… mais on encourage de la sorte l’instrumentalisation de la question référendaire, transformée pour l’occasion en tribune médiatique.
Le risque, vous le connaissez, mes chers collègues, c’est que la discussion de ces propositions de loi apparaisse comme une troisième ou une quatrième lecture d’un même texte, comme l’ultime outil de l’opposition pour occuper le débat public. Il me semble d’ailleurs que nous avons presque assisté à une telle tentative au cours des derniers mois !
L’autre risque que nous craignons, quitte à nous répéter, est celui d’une instrumentalisation de l’outil législatif par certains lobbie s bien financés, heureux de voir s’introduire dans le débat démocratique, autour de la campagne de recueil des soutiens populaires, une question qui pourrait servir leurs intérêts, bien souvent voire presque toujours pécuniaires. Or le débat public n’a jamais fait bon ménage avec l’argent, et nous tenons à ce qu’il continue d’en être ainsi.
La famille politique à laquelle je suis fier d’appartenir, celle des radicaux, s’est toujours méfiée de la pratique référendaire, bien souvent transmuée en plébiscite dans l’histoire de notre pays. Non que nous craignions aujourd’hui qu’un Badinguet se transforme demain en dictateur ; mais à notre sens, le référendum ne devrait être confiné qu’à des hypothèses ultimes, comme l’approbation par le peuple de grandes décisions affectant l’avenir de la Nation. Notre confiance réside d’abord dans l’expression du suffrage universel et la démocratie représentative, dont nous émanons et dont nous retirons notre légitimité de par l’article 3 de la Constitution.
Pour autant, nous ne saurions retirer son mérite à la procédure d’examen de ces deux textes. Nos deux assemblées ont pu, pour une fois, dialoguer et se mettre d’accord, ce qui devient très rare par les temps qui courent et confirme, en passant, que personne ne croit à l’application future de ce dispositif.
Les principaux points de divergence portaient sur les modalités de recueil et de contrôle des soutiens, avec, en particulier, la question de l’opportunité de créer ou non une commission ad hoc chargée de contrôler ceux-ci. Nous prenons acte avec satisfaction du fait que la position du Sénat, plus respectueuse de la lettre de la Constitution, a été suivie. C’est suffisamment peu fréquent pour que nous nous en réjouissions.
Quant à la question de la forme du recueil des soutiens populaires, nous saluons également le fait que la position du « tout électronique » voulue par les députés n’a pas été retenue. C’est une bonne chose, me semble-t-il, que la commission mixte paritaire soit parvenue à cette conclusion.
Vous aurez donc compris, monsieur le ministre, mes chers collègues, que notre groupe votera unanimement les conclusions de ces commissions mixtes paritaires, non pas avec enthousiasme, mais avec le souci responsable de ne pas laisser des pans de la Constitution en jachère.
À ce propos, monsieur le ministre, oserais-je vous demander s’il entre dans les intentions du Gouvernement de faire prochainement adopter, avec la même célérité, la loi organique portant application des articles 67 et 68 de la Constitution relatifs à la Haute Cour ?