Intervention de Pierre Camani

Réunion du 18 novembre 2013 à 17h00
Débat sur la politique d'aménagement du territoire

Photo de Pierre CamaniPierre Camani :

… affichée par le Président de la République à la Sorbonne, en octobre 2012, lors des états généraux de la démocratie territoriale. Une nouvelle relation proposée par le Premier ministre dans le cadre de l’élaboration du nouveau Pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités territoriales.

« L’État et les collectivités territoriales doivent retrouver le chemin de la confiance. Ils doivent être des partenaires, des acteurs qui se complètent », a déclaré le Premier ministre. Je cite cette phrase car, vous le reconnaîtrez tous aisément, elle nous change des discours stigmatisant les collectivités territoriales et les élus qui avaient contribué à installer un lourd climat de défiance dans les territoires.

Ce changement de paradigme s’établit dans un contexte financier difficile et l’opposition a beau jeu de critiquer les réductions de crédits, mais le cap est le bon !

La logique d’intervention de l’État a été inversée, parce que, madame la ministre, vous avez clairement et fortement affirmé, dans votre discours de Vesoul en particulier, que l’aménagement du territoire doit redevenir une priorité !

La crise que nous traversons est violente pour tous, mais selon la place que l’on occupe désormais dans le réseau de production mondial, on est plus ou moins exposé, on résiste plus ou moins. La crise est violente, mais tous les territoires ne la subissent pas de la même manière.

Le journal Le Monde daté du 31 octobre présente une carte de l’INSEE qui dépeint, de manière impressionnante, les fractures territoriales à partir des évolutions du nombre d’emplois par bassin d’emploi entre 2008 et 2012. Celles-ci varient de moins 14 % à plus 6 %. Certains bassins d’emploi ont un taux de chômage supérieur à 13 %.

Dans mon département de Lot-et-Garonne, les trois bassins d’emploi ont tous subi une baisse du nombre d’emplois : pour deux d’entre eux, la baisse s’établit entre 0 % et 5 % et, pour le troisième, autour de 10 %. Ce département est situé, pour partie, dans la fameuse « diagonale aride » identifiée par le géographe André Brunet et vous comprendrez que je sois particulièrement sensibilisé à la question de l’aménagement du territoire.

Cette géographie du choc de la crise appelle un volontarisme de l’action publique, un partenariat étroit entre les collectivités territoriales et les acteurs économiques et sociaux. La politique d’aménagement du territoire doit viser à soutenir les territoires en difficulté, tout en encourageant la dynamique des territoires les plus compétitifs, car ceux-ci « tirent » la croissance et assurent la péréquation.

Je salue votre volontarisme, madame la ministre, dans ce contexte extrêmement difficile, je le répète.

Je me félicite de la création du Commissariat général à l’égalité des territoires, le CGET, qui regroupera les services de la DATAR, de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances et du secrétariat général du comité interministériel des villes. Le Commissariat général à l’égalité des territoires atteste la volonté d’en finir avec la dichotomie entre l’urbain et le rural, qui a marqué la conduite des politiques en faveur des territoires ces dernières années. Il devrait doter l’État d’une structure lui permettant de concevoir ces politiques de façon plus globale, et donc plus cohérente. Il devrait également lui permettre de conduire ses missions de manière plus « transversale ». Il constitue en tout cas une nouvelle et belle occasion pour revisiter notre conception de l’aménagement du territoire.

Parmi les objectifs majeurs fixés au CGET, vous insistez sur l’accessibilité des services au public. Nous le constatons tous, la disparition des services publics et des services au public en milieu rural engendre un sentiment d’abandon extrêmement fort de la part des élus et des populations locales. Il est urgent de réagir.

La création d’emplois dans l’éducation et dans les forces de sécurité constitue un geste fort à l’égard des territoires. Pour la première fois depuis sept ans, vingt et un postes d’enseignants ont été créés à la rentrée de septembre 2013 dans mon département. De tout cela, M. Maurey ne dit rien, et il ose parler d’objectivité !

Les maisons de services au public peuvent constituer une réponse pour les territoires les plus démunis et je vous demande, madame la ministre, de bien vouloir nous préciser vos ambitions en la matière.

J’attends avec impatience la mise en œuvre des schémas départementaux d’accessibilité des services au public, prévus dans le deuxième projet de loi de décentralisation. Madame la ministre, vous envisagez d’expérimenter cette mesure avant le vote de la loi, avec les départements qui le souhaitent. Je me permets donc de vous proposer la candidature du département de Lot-et-Garonne, que j’ai l’honneur de présider.

Je suis persuadé que les départements peuvent, en partenariat avec les intercommunalités et l’État, jouer un rôle de premier plan dans le maillage des services publics et des services au public ; tel est d’ailleurs le cas dans mon département.

De la même manière, ils peuvent et doivent mener des politiques partenariales avec l’État et les intercommunalités en faveur des aménagements des centres-bourgs ruraux, pour éviter leur dépérissement et accompagner leur revitalisation. Dans le secteur du logement, les partenariats entre l’État, les collectivités et les opérateurs peuvent également s’avérer féconds.

La nouvelle vision de l’aménagement du territoire que vous défendez, madame la ministre, doit trouver sa traduction dans la nouvelle phase de négociation des contrats de plan État-région qui font suite aux contrats de projet.

Ceux-ci devront, me semble-t-il, incarner une autre approche de l’aménagement du territoire pour passer d’une logique de compétition entre les territoires à une logique d’accompagnement d’une stratégie régionale de prise en compte des territoires en déshérence. Il est en effet choquant de constater, mes chers collègues, que ce sont généralement les territoires disposant de moyens importants en ingénierie qui remportent ces appels à projet, même si, je le répète, les territoires dynamiques doivent aussi être encouragés. Cependant, la logique libérale des appels à projet contribue à exclure les territoires les plus fragiles. Ces procédures peuvent donc créer des inégalités là où elles sont censées les réduire. Des mesures spécifiques doivent donc être envisagées pour les territoires les plus fragiles. De ce point de vue, les pôles territoriaux de solidarité et d’aménagement, introduits par le Sénat dans le projet de loi relatif aux métropoles, peuvent constituer des outils intéressants.

Au-delà de la problématique essentielle de la création de valeur et de la création d’emploi dans les espaces ruraux, je voudrais m’attacher à rappeler l’importance stratégique du numérique et de la démographie médicale dans l’aménagement du territoire.

Le numérique est en train de bouleverser l’économie, le rapport entre les individus, le rapport à la distance et au temps. Il constitue un vecteur et un enjeu de développement majeur pour nos sociétés. Il constitue également un vecteur de fracture territoriale, si l’on en reste à une simple logique libérale de déploiement des réseaux, comme le faisait le précédent gouvernement.

La logique engagée par le Gouvernement est tout autre : un État stratège au service de la compétitivité et des territoires.

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