Cet amendement concerne la fiscalisation des indemnités versées aux accidentés du travail, à laquelle nous sommes opposés depuis qu’elle a été introduite par la loi de finances de 2010.
Cette mesure purement dogmatique, profondément injuste et dont le produit est minime – 355 millions d’euros –continue logiquement de susciter l’indignation d’une très grande majorité de Français, toutes tendances politiques confondues.
Avec la fiscalisation, même partielle, des indemnités journalières versées aux accidentés du travail, la « coproduction législative » a montré son pire visage, en entérinant un grave et symbolique recul des droits des victimes d’accidents du travail.
Les accidentés du travail ne sont pas des privilégiés. Ces salariés, hommes et femmes, dont la vie bascule à la suite d’un accident survenu sur leur lieu de travail et qui en gardent trop souvent la trace dans leur chair, n’étaient pas les heureux bénéficiaires d’une niche fiscale qu’il fallait supprimer au nom d’un prétendu « rendez-vous d’équité » ou du faux argument de l’alignement du traitement de tous les salaires de remplacement.
La mise en place, après bien des tentatives, de la fiscalisation des indemnités versées aux accidentés du travail fut, malheureusement, un message très clair. Ce fut aussi, en quelque sorte, l’instauration d’une triple peine : aux traumatismes, tant physiques que psychologiques, dus à l’accident de travail et aux graves pertes de revenus qui en découlent s’ajoute maintenant la fiscalisation des faibles indemnités journalières que perçoivent les accidentés du travail.
Cette fiscalisation et le discours politique qui l’a accompagnée sont venus nier le statut de victimes de ces salariés, dans le but de récupérer, sur leur dos, de bien maigres sommes. L’argument selon lequel il s’agit de traiter de la même manière tous les revenus de remplacement ne tient ni juridiquement ni moralement : les indemnités journalières versées aux accidentés du travail et celles qui sont attribuées aux salariés en arrêt maladie ou en congé de maternité ne sont pas de même nature, eu égard au motif, appelé aussi « fait générateur », qui en occasionne le versement. Le salarié victime d’un accident du travail n’a pas pu se soustraire à l’accident survenu « par le fait ou à l’occasion du travail ». Son contrat de travail lui imposait d’être présent dans l’entreprise, à la disposition de son employeur, au moment par exemple où la machine qu’il utilisait a explosé, où la nacelle a cédé, où le véhicule est tombé en panne.
Une autre différence de nature existe entre les indemnités versées en cas d’arrêt maladie ou de congé de maternité, d’une part, et celles allouées en cas d’accident du travail, d’autre part : les premières sont financées par des cotisations salariales et constituent donc une forme de salaire différé, qui, comme tel, peut être soumis à fiscalisation, contrairement aux cotisations ; les secondes sont financées par les seules cotisations à la charge des employeurs, elles-mêmes déductibles de l’impôt sur les sociétés, et ne sont en rien un salaire différé.
Au demeurant, observons que, de façon asymétrique, les cotisations des employeurs sont totalement déductibles, ce qui n’est pas le cas des indemnités versées aux salariés.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à adopter cet amendement de justice sociale et fiscale.