Séance en hémicycle du 26 novembre 2013 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • déchets
  • plastique
  • sac
  • taxe

La séance

Source

La séance est ouverte à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Par lettre en date du 25 novembre 2013, M. le Premier ministre a annoncé la fin, à compter du 30 novembre 2013, de la mission temporaire sur l’amélioration de l’Union douanière en Europe, confiée à M. Richard Yung, sénateur représentant les Français établis hors de France, auprès de Mme Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur, dans le cadre des dispositions de l’article L.O. 297 du code électoral.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur la possibilité d’instaurer un permis de louer pour lutter contre l’habitat indigne, établi en application de l’article 30 de la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des affaires sociales, ainsi qu’à la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Lucien Neuwirth, qui fut sénateur de la Loire de 1983 à 2001.

M. le ministre chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je veux saluer la mémoire de ce grand résistant qui, durant toute sa vie, mena et remporta des combats décisifs, au nom des valeurs auxquelles il croyait.

Élu député de la Loire de 1958 à 1981, puis sénateur de 1983 à 2001, questeur à l’Assemblée nationale et au Sénat, il a marqué de son empreinte notre vie politique.

Nous avons tous en tête la loi qui porte son nom, adoptée en 1967, immense progrès pour le droit des femmes à maîtriser leur fécondité. Mais Lucien Neuwirth a également permis une avancée décisive pour les malades en fin de vie, en posant dans la loi le principe du droit aux soins palliatifs.

À son épouse ainsi qu’à ses proches, j’adresse, au nom du Sénat tout entier, nos condoléances les plus attristées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2014, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 155, rapport n° 156).

Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein de la première partie du projet de loi de finances, des dispositions relatives aux ressources.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I. – IMPÔTS ET RESSOURCES AUTORISÉS (suite)

B. – Mesures fiscales

Nous en sommes parvenus, au sein du titre Ier de la première partie, à l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 22.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-59 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat et Morin-Desailly, MM. Deneux et Dubois, Mme Jouanno et M. Delahaye, est ainsi libellé :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code des douanes est ainsi modifié :

1° Au I de l’article 266 sexies, il est ajouté un 11 ainsi rédigé :

« 11. À compter du 1er juillet 2014, toute personne qui, pour les besoins de son activité économique, livre pour la première fois sur le marché intérieur ou utilise pour la première fois des sacs à usage unique en matière plastique destinés au transport des marchandises, dont les caractéristiques sont définies par décret. » ;

2° Le II du même article est complété par un 8 ainsi rédigé :

« 8. Aux sacs à usage unique en matière plastique qui sont destinés au transport des marchandises et qui sont constitués de matière plastique biodégradable et d’un minimum de 40 % de matières végétales en masse, dans des conditions définies par décret. » ;

3° À l’article 266 septies, il est ajouté un 11 ainsi rédigé :

« 11. La première livraison ou la première utilisation des sacs à usage unique en matière plastique destinés à transporter des marchandises mentionnés au 11 du I de l’article 266 sexies. » ;

4° À l’article 266 octies, il est ajouté un 10 ainsi rédigé :

« 10. Le poids des sacs à usage unique en matière plastique destinés à transporter des marchandises mentionnés au 11 du I de l’article 266 sexies. » ;

5° Le tableau du B du 1 de l’article 266 nonies est complété par une ligne ainsi rédigée :

Sacs à usage unique en matière plastique destinés à transporter des marchandises mentionnés au 11 du I de l’article 266 sexies

Kilogramme

6° Le 1 bis du même article est complété par un d) ainsi rédigé :

« d) Du 1er janvier 2015 au tarif applicable aux sacs à usage unique en matière plastique destinés à transporter des marchandises mentionnés au 11 du I de l’article 266 sexies. » ;

7° Aux 3 et 6 de l’article 266 decies et à la première phrase du premier alinéa de l’article 266 undecies, les références : « 6 et 10 » sont remplacées par les références : « 6, 10 et 11 ».

La parole est à M. Yves Détraigne.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 47 de la loi du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 a instauré une taxe générale sur les activités polluantes, ou TGAP, sur les sacs de caisse en matière plastique à usage unique, qui n’est aujourd’hui applicable qu’aux seuls sacs de caisse.

Cet amendement vise à étendre cette disposition à tous les sacs à usage unique utilisés par le grand public pour le transport des marchandises, y compris les fruits et légumes, ainsi que les produits de bouche.

L’impact environnemental de tels sacs est très important. Or les sacs de caisse stricto sensu ne représentent pas tous les sacs à usage unique. La quantité de sacs en plastique à usage unique utilisés pour emballer et transporter les marchandises est bien supérieure à celle des seuls sacs de caisse des grandes surfaces. En outre, il paraît malaisé de distinguer, lors des contrôles, un sac de caisse à usage unique d’un sac affecté à l’emport de fruits et légumes.

Aussi, ne pas soumettre à la TGAP tous les sacs à usage unique utilisés pour le transport des marchandises aurait pour conséquence de permettre aux consommateurs d’échapper à cette taxe, contrairement à l’esprit de la loi précitée, en utilisant, par exemple, des sacs de type « fruits et légumes » en tant que sacs de caisse.

Enfin, il est d’autant plus nécessaire de soumettre tous les sacs à usage unique à la TGAP que 90 % des sacs de type « fruits et légumes » sont importés et que la TGAP a également vocation à favoriser le développement d’une filière française de production de bioplastiques durables et à relocaliser la production de sacs à usage unique en matière plastique. C’est pourquoi il est logique d’exonérer de la TGAP les sacs de caisse à usage unique en matière plastique biodégradables constitués d’un minimum de 40 % de matières végétales en masse.

Tel est l’objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’amendement n° I-261, présenté par MM. D. Laurent, Doublet, Belot, Cambon et Revet, Mme Sittler et MM. B. Fournier et Grignon, est ainsi libellé :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 7 du II de l’article 266 sexies du code des douanes est ainsi rédigé :

« 7. Aux sacs de caisse à usage unique en matière plastique, dans des conditions définies par décret, fabriqués à partir de matière issue du recyclage. »

II. - La perte des recettes résultant pour l’agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie et pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.

La parole est à M. Daniel Laurent.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

La loi de finances rectificative pour 2010 a instauré une TGAP sur les sacs de caisse à usage unique en matière plastique, sauf ceux qui sont constitués d’un minimum de 40 % de matières végétales en masse.

Une étude de l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, publiée en février 2012, met en exergue certains inconvénients des sacs en plastique à base de matière végétale, compostable en milieu industriel, et préconise de favoriser l’utilisation de sacs réutilisables en plastique traditionnel.

Afin de préserver cette industrie – certains de nos territoires sont concernés – et de faire de l’économie circulaire une priorité, cet amendement vise à exonérer de la TGAP les sacs en plastique à usage unique fabriqués à partir de matière recyclée.

Le décret mentionné dans le dispositif définira la part minimale de matière recyclée contenue dans chaque sac de caisse à usage unique.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nos collègues de l’UMP et de l’UDI-UC nous ont harangués au motif que nous créions trop de taxes. Je suis donc quelque peu surpris de les entendre nous proposer ici, avec ces deux amendements, la création d’une taxe supplémentaire, puisque c’est bien de cela qu’il s’agit, mais chacun peut avoir ses propres motivations… En l’occurrence, celle qui inspire ces amendements me paraît légitime. Des amendements sur ce sujet sont d’ailleurs déposés de façon récurrente dans le cadre des projets de loi de finances.

Sur le principe, cet amendement est intéressant, car les sacs en plastique à usage unique sont, tout le monde en convient, me semble-t-il, particulièrement polluants. Néanmoins, l’application de la TGAP à partir du 1er janvier 2014 sur les sacs de caisse en plastique à usage unique devrait déjà avoir un effet incitatif et contribuer à un usage moindre des sacs en plastique.

Par ailleurs, le Comité pour la fiscalité écologique mène actuellement des travaux sur la fiscalité des déchets. La question des déchets en matière plastique devrait donc être traitée au sein de cette instance, qui vise à adopter une approche globale et consolidée de la fiscalité des déchets.

Du point de vue de la méthode, introduire une nouvelle composante de la TGAP sur les sacs en plastique, alors que cette taxe sur les sacs de caisse en plastique à usage unique n’est pas encore en vigueur – son application est prévue à partir du 1er janvier prochain – pourrait s’avérer contre-productif. En tout cas, cela est de nature à compliquer quelque peu les choses.

Les décrets d’application relatifs à la TGAP sur les sacs de caisse en plastique à usage unique ne sont pas encore parus. À cet égard, le Gouvernement pourra peut-être nous apporter quelques précisions, qui nous seront utiles, quant à l’imminence de cette publication.

Il est donc opportun d’attendre les effets de la mise en œuvre de cette disposition, avant d’amender cette dernière ou de la compléter.

Aussi, je vous suggère, mes chers collègues, de bien vouloir retirer vos amendements.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement partage l’avis de la commission. Nous n’avons pas achevé les concertations sur la mise en œuvre de la TGAP qui portera sur les sacs en plastique, que vous proposez d’ores et déjà, par ces deux amendements, de modifier son champ d’application.

Monsieur le rapporteur général, considérant le temps qui a été nécessaire pour mener à bien ces concertations, je pense que la date d’entrée en vigueur de cette taxe sera sans doute fixée au 1er juillet 2014, afin que nous puissions aller au terme de cette première phase.

Il nous semble donc tout à fait prématuré d’étendre d’ores et déjà le champ d’application de la taxe générale sur les activités polluantes aux sacs en plastique à usage unique que l’on utilise pour les fruits et légumes.

À ce stade, nous vous proposons, messieurs les sénateurs, d’attendre le terme de cette première phase, avant d’envisager l’extension de cette mesure. Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements ; à défaut, le Gouvernement y sera défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Marcel Deneux, pour explication de vote sur l’amendement n° I-59 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Deneux

Monsieur le président, monsieur le ministre, nous débattons dans cette enceinte des sacs en plastique depuis quatre ou cinq ans déjà.

Je veux apporter ici un éclairage différent de celui des orateurs qui viennent de s’exprimer.

En fait, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, ces deux amendements sont parfaitement contradictoires. Sur un plan technique, ils ne veulent pas du tout dire la même chose.

Si nous adoptons l’amendement de M. Détraigne, cela signifie que nous voulons développer la filière des sacs en plastique bio-ressourcés. Au contraire, si nous adoptons celui de M. Laurent, cela veut dire que nous souhaitons favoriser le recyclage des sacs en plastique produits à partir du pétrole et que nous tuons ainsi la filière bio-ressourcée.

Il faut être très clair : soit on dit clairement que l’on veut créer une filière bio-ressourcée, soit on promeut le recyclage des sacs en plastique, en réduisant ainsi leur coût, mais on tue la filière des produits bio-ressourcés naissante. Tel est l’enjeu.

Monsieur le ministre, la signature des décrets d’application à Matignon traîne depuis sept mois. J’espère que mon intervention vous aura apporté un éclairage technique – il faut savoir de quoi on parle et ce que l’on veut faire ! –, si jamais ces amendements étaient retirés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Yvon Collin, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Pollution visuelle, pollution des sols, pollution des eaux et des mers, cause de mortalité des animaux marins, nocivité… : un milliard de sacs de caisse en plastique sont encore distribués dans notre pays.

Afin de modifier le comportement des consommateurs et des entreprises et de sensibiliser ces derniers à ce désastre environnemental, la loi de finances rectificative du 29 décembre 2010 a créé une TGAP sur les sacs en plastique à usage unique à compter du 1er janvier 2014, d’un montant de 6 centimes environ par sac. Seuls sont exonérés les sacs constitués de 40 % au moins de matières végétales en masse.

Un délai de trois ans a été prévu afin de laisser un temps d’adaptation suffisant aux industriels. Des alternatives au sac en plastique traditionnel existent, puisque l’on a fortement développé la production de sacs produits à partir de matières végétales telles que l’amidon de maïs ou de pomme de terre. Ces derniers devraient d’ailleurs être logiquement exonérés de la TGAP.

L’amendement n° I-261 de nos collèges UMP tend à supprimer cette exonération et à favoriser, quant à lui, l’utilisation de sacs en plastique fabriqués, certes, à partir de matière recyclée, mais qui demeurent à usage unique.

Un tel amendement ne nous semble pas aller dans le sens d’une meilleure protection de l’environnement et des préconisations de l’ADEME, à savoir l’usage de sacs réutilisables et, sous conditions, des sacs biodégradables et compostables.

Cependant, nous sommes conscients de l’existence de nombreux plastiques désignés par les industriels comme biodégradables, qui sont, en réalité, oxodégradables et dont les composants se réduisent en particules sans se dégrader, ce qui ne résout pas le problème de la pollution des milieux.

En outre, les sacs véritablement biodégradables ne sont souvent compostables que dans des conditions très particulières de température, d’oxygène, d’humidité et d’acidité. Ils ne peuvent ainsi être simplement abandonnés par les consommateurs.

Ces inconvénients, mis en évidence par l’ADEME dans son étude de 2012, ne sont toutefois pas insurmontables, pour peu qu’on privilégie les sacs de caisse biodégradables et compostables à 100 % et qu’on parvienne à mettre en place une filière de collecte.

En ce qui concerne l’amendement n° I-59 rectifié bis, présenté par nos collègues centristes, il vise à étendre l’application de la future taxe à tous les sacs de transport de marchandises, y compris aux sacs de pesée des fruits et légumes. Cette extension nous semble quelque peu prématurée : en effet, s’il n’est pas nécessaire de prévoir un délai de trois ans comme on l’a fait pour les sacs de caisse, puisque les substituts existent, six mois sont manifestement insuffisants pour permettre à tous les acteurs de s’adapter.

Mes chers collègues, telles sont les raisons pour lesquelles, comme M. le ministre et M. le rapporteur général, nous sommes hostiles à ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Mes chers collègues, si vous voulez prendre une décision intéressante sur le plan écologique, n’hésitez pas : tous les ingrédients en sont réunis dans l’amendement n° I-59 rectifié bis !

Permettez-moi de vous donner l’exemple d’une féculerie de la Marne. Il y a quelques années à peine, cet établissement était sur le point de fermer, faute de débouchés pour l’amidon natif. Seulement, le monde agricole s’est pris en main : il a relancé cette féculerie pour l’adapter aux nouveaux débouchés de l’amidon transformé.

Désormais, la fécule de pomme de terre est transformée en sacs en plastique biodégradables – une innovation permet même d’en déterminer la couleur et la durée de vie –, ainsi qu’en gel anti-feu : ce produit permet d’éteindre les incendies beaucoup plus rapidement qu’on ne le fait actuellement, avec des conséquences nettement moindres sur l’environnement, puisqu’il est fabriqué à partir de produits biodégradables.

Mes chers collègues, monsieur le ministre, si nous demandons un effort au Gouvernement, c’est pour soutenir des activités de transformation créatrices d’emplois !

De même que, dans la filière éthanol, il faut d’abord passer par l’étape de la première génération avant de produire la deuxième, ainsi, dans le domaine de la bio-raffinerie végétale, un travail de longue haleine et des investissements importants sont nécessaires. Ceux-ci sont réalisés par des acteurs du monde agricole véritablement déterminés à œuvrer dans le sens du développement durable.

Je vous invite à voter l’amendement présenté par Yves Détraigne, pour favoriser une percée dans le développement des produits biodégradables !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Je désire, en me plaçant sur un plan plus général, attirer l’attention du Sénat sur la gravité des pollutions liées aux sacs en plastique. De fait, il s’agit d’une véritable bombe à retardement pour notre environnement terrestre comme marin.

En 2011, sur la demande de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, j’ai rédigé un rapport intitulé La pollution de la Méditerranée : état et perspectives à l’horizon 2030.

Les pollutions qui menacent la Méditerranée sont nombreuses, je ne les citerai pas toutes, mais il faut savoir que 80 % des déchets flottants sont en plastique. Or certaines espèces vivantes les confondent facilement avec des méduses : elles s’en nourrissent et en meurent.

Pis, les sacs en plastique ne se dégradent pas : ils se fragmentent en morceaux infimes, de l’ordre du millimètre, voire du micromètre. Des études convergentes, notamment celles menées par Bermes en 2002 et Gregory en 2009, ont recensé 260 espèces animales, des invertébrés aux mammifères marins, qui ingèrent les débris de plastique ou sont étouffés par eux.

Par ailleurs, ces débris sont colonisés par des micro-organismes qui deviennent les vecteurs de la migration d’espèces invasives. Certaines recherches ont également prouvé que leur ressemblance avec le zooplancton dont se nourrissent les larves de poisson est responsable d’occlusions intestinales chez certaines espèces. En outre, il est à craindre que les constituants chimiques des déchets en plastique ne contaminent les organismes des espèces qui les absorbent.

Songez, mes chers collègues, que le nombre moyen des microdéchets en Méditerranée est de 115 000 par kilomètre carré ; dans certaines zones, il s’élève même à 892 000 par kilomètre carré, d’après la mission MED qui étudie régulièrement ces problèmes. Or ces microdébris ont la propriété d’attirer les polluants chimiques présents dans l’eau, en particulier les polluants organiques persistants, ce qui décuple leur toxicité potentielle pour la chaîne alimentaire.

Au total, le problème posé par ces plastiques, qui n’est ni spécifiquement marin ni spécifiquement méditerranéen, est tout à fait inquiétant !

C’est pourquoi il est urgent d’éliminer les produits en plastique à usage unique non biodégradables, qui ne sont ni collectés ni recyclés. Il faut également favoriser, pour la part de ces produits qui est réellement nécessaire, des solutions alternatives biodégradables ; plus respectueuses de l’environnement, celles-ci pourront s’intégrer dans la filière de valorisation organique des bio-déchets.

Certes, la taxe qui entrera en vigueur le 1er juillet prochain est une bonne mesure ; mais, compte tenu des circonstances et de la nécessité d’une action urgente, je suis assez séduit, à titre personnel, par l’amendement de M. Détraigne, pour les raisons qui viennent d’être exposées par notre collègue Deneux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Il n’est pas habituel que je contredise mon collègue Roland Courteau, …

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

M. Roland Courteau. Ce n’est pas bon signe !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

… mais mon avis diffère du sien à propos du problème, récurrent, des films en plastique.

Ces films, dont nos ordures ménagères contiennent des milliers de tonnes, il faut absolument, dans l’avenir, que nous puissions les recycler. Les techniques existent, mais nous les avons trop peu développées dans notre pays. Aujourd’hui, les collectivités territoriales qui collectent ces films les envoient en Espagne ou au Portugal pour qu’ils y soient recyclés, tant il est vrai que nous n’avons pas été capables de mettre en place une filière de recyclage en France.

Ces deux amendements sont quelque peu contradictoires.

