution et l'industrie n'est pas sans lien avec la difficulté des industries agroalimentaires. Il s'agit d'un sujet récurrent. Nous avons été nombreux à le dénoncer lors de la loi de modernisation de l'agriculture, mais en dépit des intentions, on ne constate aucun rééquilibrage probant, malgré la mise en place d'un Observatoire des prix et des marges. En fait, la véritable cause, c'est que la France ne compte que cinq ou six centrales d'achat, contre une centaine en Allemagne. Les fournisseurs ne peuvent résister face à la menace d'un déréférencement. Il semblerait même que les centrales aient trouvé la parade à la suppression des marges arrière. Comment remédier à ce déséquilibre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

J'ai déposé un amendement lors de l'examen du texte sur la fraude fiscale. Le ministre du budget m'avait assuré qu'il lui donnerait un avis favorable dans le cadre du projet de loi de finances ou du projet de loi de finances rectificative : il s'agit de lutter contre les opérations qui permettent à la grande distribution de percevoir des marges arrière grâce à des officines situées en Suisse ou en Belgique.

Ne serait-il pas souhaitable de fusionner le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale afin de disposer d'une meilleure vision de l'ensemble des finances publiques et des prélèvements obligatoires ? Le niveau de ces derniers crée un risque de délocalisation de l'élevage et de certaines industries agroalimentaires dans l'ouest de la France. En Bretagne, sous couvert de prestations de service internationales, des ouvriers d'Europe de l'Est travaillent dans le bâtiment ou sur des chantiers de travaux publics, mais aussi dans l'agroalimentaire : dans un abattoir de porc à Evron, en Mayenne, le coût horaire d'un ouvrier est supérieur de dix euros à celui d'un ouvrier allemand. Ne faut-il pas cesser de taxer la production, notamment sous forme de charges sociales ? Taxer la production, en effet, c'est encourager la délocalisation ! Pourquoi ne pas substituer à un impôt qui pèse sur la production un impôt sur les produits qui serait neutre quant au lieu de fabrication ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La fédération bancaire française craint que l'entrée en vigueur des nouvelles normes européennes et internationales, en matière de solvabilité et de liquidité des banques, n'entraîne une évolution progressive, mais irréversible, du mode de financement de l'économie française, avec une baisse de l'intermédiation bancaire au bénéfice du financement direct des entreprises par le marché. Cette analyse semble implacable. Quelle est la cohérence de la politique fiscale avec cette évolution de fond ? L'imposition des dividendes augmente, le régime fiscal de l'assurance-vie est en cours de réexamen, tandis que la taxe sur les transactions financières s'applique sur les transactions portant sur des actions et non sur d'autres produits financiers. Ne risque-ton pas de créer un biais de compétitivité en défaveur de notre industrie ? Enfin, si nous sommes appelés à participer aux assises portant sur la fiscalité des entreprises, nous ne nous déroberons pas.

Debut de section - Permalien
Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

Vous y serez associés ! Aussi bien le groupe de travail que le groupe de pilotage compteront des parlementaires, à commencer par les présidents et les rapporteurs généraux des commissions des finances. Le calendrier est en cours de discussion avec les acteurs concernés car on ne peut réformer la fiscalité des entreprises malgré elles.

Je ne suis pas un béni-oui-oui ni un adepte de la méthode Coué. La dérision n'est pas de mise. Il s'agit de sujets sérieux et graves. Tous les élus se battent comme je l'ai fait lorsque j'étais président d'une agglomération frappée par la crise de l'automobile. Je ne cherche pas à insuffler un optimisme béat. Nous avons déployé un éventail de mesures sans précédent qui portent leur fruit. Mais je n'ai pas de baguette magique et les difficultés n'ont pas disparues pour autant. Avec Arnaud Montebourg nous nous efforçons d'apporter des réponses aux plans sociaux, dus à la crise ou à des mutations économiques. J'ai déposé un projet de loi d'habilitation pour simplifier, par voie d'ordonnances, la vie des entreprises : je souhaite réformer le droit des faillites pour augmenter les procédures amiables et limiter les redressements judiciaires, d'une part, et améliorer la situation des créanciers pour inciter les banques à consentir des financements nouveaux en accompagnement des restructurations, d'autre part. Le Gouvernement débloque des crédits. Les commissaires au redressement productif, sous l'autorité de leur ministre, ont vocation à travailler en coordination avec les collectivités territoriales.

