Un budget c'est l'expression des priorités.
D'abord, les effectifs car ce ministère est avant tout un ministère d'hommes et de femmes. En 2014, tous les départs en retraite seront remplacés dans la police et la gendarmerie qui bénéficieront également de créations de poste : 243 pour la police et 162 pour la gendarmerie. Le rythme sera plus soutenu en 2015. Je sais l'impatience ressentie partout pour l'arrivée des effectifs, je connais les besoins criants que vous constatez ici et là. En ce début d'automne, nous sommes au point le plus bas de l'année pour les effectifs. La promotion des gardiens de la paix entrés à l'école en 2013 sera affectée dans les services en décembre. Une nouvelle incorporation de 1 000 élèves gardiens sera effective dès janvier prochain, après les entrées en école du mois de septembre. Les efforts sont nécessaires pour compenser les effets de la politique de suppression des emplois des années passées. En cinq ans, 13 700 postes de policiers et de gendarmes ont été supprimés. Ces créations d'emploi ne compenseront pas ces suppressions, mais il fallait arrêter l'hémorragie.
Les effectifs ne sont pas tout, il faut constamment travailler sur des réorganisations internes pour mieux utiliser nos ressources et nous attaquer à l'explosion des cambriolages, occuper le terrain, être plus efficace dans la lutte contre le terrorisme, être présent dans les champs nouveaux comme celui de la cybercriminalité : redéploiements territoriaux police/gendarmerie, mutualisation avec la création d'un service unique des achats et des équipements, mutualisation en matière de police technique et scientifique, substitution des personnels actifs par des personnels administratifs sur les fonctions non opérationnelles.
En matière d'affectation du personnel, mes priorités sont claires : les zones de sécurité prioritaires et le renseignement intérieur.
L'administration centrale et territoriale verra ses effectifs diminuer en 2014 (550 départs à la retraite ne seront pas remplacés en préfectures et sous-préfectures et 87 en administration centrale). Il faut donc procéder à des évolutions de structure, c'est pourquoi j'ai confié aux préfets des régions Alsace et Lorraine une mission de rénovation de la carte des sous-préfectures -qui n'a pas évolué depuis 1926- dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin à l'échéance du 1er janvier 2015.
Mais l'évolution du réseau n'est pas son affaiblissement. Je suis attaché à la présence de l'État sur le territoire car on constate un sentiment d'abandon terrible dans certains territoires. Quand on est dans des difficultés, on se tourne vers l'État. C'est dans cette logique et pour répondre aux attentes de nos compatriotes que l'évolution du réseau pourra être posée : regroupement ou redécoupage d'arrondissements, création des maisons de l'État.
D'autres administrations de l'État ont perdu ces dernières années en puissance en raison de la réduction des effectifs et de la décentralisation. Cependant, il faut maintenir le réseau des sous-préfectures et des maisons de l'État là où cela s'impose.
Gérer un budget, c'est s'assurer que les moyens utilisés correspondent bien aux missions assumées. Pour cela, j'ai engagé d'autres réformes importantes pour l'administration : mise en place expérimentale de plateformes pour le traitement des demandes de naturalisation dans trois régions ; délivrance d'un nouveau permis de conduire FAETON qui allègera la tâche des préfectures ; régionalisation des plateformes CHORUS.
Tout doit contribuer à garantir l'efficacité de cette administration et au final, le service rendu aux administrés. Il faut améliorer l'accueil, notamment pour les étrangers.
En ce qui concerne la situation des personnels, les mesures indemnitaires catégorielles resteront à un niveau élevé en 2014, identique à 2013, aux alentours de 60 millions d'euros pour l'ensemble du ministère. En particulier, les gardiens de la paix et les sous-officiers de gendarmerie bénéficieront d'une nouvelle tranche du passage à la catégorie B en octobre 2014 après la première étape du 1er juillet 2013.
Les moyens de fonctionnement du ministère. Les services de gendarmerie et de police voient pour la première fois depuis 2007 leurs crédits progresser après la stabilisation de 2013, mais les besoins restent considérables que ce soit en matière immobilière, pour la gendarmerie surtout, que ce soit pour le parc automobile ou le fonctionnement courant des services. J'espère que les mesures de gel de début d'année ne viendront pas anéantir cet effort indispensable.
Parce que la sécurité est une priorité, qu'il faut avoir une vision dynamique de la loi de finances, le premier ministre a accepté de dégeler 111 millions d'euros en fin d'année 2013 au bénéfice des forces de l'ordre. J'ai aussi obtenu le dégel de 10 millions d'euros supplémentaires d'autorisations d'engagement pour lancer les opérations de maintenance urgente des logements les plus dégradés de la gendarmerie.
La sécurité civile. Les efforts sont concentrés sur les moyens nationaux : 4 millions d'euros supplémentaires consacrés à la maintenance de la flotte de la sécurité civile ; les études pour le déménagement de la base de Marignane vers Nîmes-Garons ; la poursuite du déploiement d'ANTARÈS ; déploiement du nouveau système d'alerte et d'information des populations.
Immigration, asile et intégration. Les crédits 2014 pour l'asile constituent 85 % des crédits du programme « immigration et asile » et ils augmentent de 0,5 % par rapport à 2013.
Notre système d'asile implose : depuis 2007, la demande d'asile augmente en moyenne de 10 % par an. Avec probablement 68 000 demandes en fin d'année, ce chiffre aura doublé en 6 ans et, nous le savons, 80 % de ces demandes aboutiront à un rejet par l'OFPRA et la CNDA. Les problèmes, nous les connaissons : allongement des délais d'instruction, concentration des demandeurs d'asile dans certaines régions et villes, saturation des hébergements par les déboutés du droit d'asile.
Ce budget apporte des premières réponses d'urgence : dix emplois supplémentaires à l'OFPRA, le financement de deux mille nouvelles places en centres d'accueil des demandeurs d'asile et en ce qui concerne la gestion de l'ATA (allocation temporaire d'attente), déjà 7 millions de versements indus supprimés au second semestre 2013.
Mais au-delà c'est l'ensemble du système qu'il faut revoir. J'ai lancé en juillet une réflexion avec les collectivités locales, la CNDA, les administrations, le HCR et les associations du champ de l'asile. Deux parlementaires, Valérie Létard et Jean-Luc Touraine, me feront des propositions pour refonder la politique de l'asile. À ce stade, aucun scénario de réforme n'est arrêté, mais des sujets incontournables ont d'ores et déjà été identifiés par ces deux parlementaires : une réduction significative des délais pour parvenir à 9 mois en 2015, une détermination dès l'arrivée de l'éligibilité de la demande d'asile avec un traitement accéléré, une répartition plus directive des demandeurs d'asile sur le territoire, une territorialisation plus importante de toute la procédure, l'éloignement des déboutés du droit d'asile.
L'Allemagne est passée devant nous en termes de demandes d'asile.
Je veux trouver avec la représentation nationale un consensus. Il nous faut préserver ce droit constitutionnel, conventionnel, sacré mais à condition qu'il n'y ait pas de détournement.
Voilà les grandes lignes du budget 2014 du ministère de l'intérieur avec des priorités clairement financées : la sécurité intérieure, l'asile et la modernisation de l'action publique.