Intervention de Michel Billout

Réunion du 15 février 2005 à 10h00
Questions orales — Production et distribution d'énergie en ile-de-france

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les conséquences de la fermeture de centrales thermiques à flamme en Ile-de-France.

En effet, sur les trois arrêts d'exploitation de centrales actuellement programmés - il faudrait dire pratiquement achevés -, deux concernent les sites de production situés dans le département de la Seine-et-Marne, à Montereau et à Vaires-sur-Marne.

Ce choix de la direction d'EDF risque de mettre gravement en cause la sûreté de l'alimentation et les conditions d'approvisionnement énergétique de la région capitale, en la privant des ressources énergétiques suffisantes pour garantir la continuité du service.

La disparition programmée des moyens de production en Ile-de-France laisse la région totalement dépendante des moyens de production externe. Cette dépendance n'est pas durablement soutenable, compte tenu de l'importance économique et politique de la région, si une rupture significative intervenait sur les alimentations extérieures. Le réseau des transports, vulnérable par nature, deviendrait alors le talon d'Achille de l'alimentation de la région parisienne. Cette région devrait donc avoir les moyens d'assurer sa sécurité minimale.

De plus, tout au long de l'année, la consommation d'électricité subit de grandes variations, saisonnières, journalières, voire horaires. Ainsi, pendant quelques centaines d'heures par an, on observe sur l'ensemble du territoire une demande très importante de puissance électrique, qui est appelée « puissance de pointe ». Il paraît donc nécessaire de mettre en place de nouveaux moyens de production pour répondre à la demande durant ces périodes.

Afin d'assurer la fourniture d'une électricité de qualité à moindre coût, il est indispensable d'installer ces moyens de production dans les régions où les déséquilibres entre production et consommation sont les plus importants.

Concrètement, la région d'Ile-de-France possède un fort potentiel de développement, ce qui laisse supposer que ses besoins énergétiques - notamment dans le département de la Seine-et-Marne - ne vont cesser de croître dans les prochaines années. Actuellement, la région consomme déjà pour ses propres besoins 17 % de la production nationale, alors qu'elle ne dispose que de 6 % de la puissance installée. Dans cette région, la réponse aux besoins énergétiques devrait être prioritaire.

Par de telles décisions, EDF tourne le dos à un développement industriel de recherche et d'innovation technologique ambitieux permettant de répondre pour les années à venir aux besoins en matière d'emplois et de service public à destination des populations et de l'économie franciliennes.

Il faut réfléchir dès à présent à la mise en place d'unités de production en Ile-de-France, qui soient respectueuses de l'environnement, conçues dans le cadre du développement durable, et qui répondent aux besoins en matière d'énergie. Parallèlement, il convient de lancer très vite les études nécessaires.

Il faut aussi oeuvrer à la diversification des modes de production d'énergie et ne pas tout miser sur le nucléaire, qui comporte des coûts lourds de traitement des déchets et ne peut répondre à l'ensemble des demandes.

Or, à Vaires-sur-Marne, par exemple, où l'activité de production va très prochainement cesser, aucun plan de remplacement n'est actuellement prévu : seule est envisagée la possibilité de conserver une turbine à gaz, dans l'hypothèse d'une réouverture du site à l'horizon 2008, voire 2012. Un projet identique avait déjà été proposé par la direction d'EDF en 1992, mais n'avait pas abouti. Il est donc aujourd'hui plus qu'urgent de lancer les études nécessaires pour qu'un tel plan parvienne enfin à voir le jour.

Le terrain de Vaires-sur-Marne est stratégique : il est bien intégré dans l'environnement urbain et dispose de dessertes ferroviaires et fluviales.

Lors de sa très récente audition par la commission des affaires économiques et du Plan et par le groupe d'études de l'énergie, le président d'EDF, M. Gadonneix, a indiqué que son entreprise envisageait à la fois la fermeture totale de certains sites et le redémarrage d'autres afin d'augmenter la production de 2 000 mégawatts.

Cette orientation pourrait être intéressante, mais le président d'EDF n'a pu indiquer ni les échéances ni les sites retenus, ce qui fait craindre une prise de décision trop tardive.

De plus, il ne revient pas à EDF de définir la politique énergétique de la France : cette responsabilité incombe à l'Etat. L'énergie est un domaine fondamental, qui conditionne l'emploi, les transports, la vie, et nécessite donc une maîtrise publique.

C'est la raison pour laquelle je vous prie, madame la ministre, de nous préciser les projets du Gouvernement pour le maintien d'une production d'énergie suffisante en Ile-de-France. Les citoyens ont réellement besoin d'éclaircissements sur les choix en ce domaine, a fortiori lorsque la mise en concurrence de ce secteur fait craindre que l'offre énergétique soit déterminée non plus en fonction des besoins, mais prioritairement, voire exclusivement, selon des critères de rentabilité financière.

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