Intervention de Philippe Dallier

Réunion du 22 novembre 2013 à 14h30
Loi de finances pour 2014 — Articles additionnels après l'article 2

Photo de Philippe DallierPhilippe Dallier :

Je suis assez surpris et même un peu inquiet que vous utilisiez ce registre. À mon avis, vous sous-estimez et mésestimez le ras-le-bol fiscal. Les Français ont tout simplement constaté que leurs impôts et les taxes augmentaient. Ce sera aussi le cas l’année prochaine, pour le prix d’un certain nombre de services : la TVA sur les transports, sur les ordures ménagères, sur l’eau, ...

Tout ça, ils le vivent et, bien évidemment, ils en rendent responsables ceux qui prennent les décisions, c’est-à-dire le Gouvernement et votre majorité. Il est difficile de dire le contraire ! Vous ne pouvez donc pas traiter d’antirépublicains, de poujadistes, et j’en passe, ceux qui vous mettent en garde contre la remise en cause du consentement à l’impôt du fait du seuil atteint par les prélèvements obligatoires et balayer d’un revers de main leurs avertissements. Vous faites là une erreur !

Pour ce qui concerne l’absence de lisibilité de votre politique, je vous renvoie aux déclarations successives des membres du Gouvernement. En janvier 2013, par exemple, Jérôme Cahuzac annonçait que la réforme fiscale était « faite ». Puis, tout au long de l’année, on a eu droit à d’autres déclarations, qui ont laissé penser à nos concitoyens que des décisions avaient d’ores et déjà été prises, même si je reconnais, monsieur le ministre, que vous, vous avez affirmé, ici et ailleurs, ne pas croire au grand soir fiscal et vouloir réformer progressivement.

Aujourd’hui, le Premier ministre, devant les difficultés et le mécontentement manifesté par les Français au travers des sondages, nous annonce à nouveau une remise à plat complète. Nous sommes dans la plus grande illisibilité, et cela crée de l’anxiété. Vous devez prendre en considération cet élément. Je le répète, vous ne pouvez pas balayer tout ça d’un revers de main !

Les Français savent bien que, s’ils paient des cotisations et des impôts, c’est pour financer notre modèle social et nos services publics. Mais la question est de savoir jusqu’où nous pouvons aller. On peut toujours, et nous en parlerons au moment de l’examen de l’article 3 relatif au financement de la politique familiale, annoncer la création de 100 000 places de crèche, mais comment on les finance ? Grâce aux collectivités locales, aux caisses d’allocations familiales ? Chaque Français qui a des enfants voudrait avoir une place en crèche. Pour autant, doit-on multiplier les places sans savoir comment on va les financer ?

Dans ce pays, on ne réforme qu’au bord du gouffre, lorsque la situation devient très difficile. Or faire une grande réforme dans un contexte de crise très dure, c’est encore plus compliqué. Il faudrait anticiper un peu !

Pour les collectivités locales, c’est exactement la même chose. Vouloir engager des réformes fiscales importantes alors qu’on est en pleine crise, que les recettes diminuent et qu’on ne sait pas maîtriser suffisamment les dépenses, c’est beaucoup plus compliqué. Voilà peut-être une réflexion pour les cinquante ans qui viennent...

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