L’amendement n° I-59 rectifié bis vise à encourager l’utilisation de sacs de caisse en plastique biodégradables. Mes chers collègues, essayez donc de mettre dans du compost un sac de caisse biodégradable : vous me direz au bout de combien de temps il se sera dégradé !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Si nous étions capables de fabriquer des sacs de caisse à partir de matières exclusivement végétales, cette dégradation serait facile. Seulement, ce n’est pas ainsi que l’on procède aujourd’hui : on incorpore des matières végétales, à hauteur de 30 % ou 40 %, dans du plastique issu du pétrole. En somme, ces produits, bien que qualifiés de biodégradables, ils ne le sont pas dans les faits !

Monsieur le ministre, vous êtes attaché au développement de l’économie circulaire, qui stimule l’activité et la création d’emplois au niveau local. Or si nous développions une filière de recyclage des films en plastique, dont nous pourrions collecter 220 000 tonnes dans nos poubelles, dix unités de recyclage réparties sur notre territoire seraient créées, qui emploieraient de nombreuses personnes pour le tri comme pour le recyclage.

C’est pourquoi je trouve l’amendement de M. Laurent intéressant. En effet, il vise à exonérer de TGAP les sacs en plastique à usage unique fabriqués à partir de matière recyclée.

Mes chers collègues, si vous croyez que les sacs de caisse biodégradables sont recyclables, vous faites erreur : en réalité, ils perturbent le processus de recyclage, au point que, s’ils deviennent trop nombreux, ils empêchent le recyclage des films et des autres sacs de caisse.

En définitive, je trouve que les mesures proposées par les auteurs de ces amendements sont un peu prématurées ; il est préférable d’attendre que nous ayons une vision un peu plus claire de ces problèmes.

Un grand processus national est nécessaire pour que nous arrivions à recycler l’ensemble des films présents dans nos ordures ménagères, afin d’éviter les inconvénients pour la biodiversité que M. Courteau vient de souligner.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

J’avais déposé à l’Assemblée nationale un amendement touchant à ces questions ; il avait d’ailleurs été adopté à l’unanimité, avant que le Sénat de l’époque n’en atténue la portée.

Monsieur Miquel, je suis largement en désaccord avec vous. Le problème des sacs biodégradables, c’est-à-dire d’origine végétale, est simple : il faut qu’ils atteignent 10 % du marché ; car le jour où ce seuil sera atteint, la formule deviendra tout à fait opérationnelle !

Aujourd’hui, on peut raisonnablement estimer que 80 % des produits enveloppés dans du plastique que l’on trouve dans un hypermarché pourraient l’être dans du plastique fabriqué à partir de matières biodégradables, c’est-à-dire de matières issues de l’amidon de maïs et de pomme de terre. Seulement, tous les lobbies se sont agités, en insistant notamment sur les 5 000 emplois qui auraient été menacés en Haute-Loire. Pourtant, il n’aurait pas été très compliqué de modifier les chaînes de production.

Je suis évidemment d’accord avec M. Miquel, lorsqu’il souligne qu’il faut aussi préserver le processus de recyclage des films.

En réalité, la suppression des sacs de caisse en plastique a représenté pour la grande distribution un joli coup publicitaire : celle-ci a éliminé une dépense et assuré la promotion d’un sac avec trois points de couture, un cabas qu’elle peut vendre et qui n’est pas fabriqué en Haute-Loire, mais dans les pays du sud-est asiatique. Du reste, monsieur Miquel, je vous signale que le beau vert que l’on trouve sur ces sacs est généralement obtenu à partir de résidus de bauxite, ou d’autres métaux lourds. Or il est exact que, dans nos usines d’élimination des ordures ménagères, ces cabas posent un sérieux problème, parce qu’ils sont bien plus difficiles à éliminer que les films.

Je continue de recevoir, au moins tous les mois, de nouveaux sacs biodégradables qui me sont envoyés par tel syndicat ou telle organisation écologiste. En vérité, il faut encourager l’usage de ces films car, pour des raisons économiques, le jour où ils représenteront 10 % du marché, la partie sera gagnée !

Mes chers collègues, ne soyez pas sceptiques : puisque cela marche dans certains endroits, pourquoi cela ne marcherait-il pas partout ? C’est un problème uniquement pour les lobbies !

Non seulement l’élimination des cabas coûte cher aux communes, mais elle obère nos capacités de vente de compost. En effet, un sac d’origine végétale disparaît en deux mois, parce que les bactéries le décomposent. Au contraire, les sacs en plastique sont déchiquetés, et l’agriculteur retrouve les débris dans son champ, alors que le sol a besoin de composants naturels. C’est pourquoi nous n’arrivons pas, aujourd’hui, à vendre le compost.

La vraie solution n’est pas d’opposer une méthode à l’autre, mais de favoriser les deux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

M. Delattre a parlé d’or : M. Miquel vise des produits biodégradables issus de la pétrochimie, alors que ceux que nous voulons défendre sont produits à partir de fécule ou d’amidon.

L’amendement n° I-59 rectifié bis vous est présenté au moment où nos entreprises font des efforts de recherche et de développement pour trouver des matières alternatives aux matières d’origine fossile et, partant, limiter leur impact environnemental.

C’est la bonne gestion de la fin de vie des produits et la limitation de la pollution due aux sacs en plastique fins à usage unique qui est en jeu, de même que le soutien à la valorisation des déchets organiques pour obtenir un compost de qualité.

Il s’agit aussi d’assurer le développement et la consolidation du tissu agricole et industriel dans le domaine de la bio-raffinerie, sans que le maintien de l’outil industriel actuel soit menacé : en effet, l’équipement nécessaire à la transformation des bioplastiques est identique à celui utilisé à l’heure actuelle pour les plastiques d’origine fossile.

Enfin, en adoptant une telle mesure, nous aurions l’assurance d’œuvrer en faveur des relocalisations et des créations d’emplois, puisque la France pourrait se positionner en tant que pays exportateur dans le secteur des bioplastiques, qui est loin d’être négligeable. Il s’agit véritablement d’un enjeu environnemental et industriel majeur pour notre pays.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Ce débat, tout à fait passionnant, comporte deux aspects : d’une part, les propositions de M. Laurent visent à favoriser les matériaux issus du recyclage, donc les plastiques recyclés, dans le cadre d’une forme d’économie circulaire appelée à subsister ; d’autre part, il est également possible d’agir en faveur des sacs ou films plastiques composés essentiellement à partir de matière végétale. Certes, les études sur ce sujet n’aboutissent pas toutes aux mêmes conclusions que vous, monsieur Delattre, s’agissant du temps nécessaire à la disparition de ces sacs dans un écosystème naturel. Si certains se dégradent en deux mois, il faut parfois plus de temps pour d’autres.

La réalité, c’est que nous avons besoin, dans ce domaine, surtout si nous élargissons les perspectives d’utilisation de ces sacs ou films bioplastiques, de construire une vraie filière industrielle du recyclage, notamment du compostage industriel. En effet, les méthodes de valorisation ne sont pas les mêmes que pour des sacs en plastique classiques.

Ces questions importantes sont donc posées et je comprends que tout le monde cherche à les résoudre. Il n’existe pas d’obstacle technique a priori, en tout cas sur le moyen terme, car s’il est un secteur qui, sur le plan industriel, innove considérablement, c’est bien celui du recyclage. Par exemple, s’agissant du traitement des déchets des équipements électriques et électroniques, les D3E, il a fallu innover très vite quand on est passé des gros blocs de télévision, qu’il fallait démanteler et recycler, aux écrans à plasma, qui n’appellent ni les mêmes techniques ni les mêmes machines. Le secteur de l’économie circulaire, qui est très innovant, trouvera des solutions.

Ainsi, bien que les amendements n° I-261 et I-59 rectifié bis s’inscrivent dans deux perspectives différentes, le Gouvernement estime les dispositions proposées prématurées, dans la mesure où la première phase n’est pas achevée et où la taxe n’entrera en application qu’au 1er juillet. Il paraît donc logique d’attendre cette échéance pour étendre le champ d’application de ladite taxe.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 22, et l’amendement n° I-261 n’a plus d’objet.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° I-369 est présenté par MM. Bécot, G. Bailly, Dulait, Laménie, Bordier, Lefèvre, Bizet, Savary et Lenoir, Mme Mélot et M. Revet.

L’amendement n° I-508 est présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Baylet, Bertrand et Collombat, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au second alinéa de l’article 271 du code des douanes, tel qu’il résulte des articles 13 et 14 de la loi n° 2013-431 du 28 mai 2013 portant diverses dispositions en matière d’infrastructures et de services de transports et de l’article 153 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009, après le mot : « réglementaire, », sont insérés les mots : « les véhicules utilisés pour le transport de l’alimentation du bétail, le transport des animaux et le transport de viande ».

II. – La perte de recettes pour l’Agence de financement des infrastructures de transport de France est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs mentionnée aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. – La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° I-369.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

La mise en œuvre de l’écotaxe poids lourds, actuellement suspendue, vise deux principaux objectifs : favoriser le recours aux modes de transport alternatifs à la route pour le transport de marchandises et financer de nouvelles infrastructures, tout particulièrement en matière de transport ferroviaire.

Or les professionnels de la filière française de l’élevage et de la viande, implantés en zone rurale, sont dans l’obligation d’utiliser le réseau routier pour assurer le transport de l’alimentation destiné au bétail, ainsi que celui des animaux et de la viande.

Par ailleurs, pour les mêmes raisons, liées à leur situation géographique et à la spécificité de leur activité, les professionnels du secteur ne bénéficieront en rien des investissements qui seront potentiellement réalisés, grâce aux recettes de l’écotaxe, dans de nouveaux projets d’infrastructures ferroviaires.

Enfin, l’écotaxe poids lourds devrait représenter environ 0, 5 % du chiffre d’affaires des entreprises du secteur, alors même que celles-ci dégagent en moyenne entre 1 % et 2 % de leur chiffre d’affaires en résultat net. Cette taxe détériorera donc très lourdement leur niveau de rentabilité, alors même que ces entreprises, fortement fragilisées par la crise durable qu’elles traversent, doivent faire l’objet d’un soutien prioritaire de la part des pouvoirs publics.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° I-508.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Avec cet amendement, nous revenons sur un sujet que l’on peut qualifier de « sensible », puisqu’il s’agit de la fameuse écotaxe poids lourds, dont il a beaucoup été question ces dernières semaines et dont l’entrée en vigueur a finalement été suspendue par le Gouvernement, pour une durée encore indéterminée.

Le groupe RDSE est très réservé sur cette taxe, laquelle pénaliserait injustement un certain nombre de territoires qui ne disposent d’aucune alternative au transport routier. Une telle mesure nous semble menacer l’activité d’un grand nombre d’entreprises, surtout en zone rurale. Nous regrettons que ses défenseurs soient entièrement coupés des réalités économiques du terrain que les élus des zones rurales, dont je fais partie, connaissent bien.

Les auteurs de cet amendement souhaitent prendre en compte les difficultés que poserait une telle taxe pour la filière française de l’élevage et de la viande. En effet, en raison de leur implantation en zone rurale et des spécificités propres à leur secteur, notamment au regard des impératifs de sécurité alimentaire, les entreprises de cette filière doivent nécessairement emprunter le réseau routier secondaire sur lequel s’applique l’écotaxe.

Ces entreprises, qui se trouvent souvent dans une situation économique difficile et ne disposent d’aucune alternative au réseau routier pour approvisionner les exploitations et transporter les animaux ou la viande dans les meilleures conditions, ne pourront pas supporter le poids d’une taxe supplémentaire qui pourrait représenter jusqu’à 50 % de leur résultat net. Je rappelle que plusieurs milliers d’emplois sont en jeu, essentiellement dans des territoires ruraux.

En outre, l’application de l’écotaxe à ces entreprises n’est pas cohérente avec la volonté gouvernementale de favoriser la compétitivité de nos entreprises. Cette taxe conduirait en effet à pénaliser les viandes françaises, dont nous connaissons tous la qualité, sans compter que cette filière rencontrerait alors de nouvelles difficultés, puisque les viandes importées seraient beaucoup moins lourdement taxées.

Ainsi, les véhicules assurant le transport de produits agroalimentaires français seraient taxés cinq ou six fois, à chaque étape de la production, tandis que le grand import ne le serait qu’une seule fois. C’est pourquoi nous vous proposons d’adopter cet amendement, qui vise à exonérer la filière française de l’élevage et de la viande de la très controversée écotaxe poids lourds.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Sur ces deux amendements, la commission des finances a une position très simple : dans la mesure où l’application de l’écotaxe est actuellement suspendue, il est sans doute vain de vouloir présager les conclusions du groupe de travail créé à l’Assemblée nationale sur ce sujet. Celui-ci examinera certainement les questions soulevées par nos collègues, questions que nous voyons d’ailleurs surgir ici et là dans le pays. Dès lors, il semble préférable que les éventuels ajustements à opérer soient débattus au Parlement, lorsque la nouvelle mouture de l’écotaxe lui sera soumise à son appréciation.

En l’attente, nous demandons aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer, ce qui permettra ensuite au débat de se déployer, dès l’instant où nous aurons une base de travail formalisée, transmise par le Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

La position du Gouvernement est semblable à celle de la commission. Ce projet d’écotaxe, voté en 2009, pourrait en effet être finalisé après que la discussion avec les professionnels aura été menée à son terme.

Au demeurant, je le précise, ces propositions sont légitimes. Elles se révèlent en effet « euro-compatibles », puisque le règlement européen sur l’écotaxe poids lourds prévoyait la possibilité d’exonérer les véhicules de transport d’animaux, vivants ou morts. Une telle mesure pourrait donc figurer parmi les évolutions envisageables du dispositif de l’écotaxe, si celui-ci devait évoluer demain.

Par conséquent, dans la mesure où la suspension de la mise en œuvre de l’écotaxe a permis d’ouvrir la discussion, je vous propose, messieurs Savary et Collin, de retirer ces amendements, de façon à ce que les mesures qu’ils préconisent soient versées au débat et éclairent le Gouvernement et l’ensemble des professionnels, au moment où ce sujet reviendra sur le devant de la scène.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous venez d’apporter.

Je tiens à le rappeler, le projet de loi sur l’avenir et la modernisation de l’agriculture a évolué, témoignant désormais d’une prise en compte tout à fait significative de la filière de l’élevage, sur laquelle l’écotaxe peut effectivement peser.

Ce matin, je participais à la réunion de la fédération des transports de mon département. Les entreprises de ce secteur doivent faire face à un certain nombre de difficultés. Bien sûr, la situation de Mory Ducros a engendré des dégâts collatéraux – je veux bien sûr parler des sous-traitants. Dans la Marne, ces derniers intervenaient dans différents domaines, notamment l’agro-industrie et la viticulture. Les difficultés rencontrées par Mory Ducros pénalisent considérablement à la fois ces entreprises de transport et l’ensemble de la filière.

Il est donc important de prendre en compte cette réalité dans l’élaboration de l’écotaxe poids lourds.

Par ailleurs, j’ai appris au cours de cette réunion que certaines entreprises de transport avaient déjà élaboré les logiciels permettant d’encaisser cette taxe pour, ensuite, la répercuter, comme il se doit, sur le client. La suspension de la mise en œuvre de l’écotaxe les met donc en difficulté, dans la mesure où elles ont déjà transformé leur logiciel de facturation. Aujourd’hui, elles ne savent plus comment préparer l’année 2014 !

Enfin – c’est le président du conseil général qui s’exprime –, qu’en sera-t-il des recettes ? En effet, pour certains départements, les recettes de l’écotaxe pouvaient être estimées à plusieurs centaines de milliers d’euros. Alors que les départements rencontrent des difficultés, la disparition d’une telle recette nécessitera la mise en œuvre de solutions de rechange pour équilibrer les budgets. Je pense que, dans le cadre de la réflexion menée par le groupe de travail, l’ensemble de ces problématiques devra être soulevé.

Monsieur le ministre, puisque vous avez pris note de ces préoccupations, je retire cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’amendement n I-369 est retiré.

Monsieur Collin, l’amendement n I-508 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre, vous nous invitez à retirer cet amendement. Nous avons été sensibles aux arguments que vous avez développés, et notamment à votre prise en compte des difficultés particulières que connaît la filière de l’élevage et de la viande. Dans la discussion qui s’ouvrira, nous saurons, croyez-moi, vous rappeler de telles orientations, qui devront être considérées – mais je vois que vous souriez, monsieur le ministre, ce que j’interprète comme un très bon signe pour l’avenir !

En conséquence, sous cette réserve, nous retirons notre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’amendement n° I-508 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-405, présenté par MM. Placé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 266 nonies du code des douanes est ainsi modifié :

1° Le a) du A du I est ainsi modifié :

a) La cinquième ligne du tableau du deuxième alinéa est supprimée ;

b) Au troisième alinéa, la référence : « A, » est supprimée ;

2° Le b) du A du I est ainsi modifié :

a) La quatrième ligne du tableau est supprimée ;

b) À la septième ligne du tableau, les références : « A et B, des A et C » sont supprimées ;

c) Au troisième alinéa, la référence : « A, » est supprimée ;

3° Le c) du A du I est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est supprimé ;

b) À la dernière phrase du dernier alinéa, les mots : « visé aux A ou » sont remplacés par les mots : « mentionné au ».

La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Cet amendement vise à supprimer la modulation de TGAP instaurée au bénéfice des installations de stockage et d’incinération des déchets ménagers.

À l’origine, la TGAP « mise en décharge et incinération » a été introduite afin d’encourager le recyclage des déchets. Dans le même temps, la modulation de cette taxe avait, quant à elle, pour objectif d’inciter les professionnels de l’incinération et du stockage à améliorer leur performance environnementale.

Cette modulation ne semble plus justifiée à l’heure actuelle, puisque la quasi-totalité des installations de stockage et d’incinération en bénéficie. Presque toutes se sont en effet adaptées aux normes environnementales. L’incitation fiscale n’a donc plus lieu d’être, maintenant que cet objectif est atteint.

En outre, le groupe écologiste juge que cette modulation, appelée « certification environnementale », est trompeuse. En effet, l’incinération et le stockage, rappelons-le, ne sont pas en eux-mêmes des mesures propres de traitement des déchets. Nous leur préférons, par exemple, le réemploi et la réparation, position que nous avons défendue lors de la présentation d’autres amendements.

La modulation de la TGAP cherchait à améliorer la performance environnementale d’installations qui sont polluantes par définition. C’est pourquoi nous souhaitons sa suppression.

Pour finir, je me permets de préciser que la suppression de cette niche fiscale permettrait de dégager une recette de 63, 5 millions d’euros l’année prochaine, qui pourrait être réaffectée aux collectivités locales, durement frappées par ailleurs dans le cadre de ce budget.

M. le ministre chargé du budget a défendu, durant tout le week-end, la nécessité de trouver des recettes. Nous faisons donc des propositions « vertueuses » !

M. Roger Karoutchi rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’amendement n° I-404, présenté par MM. Placé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 266 nonies du code des douanes est ainsi modifié :

1° Le a) du A du I est ainsi modifié :

a) La septième ligne du tableau du deuxième alinéa est supprimée ;

b) Au troisième alinéa, les références : «, B ou C » sont remplacées par la référence : « ou B » ;

2° Le dernier alinéa du c) du A du I est supprimé.

