Il faut savoir parfois modifier des dispositions dont on a pu considérer qu’elles ne produisaient pas les effets escomptés.
Si nous partageons la volonté de redresser les finances publiques, nous estimons que, dans le contexte actuel d’une lente et difficile sortie de crise, une augmentation trop importante de la pression fiscale sur les ménages et sur les entreprises nuirait gravement à la reprise et à la croissance sur le long terme. Or c’est bien la croissance qui sera, in fine, la clef du redressement durable de nos comptes publics.
Nous saluons, monsieur le ministre, vos efforts pour protéger les plus modestes grâce au dégel du barème de l’impôt sur le revenu et à la revalorisation de la décote. Cependant, il faut aller encore plus loin et il eût été opportun d’anticiper les conséquences néfastes de décisions antérieures, dont vous ne devriez pas porter la responsabilité.
Les Français souffrent du chômage, ceux qui travaillent ont peur de perdre leur emploi, l’accès au logement est problématique, la précarité et l’exclusion sociale progressent…
Or certaines mesures fiscales risquent de renforcer ce climat d’anxiété et de défiance néfaste non seulement pour l’économie, mais aussi pour la démocratie.
L’un des fondements de la démocratie est le consentement à l’impôt. Or ce consentement est aujourd’hui souvent mis à mal.
D’une part, des considérations simples et mathématiques doivent être relevées : de très nombreux Français, et pas seulement les plus favorisés de nos concitoyens, ont vu leurs impôts augmenter très significativement, bien que leurs revenus soient souvent égaux à ceux de l’année précédente.
D’autre part, malgré les efforts du Gouvernement pour réintroduire de la justice dans notre système fiscal – ils sont réels et nous les soutenons –, les Français doutent de cette justice, doutent de l’équité.
Pourquoi ? Tout d’abord, parce que nous continuons à « vider » progressivement les assiettes de nos principaux impôts, percées de toute part par des niches fiscales et sociales. Résultat : notre système fiscal est illisible, complexe, souvent inéquitable, ce qui réduit non seulement le consentement à l’impôt, mais aussi notre potentiel de croissance. En effet, les entreprises investissent moins, elles s’installent moins dans notre pays à cause de l’instabilité et de la complexité de nos règles fiscales et administratives – je reconnais toutefois que la responsabilité en incombe aux gouvernements de tous bords qui se sont succédé aux affaires depuis plusieurs décennies.
Je me réjouis de voir que le Premier ministre semble partager ce constat.
Ce constat est non seulement exact, mais il est aussi très grave. Après les nombreuses promesses de simplification, le Premier ministre nous annonce une « remise à plat » complète de notre système fiscal pour l’année prochaine. Il eût sans doute été opportun de le faire avant – ma remarque s’adresse aussi aux gouvernements précédents.
En attendant le projet de loi de finances pour 2015, qui doit donc résoudre, comme par miracle, tous les problèmes que je viens d’évoquer, que propose le projet de loi de finances pour 2014 ?
L’article 17 supprime un certain nombre de dépenses fiscales considérées comme inefficientes ou inutiles. Je m’en réjouis. Mais les députés ont fait adopter l’augmentation du plafond ou la reconduction d’autres niches. La cohérence de ce projet de loi de finances en matière d’économie sur les dépenses fiscales en est donc quelque peu affectée, et ce d’autant plus quand on se penche sur l’article 13, qui porte sur les « défiscalisations outre-mer ». Cet article crée deux nouveaux crédits d’impôt, sans supprimer pour autant les défiscalisations existantes, dont l’inefficacité a pourtant été maintes fois dénoncée sur toutes les travées de cet hémicycle.
Ni la fiscalité des ménages ni celle des entreprises ne sont simplifiées par le présent projet de loi de finances. Certes, ce dernier contient un certain nombre d’améliorations, mais elles ne répondent que partiellement et imparfaitement aux enjeux et aux difficultés que j’ai évoqués précédemment.
J’en viens maintenant à quelques points particuliers qui nous tiennent à cœur, notamment à une question primordiale pour les Français, celle du logement. Le RDSE a toujours défendu une fiscalité qui dissuade la rétention foncière. En ce sens, la suppression des abattements pour durée de détention sur les plus-values de cession de terrains à bâtir nous convient tout à fait. Nous pensons toutefois qu’il faut aller plus loin.
Par ailleurs, nous sommes préoccupés par une certaine improvisation en ce qui concerne les dispositions de ce projet de loi relatives aux finances locales – elles figurent dans la deuxième partie du texte, mais c’est justement le moment d’en parler !