Monsieur le ministre, vous le savez, nous divergeons sur l’analyse des causes des déficits de notre système de protection sociale.
Pour vous, ils sont, d’abord et avant tout, la conséquence d’un système trop généreux. Ce raisonnement vous conduit nécessairement et mécaniquement à tout faire pour baisser les dépenses sociales dans chacune des branches : dans la branche vieillesse, en gelant les pensions et en durcissant les conditions d’accès à la retraite ; dans la branche maladie, en maintenant sous pression financière les établissements de santé et en procédant à la fermeture des petites unités ; dans la branche famille, en réduisant les prestations et en gelant les mécanismes de revalorisation de certaines prestations.
À l’inverse, le groupe CRC constate que les plans d’économies imposés à la sécurité sociale par le biais de la seule réduction de la dépense se sont tous soldés par des effets mitigés, voire contre-productifs. Ce constat nous conduit à proposer d’agir sur l’autre levier, c’est-à-dire les ressources.
En effet, de nombreux éléments de rémunération échappent aujourd’hui au financement de la sécurité sociale. Mon propos vise notamment les sommes versées au titre de l’intéressement ou de la participation, les abondements de l’employeur aux plans d’épargne d’entreprise, aux plans d’épargne interentreprises, aux plans d’épargne pour la retraite collectifs, ou encore aux rémunérations perçues, sous forme de jetons de présence, pour l’exercice de leur mandat, par les dirigeants, administrateurs et membres des conseils de surveillance des sociétés anonymes et des sociétés d’exercice libéral à forme anonyme.
Ces éléments de rémunération sont assujettis à un mécanisme particulier, que tout le monde connaît. Appelé « forfait social », il progresse, année après année, sans toutefois jamais atteindre un niveau de prélèvement comparable à celui des cotisations sociales. Les employeurs continuent donc à favoriser ces éléments de rémunération au détriment des salaires – notamment des augmentations de ceux-ci –, structurellement plus sécurisants pour les salariés que les éléments indirects de rémunération, qui sont variables et dont l’attribution peut être arbitraire.
Aussi, pour inciter les employeurs à favoriser le salaire, nous proposons de porter le forfait social à un niveau de prélèvement quasiment identique à celui des cotisations sociales.