La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Cet amendement concerne, quant à lui, la TGAP sur les installations de stockage des déchets exploités en mode bioréacteur. Ce qui se cache derrière ce jargon incompréhensible, ce ne sont rien d’autre que les décharges, et même les mégadécharges – on ferait mieux d’appeler les choses simplement par leur nom, ce qui permettrait à nos compatriotes de nous comprendre.

À l’heure actuelle, environ 30 % des déchets finissent dans l’une des 250 décharges de France. Les mégadécharges ne diffèrent que très peu des décharges classiques ; la seule différence, c’est qu’elles sont exploitées afin de produire le maximum de biogaz. Les déchets, et parmi eux les déchets organiques, sont enfouis dans des casiers fermés, dans lesquels ils fermentent. Leur décomposition produit du biogaz, principalement du méthane, qui est ensuite capté et réutilisé comme combustible, par exemple.

D’une part, alors que le méthane ainsi produit est extrêmement polluant, les profits dégagés par ce procédé encouragent, par définition, la perpétuation de l’enfouissement des déchets. D’autre part, l’autre aspect extrêmement négatif de cette structure de stockage de déchets est l’infiltration de liquides issus de la fermentation dans les sols. Il a été prouvé que les membranes isolant les sols des liquides de décomposition ne font pas leur travail ; la pollution des sols se diffuse ensuite aux nappes phréatiques, de manière malheureusement durable.

Il semblerait en outre qu’on ait oublié la loi du 13 juillet 1992 relative à l’élimination des déchets ainsi qu’aux installations classées pour la protection de l’environnement. Celle-ci prévoit qu’à compter du 1er juillet 2002 les installations d’élimination des déchets par stockage ne seront autorisées à accueillir que des déchets ultimes, c’est-à-dire des déchets qui ne se recyclent pas. Or les déchets organiques se décomposant dans les mégadécharges en produisant du méthane ne sont pas, par définition, des déchets ultimes.

De fait, la modulation de la TGAP à destination des installations de stockage de type bioréacteur ne se justifie aucunement. C’est pourquoi nous proposons sa suppression.

J’ajoute que l’adoption de cet amendement et de celui qui le précède permettrait d’accroître les recettes budgétaires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je me félicite, au nom de la commission des finances, que Jean-Vincent Placé vienne au secours de celle-ci, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il en est l’un des membres éminents !

Sourires.

Sourires.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

En effet, il n’est jamais facile de combler un trou de 14 milliards d’euros…

Pour ce faire, Jean-Vincent Placé propose de supprimer les modulations de la TGAP visant à inciter les professionnels du secteur du stockage et de l’incinération des déchets ménagers à améliorer leurs performances – c’est l’objet de l’amendement n° I-405 –, ainsi que les modulations introduites au profit des bioréacteurs – c’est l’objet de l’amendement n° I-404.

La commission des finances suggère à notre collègue de retirer ces deux amendements. En effet, une réflexion est en cours sur la fiscalité des déchets, notamment sur la refonte de la TGAP, dans le cadre des travaux du comité pour la fiscalité écologique, présidé par Christian de Perthuis. À la suite de la conférence environnementale, le Gouvernement, faisant le choix de la clarté et de la transparence, a confié à cette instance le soin de mener une réflexion globale sur l’évolution de notre fiscalité, en y intégrant une dimension écologique plus marquée, en quelque sorte en la « verdissant ». Ce comité a d’ores et déjà formulé des propositions, qui ont été intégrées dans le projet de loi de finances pour 2014 – nous avons débattu de l’une d’entre elles hier, dans le cadre de l’article 22, qui a été rejeté.

En outre, le Gouvernement, faisant le choix de la démocratie participative – ce que personne ne lui reprochera ici – pour progresser de manière cohérente et concertée, a demandé à ce même comité d’engager une réflexion sur la fiscalité écologique, en concertation avec les différents acteurs concernés. Par conséquent, la commission ne souhaite pas anticiper sur ses conclusions, qui devraient être rendues, selon le calendrier qui a été fixé, lors de l’élaboration du projet de loi de finances pour 2015.

Mon cher collègue, vos propositions sont parfaitement recevables et intéressantes, mais attendons 2015 et les résultats de la concertation qu’a engagée le Gouvernement dans le cadre de ce comité.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Monsieur le sénateur, vous proposez de supprimer la réfaction de la TGAP au profit, d’une part, des installations de stockage et d’incinération de déchets ménagers et assimilés liés à la certification environnementale et, d’autre part, de l’exploitation en mode « bioréacteur » et de l’altermodalité de transport.

Vous vous en réjouirez comme moi, ce matin même, à Bercy, s’est pratiqué un exercice de démocratie participative, ce qui ne peut que plaire à votre mouvement. Plus sérieusement, le Gouvernement a demandé à ce comité pour la fiscalité écologique de se pencher sur la fiscalité des déchets, ce qui répond à vos préoccupations. De fait, à la suite de M. le rapporteur général, et sans revenir sur le fond des mesures que vous proposez, le Gouvernement considère que vos propositions sont prématurées à ce stade. Attendons que le comité rende ses conclusions à la fin du premier semestre de 2014, d’autant qu’un agenda a été fixé par ailleurs pour la remise à plat de notre fiscalité.

Monsieur le sénateur, le Gouvernement vous demande par conséquent de retirer ces deux amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Au préalable, je salue la patience dont fait preuve M. le rapporteur général dans ce long débat budgétaire et le soin qu’il prend à toujours répondre précisément et méticuleusement aux questions que nous lui posons, avec l’ensemble de nos collègues. La qualité de ses réponses leur apporte toute leur légitimité.

Monsieur le ministre, vous avez rappelé l’attachement des écologistes à la démocratie participative, allant même jusqu’à prétendre que celle-ci s’installe à Bercy ! Nous ne demandons qu’à voir, car ce n’est pas ce que nous avons particulièrement constaté au cours des dix-huit derniers mois…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

M. Éric Doligé. Ce n’est qu’un début !

Sourires sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Vous ne nous en voudrez pas de vous le dire, puisque nous sommes ici entre gens de bonne compagnie qui savent se respecter mutuellement lorsqu’ils débattent.

Plus sérieusement, puisque le Premier ministre a engagé la remise à plat de l’ensemble de notre système fiscal – les responsables des groupes parlementaires seront reçus à partir de jeudi pour aborder ces sujets –, puisque, comme l’a rappelé M. le rapporteur général, le comité pour la fiscalité écologique présidé par Christian de Perthuis a été installé, je ne voudrais pas que la posture offensive qu’a adoptée le groupe écologiste depuis le début de ce débat budgétaire contrarie les efforts de dialogue dont vous faites preuve, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général.

Sourires sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Vincent Placé

Cela fera plaisir à Roger Karoutchi, je citerai Nicolas Sarkozy, qui, alors qu’il était un jour interrogé sur l’attitude qu’il comptait adopter à l’égard de Jacques Chirac, avait répondu ceci : « J’ai décidé de lui faire confiance. »

Pour notre part, nous décidons de vous faire confiance, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, et nous retirons ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Les amendements n° 405 et 404 sont retirés.

L’amendement n° I-177, présenté par MM. Patient et Mohamed Soilihi, Mme Claireaux et MM. Tuheiava, J. Gillot, Cornano, Antoinette et S. Larcher, est ainsi libellé :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 266 nonies du code des douanes est ainsi modifié :

1° Le a du A du 1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les collectivités et leurs groupements des départements de Mayotte et de la Guyane, les tarifs mentionnés aux E, F et G du tableau s’appliquent jusqu’au 31 décembre 2018, date à compter de laquelle la taxe est appliquée sans adaptation sur la base du taux national. » ;

2° Le tableau mentionné au a du A du 1 est complété par trois lignes ainsi rédigées :

E. ― Pour les installations accessibles par voies terrestres sur le territoire de la Guyane.

Tonne

F. ― Pour les installations non accessibles par voies terrestres sur le territoire de la Guyane.

Tonne

G. – Pour les installations sur le territoire de Mayotte

Tonne

II. – La perte de recettes résultant pour l’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie et pour l’État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

La Guyane et Mayotte ont fait de très gros efforts afin de rattraper leur retard et de mettre place une gestion des déchets conforme à la réglementation. À telle enseigne que, la semaine dernière, le syndicat d’élimination et de valorisation des déchets de Mayotte s’est vu attribuer la Marianne d’or.

Ces efforts ont été accomplis dans un contexte particulier, puisque ces départements sont désavantagés par rapport aux collectivités de métropole, qui ne connaissent pas un contexte réglementaire et fiscal aussi contraignant. En outre, ces territoires, qui figurent parmi les plus vastes intercommunalités de France, ont des caractéristiques très particulières, telles que le déficit d’infrastructures routières ou de législation sur les voies navigables.

Le niveau élevé du taux moyen de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, la TEOM, rend compte de l’importance des contraintes qui pèsent sur les usagers par rapport aux collectivités de métropole. Ces contraintes menacent les équilibres financiers de ces collectivités et, à terme, la paix sociale.

Ainsi, la TGAP représente 14 euros par habitant en Guyane contre 5 euros par habitant sur le territoire national, alors même que le PIB par habitant est deux fois inférieur à celui de la métropole. Le budget de cette taxe représente entre 50 % et 100 % des recettes de la TEOM, dans un contexte où les taux de TEOM sont très largement supérieurs à la moyenne nationale.

Pour les communes non accessibles par voie routière, les difficultés liées à l’exploitation des sites induisent des surcoûts de traitement et compliquent la mise en œuvre de solutions, ce qui rend nécessaire la modulation de la TGAP.

À Mayotte, la fiscalité locale n’est qu’embryonnaire et ne sera effective qu’au 1er janvier 2014. Les premières recettes de la TEOM, aujourd’hui nulles, ne seraient envisageables qu’à compter de 2015.

Par ailleurs, dans un contexte de grande précarité sociale – le PIB par habitant est plus de quatre fois inférieur à la moyenne nationale française –, le nombre de foyers imposables à la TEOM est très faible, induisant des taux de TEOM insoutenables pour équilibrer les budgets de la gestion des déchets ménagers à Mayotte.

Il faut noter en outre que la TGAP n’a jamais été appliquée à Mayotte, tout jeune département. Il est donc proposé une mise en place progressive.

Il est manifeste que ces territoires font face à des difficultés majeures de mise en place des structures de gestion des déchets, qui se traduisent par un fort investissement sur les mises aux normes des décharges, mais aussi par une absence quasi totale d’intervention des éco-organismes pour développer les structures de tri sélectif.

Il en résulte que, lorsqu’en métropole, après valorisation, seulement 30 % des déchets ménagers et assimilés sont stockés et donc soumis à TGAP, en Guyane, ils sont stockés à plus de 90 %, voire à 100 % pour les communes les plus isolées, et à 100 % à Mayotte.

Une modulation de la TGAP permettrait de rétablir un niveau juste de participation par habitant équivalent au niveau national. Par ailleurs, pour les communes non accessibles par voie terrestre en Guyane – et, pour Mayotte, à partir de 2015 –, une TGAP de 3 euros par tonne permettrait de prendre en compte l’incapacité structurelle à assurer sur ces territoires un niveau de recyclage équivalent à ceux de métropole.

Enfin, je tiens à préciser que, si l’effet de cette minoration de la TGAP est significatif pour les communes d’outre-mer, il ne l’est que très faiblement pour les finances publiques, puisque ne sont concernées qu’entre 100 000 et 120 000 tonnes de déchets, soit un écart compris entre 2 millions d’euros et 2, 4 millions d’euros avec les recettes de 2012. L’effet est même nul à Mayotte, où la TGAP n’était pas applicable.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement vise à moduler les tarifs de la TGAP sur les déchets ménagers en faveur de Mayotte et de la Guyane, deux territoires dont les spécificités ne sont pas prises en compte par le tarif actuel. La commission a estimé que l’objectif des auteurs de cet amendement était tout à fait compréhensible compte tenu des spécificités de la Guyane et de Mayotte, tout en s’interrogeant sur la constitutionnalité de leur proposition au regard du principe d’égalité devant l’impôt. Néanmoins, ces interrogations sont peut-être superflues. À la lumière des utiles précisions qu’apportera le Gouvernement, la commission pourrait émettre un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Monsieur le sénateur, le Gouvernement partage votre préoccupation et est conscient des efforts qu’ont engagés les collectivités de Guyane et de Mayotte pour mettre en place une gestion des déchets conforme à la réglementation, mais également des difficultés financières que suscite la TGAP.

Au regard des investissements importants à réaliser dans ces deux départements, je vous propose de mettre en place un dispositif transitoire jusqu’au 31 décembre 2018, l’objectif étant d’en revenir au régime général à compter de 2019.

Le Gouvernement aurait souhaité émettre un avis favorable, sous réserve de l’adoption d’un sous-amendement tendant à établir un échelonnement différent de celui que vous proposez aux sixième et septième alinéas du tableau inscrit dans votre d’amendement. Ce sous-amendement n’ayant pas été déposé, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat. Il déposera dans la suite de la discussion un amendement visant à intégrer les dispositions prévues initialement dans ce sous-amendement.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Oui, monsieur le président.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 22.

L’amendement n° I-148 rectifié, présenté par Mme Sittler et MM. Billard, Reichardt, Grignon, Revet, Cornu et G. Bailly, est ainsi libellé :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 2 de l’article 266 decies du code des douanes, est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ... Les personnes mentionnées au I de l’article 266 sexies sont autorisées à déduire des cotisations de taxe dues au titre de leurs installations situées dans la zone surveillée par un observatoire départemental ou régional des déchets, les contributions ou dons de toute nature qu’elles ont versés à celui-ci dans les douze mois précédant la date limite de dépôt de la déclaration. Cette déduction s’exerce dans la limite de 171 000 euros ou à concurrence de 25 % des cotisations de taxe dues. »

II. – Les pertes de recettes résultant pour l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) et pour l’État sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.

La parole est à Mme Esther Sittler.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Sittler

Les observatoires départementaux et régionaux des déchets ont pour mission d’étudier et de déterminer la nature, la quantité, le flux et les filières de traitement des déchets au niveau local. Leur financement est aujourd’hui assuré par l’ADEME, par les collectivités locales et par l’État. Or, les charges augmentant et les subventions restant fixes, il est important pour ces organismes d’assurer leur pérennité en élargissant leurs sources de financement.

Le présent amendement vise donc à étendre le dispositif applicable aux observatoires de la qualité de l’air, c’est-à-dire à permettre les dons des entreprises aux observatoires en échange d’une déduction de la TGAP dont elles sont redevables.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement vise à permettre aux entreprises redevables de la TGAP sur les déchets ménagers qui font des dons aux observatoires départementaux et régionaux des déchets de les déduire de leur cotisation de TGAP.

Ce souhait a paru pouvoir être partagé par nos collègues de la commission des finances. Toutefois, des questions de faisabilité et de mise en œuvre se posent certainement, or la commission ne dispose pas des éclairages nécessaires sur les conséquences d’une telle décision. La commission a donc souhaité recueillir l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Madame la sénatrice, vous souhaitez donc étendre la possibilité offerte aux redevables de la TGAP-émissions polluantes de déduire du montant de la TGAP due les contributions ou dons de toute nature versés aux organismes de surveillance de la qualité de l’air, aux redevables de la TGAP-déchets au titre des contributions ou dons qu’ils feraient aux observatoires départementaux ou régionaux des déchets. Vous précisez qu’il s’agit de maintenir et d’améliorer le suivi du traitement des déchets effectué par ces observatoires.

Le Gouvernement n’est toutefois pas favorable à votre proposition. En effet, celle-ci aboutirait à une baisse de financement pour l’ADEME qui investit elle-même pour l’amélioration de la gestion et du traitement des déchets.

Enfin, le comité pour la fiscalité écologique que j’ai évoqué tout à l’heure, comme l’a fait également M. le rapporteur général, mène depuis cette année une réflexion approfondie sur le traitement et la gestion des déchets. Il semble donc préférable d’intégrer votre proposition aux sujets de réflexion du comité avant toute modification législative.

La porte n’est donc pas fermée, mais je souhaiterais apporter une réponse analogue à celle que j’ai faite tout à l’heure aux propositions du sénateur M. Jean-Vincent Placé. En effet, le comité de la fiscalité écologique qui se consacre à une réflexion extrêmement pointue sur la fiscalité des déchets accueillera une série de propositions et les examinera. Plutôt que d’ajouter des strates successives et d’agir de manière peut-être un peu désordonnée, il nous semble préférable de nous en remettre aux conclusions de ce comité qui nous proposera une appréciation globale et cohérente en matière de fiscalité des déchets. Ces conclusions permettront, selon moi, de satisfaire la demande générale d’une fiscalité lisible, la plus simple possible, et par conséquent beaucoup plus efficace.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Sittler

Non, je le retire, monsieur le président.

Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour défendre les observatoires de la qualité de l’air. Nombre de maladies découlent de la pollution de l’air, aussi il est important que ces observatoires continuent leur travail. J’espère donc que, lors des discussions futures, vous aurez à cœur de souligner l’importance du rôle des observatoires de l’air dans notre pays.

À la fin du III de l’article 235 ter ZE du code général des impôts, le taux : « 0, 50 % » est remplacé par le taux : « 0, 539 % ».

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, l’article 23 est très attendu par un certain nombre de collectivités territoriales et organismes publics touchés par ce qu’il est convenu d’appeler le problème des « emprunts toxiques ».

Il s’agit en effet de proposer une augmentation mesurée de la taxe sur les risques systémiques payée par le secteur financier afin de pourvoir au fonds de soutien d’un montant de 100 millions d’euros en 2014 et destiné à être prorogé durant quinze ans, dont la création doit faire l’objet, en principe, de l’article 60.

Il faut souligner qu’il s’agit de la première intervention d’ampleur de l’État dans ce dossier, ce dont je me félicite.

Je voudrais rappeler ici que 1 400 collectivités territoriales et plusieurs dizaines d’organismes publics, tels que des hôpitaux ou des organismes de gestion de l’habitat social, se sont vu proposer, entre 2002 et 2008, des emprunts spéculatifs, pour un total qui avoisine, encore aujourd’hui, 14 milliards d’euros. Le taux d’intérêt de certains de ces emprunts a explosé, pour s’envoler à 10 %, voire 15 % ou même 30 % dans certains cas. D’autres sont susceptibles de connaître une évolution équivalente dans les années à venir.

Il s’agit là d’un scandale susceptible de faire augmenter significativement les impôts locaux des collectivités concernées. Ce scandale est étroitement lié à celui de la banque Dexia, puisque cette dernière est responsable de deux tiers des ventes des produits concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Le sauvetage de cette banque, qui est en cours, a déjà coûté 7 milliards d’euros à l’État et ce n’est pas terminé. Ce sauvetage et la nationalisation de Dexia expliquent que l’État se retrouve aujourd’hui détenteur de 9 milliards d’euros de créances toxiques, en attente de remboursement des collectivités territoriales, à travers la Société de financement local, la SFIL, et la société « résiduelle » Dexia.

