Madame la sénatrice, vous venez de soulever une question extrêmement intéressante. Je l’ai dit, nous construisons un modèle pour trente ans. Il ne s’agit donc pas seulement de résoudre des problèmes urgents. Or nous avons bien du mal à imaginer des scénarios sur une si longue durée.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le groupe de travail confié à Jean-Michel Charpin et à un certain nombre d’experts doit réaliser les projections non seulement en prolongeant les courbes, mais aussi en imaginant les ruptures.
Certains d’entre vous ont affirmé que 15 % de la population serait concernée par la dépendance. D’autres ont avancé le chiffre de 20 %. C’est donc une bonne nouvelle : la majorité d’entre nous ne sera pas en situation de dépendance….) Pour autant, le problème de la dépendance doit être traité, car il est très lourd à la fois pour la personne elle-même, mais aussi pour son entourage. Finalement, tout le monde sera un jour concerné directement ou indirectement.
Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons pas non plus faire l’économie de penser que ce domaine connaîtra des révolutions techniques et médicales. Rappelez-vous qu’il y a soixante ans, lorsque les grands traitements de la tuberculose ont été découverts, le territoire national était parsemé de sanatoriums : ils ont fermé du jour au lendemain ! Il n’est pas exclu que l’on trouve demain un vaccin contre la maladie d’Alzheimer, qui fournit les grosses cohortes des personnes dépendantes en établissement. Ce n’est pas un rêve impossible, car de nombreuses équipes de très haut niveau travaillent sur ces sujets. Dans quinze ans, dans vingt ans, dans vingt-cinq ans, un vaccin sera peut-être mis au point, des médicaments extrêmement performants seront probablement mis sur le marché. Cette hypothèse n’est pas complètement fantasmatique. Il est donc important que le modèle que nous allons construire soit souple et capable de s’adapter à de nouvelles donnes.
Madame la sénatrice, vous m’avez également interrogée sur la question importante des services à domicile. On ne peut pas parler d’un mauvais état généralisé Il y a simplement des situations extrêmement variées. C’est la raison pour laquelle j’ai demandé aux grandes fédérations, comme l’ADMR, l’ADESSA ou l’UNA, de me donner une liste exacte des associations concernées. Nous devons améliorer le suivi statistique de ce secteur. Les causes du mauvais état de certaines associations et de certains services sont très diverses : impact de la crise économique, coûts élevés dans certaines zones rurales en raison des frais de déplacement, mais aussi, comme l’a démontré le récent rapport de l’IGAS et de l’IGF, problèmes de mauvaise gestion et d’allocation des ressources pas forcément optimale. Tous ces points seront discutés dans les prochains mois.
Les services à domicile constituent un élément-clé du maintien des personnes dépendantes à domicile. Nous devons donc améliorer le mode d’allocation des ressources ainsi que le mode de tarification. Deux projets sont sur la table : celui de l’Assemblée des départements de France et celui préconisé par l’IGAS, qui propose de créer deux tarifications différentes selon le type d’activité réalisée au domicile du bénéficiaire, à savoir, un tarif d’aide à la personne pour des prestations nécessitant des compétences spécifiques et un tarif d’aide à l’environnement moins élevé pour les besoins d’aide ménagère.
Ce sujet est un excellent thème pour le débat sur la dépendance.