Intervention de Francis Delattre

Réunion du 21 novembre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Discussion générale

Photo de Francis DelattreFrancis Delattre :

Elle est indéniable, incontestable. » Le seul problème, monsieur le ministre, c’est que vous êtes les seuls à l’apercevoir ! En réalité, c’est le désert des Tartares. Comme le lieutenant Drogo, ils attendent la gloire, retranchés au fort de Bercy, où leur garnison habile invente chaque semaine un impôt ou une taxe. C’est devenu un divertissement qui masque les nécessités du moment, au premier rang desquelles la réduction impérieuse des dépenses publiques, qui, avec 57, 1 % du PIB, nous hissent au tout premier rang de la zone euro.

On peut aujourd’hui parler d’un vrai sinistre par rapport à l’Allemagne, qui est passée en dix ans de 48, 5 % à 44, 7 %.

Cet été, mes chers collègues, 13 000 sociétés ont fait faillite. Cela ne s’était pas vu depuis 1993.

Je profite de l’occasion pour dire à notre collègue Jean Germain qu’en 1993 – c’est une date dont nous sommes quelques-uns à nous souvenir –, pour son dernier budget, Pierre Bérégovoy avait doublé le déficit. C’est le gouvernement Balladur qui a dû assumer. Mon cher collègue, l’histoire doit être relatée avec rigueur.

Les TPE concentrent neuf défaillances sur dix. Le secteur agricole, notamment l’élevage, est en difficulté et l’emmental allemand – cela ne devrait pas inquiéter un ministre normand –, à notre grande surprise, envahit nos rayons.

Sur l’ensemble du troisième trimestre, la production industrielle s’est contractée de 1, 1 % dans le secteur manufacturier et de 1, 4 % dans l’ensemble de l’industrie, selon l’INSEE. Par rapport au troisième trimestre de l’année 2012, la production manufacturière accuse un recul de 2 %.

La France continue inexorablement de détruire des emplois : 170 000 depuis le début de l’année.

Après Goodyear, Alcatel, La Redoute, Natixis et Doux, FagorBrandt vient d’annoncer la suppression d’emplois. Au cours de la seule journée de mercredi dernier, 4 000 emplois ont été annoncés comme étant condamnés.

Le chômage augmente, qui touche désormais près de 11 % de la population active.

La France a de nouveau reculé de deux places dans le classement des pays compétitifs établi par le forum de Davos en 2013. Nous sommes dorénavant à la vingt-troisième place.

Après un petit rebond au deuxième trimestre, la croissance française a reculé de 0, 1 % au troisième trimestre.

L’investissement des entreprises diminue de 0, 6 % ce trimestre. Pour autant, monsieur le ministre, on persiste dans ce budget à s’attaquer à la déductibilité fiscale des intérêts des emprunts destinés à l’investissement.

Alors qu’on parle de compétitivité et d’emploi dans tous les journaux télévisés, le Gouvernement s’interroge-t-il vraiment sur les conséquences d’une telle mesure ? Je le rappelle, ce n’est pas la droite qui a mis en place cette déductibilité.

La consommation, quant à elle, décélère de 0, 2 % et les exportations chutent de 1, 5 %.

Tous ces discours lénifiants ne font qu’entretenir la colère des Français, qui expriment leur mécontentement et leur exaspération. Surtout, monsieur le ministre, ils ne croient plus en votre capacité politique à relever ces défis.

La pause fiscale est devenue un feuilleton télévisuel. M. Hollande l’avait annoncée dans un entretien au Monde, puis dans une interview solennelle sur TF1 – grande chaîne de télévision. Que nenni, deux jours après, le Premier ministre contredit le Président, annonçant qu’elle sera effective peut-être en 2015. En réalité, la pause politique « hollandaise » est un moment de répit entre deux dévissages fiscaux, qui vous conduit – si vous voulez mon sentiment – inexorablement vers la chute.

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