Sur l’ensemble de ces produits, le risque de perte avoisine 5 milliards d’euros pour la SFIL et Dexia, et sans doute 2 milliards d’euros pour les autres banques.

Je sais qu’un certain nombre de parlementaires, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, estiment que les maires et les élus locaux concernés sont responsables de ce qui leur arrive. Je voudrais, une nouvelle fois, essayer de les convaincre qu’ils se trompent.

Comme l’ont montré pratiquement tous les rapports publiés aussi bien par l’Assemblée nationale que par la Cour des comptes, ainsi que les nombreux ouvrages consacrés à la dérive de la banque Dexia, en réalité, à quelques exceptions près évidemment – car il en existe toujours –, nos collègues ont été victimes de produits spéculatifs, pour avoir tout simplement fait confiance à leur banque traditionnelle, qu’ils consultaient et mobilisaient parfois depuis plus de vingt ans.

La taxe prévue à l’article 23 permettra donc de créer ce fonds de soutien qui est bienvenu et qui permettra de franchir, je l’espère, un premier pas, sans pour autant résoudre le problème dans son ensemble. Je veux malgré tout saluer sa création et surtout rappeler l’importance que nous accordons au décret d’application qui doit suivre pour une utilisation plus juste et plus efficace de ce fonds.

Je souligne également que plusieurs hôpitaux et CHU sont actuellement exclus de ce fonds de soutien, ce qui pose inévitablement un problème qui vient d’ailleurs d’être souligné par la Fédération hospitalière de France. En effet, les malades pourront être indirectement mis à contribution dans le cadre de l’équilibre budgétaire des hôpitaux, afin de payer ces taux d’intérêt très excessifs. Il faudra, à mon sens, revenir un jour ou l’autre sur ce point.

Enfin, je rappelle notre perplexité et notre opposition au principe de la validation législative, elle aussi prévue à l’article 60, qui doit accompagner la création de ce fonds. Dans sa rédaction actuelle, elle nous semble excessive et nous exposerons notre position lors de l’examen de l’article 60.

L’article 23, qui nous occupe aujourd’hui, est donc une première étape, mais il restera beaucoup à faire pour sortir de ces deux scandales extrêmement importants, dont le coût est inéluctable, car les paris qui ont été pris sont perdus ; il n’y a aucun espoir de voir se retourner la conjoncture, ou plus exactement les indices sur lesquels se sont fondées ces décisions.

Je suggère, pour le futur, que l’effort demandé au système bancaire et financier soit accru, pour des raisons qui tiennent à la justice – en s’inspirant du principe « pollueur-payeur » en quelque sorte –, et pour préserver les capacités d’investissement des collectivités territoriales, mais aussi, désormais, de l’État, car elles sont, comme vous le savez, déterminantes pour la croissance future de notre pays. Je ne pense pas que les services publics doivent, en définitive, subir les conséquences de dérives graves de notre système financier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’amendement n° I-379, présenté par M. de Montgolfier et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Albéric de Montgolfier.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

L’article 60 du projet de loi de finances pour 2014, monsieur le ministre, crée un fonds de soutien aux collectivités en difficulté du fait des produits structurés. Il s’agit là d’un vrai sujet. Cela a été dit à l’instant, de nombreux rapports se sont penchés sur cette question et certains ont proposé des solutions – je pense notamment au rapport d’un collègue d’Eure-et-Loir, Jean-Pierre Gorges, député-maire de Chartres.

Néanmoins, la solution consiste-t-elle à faire contribuer toutes les banques, y compris celles qui n’ont pas distribué ce type de produits, à la réparation d’une faute commise par certaines d’entre elles ?

Je remarque d’ailleurs que les banques qui ont le plus distribué ce type de produits sont des banques dont l’État était actionnaire majoritaire : l’État détenait 44 % du capital de Dexia, 75 % de la Société de financement local ; or ces deux sociétés sont celles qui ont le plus proposé les produits exotiques qui créent aujourd’hui des difficultés aux collectivités territoriales.

La question qui se pose est celle de savoir qui doit assumer cette responsabilité. Je pense d’abord qu’existe, dans un certain nombre de cas, une responsabilité de la collectivité. Mon collègue parlait à l’instant de communes en difficulté. Je veux bien reconnaître que, lorsqu’une commune ne dispose pas des compétences en interne et se fait « avoir » par une banque, elle n’a pas forcément les moyens de vérifier le taux effectif global et la qualité du produit. En revanche, le conseil général du département de la Seine-Saint-Denis, qui est l’un de ceux qui ont eu le plus recours à ce type de produit, compte plusieurs milliers de collaborateurs : on ne peut pas croire que sa direction financière n’était pas avertie du risque pris en utilisant des produits structurés.

Je suis président de conseil général. Lorsque l’on me propose des produits à 1, 40 %, mais dont le taux est indexé sur l’évolution de devises étrangères comme le franc suisse, je n’ai pas besoin d’avoir fait de très longues études pour penser qu’il existe un risque. §Une collectivité aussi importante que le conseil général de Seine-Saint-Denis, compte tenu du nombre de ses collaborateurs, aurait dû, selon moi, pouvoir prendre un peu de recul pour évaluer le risque qu’elle prenait. Par ailleurs, cette collectivité a gagné de l’argent, car les taux ont été extrêmement bas pendant un certain temps ; le problème est survenu, évidemment, au moment où les taux sont remontés. Il nous faut donc, premièrement, nous demander s’il existe une responsabilité de la collectivité.

Deuxièmement, qu’en est-il des banques ? En effet, les banques qui ont contribué à distribuer ce genre de produits exotiques doivent assumer leur responsabilité, mais dans le cadre d’une relation contractuelle. La banque qui a fauté doit éventuellement rembourser ou revenir à un taux normal. Si elle a vendu un produit illégal, la banque doit évidemment rembourser – Éric Doligé parlait ainsi de banques qui ont distribué des produits via des filiales aux îles Caïman, ce qui est totalement illégal.

Pour autant, incombe-t-il à l’ensemble du système bancaire, y compris à des sociétés qui n’ont pas distribué ce genre de produits, de payer ? La réponse est non, et c’est la raison pour laquelle notre groupe considère qu’il n’y a pas lieu d’instaurer par l’article 23, tel qu’il est proposé, une responsabilité collective.

Il est tout à fait déresponsabilisant de faire payer ceux qui n’ont pas distribué de produits exotiques. En revanche, ceux qui ont fauté doivent, dans le cadre d’une relation contractuelle, voire dans le cadre de contentieux devant les juridictions, rembourser ou du moins revenir à un taux normal. Encore une fois, ce que vous proposez revient à déresponsabiliser et à attribuer une prime à la mauvaise gestion. Sanctionnons les banques qui ont distribué ces produits, mais ne sanctionnons pas l’ensemble du système bancaire par un relèvement du taux de la taxe systémique.

Applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

On peut souscrire assez largement aux arguments employés par M. de Montgolfier concernant ce qui s’est passé lors de la crise financière. Je songe aux dérives constatées, aux excès maintes fois dénoncés et aux comportements tout à fait erratiques des banques quant aux produits mis sur le marché.

Pour autant, doit-on renoncer aujourd’hui à créer un fonds pour soutenir les collectivités qui ont souscrit ces emprunts structurés ? À mon sens, la réponse est non. En effet, il faut prendre en compte non seulement la responsabilité de ceux qui, hier, étaient à la tête de ces établissements, mais aussi celle des superviseurs et celle des pouvoirs publics, qui auraient peut-être pu jeter un œil plus attentif sur les pratiques des banques à cette époque-là. En matière de diagnostic, il est sans doute possible d’aller plus loin encore que ce qu’a indiqué M. de Montgolfier !

Toujours est-il que la situation actuelle est simple : certaines collectivités sont placées face à d’énormes difficultés, à cause de ces produits qu’elles ont été conduites à souscrire. En conséquence, le Gouvernement propose la création d’un fonds de soutien alimenté, d’une part, par une dotation de l’État d’un montant de 50 millions d’euros et, de l’autre, par une participation des banques – elle aussi d’un montant de 50 millions d’euros – assurée via le relèvement de la taxe de risque systémique.

Avec l’adoption d’un tel amendement, le fonds de soutien ne tiendrait plus, dans la mesure où il serait privé d’une des deux sources financières permettant son fonctionnement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Par ailleurs, on renoncerait à reconnaître la responsabilité des banques dans ce qui s’est produit ! Or, si l’on demande à ces dernières d’apporter la moitié des moyens nécessaires au fonctionnement de ce fonds de secours, c’est bien à la suite d’une défaillance du système bancaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

C’est une responsabilité individuelle et non collective !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

On me répond que toutes les banques ne se sont pas révélées défaillantes, ce qui est vrai.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Néanmoins, si l’on décide de se lancer à la chasse aux responsabilités en examinant les banques une à une, on se heurtera vite à un obstacle : parmi les établissements qui ont distribué des prêts à caractère toxique, figurent également des banques étrangères ! Voilà la difficulté !

Certes, il n’est pas totalement satisfaisant de partir du principe selon lequel le système bancaire, dans son ensemble, doit subir une ponction de 50 millions d’euros. Toutefois, dans ces conditions, c’est la moins mauvaise des solutions. Je le répète, celle-ci revient à faire financer pour moitié le fonds de solidarité par le système bancaire, qui n’a pas su répondre de manière satisfaisante aux exigences éthiques ni observer les règles élémentaires qui auraient dû être appliquées à l’époque.

Ainsi, on ne peut qu’être défavorable à cet amendement, qui tend à empêcher la mise en œuvre de ce dispositif.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

En présentant l’avis du Gouvernement sur l’amendement de M. de Montgolfier, j’apporterai quelques éléments de réponse à M. Vincent.

Cet article établit le financement du fonds d’aide aux collectivités ayant souscrit des emprunts toxiques, créé par l’article 60 du présent projet de loi de finances, qui figure dans sa seconde partie. Ce dispositif est abondé par les banques à hauteur de 50 millions d’euros par an. J’indique que ce dispositif court sur quinze ans, et que ce fonds pourra être doté jusqu’à 1, 5 milliard d’euros, à parité entre le système bancaire et l’État. C’est là une contribution tout à fait substantielle.

Monsieur de Montgolfier, j’ai bien entendu vos arguments. Mais, en suivant votre raisonnement, plus aucune banque ne serait en définitive mise à contribution ! En effet, si on souhaitait limiter ce financement aux seuls établissements qui ont développé un encours important en matière de prêts toxiques, on se heurterait d’emblée à cet obstacle : personne n’est en mesure d’établir de telles statistiques.

Il faut commencer par regarder ce qu’il est possible de faire. Interrogez-vous vous-même ; interrogez les spécialistes de la fiscalité et les acteurs bancaires : ils vous répondront qu’un tel exercice de calcul serait parfaitement vain.

Une autre piste reviendrait à ne taxer que les banques prêtant aux collectivités territoriales.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Toutefois, vous en conviendrez, il serait pour le moins curieux d’asseoir le financement de ce fonds sur une taxe limitée à ces acteurs, sachant que ce sont précisément eux qui permettent aux collectivités d’investir !

Enfin, il est possible de s’appuyer sur la notion de risque systémique, c’est-à-dire sur la capacité d’un certain nombre de banques à prendre des risques susceptibles, le cas échéant, de faire vaciller l’ensemble du système économique. C’est sur cette base que nous avons décidé de mettre en œuvre cette taxe. Il s’agit là, pour les banques, d’une taxe de responsabilité correspondant non seulement à la réparation d’une faute commise par certaines d’entre elles, mais aussi à la préparation de l’avenir. Du reste, vous en conviendrez avec moi, il serait également assez curieux que le Gouvernement entreprenne de juger, sous un angle moral, les collectivités ou les banques qui auraient « fauté », sans voir très bien comment faire, et affirme qui des deux est le plus responsable !

En définitive, le débat est le même que pour le crédit à la consommation. Sur ce sujet, j’ai été très frappé d’entendre certains affirmer qu’il fallait avant tout responsabiliser l’emprunteur. L’attitude du Gouvernement est tout autre. Dans un cas comme dans l’autre, elle revient à considérer que les responsabilités du prêteur et de l’emprunteur sont souvent équivalentes et que le premier ne peut pas toujours s’abriter derrière la responsabilité du second.

Face à ce qui a constitué une défaillance majeure du système bancaire, nous considérons que ce dispositif apporte une solution durable. Il permettra d’aider les collectivités territoriales qui ont eu à subir ces emprunts très sensibles ou ces prêts toxiques. En définitive, votre solution conduirait à exempter les banques de tout concours.

Plutôt qu’une usine à gaz aboutissant à l’absence totale de taxe pour le système bancaire, nous préférons mettre en œuvre une contribution modeste, …

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

… raisonnable et proportionnée au regard des bénéfices dégagés par les banques. Personne ne me persuadera du contraire !

Dans ce domaine, nous avons choisi de mettre à contribution le système bancaire. Je constate, une fois de plus, que l’opposition cherche à l’aider à se soustraire à cette obligation !

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Avec vous, monsieur Delattre, c’est toujours trop !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Maurice Vincent, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Mes chers collègues, je réagirai en quelques mots à l’intervention de M. de Montgolfier.

Tout d’abord, je tiens à corriger une erreur factuelle : lorsque Dexia a commencé à dériver, elle avait déjà été privatisée. Tous les errements dont nous parlons découlent de décisions prises entre 2002 et 2008 ! Quant à l’État, s’il a fauté au cours de cette période, c’est principalement au niveau de la supervision, comme de nombreux rapports l’ont établi.

Ensuite, concernant la responsabilité des élus locaux, je répète que je ne me sens pas concerné à titre personnel. De fait, la situation dont j’ai hérité découlait de décisions prises par des élus qui, vous l’imaginez, n’appartenaient pas à mon courant politique.

Je tiens cependant à opérer cette mise au point. Aujourd’hui, en lisant une formule chiffrée de douze lignes, il peut sembler facile de conclure qu’il ne faut pas souscrire l’emprunt correspondant. Toutefois, pour suivre ce dossier depuis très longtemps, je vous assure que les banquiers habituels des collectivités territoriales tenaient à l’époque des discours extrêmement rassurants. Ils garantissaient toute une série de parachutes, au cas où un problème surviendrait. C’est en tout cas ce qui m’a été rapporté.

Dans l’immense majorité des cas, je ne crois pas que l’on puisse mettre en cause nos collègues qui étaient maires ou présidents de conseil général avant 2008.

Monsieur de Montgolfier, vous avez cité la Seine-Saint-Denis au nombre des départements concernés. Celui du Rhône est, lui aussi, en première ligne, avec plus de 400 millions d’euros d’emprunts toxiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Je le précise afin de rétablir équilibre un équilibre dans la présentation de la situation.

Enfin, j’en suis convaincu, notre devoir est aujourd’hui de rechercher la solution qui coûtera le moins cher à la France et qui restaurera le plus rapidement possible la capacité d’investissement des communes. La démarche proposée par le Gouvernement est un premier pas dans cette direction. Hélas, je ne suis pas certain qu’elle soit suffisante : l’avenir nous le dira. Plusieurs milliards d’euros sont tout de même en jeu.

Au total, c’est bien une dérive du système financier qui s’est fait jour dans le champ des collectivités territoriales et nous devons y remédier. À mon sens, le relèvement du taux de cette taxe de risque systémique tire sa légitimité de ce constat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

L’article 23 majore de quelques centièmes de point la taxe systémique due par les établissements de crédit, en vue de créer les conditions du financement, par l’État, du fonds destiné à intervenir pour résoudre le problème des emprunts structurés.

La somme ainsi collectée au titre de la taxe systémique est d’un montant particulièrement modeste, il faut le reconnaître. En l’espace de quinze ans, aurons-nous les moyens de redresser la situation des collectivités territoriales et celle des hôpitaux ? Nous ne le savons pas aujourd’hui. Notre collègue Maurice Vincent l’a souligné avec raison, pour l’heure, nous ne disposons pas de tous les éléments nécessaires pour répondre à cette question.

Les arbitrages seront sans doute douloureux et j’ai bien l’impression que la voie suivie ne sera pas nécessairement celle de l’abandon pur et simple de créances littéralement gonflées par des taux d’intérêts galopants.

Nous connaissons la quotité de ces taux. Au taux nominal, qui pouvait sembler avantageux à l’origine, s’ajoute, pour former le taux réel, la dérive de l’indexation sur la parité du panier de monnaie qui a servi à le calculer.

Ce qui est certain, c’est que le franc suisse se porte bien, …

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

… bien mieux, en tout cas, que les finances de certaines localités !

Cela étant, cet article nous donne l’occasion de constater une fois de plus la nécessité d’améliorer les conditions de financement des collectivités. La faillite de Dexia a engendré une situation que la création d’une agence de financement ne suffira pas à résoudre, nous devons en être conscients. Porteuses de l’essentiel de l’investissement public, les collectivités territoriales doivent bénéficier d’une offre de crédit privilégiée. Dans ce cadre, l’État a un rôle déterminant à jouer. Il convient en particulier de bonifier les crédits accordés aux administrations publiques locales pour investir, agir et développer les équipements publics mis à la disposition de nos concitoyens.

Nous ne voterons donc pas cet amendement déposé par nos collègues de l’UMP. En effet, solliciter le système bancaire pour résoudre ce problème revient tout simplement à rappeler que toutes les banques ont contribué à proposer à l’ensemble des collectivités territoriales et des hôpitaux des emprunts adossés aux marchés financiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Aujourd’hui, il faut se donner les moyens d’assurer le financement des collectivités. Il faut par ailleurs mieux les accompagner. Je songe tout particulièrement aux plus petites d’entre elles, qui ne disposent pas des mêmes moyens que les plus grandes et qui, par le passé, auraient bien eu besoin du soutien des services de l’État.

Quant aux banques, certaines n’ont peut-être pas prêté aux collectivités territoriales, et n’ont donc pas contribué à les plonger dans les difficultés que l’on connaît. Mais, on le sait, elles se sont bien souvent engagées dans des pratiques tout aussi hasardeuses dans d’autres pays, où elles ont bénéficié de l’accompagnement de la Banque centrale européenne. Pour quelle raison les collectivités territoriales ne seraient-elles pas quant à elles épaulées ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mais tel n’était pas tout à fait le but visé.

Aujourd’hui, que nous dit-on ? En utilisant un chiffre un peu caricatural, le propos peut se résumer ainsi : quarante banques, ou cinquante, sont responsables, mais on ne va pas prendre la peine de faire le tri entre elles. Tous les établissements contribueront, qu’ils aient fauté ou non.

Tout d’abord, je constate que ce système de responsabilité collective est d’une grande nouveauté. Bien sûr, pour certains de nos collègues, une banque, par définition, ne peut pas être honnête ! §Quoi qu’il en soit, un banquier honnête, ayant mis en œuvre un système de prêts très cadré et tout à fait légal, est ici traité de la même manière qu’un banquier ayant commis des irrégularités ou imaginé des dispositifs à la limite de l’acceptable pour – je veux bien le croire – faire en sorte que les élus n’y voient que du feu et signent.

