Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 22 novembre 2013 à 14h30
Loi de finances pour 2014 — Article 6

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Dans un souci d’égalité de traitement entre les contribuables, le Gouvernement nous propose de nous attaquer ici, après le quotient familial et l’exonération des contributions des employeurs au financement de la complémentaire santé, à une nouvelle mesure de caractère universel, à savoir la majoration de pension de retraite dévolue aux contribuables ayant élevé trois enfants au moins.

J’ai lu, bien évidemment, l’argumentaire de notre rapporteur général en faveur de cette mesure, et je voudrais formuler une première remarque sur ses appréciations : alors même qu’elle est censée rapporter de l’argent pour équilibrer les comptes des caisses de retraite, j’observe que le transfert des sommes à l’assurance vieillesse attendra 2015. Et pour 2014, si j’ai bien compris – M. le rapporteur général nous corrigera en cas d’erreur – c’est un virement au compte de l’État pour solder le déficit budgétaire qui est prévu.

Parlons maintenant du niveau de vie des retraités, puisque la pension moyenne est passée, en sept ans, de 1 029 à 1 256 euros, comme l’indique le rapport général. Cette évolution, qui touche les personnes parties en retraite entre 2004 et 2011 – c’est-à-dire les salariés nés entre 1942 et 1951 environ, qui n’ont pas connu, comme peuvent en souffrir les jeunes d’aujourd’hui, le chômage, la précarité du travail et les mauvaises conditions de rémunération – me semble normale.

Les différentes réformes des retraites, à commencer par la réforme Balladur de 1993, qui a été la première à remettre en cause cette évolution, avec la désindexation des retraites et des salaires, puis les réformes Fillon I de 2003 et Fillon II de 2010, ont toutes tendu à comprimer le montant des pensions des classes de population nombreuses, très expérimentées, qui ont quitté le monde du travail au début du XXIe siècle pour un repos bien mérité.

Les femmes nées entre 1942 et 1951 ont été les pionnières de l’essor de l’emploi féminin et des grandes conquêtes sociales des années soixante et soixante-dix, qui ont permis aux femmes de s’imposer progressivement dans le monde du travail, dans l’économie et dans la société.

Le problème, aujourd’hui, ce n’est pas que le niveau des retraites ait progressé plus vite que celui des salaires, mais bien plutôt que les salaires soient aussi bas. Quand on sait, par exemple, que certains organismes, y compris, malheureusement, gouvernementaux, recrutent aujourd’hui des bac + 2, des bac + 3 voire des bac + 5 pour leur demander de travailler à temps partiel avec une rémunération horaire égale au SMIC, on se dit que, effectivement, quelque chose ne va pas !

Les politiques d’allégement du coût du travail, lancées à grande échelle à l’automne 1993 – soit quelques mois après la réforme des retraites – avec la loi quinquennale sur le travail, l’emploi et la formation professionnelle n’ont jamais cessé de gagner en vigueur depuis.

À l’époque, on dépensait l’équivalent d’un milliard d’euros pour alléger les supposées « charges » des entreprises. Aujourd’hui, cette dépense fiscale atteint près de 30 milliards d’euros et le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ne fera que l’alourdir.

Voilà une dépense publique sur laquelle, apparemment, on n’a pas été très regardant, et qui pourtant, au vu du nombre de personnes inscrites à Pôle Emploi, ne semble pas avoir été d’une grande efficacité dans la lutte contre le chômage de masse !

Rendre imposable un plus grand nombre de retraités, voilà, semble-t-il, l’objectif de cet article. À notre avis, l’augmentation des tranches du barème de l’impôt sur le revenu et des taux de prélèvement rapporterait autant et serait plus juste.

J’ajoute que, si l’on diminue les ressources des nombreux retraités qui aident financièrement des enfants qu’ils ont contribué à élever, ces derniers risquent de se retrouver dans des situations difficiles et de revenir vers nous pour obtenir des mesures d’accompagnement social.

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