Intervention de Nathalie Kosciusko-Morizet

Réunion du 15 février 2011 à 14h30
Débat sur le schéma national des infrastructures de transport

Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis honorée de me trouver devant vous pour évoquer le projet de schéma national des infrastructures de transport, ou SNIT.

Ce projet de schéma occupe une place essentielle parmi les missions de mon ministère, et cela pour deux raisons.

Tout abord, il est une application directe du Grenelle de l’environnement et de ses engagements, tels qu’ils sont définis par la loi du 3 août 2009. L’année 2011 est celle de la maturité et de la réalisation du Grenelle : le SNIT en sera l’une des pièces maîtresses.

Ensuite, ce dossier est essentiel parce que le SNIT sera la feuille de route de l’État en matière d’investissements dans le domaine des infrastructures de transport, et cela bien au-delà de 2011 : c’est un document appelé à durer.

Il était donc naturel et nécessaire que les élus, qui ont en la matière des choix à faire, puissent délibérer des orientations et des ambitions de ce schéma.

Mesdames, messieurs les sénateurs, avant que le débat ne commence, permettez-moi de dire quelques mots du SNIT et de son contenu.

Ce schéma doit concerner le développement, la modernisation et l’entretien des réseaux d’infrastructures de l’État. Il doit aussi œuvrer à la réduction des impacts de ces réseaux sur l’environnement. Enfin, il doit préciser la façon dont l’État entend soutenir les collectivités territoriales dans le développement de leurs propres réseaux.

Le 12 juillet 2010, mon prédécesseur au ministère de l’écologie, Jean-Louis Borloo, diffusait un avant-projet de schéma, qui avait fait l’objet d’une première concertation au sein du Comité national du développement durable et du Grenelle de l’Environnement, le CNDDGE.

Puis, l’Autorité environnementale, organisme indépendant chargé de donner un avis sur la manière dont l’État intègre dans ses projets la problématique environnementale, a été saisie du dossier. Elle a rendu son avis le 22 septembre 2010.

Les ministres ont été alors auditionnés par les commissions parlementaires concernées ; c’est ainsi que j’ai été entendue le 1er février dernier par la commission de l’économie de votre assemblée, à la demande de son président, M. Emorine.

Enfin, le document étant en consultation libre sur le site internet du ministère, il a suscité de très nombreuses réactions se sont produites, de la part d’élus, d’acteurs économiques ou de simples particuliers.

Thierry Mariani et moi-même, lorsque nous avons pris nos fonctions, avons souhaité que l’avant-projet puisse tenir compte des concertations en cours et des avis formulés. Nous proposons aujourd'hui un texte consolidé, qui répond, me semble-t-il, à cette exigence.

Il s'agit d’un document de stratégie de 192 pages, qui rassemble une soixantaine de mesures, toutes conçues pour agir directement sur les performances du système de transport et son empreinte environnementale. Il s'agit de projets de développement de portée nationale, dont la réalisation, après évaluation de leur pertinence au regard des orientations du Grenelle, paraît souhaitable à un horizon de vingt à trente ans.

Parmi ces projets figurent : vingt-huit projets de développement ferroviaire représentant un linéaire de l’ordre de 4 000 kilomètres de lignes nouvelles ; dix projets de développement portuaire destinés à contribuer à la performance du transport maritime et à développer, pour les pré-acheminements et post-acheminements, le report modal de la route vers la voie d’eau ou vers le rail ; trois projets de voies d’eau à grand gabarit ; enfin, vingt-huit projets routiers.

Ces projets représentent en tout une dépense qui est estimée sur trente ans à quelque 260 milliards d’euros, dont 166 milliards d’euros au titre du développement.

La nouvelle version du schéma, mise en ligne le 27 janvier dernier, conserve les grandes orientations de la précédente, mais privilégie les choix du Grenelle. C’est ainsi qu’elle réaffirme notamment la priorité donnée aux modes de transport alternatifs à la route que sont le ferroviaire, les transports en commun en site propre, le fluvial, le maritime. Les besoins liés à la route ne sont pas ignorés pour autant. Le schéma propose une réponse intégrée, dans laquelle l’ensemble des modes de transport, et singulièrement la route, trouvent leur place en fonction de leur spécificité et de leur domaine de pertinence.

L’action n’est évidemment pas identique selon qu’on se trouve en milieu urbain ou en milieu rural. Et elle n’est pas non plus la même selon qu’il existe ou non une alternative à la route.

Cette nouvelle version confirme aussi que la modernisation et, plus généralement, l’optimisation des infrastructures existantes doivent être au cœur de la politique de l’État en matière d’infrastructures. En effet, l’existant, c’est aujourd’hui le quotidien des Français. Dans un pays comme le nôtre, qui bénéficie déjà d’un réseau d’infrastructures très dense, c’est d’abord en agissant sur l’existant que l’on améliore la performance du système. Cela n’exclut évidemment pas le développement du système, de manière à répondre à des situations particulières d’enclavement ou de congestion, à des exigences de sécurité.

