Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Réunion du 6 novembre 2013 à 14h30
Économie sociale et solidaire — Discussion d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Marie-Noëlle LienemannMarie-Noëlle Lienemann :

Votre loi, monsieur le ministre, va faire date : elle représente une nouvelle étape et, vous l’avez dit, un changement d’échelle pour l’économie sociale et solidaire. Elle s’inscrit dans la lignée des lois de 1901 sur les associations, de 1947 sur les coopératives ou d’autres encore. Elle présente en effet l’énorme avantage d’être structurante, globale et de porter une vision d’avenir.

Le groupe socialiste attache une grande importance au fait que l’économie sociale et solidaire ne soit pas simplement considérée comme un supplément d’âme, comme une petite économie que l’on cultiverait tranquillement sous cloche. Selon nous, elle fait partie des trois grands piliers de l’économie contemporaine, de l’économie plurielle. À côté de l’économie classique des entreprises capitalistes et du service public – il existe encore –, l’économie solidaire forme ce que Jacques Delors appelait le « tiers secteur », un secteur coopératif, mutualiste, d’économie sociale. C’est pourquoi nous pensons que c’est en articulant ces trois piliers que nous pourrons développer une croissance créatrice d’emplois, répondre aux besoins de nos concitoyens et relever les défis énergétiques et écologiques.

L’économie sociale et solidaire revient souvent à la mode en temps de crise, parce qu’elle a fait la preuve de sa robustesse. À partir du moment où une partie des bénéfices sert d’abord à assurer la pérennité de l’entreprise, celle-ci résiste mieux. On la trouve donc plutôt attractive, mais, une fois que les choses vont mieux, on a tendance à considérer que, finalement, l’économie classique dite de marché doit à nouveau dominer.

Il est donc très important d’installer dans la durée, de manière forte et structurée, de nouveaux moyens juridiques et financiers pour assurer le développement de l’économie sociale et solidaire, tout en affirmant avec exigence les valeurs qui fondent sa légitimité. Deux dérives doivent cependant être évitées : d’un côté, la marginalisation, qui ferait de l’économie sociale et solidaire une économie à part, et, de l’autre, la banalisation, qui consisterait à dire que, face aux contraintes économiques sociales du marché – car on est quand même dans le secteur de la concurrence –, il faut parfois passer légèrement outre l’exigence de gouvernance démocratique ou d’autres éléments importants.

Voilà pourquoi le projet de loi doit réaffirmer l’identité et le contour de l’économie sociale et solidaire, les exigences à son égard et les forces que l’on veut valoriser en son sein. Tel est l’objet de l’article 1er.

Au sein du groupe socialiste, nous sommes très attachés à la réaffirmation de l’importance du statut de l’économie sociale et solidaire, qui ne dit pas tout mais doit être consolidé. De ce point de vue, il convient de rappeler que l’économie sociale est composée de sociétés de personnes et non de sociétés de capitaux. Je ne redirai pas à quel point ce changement structurel est essentiel.

Nous sommes également très attachés à la démocratie : « un homme, une voix », dit-on un peu rapidement. L’économie sociale et solidaire est une économie plutôt pérenne et elle partage des objectifs communs souvent fortement liés à l’intérêt général. C’est en raison de l’existence de cette dynamique que l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » est fondamental.

Monsieur le ministre, vous avez eu raison de déposer ce texte sur le bureau du Sénat pour son examen en première lecture. Le développement de l’économie sociale et solidaire est de plus en plus lié à un ancrage territorial.

À une époque où tout est mondialisé, où nos entreprises se délocalisent si facilement, où notre production industrielle est si vulnérable, il est très important de compter dans notre tissu économique des entreprises qui, parce qu’elles associent les salariés et sont liées à des initiatives locales, auront à cœur de produire dans les territoires, pour eux et en lien avec eux.

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