Notre objectif est que soient votées des dispositions conformes à la volonté ou à l’aspiration du constituant.
Comme vous le savez, l’Assemblée nationale, dans un vote qui illustre la parfaite concorde républicaine, a approuvé mardi dernier le projet de loi organique dans la rédaction résultant de la commission mixte paritaire, modifiée par un amendement du Gouvernement.
Deux dispositions de notre loi fondamentale permettent de recourir au référendum : l’article 89, d’une part, et l’article 11, d’autre part, lequel permet au Président de la République, sur proposition du Gouvernement ou sur proposition conjointe des deux assemblées, de soumettre au peuple des projets de loi entrant dans le champ fixé par son premier alinéa.
C’est de cette disposition, dans sa rédaction issue de la révision de 2008, qu’il est aujourd’hui question.
Comme a pu le relever M. Portelli, il n’est pas tout à fait satisfaisant que des textes ayant fait l’objet d’une révision constitutionnelle depuis plus de cinq ans – et même plus de six ans pour ce qui est de l’article 68 – ne soient toujours pas entrés en vigueur à ce jour. Il y a là matière à réflexion pour le législateur organique, Gouvernement comme Parlement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il est temps d’achever le parcours de ces textes qui ont connu un long cheminement. Ils ont en effet été déposés en décembre 2010, et une première lecture est intervenue un an plus tard, le 21 décembre 2011.
Comme cela est rappelé dans l’excellent rapport de votre commission, si les nouvelles dispositions de l’article 11 sont en elles-mêmes précises, elles prévoient toutefois qu’une loi organique détermine les conditions de présentation de la proposition de loi et celles dans lesquelles le Conseil constitutionnel assure le contrôle du respect des règles fixées par la Constitution.
C’est sur ce dernier point que d’ultimes ajustements sont intervenus entre les chambres afin de s’assurer de la meilleure des rédactions possibles. Vous en conviendrez en effet, il serait étonnant que le législateur voie ces dispositions relatives au rôle du Conseil constitutionnel censurées pour inconstitutionnalité par ce même Conseil...
L’histoire retiendra peut-être que c’est encore le Sénat qui voulut garantir le respect de la lettre constitutionnelle, et peut-être protéger le Conseil constitutionnel du Conseil constitutionnel lui-même...
Mon propos sera bref, car il ne me paraît plus opportun de revenir sur les discussions et les échanges intéressants que les chambres ont pu connaître sur les notions de « référendum » ou d’ « initiative populaire ».
À l’ordre du jour du Sénat figurent donc ces textes relatifs aux modalités de mise en œuvre de l’article 11, lequel institue ce que l’on a laissé nommer, à tort, le « référendum d’initiative populaire », alors qu’il s’agit en fait, comme l’a rappelé M. Sueur, d’un référendum d’initiative partagée. Celui-ci résulte d’un compromis obtenu sur la base d’amendements déposés par plusieurs groupes politiques qui visaient alors à créer un véritable référendum d’initiative populaire.
Il n’y a nulle contradiction à vouloir, d’une part, revaloriser le rôle du Parlement et, d’autre part, achever l’entrée en vigueur de cette disposition afin de mieux associer les citoyens à la vie publique.
C’était déjà, je le rappelle – les parlementaires d’expérience, dont j’ai eu l’honneur de faire partie, s’en souviennent –, le sens des travaux du Comité consultatif pour la révision de la Constitution, institué en décembre 1992 par François Mitterrand, qui fut le premier à proposer l’instauration d’un « référendum d’initiative minoritaire ». Il s’agissait de combiner « le vœu d’une minorité parlementaire et [celui] d’une minorité de pétitionnaires dont le cumul pouvait conduire à l’arbitrage de la nation elle-même ». Nous y sommes, vingt ans plus tard.
Le constituant ayant décidé d’instaurer ce type de référendum, il appartient désormais au législateur, dans la marge étroite d’appréciation – la ligne de crête – qui lui reste en ce domaine, d’adopter un dispositif qui présente les garanties nécessaires de clarté et de sécurité, comme de simplicité.
Les membres de la commission mixte paritaire sont parvenus à des propositions convergentes qui conservent les apports de l’Assemblée nationale et du Sénat, tout en respectant la lettre et l’esprit de la Constitution.
Je ne reviendrai pas sur les avancées obtenues sur les questions de recueil des soutiens, sur les modalités de transmission de la proposition de loi entre les deux assemblées, sur la question de la consultation du Conseil d’État ou sur les délais impartis au Président de la République pour organiser le référendum.
Il m’apparaît donc que l’approche rigoureuse des textes fondamentaux par la Haute Assemblée a pu prévaloir.
Je le dis d’emblée, sous la réserve d’un amendement technique de précaution déposé par le Gouvernement et approuvé avant-hier par l’Assemblée nationale, amendement qui viendra encore sécuriser votre dispositif s’agissant de la composition des formations de première instance du Conseil constitutionnel, vos travaux recueillent l’approbation et le soutien complet du Gouvernement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en adoptant ces deux projets de loi, les deux chambres satisferont à la demande de deux présidents de la République, Nicolas Sarkozy, l’initiateur de cette réforme constitutionnelle, et François Hollande, qui rappelait le mois dernier, à l’occasion de l’anniversaire de notre Constitution, son souhait de voir cette disposition acquérir force de loi. §