Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’aborderai le sujet d’une manière différente de mes collègues et je proposerai – modestement ! – une solution pour faire des économies sur cette peste grise qu’est la dépendance, notamment sur le reste à charge des familles.
Courageux, le Président de la République a annoncé qu’il ouvrirait le chantier de la dépendance en 2011. Il s’agit de créer un cinquième risque, mobilisant la solidarité nationale pour financer l’accompagnement de nos aînés.
Outre les difficultés du bel âge, le développement de maladies, comme le syndrome d’Alzheimer, augmente la complexité d’un tel dossier.
Le Sénat s’est penché depuis longtemps sur la question. Un travail remarquable a ainsi été accompli par la mission commune d’information sur la prise en charge de la dépendance et la création d’un cinquième risque.
La prise en charge de la dépendance est un défi qui m’apparaît comme une opportunité pour notre société, mais également pour nos territoires. Financement de la dépendance et aménagement du territoire forment, tel Janus, les deux visages d’un même problème.
Je me permets donc de revenir sur deux aspects liant l’aménagement du territoire et le financement de la dépendance : il s’agit, d’une part, de la localisation des EHPAD en zone rurale, car on diminue le reste à charge en abaissant la part du foncier dans le coût de la prise en charge, et, d’autre part, de la prudence dont nous devons faire preuve en matière de recours sur succession, car une telle option, comme il en existe pour l’ASPA, l’allocation de solidarité aux personnes âgées, fera peser le financement de la dépendance sur les départements vieillissants.
La diminution du reste à charge par l’installation d’EHPAD sur des territoires à faible pression foncière, c’est l’assurance d’une dépendance moins chère et d’une meilleure valorisation des territoires ruraux.
Oui, il est légitime de mobiliser la solidarité nationale quand nombre de familles ne peuvent plus supporter le reste à charge. De fait, même en matière de dépendance, les cordons de la bourse ne sont pas élastiques. Pour proposer aux Français une réforme juste et audacieuse, il est indispensable de développer une vision compréhensive du sujet, sur les plans tant sociétal et médical qu’économique et territorial. En réalité, les dimensions économique et territoriale sont précisément liées, alors que, à ce jour, une conception trop administrative tend bien souvent à les opposer.
On ne pourra redonner vie aux années de nos aînés sans redonner vie à nos territoires. Au regard des 30 % que représente le foncier dans le coût d’une place en maison médicalisée, la ruralité offre une opportunité sans pareille pour pourvoir la France de nouveaux établissements, de surcroît à meilleur rapport qualité-prix. Il faudrait cependant sortir des schèmes traditionnels des CROSS, SROS, DDASS, DRASS et maintenant des ARS, qui concentrent les projets dans les centres urbains, au nom de la proximité familiale.
Malheureusement, la proximité familiale est un argument bien théorique au regard de la réalité de la dépendance. Non seulement les EHPAD placés en zone urbaine coûtent extrêmement cher et le reste à charge des familles reste trop élevé, mais, en plus, ces structures ne trouvent pas pour autant leur place dans une vie urbaine à la fois absorbante et anonyme.
Oui, le foncier est trop cher en ville ; non, les plus modestes n’ont pas accès à ces structures d’accompagnement. Oui, la ville est absorbante ; non, les familles n’ont pas davantage le temps de visiter leurs aînés en cours de semaine. Oui, la ville est anonyme ; non, cet anonymat ne nous permettra pas de réduire de risque de maltraitance.
La ruralité, et c’est un rural qui le dit, offre – osons le dire ! – un cadre de vie mieux adapté pour traiter la dépendance. La ruralité laisse le temps au temps ; elle donne aussi à chacun l’espace suffisant pour respirer. Le sommeil y est meilleur et la vie plus équilibrée. Moins d’obstacles encombrent les promenades. Et surtout, à la campagne, il n’y a point d’anonymat ; nul n’est oublié de la société.