Pourquoi donc considérer que les « bons » banquiers, ceux qui respectent les règles, devraient être traités comme les banquiers voyous ? Comment voulez-vous demander au système bancaire de se réguler, de respecter les règles, d’éviter les paradis fiscaux, de se plier à ceci et à cela, si vous ajoutez ensuite : « de toute façon, c’est égal, si vous le faites, vous serez tout de même traités comme les autres ! » ?

Je ne comprends pas cette dimension collective. Un certain nombre de collectivités, en Île-de-France ou ailleurs, ont intenté des procès aux banques qui avaient distribué des emprunts toxiques. Dans la plupart des cas, elles ont gagné et ont obtenu réparation, au moins partiellement. C’est cela, la logique du système !

Vous dites vous-mêmes que 1 000 ou 1 500 collectivités, établissements publics ou autres ont contracté ces emprunts toxiques. Très bien. On sait donc parfaitement quels sont les établissements bancaires qui ont prêté ! Pourquoi, et à quel titre, se permet-on de distinguer entre ceux qui sont responsables et coupables et ceux qui n’y sont strictement pour rien, qui n’ont jamais accordé un prêt toxique, pour conclure que cela n’a pas d’importance, que ces derniers paieront tout de même, comme les autres ?

Comment peut-on responsabiliser les banques, demander à ces dirigeants d’établissements financiers ou bancaires d’être réguliers et honnêtes si, en tout état de cause, de par la loi, quel que soit leur comportement, on considère qu’ils sont tous pareils ?

Franchement, il est profondément injuste, à mon sens, de collectiviser à ce point la responsabilité. Que l’on sanctionne les banques qui ont accordé des prêts toxiques, d’accord. Que les collectivités intentent des procès et que l’on trouve une solution publique pour les aider, très bien ! Mais déterminons quels sont les établissements financiers responsables, plutôt que de les traiter comme un seul bloc, en considérant que tout le monde est responsable ! Cela déresponsabilise les coupables, qui auront le sentiment de ne pas être plus maltraités que ceux qui n’ont jamais fauté.

Cet article me paraît tout à fait injuste et inéquitable, en conséquence, je voterai l’amendement présenté par mon collègue Albéric de Montgolfier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Je suis également choqué, d’autant plus que les décisions éventuelles que nous prendrions maintenant emporteront des conséquences plus tard, sur l’article 60.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Non ! Mais enfin, vous le retrouverez à l’Assemblée nationale, donc autant l’évoquer ici pour expliquer ce qui risque d’advenir…

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

… et dévoiler l’arrière-pensée du Gouvernement autour de cet article 23, qui permettra à l’Assemblée nationale de débattre de l’article 60.

Premièrement, vous avez dit tout à l’heure que votre objectif était de ne pas déresponsabiliser les banques. Vous mettez donc toutes les banques dans le même bain en faisant payer la totalité d’entre elles avec, dites-vous, « un taux extrêmement modeste », qui rapporte 1, 5 milliard d’euros ! Vous avez dit à plusieurs reprises que 1, 5 milliard d’euros représentait finalement une somme modeste.

M. Roger Karoutchi rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Je me souviens des débats d’hier, où, quand on proposait de supprimer 200 millions d’euros à tel endroit ou d’en ajouter autant à tel autre, vous nous opposiez que 200 millions d’euros représentaient une somme considérable, insupportable pour le budget. Aujourd’hui, 1, 5 milliard d’euros constitue donc une somme modeste, sans importance.

Je me permets de rappeler que ce modeste milliard et demi d’euros correspond tout de même au montant de la réduction de l’« enveloppe normée ». Vous voyez que lorsque l’on rapproche des montants de cette nature, aux yeux des collectivités ponctionnées, ils ne sont plus aussi modestes.

Ensuite, je voudrais dire, après mes collègues Albéric de Montgolfier et Roger Karoutchi, qu’il existe des tribunaux, qui permettent de résoudre certains problèmes ! Je ne cache pas, par exemple, que je suis actuellement en procès, en raison d’une situation particulière, au sujet de laquelle je suis persuadé d’obtenir réparation. Si nous votons cette disposition, ce ne sont pas les banques fautives qui seront condamnées, mais la masse globale du secteur qui sera contrainte de payer.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

En outre, nous donnerions un mauvais exemple. Je nourris ainsi l’idée de demander à l’État de compenser, dans le projet de loi de finances pour 2015, les sommes qu’il a prélevées sur les ressources de mon département, alors que je ne l’avais pas prévu. En ce moment, on prend continuellement des décisions qui se soldent par des prélèvements au détriment des collectivités territoriales. Si, dès lors que l’on est mis en difficulté par des tiers, il est possible de demander des compensations à l’État, alors nous ne nous gênerons pas pour le faire l’année prochaine !

De surcroît, je crains que l’influence de certaines banques ne soit pas étrangère à cette démarche, car elles ne veulent surtout pas risquer de se retrouver devant les tribunaux et espèrent donc que ces dettes, qu’elles ont engagées, seront progressivement effacées, avec leur responsabilité.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Bien sûr, les banques font pression pour payer des taxes !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

J’ajoute que dans l’article 60, que nous ne discuterons peut-être pas, nous serons amenés à valider rétroactivement des contrats de prêts et leurs avenants, dans lesquels il n’est pas fait mention du véritable taux effectif global, ou TEG, mais de TEG erronés. Voilà donc la direction vers laquelle nous sommes poussés, pour finalement laver de toute responsabilité les banques qui ont contrevenu aux règles élémentaires de leur métier.

Comme par hasard, on s’apercevra alors que l’on protège principalement l’État, actionnaire majoritaire, comme cela a été dit tout à l’heure, de la SFIL, qui a hérité du portefeuille d’emprunts structurés de la banque Dexia. La boucle est donc bouclée. Au travers de cet article 23, on nous prépare à voter l’article 60, qui permettra de dégager l’État et les banques de leurs responsabilités. Voilà pourquoi nous voterons cet amendement de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous sommes face à une question de fond : celle de l’attribution de la responsabilité, en cas de décision de gestion, au prêteur, à l’emprunteur, mais aussi à l’État, partie prenante dans cette affaire et qui nous demande de le devenir. Il nous est donc proposé de voter 50 millions d’euros de taxes pour l’ensemble des banques, mais également 50 autres millions d’euros de la part de l’État sur quinze ans, alors que l’on cherche à faire des économies ! Avec cet article 23 d’abord, puis avec l’article 60, nous mettons le doigt dans un processus à 1, 5 milliard d’euros sur quinze ans, ce qui ne représente pas une petite dépense.

Qui est responsable ? L’État n’a-t-il aucune responsabilité en la matière ? Nous avons dit tout à l’heure qu’un défaut de supervision dans l’exercice de son rôle d’actionnaire de certaines banques pouvait sans doute lui être reproché. J’en suis convaincu. Aujourd’hui, l’État est toujours incapable de chiffrer exactement le préjudice dû à l’action de Dexia. Nous avons déjà supporté plusieurs engagements de fonds, mais aucune question précise sur le sujet ne nous permet de savoir ce que va véritablement nous coûter Dexia. Je trouve cela effrayant !

Ensuite, sommes-nous aujourd’hui capables de faire un bilan global de l’ensemble de ces emprunts toxiques dans le pays, afin de savoir exactement quels sont les établissements qui ont prêté, et combien, et quelles sont les collectivités qui ont souscrit ? On en a recensé jusqu’ici 1 500, soit une petite minorité d’entre elles.

Toutes les banques sont-elles responsables ? Il ne me semble pas. C’est l’objet de cet amendement de suppression : il ne paraît pas normal de faire payer toutes les banques, y compris celles qui n’ont jamais prêté à des collectivités locales ou qui ont toujours fait attention à distribuer des produits sûrs.

Toutes les collectivités locales sont-elles responsables ? Non. Je ne vois pas où est la responsabilité de celles qui n’ont pas souscrit d’emprunt. Beaucoup d’entre nous exercions des responsabilités au sein de collectivités locales quand les établissements nous ont proposé ce type de produits, et beaucoup les ont refusés. Tout le monde n’est pas « tombé dans ce panneau » et il n’y a aucune raison de rendre tout le monde responsable.

Enfin, il faut regarder ce que deviennent les individus. J’ai appris que deux des dirigeants de Dexia ont rejoint leurs administrations d’origine, l’INSEE et le ministère des finances, en bénéficiant de parachutes dorés. Il semble qu’entre 400 000 et 600 000 euros leur ont été versés.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

J’aimerais savoir dans quelle mesure ces dirigeants sont responsables. On nous demande aujourd’hui de payer des sommes considérables, alors que les dirigeants de la banque regagnent leurs administrations d’origine avec des parachutes dorés !

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Et ils sont les premiers à nous donner des leçons !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. Vincent Delahaye. 600 000 euros, pour moi, ce n’est pas rien. Je souhaite donc savoir si cela est exact et ce qui leur a été demandé.

Exclamations sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

M. Philippe Bas. Monsieur le ministre, vos explications ne nous ont pas convaincus.

M. Albéric de Montgolfier manifeste son approbation.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je dois dire qu’il est surprenant, et peut-être même piquant, après avoir diminué les dotations aux collectivités territoriales de 2, 5 milliards d’euros, de revenir devant la représentation nationale pour demander un geste de solidarité envers celles qui sont prises dans l’engrenage des emprunts toxiques. Vous devriez être cohérents dans la manière dont vous gérez les relations de l’État avec les collectivités locales.

Que faites-vous donc, pour traiter cette difficulté ? Vous créez un prélèvement supplémentaire. C’est bien dans votre manière, c’est d’ailleurs ce que vous faites également pour les départements, en les incitant à augmenter les droits de mutation à titre onéreux.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je ne peux que récuser cette pratique qui consiste, à chaque fois que se présente une difficulté, à inventer un nouveau prélèvement. Ce n’est pas ainsi que l’on amènera notre pays sur la voie du redressement.

Cet impôt touche donc les banques. Il semblerait que cela vous mette à l’aise. Les banques, ce sont les représentants de la finance, et la finance, chacun le sait, nous connaissons le bréviaire, c’est l’ennemi ! On fait donc jouer une corde sensible, en stigmatisant cette activité.

Il me semble, au contraire, que l’on doit traiter l’activité bancaire comme une industrie utile à notre pays, qui se situe au cœur de son économie, dont elle assure le financement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Mais enfin, ce n’est possible d’entendre cela ! Elles sont tout de même partie prenante des marchés financiers !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Si l’on portait ce regard sur l’activité bancaire, on y réfléchirait à deux fois avant d’augmenter ses prélèvements.

Or vous le faites dans des conditions, ainsi que mes collègues l’ont rappelé à l’instant, particulièrement injustes et déresponsabilisantes. C’est pourquoi nous ne pouvons l’accepter. Vous devez traiter les banques comme les autres contribuables, en respectant une forme d’égalité entre elles, sans faire payer aux bonnes les fautes des mauvaises. Ce principe d’égalité doit être observé ici.

Je m’associe en outre à ce que disait à l’instant Éric Doligé : quelle légèreté d’entendre dans notre assemblée qualifier un fonds doté de 1, 5 milliard d’euros, de fonds n’engageant que de petites sommes, abondé par un prélèvement tout à fait limité. Est-ce ainsi que vous entendez gérer les finances publiques ? En considérant que 1, 5 milliard d’euros est une petite somme négligeable, dont le prélèvement passera ici comme une lettre à la poste ?

Nous ne vous laisserons pas proposer de telles dispositions sans réagir avec beaucoup de fermeté !

Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Il est vrai que ce sujet nous interpelle. Je me sens directement concerné, dans la mesure où la collectivité territoriale que je préside a contracté un emprunt structuré, dont je surveille l’évolution comme le lait sur le feu depuis trois ou quatre ans. Les périodes de haut alternent avec des périodes de bas, mais, jusqu’à présent, cet emprunt a toujours été rentable pour la collectivité. C’est pourquoi j’attendais la négociation. À ce jour, il nous a offert un avantage de 400 000 euros par rapport à un emprunt dit « classique », sur quinze ans à taux fixe.

Avec ce mauvais classement dans la charte de…

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

… Gissler, je le surveille de très près, et, compte tenu du contexte, j’ai préféré le renégocier maintenant, en profitant d’une fenêtre de tir permettant d’en sortir à bon compte. Je savais que ce fonds allait être créé, mais je n’ai pas pour autant attendu, et le coût global pour ma collectivité ne sera pas plus lourd que si nous avions souscrit dès le début un emprunt classique, à taux fixe ou variable en fonction des conditions.

De plus, ces engagements interviennent toujours dans le cadre d’un panier d’emprunts. Il ne me semble pas qu’un gestionnaire de collectivité s’acharne à ne contracter qu’un seul type d’emprunts. En en discutant entre collègues, on constate que les collectivités un peu importantes en ont contracté dix ou douze, qui ne sont pas tous formatés de la même manière, afin précisément de limiter les risques et de les rendre acceptables par la collectivité.

Il apparaît maintenant que ceux qui ont mis en place une gestion de ce type, qui ont renégocié il y a quelques mois ou quelques années, selon le type de produit financier, n’auront pas accès à ce fonds, contrairement à ceux qui ont attendu. Il y a donc bien rupture d’égalité.

Monsieur le ministre, il faut savoir tirer des leçons de notre expérience. Alors que notre pays a une dette trop élevée, on continue à inciter les collectivités à emprunter. La Caisse des dépôts et consignations propose aux collectivités d’emprunter sur quarante ans ! Dans quelques années, nous risquons de nous dire que, finalement, il n’était pas sérieux d’étaler la dette sur une si longue durée…

Protestations sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Cela dépend de la nature de l’investissement !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Effectivement, selon le type d’investissement, la durée du prêt peut aller de trente à quarante ans.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Jusqu’à présent, la Caisse des dépôts et consignations intervenait à hauteur de 50 % de l’emprunt, mais ce taux sera désormais porté à 100 % en dessous d’un million d’euros.

Je le répète, on incite les collectivités à s’endetter, alors même notre pays l’est déjà fortement !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Il vaut mieux s’endetter à 4 % qu’à 12 % !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

M. René-Paul Savary. Monsieur le ministre, nous estimons pour notre part que le seul objectif qui vaille en cette période difficile, c’est la diminution de la dépense publique.

Applaudissements sur quelques travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Le ministre va nous dire que 1, 5 milliard d’euros, ce n’est pas grand-chose !

M. Jean-Claude Carle remplace M. Jean-Pierre Raffarin au fauteuil de la présidence.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Monsieur Savary, vous avez pu renégocier votre emprunt, c’est fort bien ! Encore faudrait-il que tout le monde puisse le faire… Si l’on a créé ce fonds, c’est pour venir en aide aux collectivités qui ne sont pas en mesure de renégocier leurs emprunts.

Je voudrais évoquer la responsabilité des banques. Nous savons que la plupart d’entre elles – pour ne pas dire toutes ! – ont, à un moment ou à un autre, commercialisé des emprunts structurés.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Certainement, mais cela signifie bien qu’elles y ont toutes eu recours…

Certaines se sont désengagées plus vite que d’autres, mais, au départ, même si ce fut dans des proportions différentes, elles ont pratiquement toutes engagé leur responsabilité.

Or nous sommes mis devant nos responsabilités par la Cour des comptes qui, dans son rapport d’octobre dernier sur les finances des collectivités locales, nous demande de résoudre urgemment la question des prêts et emprunts toxiques. Nous avons trouvé une solution qui – soyons honnêtes ! – est un compromis, car la validation législative ne plaît pas forcément aux collectivités locales, pas plus que la taxe.

Monsieur Doligé, vous avez évoqué le lobbying bancaire. J’ai rarement vu qu’il parvenait à obtenir la création d’une taxe bancaire…

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Laissez-moi parler ! Vous n’allez tout de même pas répondre à ma place.

Je me permettrai donc de contester la qualité de votre lobbyiste bancaire.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Nous sommes parvenus à une solution de compromis. Elle permet incontestablement de répondre à l’interpellation de la Cour des comptes, qui nous enjoignait de trouver une solution fondée sur la solidarité et la mise à contribution du système bancaire.

Messieurs Doligé et Karoutchi, j’ai entendu vos remarques. Pour être très honnête, elles ne sont pas toutes illégitimes, et vous avez développé des arguments solides.

Néanmoins, il faut se placer du point de vue des pouvoirs publics. La Cour des comptes nous demande de résoudre ce problème qui restait pendant. Or nous ne sommes pas en situation – je le redis – d’élaborer une taxe qui vise uniquement les banques dont le niveau de l’encours des prêts toxiques justifie qu’elles soient taxées.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a préféré mettre en place un dispositif qui repose sur un équilibre. De votre point de vue, et je le comprends, cet équilibre est imparfait. Nous avons essayé de créer un dispositif qui allie solidarité et efficacité, afin de nous débarrasser d’un problème qui existe depuis longtemps et qui pèse sur bon nombre de collectivités locales.

Nous débattrons de nouveau sur ce fonds au moment de l’examen de l’article 60. En attendant, je vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs, de rejeter l’amendement de M. de Montgolfier et d’adopter l’article 23 en l’état.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mes chers collègues, à ce point du débat, je voudrais vous avouer mon scepticisme. S’il n’y avait, d’un côté, que de bons gestionnaires et, de l’autre, que des mauvais, les choses seraient très simples. On incriminerait les mauvais et on essayerait d’éviter que les bons n’aient à payer pour ces derniers.

Néanmoins, dans bon nombre de situations, il est difficile de dire que nous avons affaire à un gestionnaire vraiment mauvais. Il peut être à moitié mauvais ou à moitié bon. Bref, dans la réalité, il y a toutes sortes de situations.

Il peut aussi arriver qu’un bon gestionnaire ait hérité d’un mauvais gestionnaire à la suite d’une alternance à la tête d’une collectivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Ne citons pas d’exemple particulier, mais ce sont des choses qui arrivent.

Je voudrais, en outre, attirer votre attention sur le fait que la responsabilité de l’État est, me semble-t-il, potentiellement engagée de différentes manières. Si une collectivité ne peut plus faire face à ses obligations, elle sera mise sous tutelle. L’octroi d’une subvention budgétaire est alors sans doute inévitable, comme l’attestent d’assez nombreux exemples dans le passé.

Par ailleurs, si les contentieux à l’égard des banques se multiplient, ils vont sans doute avoir pour conséquence d’accroître leur passif, ce qui peut mettre en péril la solvabilité de telle ou telle banque. Qui sera alors le garant en dernier ressort du système ? L’État ! Certes pas en totalité, mais il ne pourra sortir indemne de cette affaire…

C’est la raison pour laquelle cette question me conduit, mes chers collègues, à faire preuve d’un assez grand scepticisme.

Le Gouvernement aborde le sujet en créant un petit fonds. Il le fait sans connaître véritablement l’ampleur potentielle des dégâts, puisque je n’ai pas trouvé de réel chiffrage du risque. Peut-être cela vaut-il mieux, parce que les chiffres pourraient être tellement effrayants que nous serions tentés de nous occuper d’autre chose !

