Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le sujet qui nous occupe aujourd’hui est la prévention des inondations et la protection contre celles-ci. Nous ultramarins connaissons bien ces problèmes, car ils sont récurrents et constituent une préoccupation majeure en Martinique et en Guadeloupe, où les risques naturels sont plus nombreux et plus dangereux qu’ailleurs.
Ainsi, le risque d’inondation est élevé aux Antilles, puisque les pluies y provoquent des crues rapides, violentes et de courte durée. En outre, le risque de mouvements de terrain est présent à des degrés divers : certaines zones à risque sont connues, d’autres sont plus délicates à repérer. De plus, les risques naturels dans les DOM pourraient s’aggraver à l’avenir, car le changement climatique est susceptible d’entraîner une élévation du niveau de la mer et un accroissement de l’intensité des tempêtes et des cyclones.
C’est pourquoi la proposition de loi relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci m’apparaît comme un texte majeur. Je salue la prise en compte de cette problématique au travers de la double perspective de la prévention et de la protection.
Concernant la prévention, je souhaite souligner que, aux Antilles, sur le plan juridique, nous sommes confrontés à des interprétations contradictoires des dispositions combinées du code général de la propriété des personnes publiques et du code de l’environnement.
Par exemple, les termes des articles L. 2124-11 et L. 2111-9 du code général de la propriété des personnes publiques et L. 215-14 du code de l’environnement donnent à penser que l’entretien des berges des cours d’eau domaniaux est à la charge de l’État, puisque celui-ci est responsable de l’entretien du lit aux rives et que les berges relient le lit aux rives. Or ces éléments sont en contradiction avec l’article L. 215-14 du code de l’environnement, aux termes duquel « le propriétaire riverain est tenu à un entretien régulier du cours d’eau ».
Sur cette base, les services de l’État refusent d’intervenir pour l’entretien des berges des cours d’eau domaniaux. Ainsi, il n’existe pas de plan de gestion assorti d’une fréquence régulière d’entretien pour les cours d’eau domaniaux en Martinique. C’est pourquoi il est indispensable que le préfet ait les moyens d’organiser les interventions régulières de l’État pour l’entretien des cours d’eau domaniaux.
Par ailleurs, les spécificités géographiques ne sont pas non plus prises en compte sur le plan juridique. Par exemple, il n’y a pas de fleuve aux Antilles. La définition jurisprudentielle – et, à terme, réglementaire – des cours d’eau – présence d’un lit naturel et d’un débit suffisant la majeure partie de l’année – exclut donc d’office les ravines insulaires du champ réglementaire. Or la prise en compte de leur entretien et de leur aménagement est capitale pour la gestion des « cours d’eau » dans un espace insulaire caribéen soumis à des pluies parfois violentes et sporadiques à la fois, d’autant que, en Martinique, les bassins versants sont relativement petits et souvent pentus en amont, ce qui accroît l’érosion.
Il importe donc d’ajuster la définition pour que les ravines soient considérées comme des cours d’eau. Cette qualification représente un enjeu essentiel pour les Antilles, surtout sur le plan financier.
En effet, l’entretien des cours d’eau non domaniaux et les travaux de protection sont à la charge des riverains. Ceux-ci, faute de moyens suffisants, se retournent vers les communes, qui, souvent, ne sont pas en mesure d’agir. Alors, les riverains interviennent de façon inappropriée dans le lit des rivières.
Enfin, concernant le volet relatif à la protection, il m’apparaît utile, à ce stade, de formuler des remarques sur le chapitre II, intitulé « Dispositions relatives à la gestion de la crise, à la réhabilitation et à l’indemnisation ».
L’article 10 prévoit, à bon escient, le renforcement de la mission des réserves communales de sécurité civile. Compte tenu de notre insularité, la faculté de recourir à une réserve revêt une importance cruciale.
Toutefois, trois points méritent d’être clarifiés.
D’abord, il faudrait prévoir l’affectation de moyens financiers spécifiques à la création et à la gestion de ces réserves, qui voient leur rôle renforcé.
Ensuite, la formule « dès que la probabilité de survenance d’un événement calamiteux exceptionnel est forte » pourrait à mon sens être remplacée par les mots « dès que des événements excédant les capacités des moyens disponibles ». Ainsi, l’élu disposerait d’une plus large possibilité de faire appel à la réserve.
Enfin, s’il est intéressant de légitimer la mutualisation des moyens entre communes, il convient de préciser l’autorité de commandement, le champ de la responsabilité des réserves et la prise en charge de leur couverture en cas de problème.
Telles sont les propositions que je formule pour enrichir ce texte que je considère de bonne facture.