Les ministres sont là pour protéger leur administration. Celle-ci n’est pas comptable de toutes les difficultés, de tous les maux auxquels un pays peut être confronté.
Ce principe est consubstantiel à la République. Les fonctionnaires appliquent les orientations que le pouvoir politique souhaite faire prévaloir. Ils le font en tout temps avec beaucoup de loyauté, de compétence et de sens des responsabilités. Au moment où nous abordons les questions budgétaires, qui sont des questions sérieuses, il est important de rendre à ces fonctionnaires l’hommage qui leur est dû. Je veux dire très clairement que nous travaillons en confiance avec nos collaborateurs de Bercy et je veux saluer la qualité de leur travail, leur ardeur à la tâche et leur profond sens de l’État.
Je voudrais également profiter de ce débat pour insister sur quelques points, en donnant des chiffres, parce que, finalement, la seule chose qui vaut en matière budgétaire, c’est la réalité des chiffres.
Je voudrais tout d'abord insister sur l’évolution des déficits et le redressement de nos comptes.
Je voudrais ensuite souligner l’effort d’économies en dépenses que représente ce budget.
Je voudrais également insister sur les mesures que ce budget contient pour le redressement de notre économie et l’amélioration du pouvoir d'achat de nos compatriotes ; il s’agit d’une question importante, dans laquelle j’inclus celle de l’emploi.
Je voudrais enfin insister sur quelques questions qui nous tiennent à cœur, à Pierre Moscovici et à moi-même, et sur lesquelles nous sommes mobilisés ; en témoignent ce projet de loi de finances, mais également le projet de loi de finances rectificative et le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière. Je veux parler de l’action résolue que nous avons engagée ensemble pour lutter contre la fraude fiscale et récupérer ainsi les recettes qu’auraient dû verser ceux qui ont décidé de ne pas payer leurs impôts. En effet, chaque euro récupéré sur ceux qui fraudent est un euro de moins prélevé sur ceux qui, depuis longtemps, s’acquittent de leurs devoirs de citoyens.
Commençons par les déficits. Examinons la séquence des chiffres, puisque ce sont ces derniers qui indiquent la trajectoire. Le reste, c’est le tohu-bohu, le vacarme qui peut parfois occuper tout l’espace public sans que la bonne foi soit nécessairement convoquée. Pour ma part, je m’en tiens à la réalité des chiffres.
Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, le déficit nominal était de 5, 3 % du produit intérieur brut. En 2012, il s’est établi à 4, 8 %. Il est vrai que nous nous étions fixé un objectif de 4, 5 %, mais tous ceux qui, au sein de la commission des finances, ont examiné de près les raisons de ce décalage savent qu’il s’explique essentiellement par la nécessité de prendre en compte la situation de la banque Dexia et d’intégrer des crédits de paiement qui n’avaient pas été alloués à l’Union européenne depuis novembre 2010, afin d’éviter que cette dernière ne se trouve dans l’impossibilité d’honorer ses engagements au titre des perspectives financières 2007-2013.
Si l’on ôte ces deux éléments extérieurs, nous sommes très près de l’objectif que nous nous étions fixé. Pour 2013, notre objectif est de ramener le déficit à 4, 1 % ; je reviendrai tout à l'heure sur l’évolution des recettes et la manière dont nous tenons la dépense. Enfin, le projet de loi de finances pour 2014 prévoit un déficit de 3, 6 %.
En dépit de ce qu’il m’arrive souvent d’entendre dire, ces chiffres sont incontestables. On les trouve dans les rapports que vous avez pu étudier. Les déficits ne dérapent pas !
Depuis que nous sommes en situation de responsabilité, nous menons une stratégie continue de réduction des déficits. Non seulement cette dernière, qui donne un sens à la trajectoire des finances publiques, est en cours, mais, en outre, nous avons réussi à atteindre cet objectif en faisant des efforts structurels que la Commission européenne comme le Haut Conseil des finances publiques saluent.
Je veux donner les chiffres précis : 1, 3 % en 2012, 1, 7 % en 2013 et 1 % en 2014. Si la Commission européenne, dans le cadre du semestre européen et du programme de stabilité au sein duquel s’inscrivent nos engagements, reconnaît que la trajectoire est tenue, c’est parce qu’elle sait que les chiffres d’efforts structurels que je viens de vous donner correspondent à ce que nous faisons et nous permettront d’atteindre les engagements que nous avons pris. Il est important que notre crédibilité soit préservée et réaffirmée à tout moment.