Je n’ai toujours pas compris si cet effort partagé de 100 millions d’euros par an allait réellement correspondre au besoin qui se concrétisera au fur et à mesure des années qui viennent. J’ai le sentiment que, même si nous mettons le doigt dans une mécanique qui peut s’avérer redoutable, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… ne rien faire et renvoyer les collectivités locales et les banques à leurs responsabilités respectives peut aussi entraîner des conséquences difficiles à assumer.

Mes chers collègues, après avoir entendu les arguments des uns et des autres, je m’abstiendrai sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je souhaiterais apporter deux précisions chiffrées.

D’abord, notre collègue Éric Doligé a évoqué un montant de 1, 5 milliard d’euros. Ce chiffre n’a rien à voir avec la réalité ! Il s’agit d’un fonds abondé en 2014 de 50 millions d’euros par l’État et de 50 millions d’euros par les banques. Nous discutons du projet de loi de finances pour 2014. Ce qu’une loi de finances a fait, une autre peut le défaire ! Il n’est aucunement question de 1, 5 milliard d’euros.

Ensuite, il ne s’agit pas de faire l’aumône, puisque 55 % du coût de l’indemnité de renégociation restera à la charge des collectivités. C’est donc bien un fonds de solidarité pour une part minoritaire de l’indemnité qu’il sera nécessaire de verser dans le cadre des renégociations.

J’ai entendu certains orateurs dire qu’il fallait que les fautifs assument ! Si c’est là votre vision des choses, soyez rassurés : ceux qui ont « fauté » vont effectivement être sollicités car ils vont devoir payer, je le redis, 55 % de la charge de la renégociation.

L’adoption de cet amendement entraînerait la suppression de ce dispositif. Les conséquences seraient lourdes. En effet, si ce système est, je l’ai dit, très imparfait, notamment sur la question des responsabilités, il permet à tout le moins d’envoyer un signal aux collectivités et aux élus qui les dirigent aujourd’hui, qui ne sont pas forcément ceux qui étaient hier aux responsabilités.

Nous voulons leur montrer la solidarité qui s’exprime aujourd’hui au travers de la discussion au Parlement. Le système bancaire, qui s’est laissé aller à des dérives – même si certaines banques ne peuvent être suspectées –, est sollicité pour abonder pour moitié ce fonds.

Ce dispositif est équilibré. Nous devons donc rejeter cet amendement de suppression de l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur le rapporteur général, nous n’avons pas la même mémoire des choses. M. Cazeneuve avait évoqué, me semble-t-il, un fonds abondé par l’État, à hauteur de 50 millions d’euros, et par les banques, pour le même montant, et ce pendant quinze ans. Les chiffres que vous avancez sont-ils les mêmes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je mets aux voix l’amendement n° I-379.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Ah ! sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici le résultat du scrutin n° 83 :

Le Sénat n’a pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je mets aux voix l’article 23.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici le résultat du scrutin n°84 :

Le Sénat a adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° I-110, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 3° du II de l'article 235 ter ZD est abrogé.

La parole est à M. Éric Bocquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous éprouverez sans doute un léger sentiment de flash-back en abordant cet amendement qui nous ramène, il est vrai, quelques mois en arrière, quand, examinant le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, nous avions débattu longuement des activités dites de « tenue de marché » et de leur rôle sur l’économie réelle.

La taxe sur les transactions financières, dont la genèse fut longue et la naissance difficile, est née avec quelques handicaps, dans un contexte de forte résistance des acteurs financiers, qui trouveront toujours les arguments pour justifier le fait qu’il faut leur laisser le champ libre, car leur activité, nous expliquent-ils, est indispensable au financement de l’économie réelle. Permettez-moi ici d’en douter : la finance autocentrée n’a, à ce jour, jamais fait la preuve de son efficacité dans l’économie générale.

En effet, suivant une habitude assez largement ancrée dans notre pays, à peine le principe de la taxe était-il établi que des dispositions étaient prises pour en restreindre l’application. Ainsi, en examinant l’article 235 ter ZD du code général des impôts, on constate qu’ont immédiatement été définis rien moins que douze cas d’exonération, touchant notamment, « aux acquisitions réalisées dans le cadre d’activités de tenue de marché ». Je poursuis la citation : « Ces activités sont définies comme les activités d’une entreprise d’investissement ou d’un établissement de crédit ou d’une entité d’un pays étranger ou d’une entreprise locale membre d’une plate-forme de négociation ou d’un marché d’un pays étranger lorsque l’entreprise, l’entité ou l’établissement concerné procède en tant qu’intermédiaire se portant partie à des opérations sur un instrument financier, au sens de l’article L. 211-1 du même code :

« a) Soit à la communication simultanée de cours acheteurs et vendeurs fermes et compétitifs de taille comparable, avec pour résultat d’apporter de la liquidité au marché sur une base régulière et continue ;

« b) Soit, dans le cadre de son activité habituelle, à l’exécution des ordres donnés par des clients ou en réponse à des demandes d’achat ou de vente de leur part ;

« c) Soit à la couverture des positions associées à la réalisation des opérations mentionnées aux a et b ; ».

Avec de telles dispositions, je ne suis même pas certain que les opérations menées par les traders fassent l’objet d’une imposition !

Le résultat est connu : la taxe, qui devait dégager 1, 6 milliard d’euros de rendement, dont 60 millions d’euros pour le compte spécial d’aide au développement, stagne aujourd’hui aux alentours de 700 millions d’euros. C’est une évidence, les milieux de la finance ont pris suffisamment d’importance et de poids – trop, à mon sens - pour influer sur certains choix politiques. Il est simplement regrettable que cela se produise.

Nous souhaitons donc, par cet amendement, procéder à une extension d’assiette de la taxe en retirant du champ des exonérations les opérations pour tenue de marché qui ne sont rien d’autre, le plus souvent, que des opérations pour compte propre. Cela musclera quelque peu le rendement de la taxe sur les transactions financières et la rendra, de fait, plus pertinente.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La taxe sur les transactions financières françaises, qui s’applique aux achats d’actions de grandes sociétés françaises, ne concerne pas, comme vous le soulignez, les opérations dites de « tenue de marché ». Dans ces opérations, la banque agit, en fait, en tant qu’intermédiaire dans le but non pas de répondre à la demande d’un client acquéreur, mais d’assurer la liquidité d’une action sur le marché. Dès lors, la transaction n’est pas effectuée dans un but spéculatif, mais seulement afin de garantir à l’entreprise concernée la liquidité et l’attractivité de son action sur les marchés.

L’exemption actuelle paraît donc parfaitement justifiée à la commission des finances au regard des objectifs de la taxe et, surtout, de la nécessité qu’il y a de préserver la capacité de financement des entreprises sur le marché.

C’est la raison pour laquelle je vous demande de retirer cet amendement, monsieur Bocquet.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué

Même avis !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L’amendement n° I-108, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 235 ter ZD bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le III est abrogé ;

2° À la première phrase du IV, le taux : « 0, 01 % » est remplacé par le taux : « 0, 2 % » ;

II. - Au IV de l'article 235 ter ZD ter du même code, le taux : « 0, 01 % » est remplacé par le taux : « 0, 2 % ».

La parole est à M. Éric Bocquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Cet amendement s’attaque à l’une des pratiques les plus discutables des établissements de crédit sur la grande toile des marchés financiers reliés par la cybernétique : la pratique de l’ordre répété à haute fréquence. Des économistes de plus en plus nombreux reconnaissent d’ailleurs aujourd’hui combien elle est contestable. Cette pratique représenterait, nous dit-on, 50 % des transactions financières de par le monde.

Notre législation, depuis la loi de finances rectificative de mars 2012, a introduit une taxe sur les opérations de ce type, à haute fréquence. Cette taxe avait, en quelque sorte, été portée par l’ancienne équipe gouvernementale qui tentait de faire amende honorable après les multiples cadeaux fiscaux qui avaient pu être distribués entre 2007 et 2012. Le rendement de cette taxe ne semble pas spectaculaire et, en six mois, il s’est élevé à 198 millions d’euros, victime d’une assiette plutôt mal conçue et d’un taux particulièrement faible.

Notre amendement porte non pas sur l’assiette, comme pour la taxe sur les transactions financières, mais sur le taux, en vue de rendre cette taxe bien plus opératoire et efficace.

La hausse proposée est certes sérieuse et significative, mais, dans l’état actuel des comptes publics, les marchés financiers peuvent, me semble-t-il, payer leur écot et contribuer ainsi aux efforts demandés à tous les Français.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Cet amendement est en partie satisfait. L’existence de la taxe sur le trading à haute fréquence, même si son taux est très bas, suffit à ne plus rendre profitable ce type de transactions. On peut dès lors penser que cette taxe a atteint son but.

Quant à la taxe sur les CDS souverains à nu, elle n’était que temporaire, puisque ceux-ci sont désormais interdits par le droit européen.

Dans ces conditions, je sollicite, là encore, le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget

Vous proposez de fixer le taux de la taxe sur le trading à haute fréquence et de celle sur les contrats d’échanges sur défaut d’un État à 0, 2 %, au lieu du taux actuellement applicable de 0, 1 %, afin de renforcer la lutte contre la spéculation financière.

Vous souhaitez également supprimer l’exonération de taxe dont bénéficient les activités de tenue de marché, qui donnent lieu, comme vous le savez, à des opérations de haute fréquence.

Le Gouvernement partage totalement la volonté qui est celle des sénateurs de lutter contre la spéculation. Cependant, l’alignement de taux que vous proposez n’est pas, selon nous, nécessaire.

S’agissant des opérations de trading à haute fréquence, compte tenu des très faibles marges qu’elles dégagent et de la concurrence européenne dans ce secteur, le taux de 0, 01 % a spécifiquement été fixé pour dissuader ces opérations, qui n’apportent pas au marché une liquidité stable et utile. Il ne semble donc pas nécessaire de multiplier ce taux par vingt.

En outre, les traders à haute fréquence qui n’ont pas une position nulle en fin de journée sont taxés sur les acquisitions d’actions au taux de 0, 2 %.

Les deux taxes, sur le trading à haute fréquence et sur les acquisitions de titres, se combinent donc pour réduire certaines activités spéculatives.

Par ailleurs, les activités de tenue de marché effectuées dans le cadre d’opérations de haute fréquence ont pour objet d’apporter de la liquidité au marché et de limiter la volatilité des cours. Ces activités sont donc utiles et légitimes, ce qui requiert de les exonérer de la taxe.

Quant aux contrats d’échange sur défaut d’un État, je vous précise que l’Union européenne a interdit depuis le 1er janvier 2012 aux investisseurs d’acheter ces produits lorsqu’ils ne détiennent pas de titres de dette correspondants. Il n’est donc pas davantage nécessaire de modifier le taux de la taxe.

Par ailleurs, la France s’est fortement engagée à ce que les travaux communautaires visant à mettre en œuvre une taxe sur les transactions financières au niveau européen aboutissent rapidement au travers d’une coopération renforcée.

Dans ces conditions, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, je ne pourrai émettre un avis favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je veux juste rappeler à mon collègue Éric Bocquet l’innovation que nous avons introduite à l’occasion du récent examen du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires, innovation à laquelle, d'ailleurs, le Gouvernement s’était montré favorable.

Je ne rentrerai pas dans les détails, mais vous savez que le trading à haute fréquence se caractérise par l’envoi de très nombreux ordres d’achat que l’on annule immédiatement, ce qui sème le trouble. Pour limiter ces abus, nous avons introduit une pénalisation par ordre d’annulation d’opération.

Ce dispositif me semble assez complet pour limiter le trading à haute fréquence.

Dès lors, monsieur Bocquet, je ne suis pas sûr qu’il faille multiplier par vingt le taux de la taxe sur les opérations à haute fréquence.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° I-109, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le IV de l’article 235 ter ZE du code général des impôts, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« ... – Cette taxe n’est pas déductible pour l’établissement de l’impôt sur les sociétés. »

La parole est à M. Éric Bocquet.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

À l’instar d’autres amendements que nous avons présentés par le passé, cet amendement vise à rendre la taxe de risque systémique à laquelle sont assujettis les établissements de crédit non déductible de l’impôt sur les sociétés.

Cette sorte de « contribution solidaire généralisée » existant entre les banques de notre pays doit participer de leur effort citoyen dans la prévention des crises financières que leur comportement suscite souvent.

De plus, depuis 2008, nos compatriotes sont suffisamment attentifs à la situation économique et financière de notre pays pour souscrire à la nécessité de mettre l’ensemble des acteurs concernés à contribution au titre de la prévention et, peut-être, de la résolution des problèmes.

La taxe systémique, c’est l’instrument collectif que les établissements de crédit utiliseront, soit pour venir au secours d’un établissement en difficulté, soit pour résoudre la crise qui les touche tous. La non-déductibilité, pour l’établissement de l’impôt sur les sociétés, de leur apport à la caisse commune n’aura comme équivalent que la pleine efficacité de celle-ci quand elle sera sollicitée.

Mes chers collègues, monsieur le ministre, de nombreux observateurs de l’activité financière et économique s’accordent aujourd'hui pour dire que tous les ingrédients d’une nouvelle crise financière, d’une nouvelle bulle, sont réunis et que nous pourrions plonger, demain, dans une autre récession.

Les État auront-ils alors la capacité de juguler cette nouvelle crise mortifère ? Il est, selon nous, urgent d’agir !

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La taxe de risque systémique vise à limiter la prise de risque par les établissements de crédit.

Des amendements ayant le même objet avaient été votés par le Sénat en 2011 et en 2012. Toutefois, en 2012, le rejet du projet de loi de finances ne nous avait pas permis de défendre cette disposition en commission mixte paritaire.

L’amendement tend à rendre cette taxe non déductible de l’assiette de l’impôt sur les sociétés.

Or il convient de souligner que, depuis l’an passé, plusieurs initiatives ont été prises.

D’une part, la loi de séparation et de régulation des activités bancaires a créé, au sein du fonds de garantie des dépôts, un fonds de résolution, qui devra être alimenté par les banques à hauteur de 10 milliards d’euros en dix ans, soit un milliard d’euros par an.

De plus, aux termes de l’article 23, que nous venons d’adopter, la taxe de risque systémique verra son taux augmenter, ce qui aura pour effet d’en accroître le produit de 50 millions d’euros, à la charge des banques.

Je comprends les intentions des auteurs de cet amendement ; j’avais d’ailleurs donné un avis favorable, l’an passé, à un amendement ayant le même objet. Néanmoins, au regard des évolutions que je viens de signaler et de l’effort important déjà demandé aux banques, dans un contexte d’accroissement des contraintes prudentielles, il serait contre-productif d’alourdir encore la charge pesant sur le secteur bancaire.

Dès lors, la commission des finances sollicite le retrait de cet amendement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

Le Gouvernement sollicite lui aussi le retrait de l’amendement.

Je veux en profiter pour énoncer les préoccupations du Gouvernement en ces matières.

Monsieur Bocquet, nous sommes absolument conscients que le désordre bancaire et financier constaté au milieu des années deux mille est la raison de la crise. La reconstitution de l’histoire conduit aujourd'hui à incriminer les États et à dénoncer les dettes souveraines comme la raison de son déclenchement. Or, j’y insiste, les dettes souveraines sont la conséquence, et non la cause de la crise ! C’est parce que les États ont été dans l’obligation de soutenir l’activité économique après que le système financier se fut déréglé que les dettes souveraines ont augmenté.

La France a joué un rôle majeur dans la mise en place d’un système de supervision bancaire, en particulier depuis le mois de mai 2012. Ce « Mécanisme de surveillance unique » et le « Mécanisme de résolution unique » des crises bancaires permettent la mutualisation des difficultés auxquelles le système financier peut être confronté. Ils constituent deux des trois piliers de l’Union bancaire, ce qui rend le système de supervision efficace.

En outre, la taxe de risque systémique, qui alimente un fonds de résolution, a été instituée et son taux a été relevé. Monsieur Bocquet, ce n’est pas en augmentant le taux de cette taxe, qui risque, par ailleurs, d’obérer la compétitivité de l’industrie bancaire – des activités, des emplois et des savoir-faire sont en jeu – que nous parviendrons à être plus efficaces dans la régulation de la finance, c’est en confortant l’Union bancaire !

C’est pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° I-480, présenté par MM. Delahaye et Maurey, est ainsi libellé :

Après l'article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 41 du 2 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 est abrogé.

La parole est à M. Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Cet amendement vise à rétablir le droit de timbre pour l’accès à l'aide médicale de l'État, l’AME, droit supprimé en juillet 2012.

En effet, le rapporteur spécial des crédits de la mission « Santé » à l’Assemblée nationale a noté une dérive importante du coût de l’AME, qui atteindrait aujourd'hui 800 millions d’euros et s’acheminerait tranquillement vers le milliard d’euros chaque année. Selon lui, il y aurait 50 000 nouveaux bénéficiaires par trimestre. Je pense que ces informations méritent que l’on en débatte.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous apporter des précisions sur ces chiffres ?

Il me semble que le droit de timbre permettait de limiter quelque peu le nombre de bénéficiaires. Si je salue la générosité et l’humanisme qui inspirent l’aide médicale de l’État, je me demande si la France n’est pas le seul pays à s’être doté d’un tel dispositif. Dès lors, je considère que nous devrions regarder ce que font nos voisins en la matière pour, peut-être, tenter de nous aligner sur la pratique européenne.

Monsieur le ministre, maîtrise-t-on à peu près l’évolution du coût de l’aide médicale de l’État sur la durée ou s’agit-il d’une de ces aides qui fonctionnent « à guichet ouvert » ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Mon cher collègue, le droit de timbre n’a pas permis de maîtriser les dépenses d’AME et a même entraîné une aggravation des pathologies constatées chez les étrangers en situation irrégulière.

Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre

L’établissement du droit de timbre a occasionné des retards dans la prise en charge d’un certain nombre de patients relevant de l’AME et, par là même, un renchérissement du coût de cette prise en charge. Il était donc humainement contestable et budgétairement inefficace.

C'est la raison pour laquelle l’avis du Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Mon explication de vote vaudra en même temps présentation de l’amendement n° I-386, que j’ai déposé au nom du groupe UMP et qui porte sur le même sujet, tout en étant légèrement différent.

Pour reprendre les arguments de M. Delahaye, l’AME sera de toute manière réformée. Ne nous voilons pas la face : le système qui a été mis en place est aujourd'hui hors de contrôle. Le dispositif, qui coûtait 75 millions d’euros en 2000, coûte 800 millions d’euros en 2013 et coûtera 1 milliard d’euros en 2014. Rendez-vous compte : en quatorze ans, nous sommes passés de 75 millions d’euros à 1 milliard d’euros !

Dans ces conditions, l’aide médicale de l’État sera inévitablement réformée, probablement dans le cadre global de la réforme du droit d’asile et des textes sur l’immigration que le ministre de l’intérieur doit présenter après les élections municipales.

