Oui, le ministère compte sur une bonne gestion de la procédure. Mais il peut y avoir des imprévus : voyez l'affaire du petit Grégory, dans laquelle des expertises techniques très sophistiquées ont été demandées vingt-cinq ans après les faits. Dans ce type d'affaire très médiatisée, les magistrats ne peuvent s'opposer au recours aux expertises les plus modernes.
Je ne suis pas un spécialiste des fouilles corporelles - sujet très sensible -, mais je reste convaincu que le recours à ces pratiques peut diminuer. D'autres techniques existent, tout dépend de nous puisque c'est une question de budget.
Notre pays compte 270 000 personnes condamnées pénalement, dont près de 70 000 en prison. Une bonne justice exige de bonnes lois - les magistrats appliquent la loi... Elle exige aussi un budget suffisant, et une certaine culture judiciaire. La justice pénale a pour fonction de sanctionner, de réhabiliter, de réinsérer. Elle fait oeuvre de régulation sociale. Pour ces raisons, le service public de la justice doit être défendu. L'État français s'est construit à coups d'épée et par les alliances certes, mais aussi grâce à un système judiciaire qui reste le fondement de notre cohésion nationale.
L'extraction judiciaire ne concerne que le passage de la prison au tribunal. La mise en oeuvre de la dernière réforme, qui consistait à autoriser le personnel pénitentiaire à exécuter cette procédure, semble bloquée. Dans ma région par exemple, le responsable de la nouvelle prison n'était pas même au courant de ce mécanisme. Or l'extraction judiciaire n'est pas qu'affaire d'effectifs : il faut des compétences, notamment celle du maniement des armes - ce que confirment certains incidents récents. Plutôt que de soumettre l'application de cette réforme à un délai rapproché, je plaide pour le pragmatisme et l'adaptation aux compétences des personnes en place.
Le budget pour 2014 finance quatre nouveaux centres d'hébergement collectif. Ces dernières années, nous avons mis l'accent de manière excessive sur les CEF, qui relèvent de l'utopie sécuritaire dans laquelle vit notre pays. Celle-ci est néfaste au bon fonctionnement de la justice et du droit. Les CEF ne sont qu'un maillon de la chaîne : en 2012, on comptait 1 528 mineurs en CEF, et 4 180 en hébergement traditionnel - dont font partie les 432 familles d'accueil. Je regrette la diminution des effectifs d'encadrement de ces centres, qui passent de 27 à 24 personnes, alors que le ratio est en principe d'un encadré pour deux encadrants.
L'aide juridictionnelle est un sujet sensible. Son financement peut théoriquement provenir du budget de la nation, des assurances de protection juridique, mais elles ne couvrent pas le champ pénal, ou de la solidarité des professionnels du droit - j'ignore à ce propos si l'expertise comptable en fait partie.