Intervention de Nelly Olin

Réunion du 15 février 2005 à 10h00
Questions orales — Interdiction en milieu professionnel des éthers de glycol reprotoxiques

Nelly Olin, ministre déléguée à l'intégration, à l'égalité des chances et à la lutte contre l'exclusion :

Monsieur le sénateur, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur la stratégie de protection des salariés contre les éthers de glycol et, notamment, demandé l'interdiction en milieu professionnel des éthers de glycol toxiques pour la reproduction.

Les éthers de glycol appartiennent à une famille de solvants dont une trentaine environ ont donné lieu à une exploitation industrielle dans différents secteurs, peintures, encres, vernis, colles, cosmétiques, carburants aéronautiques, produits d'entretien et produits phytosanitaires. En l'état actuel des connaissances scientifiques, neuf d'entres eux présentent une toxicité pour la reproduction avérée chez l'animal et ont été classés, à l'échelon européen, dans la catégorie des substances toxiques pour la reproduction de catégorie 2.

Ce classement entraîne automatiquement, en vertu de la réglementation communautaire, dans tous les Etats membres de l'Union européenne, une interdiction d'incorporation dans les produits à destination du grand public.

S'agissant des applications industrielles en milieu professionnel, la stratégie européenne de protection des travailleurs est fondée, en premier lieu, sur l'obligation de substitution, dont le principe figure dans la directive-cadre 89 - 391 du 12 janvier 1989 et est rappelé dans les directives concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l'exposition à des agents chimiques dangereux - c'est la directive 98-24 du 7 avril 1998 - ou à des agents cancérogènes ou mutagènes - c'est la directive 2004-37 du 29 avril 2004.

Aucun éther de glycol n'a, pour l'instant, été interdit en milieu professionnel dans un Etat membre de l'Union européenne.

En France, le cadre juridique assurant la mise en oeuvre de ces mesures est complet. Il a été modernisé et renforcé par le décret du 1er février 2001 relatif à la protection des travailleurs contre les risques liés à l'exposition à des agents cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction de catégories 1 et 2.

Il faut souligner que ce décret va au-delà des dispositions de la directive européenne, puisqu'il s'applique non seulement aux agents cancérogènes et mutagènes, mais aussi aux agents toxiques pour la reproduction. De plus, cette réglementation prévoit des mesures de protection spécifique des femmes enceintes et allaitantes.

Afin de s'assurer de la mise en oeuvre de cette réglementation, les services ont mené une campagne spécifique en 2001, dans le cadre des actions prioritaires de l'inspection du travail. En termes de sensibilisation, plusieurs documents d'information ont été diffusés, avec l'appui de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, la CNAMTS, et de l'Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, l'INRS. Par ailleurs, des journées d'échanges avec les scientifiques ou à destination des professionnels ont été organisées.

Les initiatives des pouvoirs publics, comme les efforts des industriels en matière de substitution, qui résultent de la réglementation applicable, ont eu un impact important sur l'utilisation des éthers de glycol connus comme dangereux.

Ils offrent des résultats encourageants qui ne désactivent, en rien, la vigilance des autorités publiques.

Ainsi, en France, selon les données disponibles, les éthers de glycol classés comme toxiques pour la reproduction de catégorie 2, ne représentaient plus, en 2002, que 3 % à 4 % des quantités utilisées en 1993.

Par ailleurs, afin de préciser les risques sanitaires que présentent les éthers de glycol, les services ont financé ou fait réaliser plusieurs études. Il s'agit notamment d'une étude de classification et d'évaluation de risques de certains éthers de glycol par l'INRS, de la mise à jour de l'expertise collective de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, l'INSERM, sur les éthers de glycol, d'une étude de l'INSERM relative à la RATP, de plusieurs études de l'INSERM ayant pour objet d'évaluer les effets potentiels sur la reproduction.

L'étude menée auprès des agents de la RATP est finalisée et sa publication officielle, accompagnée des recommandations éventuelles de l'Institut de veille sanitaire, l'InVS, doit avoir lieu tout prochainement.

L'analyse des résultats de cette étude relève exclusivement des scientifiques. Le principe de la séparation entre, d'une part, l'évaluation indépendante des risques et, d'autre part, sa gestion par les pouvoirs publics, est essentiel à nos yeux.

Selon les conclusions des experts, le ministère chargé du travail prendra les mesures appropriées afin de garantir de façon proportionnée la sécurité et la santé au travail au regard des substances chimiques dangereuses.

L'expertise en France dans ce domaine devrait d'ailleurs être considérablement élargie dans les prochaines années, du fait de la création d'une agence publique compétente en santé au travail. Cette création fera l'objet d'une annonce officielle lors de la présentation du plan Santé au travail par MM. Jean-Louis Borloo et Gérard Larcher, le 17 février prochain, devant le Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels.

Il faut préciser à cet égard que les éthers de glycol évoqués ici ne sont qu'une petite partie des substances cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction de catégories 1 ou 2 utilisées en milieu de travail que cette agence aura à expertiser.

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