En tout état de cause, je le répète, le système est aujourd'hui hors de contrôle. En 2014, la dépense aura augmenté de près de 400 millions d’euros en trois ans ! Monsieur le rapporteur général, vous devriez être sensible à cette évolution du coût de l’AME : on a le sentiment que plus personne ne la maîtrise !

Cette évolution s’explique par la réduction considérable – pour ne pas dire la « suppression » – du délai de présence sur le territoire national requis pour bénéficier du dispositif et par celle, en 2012, du droit de timbre, dont le montant était pourtant extrêmement réduit, puisqu’il s’élevait à 30 euros.

Tout citoyen participant forfaitairement à ses remboursements de sécurité sociale, on ne comprend pas bien ce qui justifie ces choix… Peut-être y a-t-il là une forme de démagogie, mais je ne souhaite pas entrer dans ce genre de polémique. En tout cas, les options prises sont excessives !

Aujourd'hui, les gestionnaires du système eux-mêmes avouent qu’ils ne savent pas combien coûtera l’AME dans les cinq ans qui viennent.

De toute façon, le Gouvernement réformera l’AME. De toute façon, il recadrera le dispositif. Il n'y a pas d’autre solution !

En réalité, monsieur le ministre, ni M. Delahaye ni moi-même ne nous faisions d’illusion sur l’avis que vous alliez donner à nos amendements. Nous le savons, la question dépasse le simple cadre budgétaire, et c’est au ministère de l’intérieur qu’il appartient de revoir le dispositif de l’aide médicale de l’État, dans le cadre d’une réforme du droit d’asile ou de l’immigration.

Par conséquent, veuillez considérer nos amendements comme des amendements d’appel, témoignant d’une inquiétude: Comment peut-on laisser dériver le système de l’AME à ce niveau ?

Sans doute le Gouvernement peut-il au moins commencer à nous indiquer ce qui est envisagé pour essayer de maîtriser le dérapage actuel de l’AME.

Le problème n’est pas de savoir si l’on remet en cause le principe même de ce dispositif. Le problème, ce sont ces 75 millions d’euros qui sont devenus un milliard, entre le projet de loi de finances pour 2000 et le projet de loi de finances pour 2014 !

Qui imaginerait que l’on puisse laisser la dépense continuer de dériver ainsi, sans que l’on se dote d’un minimum d’encadrement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur le ministre, je n’attendais pas du tout que, ce soir, vous nous donniez votre accord au rétablissement du droit du timbre.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Au reste, tel n’était pas le but de mon amendement.

Toutefois, j’attendais un peu plus de votre réponse. Les propos que vous tenez et les objectifs que vous avez en tête, objectifs que nous partageons pour partie, me laissaient tout de même espérer que vous nous annonceriez le lancement d’une réflexion, au sein du Gouvernement, pour chercher à maîtriser cette dépense, qui devient démentielle – je vous renvoie aux chiffres qu’a cités Roger Karoutchi.

Nous ne devons plus tarder à assumer nos responsabilités et à nourrir une réflexion collective sur le sujet. À une époque où l’on cherche des économies un peu partout, on ne peut se permettre de laisser dériver une dépense de la sorte, au gré de la demande ! Si l’on procède ainsi, on ne s’en sortira jamais !

Monsieur le ministre, j’attendais, et j’attends toujours, une réponse plus cohérente, traçant des perspectives pour l’avenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Aymeri de Montesquiou, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Monsieur le rapporteur général, vous avez établi une corrélation entre l’existence du droit de timbre et l’augmentation des pathologies des immigrés. Pensez-vous sérieusement que l'on serait passé de 75 millions d’euros à 800 millions d'euros – ce sont les chiffres cités par Roger Karoutchi - pour soigner les pathologies de ces immigrés, si l'on avait rétabli le droit de timbre ?

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Monsieur de Montesquiou, je préfère la manière, plus juste, dont Roger Karoutchi aborde le sujet, soucieux qu’il est de ne pas céder à de mauvais réflexes et de ne pas convoquer dans notre débat de mauvais thèmes…

Je partage votre sentiment : aucune dépense publique ne peut augmenter à ce point sans préoccuper un gouvernement dont l'un des objectifs est de redresser les comptes du pays. Les chiffres qui ont été donnés sont exacts, et nous gardons à l'esprit que le problème doit être traité.

En revanche, je ne pense pas que le rétablissement du droit de timbre soit l'outil adéquat pour limiter les dépenses. Je m'adresse ici à la fois à Aymeri de Montesquiou et à Vincent Delahaye : au lendemain de la suppression de ce droit de timbre, un certain nombre de malades se sont tournés vers les hôpitaux et il a bien fallu leur administrer des soins qui, compte tenu du type et surtout de l'ancienneté des pathologies dont étaient victimes ces personnes, ont coûté plus cher aux finances publiques que si elles s'étaient fait soigner sans attendre.

Comprenez bien le sens de ma réponse : je ne nie pas le problème – la dépense augmente dans des proportions telles qu’aucun ministre responsable ne pourrait l’ignorer. Je dis simplement que, pour traiter le problème comme il se doit, le droit de timbre ne me paraît pas être la solution. Seul un travail articulé entre le ministre de l'intérieur, le ministère des affaires sociales et le ministre du budget permettra d'arrêter un dispositif qui soit humainement irréprochable et budgétairement maîtrisé, et qui s'inscrira dans une politique globale de la France – politique dont le ministre du budget n’a pas la charge.

Je pense que cela justifie effectivement une information du Parlement. Des échéances ont été rappelées ici même : le ministre de l'intérieur présentera certaines réformes au cours des prochains mois. Devant le Sénat, nous pouvons donc prendre l'engagement que, à l'occasion de la présentation de ces réformes, nous rendrons compte à la représentation nationale des dispositions prises pour satisfaire aux objectifs que je viens d'indiquer.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

finances. Tout d’abord, puisque notre collègue Roger Karoutchi a profité de son explication de vote pour présenter l’amendement n° I-386, j’indique que la commission a émis également un avis défavorable.

Ensuite, je précise le coût du dispositif, notre collègue Vincent Delahaye ayant parlé de 800 millions d'euros pour l'année 2013, et même de un milliard d’euros pour 2014. Pour cette année, le coût est précisément évalué à 743 millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Enfin, à Aymeri de Montesquiou, qui a évoqué les questions sanitaires, je précise que le droit de timbre a, certes, entraîné une baisse du nombre de bénéficiaires, de 4 % en 2012, mais sans pour autant réduire les dépenses d'aide médicale de l’État, qui ont même augmenté de 8 % en 2012. En effet, une aggravation des pathologies a été constatée, entraînant une hausse du nombre d’hospitalisations. C'est bien là où je voulais en venir : les cas deviennent plus lourds…

L’expérience montre donc que le durcissement des conditions d’accès à l’AME non seulement va à l’encontre de la vocation sanitaire de ce dispositif, mais encore ne constitue pas non plus une voie efficace de maîtrise de la dépense.

Je confirme donc l’avis défavorable de la commission sur ces deux amendements.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L'amendement n° I-386, présenté par M. Karoutchi et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l’article 23

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l’article L. 251-1 du code de l’action sociale et des familles est ainsi rédigé :

« Tout étranger résidant en France de manière ininterrompue depuis plus de quatre mois, sans remplir la condition de régularité mentionnée à l’article L. 380-1 du code de la sécurité sociale et dont les ressources ne dépassent pas le plafond mentionné à l’article L. 861-1 du même code a droit, pour lui-même et les personnes à sa charge au sens de l’article L. 161-14 et des 1° à 3° de l’article L. 313-3 du même code, à l’aide médicale de l’État, sous réserve, s’il est majeur, de s’être acquitté, à son propre titre et au titre des personnes majeures à sa charge telles que définies ci-dessus, du droit annuel mentionné à l’article 968 E du code général des impôts. »

Cet amendement a été précédemment défendu.

Je le mets aux voix.

L'amendement n'est pas adopté.

I. – Le premier alinéa du I de l’article 244 quater G du code général des impôts est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« I. – Les entreprises imposées d’après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 octies, 44 decies ou 44 terdecies à 44 quindecies peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt au titre de la première année du cycle de formation d’un apprenti dont le contrat a été conclu dans les conditions prévues au titre II du livre II de la sixième partie du code du travail.

« Ce crédit d’impôt est égal au produit du montant de 1 600 € par le nombre moyen annuel d’apprentis n’ayant pas achevé la première année de leur cycle de formation dans l’entreprise et qui préparent un diplôme ou à un titre à finalité professionnelle équivalent au plus à un brevet de technicien supérieur ou un diplôme des instituts universitaires de technologie, enregistré au répertoire national des certifications professionnelles mentionné à l’article L. 335-6 du code de l’éducation.

« Ce montant est porté à 2 200 € dans les cas suivants, quel que soit le diplôme préparé : ».

II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2014.

III. – À titre transitoire et par dérogation au I, pour les crédits d’impôt calculés en 2013, les entreprises mentionnées au I de l’article 244 quater G du code général des impôts peuvent bénéficier :

1° Pour les apprentis préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle équivalent au plus à un brevet de technicien supérieur ou un diplôme des instituts universitaires de technologie, enregistré au répertoire national des certifications professionnelles mentionné à l’article L. 335-6 du code de l’éducation, d’un crédit d’impôt égal à la somme entre, d’une part, le produit du montant de 1 600 € par le nombre moyen annuel d’apprentis en première année de leur cycle de formation et, d’autre part, le produit du montant de 800 € par le nombre moyen annuel d’apprentis en deuxième et troisième année de leur cycle de formation ;

2° Pour les apprentis préparant d’autres diplômes, d’un crédit d’impôt égal au produit de 800 € par le nombre moyen annuel d’apprentis, quelle que soit l’année de leur cycle de formation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Cet article prévoit de recentrer le crédit d’impôt bénéficiant aux employeurs d’apprentis en le limitant à la première année du cycle de formation et pour la préparation de diplômes de niveau inférieur ou égal à bac+2.

Il s’agit donc d’un véritable « article rabot », qui aura pour effet de réduire les aides publiques pour l’apprentissage de 20 % !

Cette mesure est en complète contradiction avec les objectifs affichés. J’avais cru comprendre que la priorité du Président Hollande était la jeunesse et j’avais aussi compris, lorsque Mme Fioraso débattait à l’Assemblée nationale de l’enseignement supérieur, que le Gouvernement allait faire des efforts pour soutenir financièrement l’apprentissage.

En confinant l’apprentissage aux entreprises de moins de dix salariés, cet article apparaît comme le point d’orgue d’une politique consistant à le réduire plutôt qu’à le développer.

La logique qui prévalait jusqu’alors était de faire en sorte que l’apprentissage, occasion incontestable de passage à l’emploi, gagne également, au-delà du seul monde de l’artisanat, les entreprises les plus importantes, offrant un vivier de formations gigantesque !

Le président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises ne s’y est pas trompé. Selon lui, il s'agit d’un mauvais coup porté aux entreprises s’engageant en faveur de l’apprentissage, et l'on n’agirait pas autrement si l'on cherchait à les décourager…

Nous ne pouvons donc que nous opposer vigoureusement à cette mesure, et voter contre cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° I-461 est présenté par MM. Zocchetto, Maurey et Merceron, Mme Férat, M. Détraigne, Mme Létard, MM. Dubois, Guerriau et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.

L'amendement n° I-492 est présenté par MM. Savary, Bécot, Bizet, Bordier et Cardoux, Mme Cayeux, MM. Cointat et Cornu, Mmes Debré et Deroche, MM. Doligé, B. Fournier et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Huré, Husson, Laménie et Lefèvre, Mmes Masson-Maret et Mélot, MM. Milon, Pillet et Pointereau, Mmes Primas et Procaccia et MM. Reichardt et Retailleau.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour défendre l’amendement n° I-461.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L'article 23 bis n’est pas sans présenter un caractère paradoxal. Introduit à l’Assemblée nationale par voie d’amendement, donc sans aucune étude d’impact, cet article réduit de 50 % le crédit d’impôt pour l’apprentissage en limitant son bénéfice, pour les entreprises qui prennent en charge des apprentis, à la première année de formation.

Si nous avions mauvais esprit, nous dirions que l'on pénalise les apprentis pour financer les emplois d’avenir, c’est-à-dire que l’on sanctionne le secteur productif au profit du secteur associatif.

Nous ne pouvons donc soutenir cette mesure – surtout ici, au Sénat, où se tient chaque année une journée dédiée aux meilleurs jeunes apprentis de France. C’est la transmission mêmes des savoir-faire et de métiers entiers qui est en jeu.

Une telle disposition est parfaitement inopportune en ce qu’elle fragilisera le statut des apprentis et la situation financière des entreprises qui les forment. Du reste, cet article suscite d’ores et déjà de vives réactions des acteurs économiques concernés.

Aussi, afin de procurer un soutien sans faille à la cause du renforcement du statut des apprentis, le présent amendement tend à supprimer cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. René-Paul Savary, pour défendre l’amendement n° I-492.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

L’objet de cet amendement est identique : supprimer l'article 23 bis, qui restreint le champ d’application du crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage.

Son montant actuel – 1 600 euros par année d’apprentissage – serait maintenu, mais, à compter du 1er janvier 2014, son bénéfice serait limité à la première année du cycle de formation des apprentis, et à ceux qui préparent un diplôme d’un niveau inférieur ou égal à bac+2.

En l’état, la modification envisagée s’appliquerait à tout employeur d’apprentis, sans distinction selon l’activité – qu’elle soit, par exemple, artisanale ou commerciale – ou selon l’effectif.

En modifiant le crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage, le Gouvernement envoie un signal opposé à la volonté, inscrite dans la décision n° 23 du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, d'avoir 500 000 apprentis de plus en 2017.

Il s’agit donc d’une très mauvaise nouvelle pour l’artisanat et le commerce, d’autant plus que les entrées en contrat d’apprentissage ont reculé de 10 % sur les neuf premiers mois de 2013…

Par ailleurs, il faut tout de même rappeler qu’un apprenti représente un coût pour l’entreprise. Aussi, si elle n'est pas aidée dans cette démarche - et pendant toute la durée de l'apprentissage, si l'on veut que les apprentis aillent jusqu'au bout -, une entreprise, notamment artisanale, renoncera à former des apprentis, du moins dans ces conditions et compte tenu d'un contexte économique par ailleurs incertain.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, nous souhaitons supprimer cet article.

J’avoue que M. le ministre chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation m’avait, au fil de nos échanges, convaincu de l'existence d'une volonté de faire avancer les choses dans les domaines donnant lieu à discussion. C'est ainsi que j'ai retiré des amendements, par exemple, sur l'écotaxe ou bien, pour la fiscalité écologique, sur les sacs en plastique, au bénéfice de ces lois nouvelles et de ces groupes de travail que l’on nous a promis.

Alors, ici, monsieur le ministre, à votre tour : puisqu'un projet de loi sur la formation nous sera présenté dans quelques mois, il est important, en attendant, de ne pas toucher à l'apprentissage. Nous vous demandons donc de retirer cette proposition.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission des finances, qui en comprend le principe et les motifs, est cependant défavorable à ces deux amendements, ne serait-ce que parce qu’ils seraient coûteux, et vous savez, mes chers collègues, combien cela inquiète toujours la commission des finances…

Surtout, ils remettraient en cause le difficile équilibre auquel est parvenu le Gouvernement pour financer l'apprentissage. Rappelons-le, dans le contexte tendu qui caractérise les finances publiques, le Gouvernement a procédé à une remise à plat des ressources des régions en matière d’apprentissage, et le présent article n’est qu’un élément d’un dispositif d’ensemble.

On sait que, pour l’année 2014, le financement des primes d’apprentissage reposera sur une affectation du produit de la TICPE – la taxe intérieure de consommation de produits énergétiques – à hauteur de 117 millions d’euros, sur le fondement de l’article 24 quater que nous examinerons, ce montant étant gagé par l’économie dégagée sur le crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage résultant des dispositions du présent article 23 bis . Ce financement reposera aussi sur une ressource de 50 millions d’euros provenant du fonds de roulement du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ». Enfin, il reposera sur un versement de 264 millions d’euros provenant du budget du programme 103 de la mission « Travail et emploi », par redéploiement de crédits.

Tout cela a été évoqué au sein de la commission des finances.

Augmenter la dépense fiscale concernant le crédit d’impôt pour l’apprentissage reviendrait à remettre en cause cette architecture de financement et donc à augmenter soit le montant de l’affectation de recettes de TICPE, soit le montant de la dépense budgétaire par rapport au dispositif proposé par le Gouvernement.

Dès lors, il nous a semblé préférable de nous investir dans la discussion à venir du collectif budgétaire où doivent se trouver des éléments de réflexion sur l'évolution de l'apprentissage – M. le ministre nous en précisera certainement les contours.

En attendant, nous sommes défavorables à ces deux amendements identiques.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Nous nous trouvons ici au cœur des questions qui animent nos débats depuis le début de l'examen de ce projet de loi de finances.

Tout d’abord, comment, dans un contexte où l'on doit redresser nos finances publiques, procéder à des économies qui soient pertinentes ?

Exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Avec vous, ce n’est jamais là, et ce n’est jamais le bon moment ! Depuis le début du débat dans cet hémicycle, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons engagé 13 milliards d'euros de dépenses supplémentaires…

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Je constate que les grands théoriciens de la diminution de la dépense publique sont les mêmes qui, en quelques amendements, ont réussi à déclencher une augmentation de cette dépense qui, si elle devait être confirmée au terme du débat parlementaire, conduirait à un dérapage massif de nos déficits !

Si nous voulons maîtriser la dépense, c’est partout que nous devons faire en sorte qu’un euro dépensé soit un euro utile. Qu’avons-nous fait en ce sens ? Je veux rappeler quelle a été notre philosophie, afin que nous partagions tous les termes du débat.

Premièrement, nous voulons clarifier les compétences en matière d’apprentissage. Nous avons décidé de faire en sorte que le rôle des régions, qui sont au plus près des acteurs locaux, soit confirmé. Dans le cadre de la réforme de la fiscalité, nous avons reçu avec le Premier ministre l’ensemble des partenaires sociaux qui ont tous, y compris les organisations patronales, insisté sur le fait que la gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences serait d’autant plus efficace qu’elle serait déclinée territorialement, au plus près des entreprises.

Donc, le fait que les régions aient une compétence reconnue en la matière va dans le sens de la modernisation et de l’efficacité du dispositif.

Donner des compétences aux régions en matière de formation professionnelle et d’apprentissage, de gestion prévisionnelle des effectifs et des compétences sans leur donner les moyens d’assumer ces responsabilités eût été de notre part à la fois irresponsable et déloyal, au moment où nous signons avec elles un pacte de confiance.

Nous avons donc décidé de transférer aux régions des frais de gestion adossés à des impôts perçus par les collectivités territoriales dont le dynamisme, de l’ordre de 4 % à 6 % par an, leur garantit qu’elles seront en situation – les présidents de région reconnaissent d'ailleurs qu’ils ont durement négocié – d’assumer les responsabilités nouvelles qui leur ont été données.

