Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 18 présente une nouvelle réforme d’imposition des plus-values de cessions immobilières, après la censure par le Conseil constitutionnel de celle que le Gouvernement avait proposé l’an dernier à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour 2013.
Votre nouveau dispositif, monsieur le ministre, repose notamment sur la distinction entre les terrains à bâtir et les autres biens immobiliers.
Ainsi, d’un côté, vous proposez, pour les propriétés bâties, un système d’abattement pour durée de détention bien plus avantageux que le droit en vigueur, en ramenant notamment de trente à vingt-deux ans le nombre d’années nécessaires pour obtenir une exonération totale de l’imposition. Vous y ajoutez, pour un an, un abattement exceptionnel de 25 %.
De l’autre côté, vous supprimez tout abattement pour durée de détention pour les terrains à bâtir. Les plus-values réalisées à l’occasion de leur cession ne pourraient plus être taxées, dès lors, qu’au taux maximal, quel que soit le nombre d’années pendant lesquelles les contribuables ont conservé le bien.
Je considère, pour ma part, que cette distinction n’est pas si évidente et qu’avec l’institution d’une telle différence d’imposition, le principe d’égalité devant les charges publiques n’est peut-être pas respecté.
Comme vous le savez, dans sa décision du 29 décembre 2012, le Conseil constitutionnel a censuré le dispositif que vous proposiez l’an dernier pour les plus-values réalisées à l’occasion de la vente de terrains à bâtir. Celui-ci portait en effet atteinte à l’égalité devant les charges publiques en ce qu’il conduisait « à un taux marginal maximal d’imposition de 82 % qui aurait pour effet de faire peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leur capacité contributive ».
Je me demande s’il n’est pas également porté atteinte à l’égalité devant les charges publiques par le simple fait de distinguer les terrains à bâtir des autres biens immobiliers dans le régime d’imposition des plus-values. Car, finalement, la nature juridique du bien est-elle si différente ? Il n’y aurait qu’à construire pour bénéficier d’un abattement… Cependant, ne l’oublions pas, il ne suffit pas de disposer d’un terrain à bâtir pour pouvoir y ériger effectivement une construction, car le droit fiscal est autonome et ne connaît pas le droit de l’urbanisme, lequel, dans le cadre des documents opérationnels d’urbanisme applicables dans nos communes, définit des terrains constructibles et des terrains non constructibles. Or, si je ne m’abuse, cette distinction qui définit les droits des propriétaires est d’un autre ordre que la distinction du droit fiscal entre terrains à bâtir et autres terrains.
Par ailleurs, quel motif d’intérêt général justifie cette distinction de traitement ? C’est, nous dira-t-on, le fait de créer de l’offre sur le marché foncier en mettant fin à l’effet contre-incitatif de la fiscalité. Peut-être, mais il ne me semble pas évident que ce motif soit suffisant, d’autant qu’il me paraît bien paradoxal que le développement de l’offre de logements justifie, à la fois, la suppression de l’abattement pour durée de détention de terrains à bâtir et l’assouplissement du régime d’imposition des plus-values de cession des autres biens immobiliers.
Je souhaitais simplement attirer l’attention de notre assemblée sur ce point, qui ne me semble pas dénué de tout intérêt quant au sort final du nouveau régime d’imposition des plus-values qui nous est soumis aujourd’hui.
Là encore, nous serons fixés lorsque nous prendrons connaissance de la décision que le Conseil constitutionnel sera amené à rendre sur ce sujet.