Intervention de Valérie Fourneyron

Réunion du 7 novembre 2013 à 9h30
Économie sociale et solidaire — Article 10

Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, avant de vous présenter l’article 10, qui donne pour la première fois une définition de la subvention, je souhaite remercier mon collègue Benoît Hamon de la qualité du travail qui a pu être mené entre nos deux ministères sur la vie associative dans le cadre du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire.

Comme vous le savez, les associations sont l’une des principales composantes du secteur de l’économie sociale et solidaire.

Parfois peu visibles, rarement sur le devant de la scène médiatique, elles sont pourtant une véritable force citoyenne du quotidien et un acteur socio-économique majeur. Les chiffres sont éloquents : 16 millions de bénévoles sont engagés au sein de 1 300 000 associations qui emploient 1 800 000 salariés.

Mais les conditions de l’intervention associative ont considérablement évolué ces dernières années : de défricheurs, d’innovateurs, d’expérimentateurs des besoins sociaux sur les territoires, les associations sont parfois devenues de simples prestataires ou même des « auxiliaires » des collectivités.

Depuis plusieurs années, les acteurs associatifs ont alerté les pouvoirs publics sur la montée en puissance de la commande publique au détriment de la subvention.

Cette perception a été clairement corroborée par les travaux d’observation conduits par l’économiste Viviane Tchernonog : au sein du financement public des associations, qui continue de représenter la moitié du financement total du secteur concerné, les commandes publiques ont progressé de 73 % entre 2005 et 2011, soit une augmentation de 10 % par an en moyenne, tandis que les subventions baissaient de 17 % au cours de la même période.

Une telle évolution est dommageable, car elle assèche la capacité des associations à être force d’innovation et de proposition.

Historiquement, les associations sont à l’initiative de nombreux dispositifs qui font aujourd’hui référence, qu’il s’agisse des crèches parentales, de la médiation pénale, de l’hébergement d’urgence, du microcrédit, de la création de circuits courts de production et de consommation, ou encore d’actions de sensibilisation, de prévention et de promotion des droits.

Mais il existe aujourd’hui un déséquilibre entre les instruments juridiques de la commande publique, qui sont précis, encadrés et codifiés, et ceux qui encadrent la subvention que les collectivités territoriales estiment peu balisés.

La notion de subvention et les cadrages qui s’y rapportent reposent en effet à ce jour sur des supports de portée juridique limitée, telle la circulaire du Premier ministre du 18 janvier 2010 relative aux relations entre les pouvoirs publics et les associations.

Cette dernière n’est pas opposable aux collectivités publiques autres que l’État, ce qui en limite la portée. D’ailleurs, le bilan d’application de ce texte a permis de mettre en évidence une tendance à la diminution du recours à la subvention au profit de la procédure de marchés publics, et ce depuis plusieurs années.

L’ensemble des acteurs, associations ou collectivités locales, ont formulé le souhait d’une clarification du régime juridique des subventions, en vue d’en développer l’usage quand la commande publique n’est pas adaptée, et d’une inscription législative, afin que la définition de la subvention puisse être appréhendée tant par les autorités de l’État que par les collectivités locales. Le Gouvernement a donc voulu apporter une réponse aux enjeux en cause en inscrivant dans la loi une définition de la subvention.

La disposition présentée au sein du projet de loi s’inscrit bien dans l’objectif de clarifier le régime juridique de la subvention en vue d’en développer l’usage à titre alternatif de la commande publique.

L’article 10 tend à modifier la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

La définition proposée s’appuie sur les critères dégagés par la jurisprudence administrative permettant de distinguer la subvention de la commande publique : initiative du bénéficiaire de la subvention, caractère d’intérêt général, absence de contrepartie pour les autorités publiques, caractère discrétionnaire.

En reprenant tous ces critères et en les explicitant, la définition légale apporte une meilleure sécurisation juridique très attendue des acteurs, qu’il s’agisse des associations ou des collectivités locales. Elle constitue donc une avancée majeure. Pour la première fois, une disposition législative sur la subvention est proposée. Son adoption permettra de préserver la capacité d’initiative des associations et leur force d’innovation au service de l’intérêt général.

Cette mesure aura une portée politique importante, car elle donnera un signal fort aux collectivités quant à la légitimité de la logique de subventionnement des associations.

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