En entrant un peu dans le détail de ce nouveau document, on voit qu’il intègre la stratégie d’ensemble de la version initiale. Cette stratégie, qui n’était en effet pas contestée, s’articule autour des quatre grands axes que sont l’optimisation du système de transport existant pour limiter la création de nouvelles infrastructures, l’amélioration des performances du système de transport dans la desserte des territoires, l’amélioration des performances énergétiques du système de transport et, enfin, la réduction de l’empreinte environnementale des infrastructures et équipements de transport.

Il faut aussi relever que le nouveau document replace clairement la politique de l’État dans son contexte national et international, notamment en précisant comment cette stratégie s’inscrit dans le contexte européen. Des cartes ont ainsi été ajoutées, qui montrent de quelle manière les principaux projets de développement, en particulier dans le domaine ferroviaire, contribuent à répondre à la demande de déplacements au niveau européen.

Le texte a été renforcé pour mieux mettre en évidence la nécessaire complémentarité des différents modes dans les réponses à apporter. Cette nouvelle version met plus en avant le caractère multimodal et intégré de la politique proposée.

Il clarifie aussi – c’était une demande forte de très nombreux sénateurs – le contenu de la politique de modernisation que l’État se propose de mettre en œuvre dans les domaines ferroviaire et routier.

Le nouveau document revisite les projets de développement. Il n’a pas été modifié en tout, mais des inflexions sensibles ont été introduites.

De nouveaux projets ont ainsi été retenus qui ne figuraient pas dans la version initiale. C’est le cas, par exemple, de l’amélioration des liaisons Paris-Brest et Paris-Quimper, avec un objectif de trois heures de temps de parcours, et des liaisons entre la Lorraine et la vallée du Rhône. C’est aussi le cas de la prolongation de la ligne à grande vitesse Provence-Alpes-Côte d’Azur vers l’Italie ou encore, dans le domaine fluvial, du chantier multimodal de Strasbourg-Lauterbourg.

Des projets ont aussi été retirés. C’est le cas du projet de contournement autoroutier de Tours, qui présente de réelles difficultés d’insertion dans un environnement humain et naturel extrêmement sensible et pour lequel d’autres solutions devront être recherchées.

Par ailleurs, les projets routiers dits « coups partis », déclarés d’utilité publique avant le Grenelle de l’environnement et dont la réalisation s’inscrit dans la nécessaire continuité de l’action publique, projets qui ne figuraient pas dans la première version de l’avant-projet, ont été intégrés à la version consolidée, dans un souci de clarté.

La version initiale ne mentionnait pas le coût de nombreux projets de développement. La nouvelle version, plus précise, indique, à quelques exceptions près, l’estimation actuelle de tous les projets retenus.

Les calculs effectués montrent que la mise en œuvre complète de tout ce qui figure dans l’avant-projet de schéma nécessiterait un effort important de financement, excédant les crédits publics actuellement dédiés à cette politique. Nous ne le cachons pas et sommes conscients que des choix devront être faits.

Ce schéma, dès aujourd’hui, va pouvoir jouer son rôle. II va nous permettre de répondre aux besoins de mobilité de nos territoires et de leurs populations, tout en faisant évoluer l’ensemble du système dans la direction que nous souhaitons, celle d’une mobilité plus collective, moins énergivore, moins consommatrice d’espaces agricoles et de milieux naturels, d’une mobilité qui préserve et crée des dizaines de milliers d’emplois en France.

Quel est l’agenda du SNIT ?

Nous allons continuer la concertation dans le cadre du CNDDGE, conformément à ce que prévoit la loi Grenelle 1.

Je l’ai dit, le document a été mis en ligne sur le site internet du ministère, et une consultation du public est engagée. Tous ceux qui le souhaitent ont ainsi la possibilité de s’exprimer et de contribuer à l’élaboration de ce qui deviendra la feuille de route de l’État pour les prochaines années.

Nous avons déjà recensé plusieurs centaines de réactions, ce qui montre que le sujet, en dépit de son aspect plutôt technique et parfois rebutant malgré nos efforts pour le rendre attractif, éveille l’intérêt des citoyens.

De nombreuses remarques et observations de parlementaires ont déjà été prises en compte dans l’élaboration de cet avant-projet. Nous sommes en effet très attentifs, avec Thierry Mariani, aux travaux que mène actuellement Louis Nègre, au nom de la commission, en tant que président du groupe de suivi sur le SNIT.

Une fois la phase de consultation achevée et les dernières mises au point effectuées, il est prévu de saisir le Conseil économique, social et environnemental.

J’aurai évidemment l’occasion, comme je le fais aujourd’hui, de revenir débattre devant la représentation nationale de ce dossier majeur.

Je dirai alors, comme je vous le dis aujourd’hui, que ce projet me paraît à la fois cohérent et équilibré. Il va dans la bonne direction et il inscrit notre système de transport dans une véritable dynamique de développement durable.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion