Intervention de Hélène Lipietz

Réunion du 18 novembre 2013 à 17h00
Débat sur la politique d'aménagement du territoire

Photo de Hélène LipietzHélène Lipietz :

Heureusement, comme toujours !

En effet, l’aménagement du territoire est forcément une politique complexe, puisqu’il s’agit en réalité de la conjonction de plusieurs politiques – services publics, mobilité, développement économique – qui doivent être menées à tous les échelons territoriaux.

Beaucoup d’efforts ont été menés pour organiser le développement des territoires, entre rural et urbain – peut-être insuffisamment pour le rural – et également au sein même des territoires ruraux et au sein des territoires urbains.

Malgré tout, on constate des échecs, probablement dus, dans certains cas, à une vision à trop court terme. Je ne citerai qu’un exemple : le déséquilibre entre l’est et l’ouest de la région parisienne.

Ainsi, nos collègues Fichet et Mazars ont publié en février 2013 un rapport qui souligne l’influence des politiques d’aménagement du territoire sur le développement économique : « sans infrastructures de transports et de communication adéquates, il est difficile, voire impossible d’attirer nombre d’activités économiques sur le territoire. »

Jusqu’à une période récente, l’aménagement spatial s’est borné au développement des autoroutes ou des lignes à grande vitesse.

Cette conception est révolue, et le Grenelle de l’environnement a souligné la nécessité de mettre un coup d’arrêt au développement routier.

Le transport ferroviaire de proximité est à la peine, face aux lourds investissements de modernisation nécessaires actuellement.

Pourtant, les dessertes ferroviaires locales sont pour les territoires non centraux une nécessité alors que, si l’on observe les choix budgétaires actuels, la priorité est donnée aux lignes à grande vitesse.

L’aménagement du territoire implique un réseau ferroviaire en toile d’araignée, et non ces trains à grande vitesse et grande distance qui visent à relier la France et le reste du monde à Paris.

Il faut aussi penser à reconstruire le fret, disparu depuis une vingtaine d’années : mettre un camion sur un train sera toujours moins polluant et plus sûr pour les usagers de la route qu’un camion qui roule.

Il faut donc retrouver des marges de manœuvre budgétaires grâce à la taxe poids lourds dite « écotaxe », mais qui devrait s’appeler « pollutaxe ». Cette redevance est au service de l’activité locale des territoires, parce qu’elle incite les transporteurs et leurs clients à optimiser leurs transports, autrement dit à ne plus faire circuler de poids lourds à vide.

La crise de l’écotaxe nous oblige d’ailleurs à raisonner à l’échelle européenne en prenant en compte les territoires frontaliers. L’Alsace, à l’inverse de la Bretagne, demande sa mise en œuvre car les camions ont envahi ses routes. L’Allemagne a mis en place la taxe poids lourds il y a déjà presque dix ans...

Un autre enjeu réside dans l’aménagement numérique des territoires, qui est une façon de se déplacer virtuellement ! Le numérique permet de surmonter les problèmes de mobilité, d’isolement, ou encore de handicap grâce aux services en ligne et de gérer au plus près les besoins des citoyens.

C’est pourquoi je salue les départements pionniers, notamment les départements ruraux, ceux qui se sentent tellement abandonnés par le centralisme parisien, et le volontarisme du Gouvernement qui s’est fixé pour objectif que l’ensemble du territoire ait accès au très haut débit sous dix ans. Il s’agit d’un objectif décisif pour nos territoires comme pour la France dans ses rapports avec le monde.

De plus, le maillage numérique permet la délocalisation de nos institutions, par exemple l’École nationale d’administration, l’ENA, à Strasbourg, mais aussi l’INSEE. Toutes ces institutions n’ont finalement pas besoin d’être à Paris.

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