Cet amendement tend à instituer une taxe sur la revente spéculative de fréquences hertziennes obtenues gratuitement.
En effet, le CSA, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, attribue gratuitement l’usage de fréquences à des éditeurs de radio et de télévision sous réserve du respect de certaines obligations en matière d’investissements dans la création ou de quotas de diffusion.
Depuis le lancement de la télévision numérique terrestre, la TNT, les reventes de sociétés détentrices de fréquences se sont multipliées, avec des gains parfois très importants pour le vendeur. On se souvient de la cession de la chaîne Direct 8 à Canal +.
Évidemment, ayant fait l’objet d’investissements, une chaîne acquiert progressivement de la valeur. Toutefois, compte tenu des plus-values parfois réalisées, on peut s’interroger sur la nature spéculative de ces opérations, dont l’État, lui, ne retire rigoureusement rien alors qu’il a accordé gratuitement les fréquences.
Cet amendement vise à empêcher ce type de pratiques. Toutefois, lorsque les cessions de fréquences sont nécessaires, à l’occasion de regroupements par exemple, il faut que l’État y trouve aussi son compte.
Le hertzien terrestre est une ressource gratuite, mais c’est surtout une ressource rare, qui a permis à de nombreux groupes de se développer économiquement ; il me semble inadmissible que ces fréquences rares et délivrées gratuitement par l’État puissent servir d’instruments de valorisation financière.
Afin d’éviter que des candidatures ne soient inspirées que par une perspective spéculative, en prévoyant une revente au plus offrant, il est proposé de taxer ces reventes à hauteur de 5 % du prix de la cession, un pourcentage d’ailleurs plutôt modeste.
Même le CSA a souhaité, pour les dernières fréquences attribuées en TNT, introduire des clauses d’interdiction temporaire de revente, qui sont d’ailleurs contestées par les chaînes.
Au Sénat, par deux fois, au cours de deux années consécutives, un large consensus s’était dégagé pour adopter la mesure que je propose à nouveau aujourd’hui. Il se trouve en effet que, chaque fois, elle a été annulée par le Conseil constitutionnel.
La première fois, le motif invoqué pour justifier l’annulation tenait aux ajouts techniques apportés par deux gouvernements successifs pour préciser et sécuriser l’amendement que je proposais, ajouts qui se sont avérés être moins bien conçus que ce qu’avait prévu le Parlement.
La seconde fois, le Conseil constitutionnel a en outre qualifié cet amendement de cavalier législatif, considérant qu’il devait se rattacher à la loi de 1986 relative à la liberté de communication.
Pour éviter un nouvel accroc de cette sorte, nous avons créé, dans la loi relative à l’indépendance de l’audiovisuel public que nous venons d’adopter, le cadre nous permettant de proposer cette taxe en loi de finances, sans que la disposition en question puisse être considérée comme un cavalier.
Le paysage audiovisuel qui se profile pour les années à venir sera sans doute marqué par une tendance à la concentration, car les chaînes de la TNT sont loin de bénéficier toutes d’une audience équivalente : selon toute vraisemblance, certaines d’entre elles seront proposées au rachat. Ainsi, dès 2014, l’État pourrait tirer parti des cessions qui ont des chances de se produire.
Par les temps qui courent, il n’est guère d’occasions de trouver de nouvelles rentrées fiscales. Or c’est ce à quoi tend aussi cet amendement.