Si nous voulons retrouver le chemin de la croissance, il faut que nous accomplissions cet effort d’assainissement de nos comptes publics. De la même manière, nous n’avons aucune chance d’atteindre l’objectif d’assainissement de nos comptes publics si nous ne mettons pas tout en œuvre pour retrouver le chemin de la croissance.
Notre effort de réduction des déficits publics se traduit également par la maîtrise des comptes sociaux. Je rappelle que, en 2010, alors même que le taux de croissance était légèrement supérieur à 1, 5 %, le déficit des comptes sociaux – celui du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV – s’est dégradé d’environ 4, 5 milliards d'euros, pour atteindre 28 milliards d'euros. En 2011, le déficit était encore de 20, 8 milliards d'euros.
Si nous n’avions rien fait lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, si nous n’avions pas présenté de projet de loi de finances rectificative pour 2012, le déficit aurait sans doute dépassé 25 milliards d'euros. Grâce aux dispositions que nous avons prises, il s’est établi à 17, 5 milliards d'euros en 2012. En 2013, il sera de 16, 2 milliards d'euros, et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 prévoit qu’il sera de 12, 8 milliards d'euros l’an prochain.
Nous sommes donc dans une séquence très affirmée de diminution des déficits des comptes sociaux. En l’espace de dix-huit mois, nous aurons réduit ces déficits de 8 milliards d'euros. Si nous maintenons cette tendance, le déficit du régime général et du FSV s’établira à 4 milliards d'euros en 2017. En cinq ans, nous aurons ainsi divisé par plus de cinq le déficit des comptes sociaux.
Voilà les chiffres. On peut ensuite débattre à l’infini, mais ils parlent d’eux-mêmes. Je veux dire au Sénat et, à travers lui, aux Français, que les efforts accomplis, dont il faut reconnaître qu’ils ont parfois été lourds, aboutissent à la réduction des déficits nominaux et des déficits des comptes sociaux, qui s’étaient envolés de manière significative au cours des dernières années. Certes, il y a eu la crise, mais le déficit structurel avait lui aussi augmenté entre 2008 et 2011. La crise n’était donc pas le seul élément d’augmentation des déficits et de dégradation de nos comptes. Les rapports du Haut Conseil des finances publiques en témoignent.
Le deuxième sujet sur lequel je voudrais insister, c’est la dépense. Ma conviction profonde est qu’il n’est pas possible – j’insiste sur ce point – de préserver nos services publics et notre modèle social, qui sont le patrimoine de ceux qui n’en ont pas, sans maîtriser la dépense publique.
Le ministère du budget n’est pas le ministère du prélèvement par l’impôt du patrimoine de ceux qui en ont un ; il est, et il doit être avant tout, a fortiori dans un contexte de crise, le ministère de la préservation du patrimoine de ceux qui n’en ont pas, c'est-à-dire des services publics et de la protection sociale.
Si nous sommes attachés aux services publics et à la protection sociale – au modèle social français, qui est souvent évoqué par le Premier ministre –, notre devoir est de faire en sorte que la mauvaise dépense publique ne chasse pas la bonne, et même qu’il ne reste que la bonne, c'est-à-dire que chaque euro dépensé soit un euro utile. C’est le moyen de préserver le modèle social français et les services publics à la française, qui, je le répète, sont le patrimoine des Français les plus modestes et les plus exposés au tumulte de la crise.
La volonté qu’a le Gouvernement de réduire les déficits ne traduit pas une orientation « austéritaire », comme certains se plaisent à la qualifier, qui serait suivie au détriment des services publics ou de la protection sociale. Non ! Si nous voulons que la mauvaise dépense publique ne chasse pas la bonne, c’est en raison de notre attachement viscéral au modèle social français. Nous avons en effet la conviction qu’il n’est pas possible d’assurer la soutenabilité de ce modèle si nous ne maîtrisons pas la dépense publique.
Nous devons réaliser des économies. Ces économies, nous les faisons avec discernement. Nous économisons 9 milliards d'euros sur l’État et 6 milliards d'euros sur la sphère sociale.
Les 9 milliards d'euros d’économies sur l’État absorbent le rythme tendanciel d’augmentation de la dépense publique, soit environ 7, 5 milliards d'euros. Cela signifie que les dépenses de l’État diminuent de 1, 5 milliard d'euros.