La justice est une priorité gouvernementale : hors fonds de concours, son budget s'élève à 7,8 milliards d'euros, en hausse de 1,7 % ; 555 postes sont créés. Il s'inscrit dans le prolongement du budget 2013, qui était en hausse de 4,2 % et créait 480 emplois. La hausse est sensible pour certains chapitres, comme la formation professionnelle, dont les crédits augmentent de 47 %.
Dans le programme « Justice judiciaire », si l'on tient compte des réaffectations, ce sont 63 nouveaux postes de magistrats qui sont créés, avec 358 entrées pour 295 sorties, dans la continuité avec 2013 où 142 postes ont été créés, et en rupture avec la période 2010-2012 durant laquelle on n'avait compté aucune création. L'effectif théorique des magistrats est de 7 829, mais l'effectif réel de 7 489, car 4,5 % des postes sont vacants. Inversement, à la Cour de cassation, l'effectif théorique est de 220, l'effectif réel de 281. En effet, la Cour de cassation ne dispose pas de schéma d'emplois et le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) bénéficie d'une liberté de nomination.
Le ratio de un pour un entre magistrats et greffiers n'est pas atteint mais s'établit tout de même à 0,99 grâce à la transformation d'emplois de catégories C en B. Actuellement 1 082 greffiers sont en formation, ils seront opérationnels l'an prochain. Je souhaite que leur indice soit réformé et leur fonction revalorisée : pourquoi ne pas leur confier certains actes, gracieux par exemple et non contentieux.
Nous avions demandé un rapport à la Cour des comptes sur les frais de justice. Une économie substantielle est attendue grâce à des mesures de réorganisation et au développement de la rémunération forfaitaire plutôt qu'à l'acte. En outre, en 2014 sera mise en place une plateforme nationale d'interceptions judiciaires. En effet, les missions d'écoute et de surveillance, pourtant régaliennes, sont largement confiées à des entreprises privées ; il faudra que les ordonnateurs publics d'écoute la sollicitent de manière prioritaire.
Dans le cadre du programme « Administration pénitentiaire », 490 personnes seront recrutées principalement pour lutter contre la récidive, soit 400 créations de postes, et 90 recrutements compensant les départs à la retraite, pour renforcer les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP). Au 1er juillet 2013, nous comptions 68 569 personnes écrouées, pour 57 238 places de prison, auxquelles s'ajoutent 200 000 personnes en milieu ouvert. La garde des Sceaux a fixé un objectif de 63 500 places de prison à l'horizon 2019. Elle a décidé de poursuivre les partenariats public-privé (PPP) déjà engagés mais de suspendre tout autre projet. Les PPP concernent 53 établissements pénitentiaires et 49 % de la population pénale. Ces décisions s'inscrivent dans une nouvelle réflexion sur les modalités d'exécution de la peine. La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 a ainsi préféré la notion de « parcours d'exécution de la peine » à celle de « projet d'exécution de la peine ». Comme le préconisent Jean-René Lecerf ou le député Dominique Raimbourg dans leurs rapports, il faut réfléchir aux peines alternatives à l'emprisonnement. De plus, la prison ne doit pas se limiter à une période d'emprisonnement mais doit préparer la réinsertion. Dans le temps carcéral, l'école a sa place, le travail également.
Le programme « Protection judiciaire de la jeunesse » comporte la création de 78 emplois, ce qui n'efface pas les conséquences de la suppression de 632 emplois entre 2008 et 2012 due à la révision générale des politiques publiques (RGPP). En 2013, un effort important a été réalisé pour limiter les retards de paiement aux associations de secteur réhabilité, naguère importants mais qui s'établiraient désormais à un mois. Ces associations ont du mal à financer leurs investissements et se trouvent fragilisées dans leur fonctionnement quotidien. En outre, si l'on associe naturellement la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et les conseils généraux, il ne faut pas oublier les liens avec la région, interlocuteur pour la formation professionnelle, ou avec les services déconcentrés de l'État à ce niveau, tels les rectorats ou les agences régionales de santé (ARS). Enfin quatre centres de placement ouverts seront créés en 2014.
Le programme « Accès au droit et à la justice » concerne essentiellement l'aide juridictionnelle qui représente 347 millions d'euros sur les 369 millions d'euros du programme. Le budget prévoit la suppression de la contribution de 35 euros pour l'aide juridique, dont le produit s'élevait à 60 millions d'euros ; en contrepartie, le Gouvernement augmente l'enveloppe budgétaire de 30 millions et prévoit des mesures d'économies équivalentes. En 2007, Roland du Luart a présenté un rapport d'information sur la réforme de l'aide juridictionnelle : ses réflexions gardent toute leur actualité. La garde des Sceaux réfléchit à un nouveau mode de financement de l'aide.
Deux articles sont rattachés à cette mission. L'article 69 supprime la contribution pour l'aide juridique ; revalorise l'unité de valeur de référence pour le calcul de la rétribution des avocats à l'aide juridictionnelle ; et instaure un barème unique à l'ensemble des barreaux pour fixer cette rétribution. L'article 69 bis reporte d'un an, au 1er janvier 2015, la collégialité de l'instruction.