Intervention de Valérie Létard

Réunion du 15 février 2011 à 14h30
Débat d'orientation sur la prise en charge de la dépendance et la création d'un cinquième risque — Orateurs inscrits

Photo de Valérie LétardValérie Létard :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à partir du constat juste et équilibré dressé par nos collègues Alain Vasselle et Philippe Marini, il nous faut, en abordant ce sujet sensible de la prise en charge de la dépendance, essayer de nous poser les bonnes questions.

À mon sens, celles-ci sont au nombre de trois. Comment respecter le libre choix des personnes âgées entre domicile et établissement ? Comment concilier l’équité et la proximité ? Comment partager justement le coût financier de cet effort ?

Première question : comment respecter le libre choix des personnes âgées ?

C’est un engagement pris, dès 2007, par le Président de la République. C’est une question de respect et de dignité. Mais, il ne faut pas se le cacher, c’est aussi une inflexion à donner pour orienter une partie plus importante de nos efforts sur le développement de l’offre à domicile – soins infirmiers à domicile, accueils de jour, hébergements temporaires –, plutôt que de se concentrer sur la seule poursuite de créations massives de structures d’hébergement.

Ce choix a plusieurs conséquences, que je listerai rapidement.

S’agissant du renforcement de notre effort en matière de prévention, le rapport de notre collègue Valérie Rosso-Debord contient des pistes intéressantes.

S’agissant du maintien impératif du groupe iso-ressources 4, le GIR 4, dans le dispositif de l’APA et son amélioration, je partage complètement l’analyse de la mission sénatoriale. Supprimer ce niveau d’entrée dans l’aide reviendrait à fragiliser l’ensemble du système, car nous prendrions ainsi le risque d’accroître les hospitalisations accélérées et, donc, les dépenses de santé.

S’agissant de l’effort important nécessaire pour former les personnels à prendre en charge des personnes très dépendantes à domicile, il faut poursuivre le plan de développement des métiers et formations du secteur médico-social que j’avais déjà soutenu en 2008. Je persiste à penser que c’est une des clés de la réussite de notre politique en faveur des personnes âgées, qu’elles restent à leur domicile ou qu’elles intègrent un établissement.

Enfin, il faut repenser l’articulation entre le domicile et l’établissement pour aller vers des plateformes de services couvrant tout le parcours des personnes, afin d’éviter les ruptures de prise en charge.

Deuxième question, fondamentale elle aussi, comment concilier équité et proximité ?

Comme devant la maladie, nous ne sommes pas tous égaux devant le vieillissement. Cela implique que ce risque relève d’abord de la solidarité nationale, et une société solidaire doit aider à prendre en charge cet aléa collectivement, d’où la proposition de la CNSA en octobre 2007 de créer un droit universel à une compensation personnalisée pour l’autonomie.

Ce droit doit donner accès à une évaluation des besoins d’aide, à un plan de compensation et au versement d’une prestation personnalisés. Pour ma part, je reprends complètement à mon compte ces propositions et c’est sur ces bases qu’il nous faut, à mon sens, construire la réforme.

En pratique, cela implique trois déclinaisons logiques.

Premièrement, nous acceptons une péréquation afin d’assurer cette aide à toutes les personnes âgées, de manière équivalente en tout point du territoire. Les départements ruraux pauvres ou urbains pauvres doivent être assurés du soutien financier nécessaire. Il faut réfléchir à la manière dont nous répartirons la charge entre l’État, les départements, les usagers et revoir la clé de répartition de l’APA.

Deuxièmement, nous acceptons la nécessité d’établir une équité entre les plus riches et les plus pauvres en fonction de la capacité financière de chacun. Dans cette optique, il est d’ailleurs légitime d’encourager les personnes disposant de revenus suffisants à recourir au système assurantiel.

Troisièmement, nous nous fixons comme un des objectifs majeurs de la réforme de réduire le reste à charge des résidents en établissement, en agissant sur la prise en charge des aides-soignantes et de l’animation.

Dernière question enfin, quels choix financiers pour assurer cette prise en charge ?

Il est difficile d’évaluer précisément le besoin de financement – M. Alain Vasselle avançait le chiffre d’un milliard d’euros par an. Mais, contrairement à l’assurance maladie, et grâce au mode de fonctionnement de la CNSA et des départements, nous partons d’une situation saine, car les besoins à couvrir ne s’accompagnent d’aucun endettement ou passif à apurer.

Du côté des économies possibles, on pourrait certes choisir de revenir au recours sur succession de la prestation spécifique dépendance, la PSD. D’une manière ou d’une autre, ce serait une fausse économie et je n’y suis pas favorable. On peut en revanche s’interroger sur le bien-fondé de l’aide fiscale à l’hébergement en EHPAD. Ces 300 millions d’euros pourraient être plus utilement affectés.

Mais le compte n’y sera pas sans envisager d’autres recettes.

La plus simple, à l’assiette la plus large et au taux le plus faible, est la contribution sociale généralisée, la CSG. 0, 1 point de CSG représente 1, 3 milliard d’euros. Toutefois, je n’ignore pas la difficulté à agir sur ce levier dans le contexte financier actuel.

La piste de la seconde journée de solidarité, que vous avez rappelée, est très intéressante et il faut la creuser.

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