C'est pourquoi nous insistons sur les dépenses de fonctionnement. La capacité de désendettement et l'autofinancement des collectivités en dépendent fortement, et la situation peut vite déraper. Or elle est aujourd'hui fragile, même s'il n'a pas lieu de sonner le tocsin. L'investissement public local n'est pas forcément dans tous les cas une dépense saine et positive. Nous recommandons une appréciation ex ante de la rentabilité économique et sociale, à distinguer de la rentabilité commerciale bien sûr. Les coûts de fonctionnement ne sont pas toujours bien cernés. Au contraire, les investissements de renouvellement sont bons par nature ; mais ils nécessitent une meilleure connaissance des immobilisations qui forment le patrimoine des collectivités.
Deux associations d'élus ont évoqué la possibilité d'une loi de finances des collectivités territoriales. Pourquoi pas ? La loi de programmation des finances publiques et les engagements pris à Bruxelles sont aujourd'hui traduits dans la réalité par des baisses de dotations et par la règle d'or, très saine, mais insuffisante. Il manque une courroie de transmission. Une loi de gouvernance des finances locales ne serait pas inutile. Il s'agirait précisément de maîtriser les dépenses de fonctionnement, à périmètre constant, et de neutraliser les transferts de charges.
Je connais bien le travail de la Cour sur la mutualisation dans les intercommunalités, pour l'avoir piloté. Il y a eu des progrès depuis : en 2005, nous constations que les répartitions de compétences étaient souvent floues, que les services n'étaient pas forcément transférés avec les compétences et que la qualification de l'intérêt communautaire n'était pas toujours claire. Nous citons des bonnes pratiques dans le présent rapport. Un bémol cependant : on n'observe pas encore une modération générale de la progression des dépenses consolidées. Du reste, comment, sans les outils comptables appropriés, avoir une vision juste ? Nous constatons une augmentation normale des dépenses des EPCI, mais il manque un instrument pour en mesurer la contrepartie au niveau des communes. Le projet de loi de décentralisation esquisse un coefficient de mutualisation ; je ne veux pas entrer dans le détail, mais dans l'esprit, c'est tout à fait cela. Pour progresser, il faut mettre en place des services fonctionnels communs. Le partage de services avec des mises à disposition ascendante, c'est bien ; mais à terme, il faudra regrouper le personnel au niveau intercommunal, quitte à avoir des mises à disposition descendantes.
Nous consacrons un chapitre au crédit aux collectivités ; la situation, inquiétante en 2011, s'est passablement rétablie en 2012. Au-delà du plan de sauvetage de Dexia, l'apparition de la Sfil et de la Caffil, avec la Banque postale et la future agence de financement des collectivités, marque une recomposition de l'offre de crédit aux collectivités territoriales. La tendance est à des taux de marge plus importants, et à des financements par tour de table plutôt que par contrat exclusif avec une banque. Pour l'avenir, la situation ne suscite pas d'inquiétude. Reste un stock de 6 à 7 milliards d'euros d'emprunts très toxiques. L'avis du Conseil de normalisation des comptes publics (CNoCP) sur l'obligation de provisionnement n'est pas encore entré en vigueur ; mais il n'y a pas de solution miracle. On peut toujours espérer que la banque nationale suisse change de politique monétaire ! Et l'on peut imaginer un partage des coûts de sortie avec les banques.