Intervention de Annie David

Réunion du 14 novembre 2013 à 9h45
Financement de la sécurité sociale pour 2014 — Article 21 et annexe B

Photo de Annie DavidAnnie David :

Au moment où nous examinons l’article 21, qui fige, pour les quatre ans à venir, les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses, notamment l’ONDAM, je souhaite attirer votre attention, madame la ministre, sur la situation des établissements hospitaliers, notamment ceux du département de l’Isère.

Rappelez-vous, madame la ministre, lorsque vous êtes venue à Grenoble il y a quelques mois, accompagnée de Jean-Marc Ayrault, le personnel des urgences vous a alertée sur les conditions dans lesquelles ils exercent leur mission et les difficultés auxquelles ils sont confrontés, à l’instar d’autres collègues dans de nombreux établissements, faute de personnel suffisant, de lits d’aval ou de lits pour les patients atteints de polypathologies, car cela ne présente pas un gain de productivité suffisant.

Vous vous en souvenez sans doute aussi, plusieurs membres du personnel médical avaient été agressés, victimes de la détresse des familles.

Depuis, la situation n’a guère évolué, les urgences connaissent toujours un temps d’attente de plus de deux heures et, si les conditions d’accueil et de sécurisation ont été améliorées, les possibilités d’hospitalisation, quant à elles, ne l’ont pas été.

Les difficultés du CHU de Grenoble ne tiennent cependant pas au seul fonctionnement des urgences. Malgré la notoriété et la grande qualité des soins et des services spécialisés de cet établissement – un nouveau traitement de la maladie Parkinson, tout à fait intéressant, nous avait d’ailleurs été présenté –, le CHU de Grenoble figure aujourd’hui parmi les plus endettés du pays, avec des dépenses de personnel qui ne sont plus garanties, des dépenses de médicaments et des frais financiers en hausse.

C’est pourquoi on lui a enjoint de recomposer son offre de soins et de concentrer son projet sur des activités à la fois économes et rentables. Cette mission est impossible, car, dans le même temps, l’agence régionale de santé lui impose d’accueillir les activités de chirurgie cardiaque dispensées jusqu’alors par une clinique privée, située dans l’agglomération grenobloise et avec laquelle une coopération public-privé a été établie. Ce CHU, obligé d’accueillir la chirurgie cardiaque, doit donc faire face à des coûts supplémentaires et doit notamment réinvestir dans de nouveaux blocs opératoires, pour lesquels les crédits nécessaires lui ont d’ailleurs été refusés.

La clinique privée, quant à elle, conservera une activité de chirurgie moins coûteuse.

On voit bien là les limites de l’exercice obligé par la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, et celles d’une tarification à l’acte qui ne prévoit pas, entre autres, les investissements.

Sur notre territoire, ce CHU n’est pas le seul en difficulté. L’hôpital de Voiron, saturé, doit être reconstruit dans le cadre d’un pôle public-privé, c'est-à-dire avec une clinique, mais, les financements tardant, il se transforme progressivement en structure de soins de suite, de long séjour, de gériatrie, et la population s’inquiète.

L’hôpital public de Bourgoin-Jallieu, dans le nord de l’Isère, est, quant à lui, en passe de perdre son service de néonatalité, au profit d’une clinique privée.

Quant aux établissements psychiatriques, ils souffrent d’un très faible ratio médecins/lits et d’une réduction imposée du nombre de lits.

Bref, tous ces établissements pâtissent à la fois d’une forme de concurrence entre le public et le privé, organisée par l’ARS au bénéfice d’on ne sait trop qui, et d’un manque cruel de moyens !

Pour 2013, nous l’avons vu précédemment, les objectifs de dépenses de la sécurité sociale ont été respectés. Ils sont même inférieurs aux objectifs fixés pour chacune des branches, démontrant ainsi que le déficit qui continue à se creuser tient non pas à un excès de dépenses, mais bien à une insuffisance de recettes. Cet objectif a, certes, été respecté, mais au prix, nous pouvons tous le mesurer, d’un non-recours aux soins et d’un effort considérable réalisé par les établissements hospitaliers, qui se trouvent confrontés à une logique purement budgétaire et comptable.

Pour 2014, et jusqu’en 2017, vous nous proposez un ONDAM historiquement bas et, pour la première fois, l’objectif de dépenses pour l’hôpital sera inférieur aux objectifs de dépenses de soins de ville, 2, 3 %, contre 2, 4 %.

Alors que les personnels des hôpitaux croulent sous les tâches, du fait de l’ampleur du sous-effectif et de l’absence d’initiative pour régler la question de l’endettement des hôpitaux, causé notamment par les crédits toxiques, il est demandé à l’hôpital public de consentir de nouveaux efforts, alors même qu’il manque de moyens pour faire face à ses missions.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe CRC n’est donc pas favorable à cet article 21.

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