Intervention de Albéric de Montgolfier

Réunion du 26 novembre 2013 à 14h30
Loi de finances pour 2014 — Article 23

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier :

L’article 60 du projet de loi de finances pour 2014, monsieur le ministre, crée un fonds de soutien aux collectivités en difficulté du fait des produits structurés. Il s’agit là d’un vrai sujet. Cela a été dit à l’instant, de nombreux rapports se sont penchés sur cette question et certains ont proposé des solutions – je pense notamment au rapport d’un collègue d’Eure-et-Loir, Jean-Pierre Gorges, député-maire de Chartres.

Néanmoins, la solution consiste-t-elle à faire contribuer toutes les banques, y compris celles qui n’ont pas distribué ce type de produits, à la réparation d’une faute commise par certaines d’entre elles ?

Je remarque d’ailleurs que les banques qui ont le plus distribué ce type de produits sont des banques dont l’État était actionnaire majoritaire : l’État détenait 44 % du capital de Dexia, 75 % de la Société de financement local ; or ces deux sociétés sont celles qui ont le plus proposé les produits exotiques qui créent aujourd’hui des difficultés aux collectivités territoriales.

La question qui se pose est celle de savoir qui doit assumer cette responsabilité. Je pense d’abord qu’existe, dans un certain nombre de cas, une responsabilité de la collectivité. Mon collègue parlait à l’instant de communes en difficulté. Je veux bien reconnaître que, lorsqu’une commune ne dispose pas des compétences en interne et se fait « avoir » par une banque, elle n’a pas forcément les moyens de vérifier le taux effectif global et la qualité du produit. En revanche, le conseil général du département de la Seine-Saint-Denis, qui est l’un de ceux qui ont eu le plus recours à ce type de produit, compte plusieurs milliers de collaborateurs : on ne peut pas croire que sa direction financière n’était pas avertie du risque pris en utilisant des produits structurés.

Je suis président de conseil général. Lorsque l’on me propose des produits à 1, 40 %, mais dont le taux est indexé sur l’évolution de devises étrangères comme le franc suisse, je n’ai pas besoin d’avoir fait de très longues études pour penser qu’il existe un risque. §Une collectivité aussi importante que le conseil général de Seine-Saint-Denis, compte tenu du nombre de ses collaborateurs, aurait dû, selon moi, pouvoir prendre un peu de recul pour évaluer le risque qu’elle prenait. Par ailleurs, cette collectivité a gagné de l’argent, car les taux ont été extrêmement bas pendant un certain temps ; le problème est survenu, évidemment, au moment où les taux sont remontés. Il nous faut donc, premièrement, nous demander s’il existe une responsabilité de la collectivité.

Deuxièmement, qu’en est-il des banques ? En effet, les banques qui ont contribué à distribuer ce genre de produits exotiques doivent assumer leur responsabilité, mais dans le cadre d’une relation contractuelle. La banque qui a fauté doit éventuellement rembourser ou revenir à un taux normal. Si elle a vendu un produit illégal, la banque doit évidemment rembourser – Éric Doligé parlait ainsi de banques qui ont distribué des produits via des filiales aux îles Caïman, ce qui est totalement illégal.

Pour autant, incombe-t-il à l’ensemble du système bancaire, y compris à des sociétés qui n’ont pas distribué ce genre de produits, de payer ? La réponse est non, et c’est la raison pour laquelle notre groupe considère qu’il n’y a pas lieu d’instaurer par l’article 23, tel qu’il est proposé, une responsabilité collective.

Il est tout à fait déresponsabilisant de faire payer ceux qui n’ont pas distribué de produits exotiques. En revanche, ceux qui ont fauté doivent, dans le cadre d’une relation contractuelle, voire dans le cadre de contentieux devant les juridictions, rembourser ou du moins revenir à un taux normal. Encore une fois, ce que vous proposez revient à déresponsabiliser et à attribuer une prime à la mauvaise gestion. Sanctionnons les banques qui ont distribué ces produits, mais ne sanctionnons pas l’ensemble du système bancaire par un relèvement du taux de la taxe systémique.

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