En même temps, le Pacte pour la croissance, la compétitivité et l'emploi a une vocation offensive. Les économistes saluent le rattrapage en matière d'innovation. L'allègement des charges ou le crédit d'impôt ont des effets anticipés. J'assume la paternité du CICE. Cette mesure était nécessaire. Elle doit s'inscrire dans la durée. Si évolution il y a, elle devra l'améliorer non le remettre en cause.

La fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu aurait pour objet d'accroître la progressivité de l'imposition. La progressivité de l'impôt sur le revenu a déjà été renforcée à travers la réforme de l'ISF ou en soumettant les dividendes au barème de l'impôt sur le revenu. Sans doute conviendra-t-il, dans un second temps, de réfléchir à une meilleure harmonisation de la fiscalité des revenus du capital et du travail. Nous reprendrons les réformes dès que la croissance sera revenue. Mais il est aussi nécessaire faire une pause. Les citoyens sont inquiets. Dans l'immédiat, ils veulent de la stabilité.

Je partage votre diagnostic sur l'agroalimentaire : nous devons renforcer les filières, en évitant qu'elles ne soient victimes de la guerre des prix provoquée par la grande distribution. La France compte sept centrales d'achat mais 12 000 fournisseurs. Ce déséquilibre étant systémique, il appartient à l'État d'intervenir. Ainsi, récemment, nous avons gagné trois procès, en appel et en cassation, et les enseignes ont été condamnées pour déséquilibre significatif du fait de conditions imposées à leurs fournisseurs. Il faut aller plus loin. Comme les anglo-saxons qui ont recours au name and shame, nous devons pointer du doigt ces pratiques pour mieux les dénoncer. La loi Hamon renforce les sanctions, avec la création de sanctions administratives en cas de pratiques abusives, et rééquilibre les négociations qui s'engageront sur la base du tarif des fournisseurs.

Monsieur Arthuis, le Gouvernement s'est engagé à réfléchir, avec vous, à une réécriture de votre amendement qui vise à lutter contre l'optimisation fiscale liée aux marges arrière afin de mieux l'articuler avec le droit européen. Il trouvera sa place dans une loi de finances d'ici la fin de l'année. Le ministère du budget y travaillera avec vous.

Lors de leur élaboration, le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale font déjà l'objet d'une coordination accrue. De même, leur présentation souligne leur articulation : l'article liminaire de la loi de finances, nouveauté prévue par la loi organique, présente des données relatives à l'ensemble des administrations publiques ; le rapport économique, social et financier comprend une synthèse des éléments relatifs aux prélèvements obligatoires et de nos engagements européens. Je salue d'ailleurs le travail colossal accompli par les services de Bercy.

Comme vous, nous souhaitons moins taxer les facteurs de production...

Debut de section - Permalien
Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances

Tel était le but de la taxe sur l'excédent brut d'exploitation. Mais le projet n'était pas mûr. Les assises de la fiscalité sur les entreprises poursuivront le même objectif.

Il n'y a aucune contradiction entre le financement des entreprises et notre politique fiscale. Ainsi la réforme de l'assurance vie vise à réorienter l'épargne vers le financement des fonds propres des entreprises, tout comme le PEA-PME. Nous avons besoin d'un système bancaire solide et mieux régulé. Tel était l'objet de la loi bancaire. Mais nous devons aussi disposer d'un système bancaire compétitif : c'est pourquoi nous avons décentralisé, avec la Caisse des dépôts, 30 milliards d'euros vers le système bancaire pour résoudre les problèmes de liquidité et l'aider à financer les petites et moyennes entreprises. Nous devons adapter les produits d'épargne au financement des entreprises, en assurant à la fois un gain aux assurés et un rendement suffisant aux assureurs. Notre réforme de l'assurance vie est consensuelle ; elle s'appuie sur un rapport parlementaire et sur la concertation avec tous les acteurs. L'évolution vers la désintermédiation n'est pas simplement due à des raisons prudentielles. Les entreprises elles-mêmes souhaitent diversifier leurs modes de financement. Nous devons accompagner le mouvement, même si la part du financement de marché ne sera jamais prépondérante en France.

Donner de l'air à l'économie ne se résume pas à la politique fiscale. J'ai réformé, par exemple, le code des assurances pour permettre aux assureurs d'acheter davantage de dette des entreprises françaises plutôt que de la dette souveraine : cette mesure dégagera 5 à 10 milliards d'euros nouveaux pour les entreprises. Ainsi elles créeront des emplois et nous diminuerons le chômage. Tel est le sens de notre politique de renforcement de la compétitivité et de l'offre productive française.