C’est donc le premier point sur lequel je voulais insister pour rassurer les sénateurs sur la possibilité d’aller au bout de la logique qui préside à notre action : nous voulons clarifier et nous donnons les moyens aux régions de le faire.

Deuxièmement, nous souhaitons que ce que nous faisons en matière d’apprentissage soit mieux piloté et davantage ciblé. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de concentrer le dispositif sur les entreprises qui en ont le plus besoin, non pas celles qui ont les marges les plus importantes, mais celles qui ont parfois le plus besoin de recourir aux apprentis et, en même temps, en raison de leur taille, peuvent consacrer à leur formation une attention et un temps significatifs. De ce point de vue, ce que nous maintenons pour les entreprises de moins de dix salariés est perçu par le secteur de l’artisanat comme très important. Par ailleurs, le fait de modifier le dispositif du crédit d’impôt permet d’avoir la gestion la plus fine, la plus près du terrain possible.

Bref, nous clarifions et, pour une gestion optimale des deniers publics, nous procédons à des modifications qui garantissent à la fois la bonne gestion budgétaire et l’efficacité du dispositif.

Troisièmement, à vous qui me demandez si tout cela nous garantit d’atteindre le but, je réponds que nous devons au Sénat comme à l’Assemblée nationale des retours réguliers sur la manière dont la réforme se met en place. Si nous constatons ensemble, soucieux que nous sommes du développement d’une politique ambitieuse de l’apprentissage, des décalages entre les objectifs que nous nous assignons et les résultats que nous obtenons, nous ajusterons et ferons évoluer le dispositif.

Comprenez bien l’esprit dans lequel nous agissons, en toute transparence et en pleine responsabilité, dans un contexte où il faut réaliser des économies en dépenses, mais sans sacrifier une priorité réaffirmée par le Président de la République, à savoir le développement de l’apprentissage, qui est une chance pour nos jeunes et pour nos entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Monsieur le ministre, l’État a transféré l’apprentissage aux régions voilà déjà une bonne dizaine d’années et cela fait très longtemps que les régions essaient de tenir leurs propres objectifs en termes d’effectifs d’apprentis. La principale d’entre elles, la région d’Île-de-France, n’y parvient pas. Plus exactement, nous avons augmenté le nombre d’apprentis, mais avec une extrême difficulté, le paysage économique et entrepreneurial, en Île-de-France comme ailleurs, n’étant guère positif.

Il faut opérer une grande réforme de l’apprentissage, nous dit-on, non seulement en termes de financement mais également en termes d’organisation, de structure, voire de répartition géographique des centres de formation d’apprentis, les CFA, et de filières. Or vous n’abordez pour le moment que le seul aspect financier de la réforme, à savoir le « qui paie quoi » Des frais de gestion sont transférés aux régions. Parallèlement, dans cet équilibre difficile à trouver, vous essayez de regagner un peu d’argent sur le crédit d’impôt aux entreprises.

Bref, je ne suis pas convaincu que le transfert d’une fraction des frais de gestion aux régions leur permette pour autant de multiplier le nombre d’apprentis. Si vous souhaitez atteindre l’objectif de 500 000 apprentis, à l’instar de l’Allemagne, où l’intégration des jeunes dans le premier emploi réussit, car ils peuvent être apprentis et ne sont pas tous poussés à suivre un enseignement supérieur auquel ils ne sont pas forcément adaptés, ne brouillez pas le signal ! Vous décidez d’aider les régions en matière d’apprentissage et, dans le même temps, vous réduisez le crédit d’impôt bénéficiant aux entreprises employant des apprentis.

Je sais que le contexte budgétaire est difficile, mais, si vous voulez faire de la jeunesse et de l’apprentissage une priorité, adressez un même signal aux régions et aux entreprises. Si vous donnez plus aux régions mais moins aux entreprises, quand les régions demanderont aux entreprises de prendre davantage d’apprentis, la réponse sera simple : « Pouce ! Nous ne marchons pas ! Il est plus lourd de former des apprentis et nous avons globalement moins de crédit d’impôt à ce titre ? Nous en recruterons moins ! » Alors, les régions auront peut-être un peu plus de moyens – et encore, car, parallèlement, elles recevront moins de dotations -, mais, confrontées à des entreprises plus réticentes, elles seront moins en mesure de faire vivre l’apprentissage.

Nous verrons, année après année, s’il convient de changer le système, dites-vous, notamment si, d’un seul coup d’un seul, le nombre des apprentis devait exploser. Cependant, je crains que, compte tenu de la dualité des signaux, l’un positif adressé aux régions, sur les frais de gestion, l’autre négatif en direction des entreprises, sur le crédit d’impôt, nous n’arrivions pas du tout à améliorer la situation de l’apprentissage dans notre pays.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Ce débat est très important ; j’entends les remarques pertinentes formulées par Roger Karoutchi, qui ont également présidé à notre propre réflexion.

Vous dites, monsieur le sénateur, que la priorité accordée à la jeunesse doit se matérialiser par des actes : mais le présent projet de loi de finances n’en manque pas ! Concernant l’école, nous procédons à des recrutements et allouons des moyens budgétaires à la réforme des rythmes scolaires ; nous créons un dispositif de 55 000 bourses destiné aux jeunes qui veulent accéder à l’université, cela n’est pas rien ; nous avons en outre décidé d’augmenter les effectifs d’enseignants à l’université afin d’améliorer les conditions d’accueil des jeunes. Notre action en faveur du logement est également très ciblée sur les jeunes. N’oublions pas le contrat de service civique.

Par conséquent, le Gouvernement est mobilisé en faveur de la jeunesse. L’ensemble de ces mesures se chiffre en milliards d’euros et témoigne de la volonté du Gouvernement, ainsi que de l’adéquation entre le programme défini par le Président de la République et les décisions budgétaires.

Pour ce qui concerne l’apprentissage, ce que fait un gouvernement pour renforcer le développement des entreprises constitue un tout : on ne peut pas considérer séparément les mesures en faveur de l’apprentissage, les dispositions en faveur de la compétitivité et celles qui sont en faveur de l’investissement.

L’allègement net des charges et de la fiscalité sur les entreprises auquel nous procédons représente 12 milliards d’euros cette année. Nous l’oublions dans le vacarme de la polémique parlementaire, mais il y a la réalité des chiffres.

La réalité des chiffres, monsieur Karoutchi, c’est que nous réalisons cette année 10 milliards d’euros d’allègement net de charges sur les entreprises au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, que l’an dernier mon prédécesseur avait prélevé 4, 5 milliards d’euros sur les entreprises et que, cette année, j’ai proposé au Président de la République et au Premier ministre que nous prélevions 2 milliards d’euros de moins. Il ne s’agit pas de 2 milliards d’euros de moins d’augmentation d’impôt, mais de 2 milliards d’euros de moins de prélèvements, ce qui signifie qu’entre l’allègement net de charges que constitue le CICE et la diminution de la pression fiscale sur les entreprises, le total s’élève à 12 milliards d’euros.

Nous avons mis en place un dispositif pour les jeunes entreprises innovantes, une réforme des plus-values de cession de valeurs mobilières, une modification de l’amortissement des entreprises qui investissent dans la robotisation et dans l’innovation.

Nous sommes par ailleurs en train d’engager une réforme de la formation professionnelle. Le conseil des ministres aura à connaître, en janvier 2014, d’une grande réforme de l’apprentissage.

Toutes ces mesures sont donc à prendre en compte pour juger de la réalité de notre action. Nous avons tous ces sujets à l’esprit. Ils constituent un tout, une priorité. Je suis convaincu que le pilotage plus fin de la dépense en faveur de l’apprentissage, mieux ciblé sur les entreprises qui en ont le plus besoin, permettra d’atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés, au bénéfice du secteur économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

J’avais cru comprendre qu’une vaste réflexion sur la formation professionnelle et l’apprentissage, puis une grande réforme seraient entreprises. Ces sujets méritent que l’on se mette autour d’une table pour remettre les choses à plat et mener une réflexion approfondie. Or le dispositif proposé par l’article 23 bis, adopté à l’Assemblée nationale par voie d’amendement, ne semble pas faire partie d’un plan d’ensemble.

Je suis par conséquent très gêné. Les explications du ministre paraissent plutôt convaincantes, mais l’absence d’étude d’impact donne l’impression d’une mesure particulière, prise à la va-vite, en raison de son caractère financièrement intéressant : un crédit d’impôt en moins au bénéfice des entreprises. Nous n’avons pas l’impression que la disposition s’insère dans une stratégie globale en matière de formation et d’apprentissage.

C’est la raison pour laquelle le groupe UDI-UC a proposé la suppression de l’article 23 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le ministre, vous avez cité l’ensemble des mesures que vous prenez en faveur de la jeunesse, des mesures auxquelles je peux souscrire. Chaque collectivité essaye d'ailleurs d’apporter sa pierre à l’édifice dans ce domaine. J’en veux pour preuve les contrats d’apprentissage portés par la région et soutenus par les départements pour les bénéficiaires du revenu de solidarité active, le RSA. Nous avons des actions complémentaires à mener avec la région.

Permettez-nous simplement, sans esprit polémique, de vous alerter, monsieur le ministre. Cette mesure de portée financière de court terme peut avoir des répercussions de long terme. Elle interviendra en même temps que l’augmentation de la TVA pour un certain nombre d’entreprises. Si une incitation à l’apprentissage n’est pas prévue parallèlement, il est sûr que nos jeunes ne trouveront pas de débouchés à travers ce cursus.

C'est la raison pour laquelle nous avons présenté cet amendement, dans l’attente de la réforme de la formation professionnelle.

Nous reviendrons sur les fonds alloués aux régions à l’occasion de l’examen de l’article 25, avec la suppression de la dotation générale de décentralisation liée à la formation professionnelle en contrepartie d’un impôt dit « plus dynamique ». Certes, je veux bien croire qu’il y ait un certain dynamisme, que vous avez estimé de 4 % à 6 %, sur les frais de gestion perçus par l’État que vous transmettrez aux régions. En revanche, je crains que la fraction supplémentaire de taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques n’ait pas le même dynamisme et n’aille en s’amenuisant.

Par conséquent, je ne suis pas convaincu qu’à travers ce nouveau dispositif les régions vont bénéficier des moyens dont elles auraient besoin pour mener cette politique de formation. Les régions sont, comme les départements, prises dans un étau budgétaire qui ne leur permet pas d’investir à hauteur de leurs ambitions.

C’est pourquoi il est plus prudent de supprimer la mesure, dépourvue d’étude d’impact, adoptée par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Compte tenu de la rapidité avec laquelle évoluent nos débats, j’indique d’ores et déjà que je vais retirer mon amendement n° I-527, ce qui nous permettra de gagner encore un peu plus de temps !

Je souscris à beaucoup des constats présentés par les différents intervenants, qu’il s’agisse de la philosophie de l’apprentissage ou des difficultés que rencontre aujourd’hui cette filière.

Après avoir atteint son point culminant, l’apprentissage est en baisse dans notre pays depuis deux ans : d’abord, du fait de la crise, ensuite en raison du baccalauréat professionnel en trois ans qui a fait quelque peu reculer les employeurs d’apprentis, et enfin parce que certaines mesures prises par le gouvernement précédent comme par le gouvernement actuel ont visé à diminuer les aides accordées à ceux qui emploient des apprentis.

Je vous ai écouté avec attention, monsieur le ministre, et si je m’apprête à retirer mon amendement, c’est parce que je souscris comme vous à la logique de diminution des dépenses, à laquelle nous sommes tous soumis aujourd’hui et qu’il nous faut bien accepter.

Toutefois, je voudrais rétablir quelques vérités. Vous avez dit vouloir plus de clarification et de simplification dans la gouvernance de l’apprentissage par les régions, et nous nous en félicitons tous : les régions ont saisi à bras-le-corps les questions relatives aux centres de formation des apprentis, aux employeurs d’apprentis et à l’aide aux apprentis, sous toutes ses formes.

Mais, concernant les frais de gestion, dont vous avez dit qu’ils seraient à l’avenir une recette plus dynamique que la dotation, je vous fais observer qu’il ne s’agit pas pour l’instant d’une mesure nouvelle : c’est la simple compensation de la disparition d’une partie de la dotation.

Le soutien à l’apprentissage peut prendre différentes formes : à côté des dotations versées par l’État aux régions, il faut compter le soutien de ces mêmes régions aux employeurs d’apprentis ainsi que le mécanisme du crédit d’impôt.

Dans mon esprit, avec cet amendement n° I-527, je proposais une mesure de justice. Je l’avais déposé en pensant à ceux qui ont choisi la voie de l’alternance, laquelle est aussi une voie de l’excellence, pour tenter de réussir

M. Roger Karoutchi opine.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Certes, monsieur le ministre, nous pourrons revoir la question plus tard, mais je rejoins ici notre collègue Vincent Delahaye : la suppression du crédit d’impôt pour les apprentis au-delà de bac+2 a été introduite à l’Assemblée nationale par voie d’amendement et n’appartenait donc pas à l’architecture originelle du texte du Gouvernement. Dès lors, il me semblait possible d’intervenir dès maintenant.

Sous le bénéfice de ces explications, monsieur le président, je retire par avance l’amendement n° I-527.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de André Reichardt

Je voudrais à mon tour plaider pour la suppression de cet article.

Permettez-moi de faire état de mon expérience professionnelle.

J’ai été directeur général de la chambre des métiers d’Alsace pendant plus de vingt ans et j’ai pu constater, à cette occasion, combien le coût de l’apprentissage était un élément important dans le recrutement des apprentis, tout particulièrement pour les petites entreprises, notamment celles de moins de dix salariés. En Alsace, nous avons cette chance d’avoir des entreprises artisanales de plus de dix employés, droit local oblige. Or le fait de s’en prendre plus particulièrement à telle ou telle catégorie d’entreprise est un vrai souci.

Pour les plus petites d’entre elles, la diminution du crédit d’impôt en faveur de l’apprentissage, désormais réservé aux seuls apprentis d’un niveau inférieur ou égal à bac +2, conformément au dispositif introduit par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, va s’ajouter à la modification de l’indemnité compensatrice. Cela, à n’en pas douter, va poser à l’avenir un grave problème pour le recrutement des apprentis dans ces petites structures.

Je voudrais vraiment vous faire partager mon expérience et vous faire comprendre à quel point les entreprises dont nous parlons ont besoin de ces aides pour recruter dans le temps. Une entreprise, quelle que soit sa taille, a besoin de visibilité pour recruter, qu’il s’agisse d’un contrat de travail traditionnel ou d’un contrat d’apprentissage. Ne prendre en compte qu’une seule année dans le cadre d’un contrat qui s’étale sur deux, voire trois ans, va à l’encontre de cette visibilité.

Comme les précédents intervenants, je crois que la suppression de cet article s’impose, surtout si, comme le Gouvernement semble le dire, nous voulons maintenir, et même augmenter le nombre de contrats d’apprentissage.

Il ne s’agit pas ici de faire de la politique politicienne, mais de savoir, dans les circonstances économiques que l’on connaît, où placer les priorités. J’ai le sentiment que cette proposition, telle qu’elle ressort des travaux de l’Assemblée nationale, est vraiment néfaste et contraire à l’engagement que nous partageons tous ici en faveur de l’emploi des jeunes.

Je rappellerai une fois de plus que 75 à 80 % des apprentis qui ont réussi leur examen trouvent un emploi dans l’entreprise qui les a formés. Nous devons garder cette statistique à l’esprit.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

M. le président. Je vais mettre aux voix par scrutin public les amendements identiques n° I-461 et I-492, à la demande du groupe socialiste.

Exclamations sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur le président, nous assistons à une multiplication des scrutins publics qui retardent nos débats. Je remercie notre collègue François Patriat d’avoir annoncé qu’il allait retirer son amendement pour nous permettre de gagner un peu de temps, mas les scrutins publics nous en font perdre !

Je tiens à rappeler que le scrutin public ne remplace pas la présence en séance. Si nous étions plus nombreux dans l’hémicycle, il y aurait moins de scrutins publics !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je vous donne acte de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Je mets aux voix les amendements identiques de suppression n° I-461 et I-492, sur lesquels la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable.

Je rappelle que j’ai été saisi d’une demande de scrutin public de la part du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Voici le résultat du scrutin n° 85 :

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° I-527, présenté par M. Patriat, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après les mots :

formation dans l'entreprise

supprimer la fin de cet alinéa.

Cet amendement a été précédemment retiré.

Je mets aux voix l'article 23 bis.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Compte tenu de la rapidité d’avancement de nos travaux, la commission des finances demande la réserve, jusqu’à la reprise du soir, de l’amendement n° I-276, déposé par notre collègue Philippe Marini et portant article additionnel après l’article 24 ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Je précise, pour la clarté de nos débats, que si, à la reprise, nous en étions parvenus à l’examen d’amendements au sein d’un article, l’amendement n° I-276 serait examiné à l’issue de la discussion dudit article.

Je rappelle que, aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, lorsqu’elle est demandée par la commission saisie au fond, la réserve est de droit, sauf opposition du Gouvernement.

Quel est donc l’avis du Gouvernement sur cette demande de réserve formulée par la commission des finances ?

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Favorable, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

L’amendement n° I-445, présenté par M. Placé, Mme Ango Ela et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la première phrase du premier alinéa du I de l’article 235 ter ZD du code général des impôts, les mots : «, que son acquisition donne lieu à un transfert de propriété, au sens de l’article L. 211-17 du même code, » sont supprimés.

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er septembre 2014.

La parole est à Mme Kalliopi Ango Ela.

Debut de section - PermalienPhoto de Kalliopi Ango Ela

Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai conjointement les amendements n° I-445 et I-446.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

J’appelle donc également en discussion l’amendement n° I-446, présenté par Mme Ango Ela, M. Placé et les membres du groupe écologiste, et ainsi libellé :

Après l’article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Au V de l’article 235 ter ZD du code général des impôts, le taux : « 0, 2 % » est remplacé par le taux : « 0, 4 % ».

II. – Au dernier alinéa du I de l’article 22 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, le taux : « 10 % » est remplacé par le taux « 50 % ».

III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Kalliopi Ango Ela

La taxe sur les transactions financières, dite « taxe Tobin » lorsqu’elle n’était encore promue que par une poignée d’économistes et de militants décidés, est aujourd’hui bien connue et discutée dans les plus hautes instances économiques et politiques. Elle consiste à appliquer une taxe de taux assez faible aux achats de titres.

Son intérêt est double. D’une part, par son assiette large, elle peut présenter un rendement intéressant. D’autre part, si son taux est suffisamment élevé, elle peut décourager les échanges par trop spéculatifs, qui dévoient la finance et menacent l’économie dite « réelle ».

Alors que la taxe britannique, dont le taux est aujourd’hui de 0, 5 %, rapporte de 3 milliards d’euros à 4 milliards d’euros par an, la taxe française, dont le taux est de 0, 2 %, ne rapporte que 600 millions d’euros.

L’amendement n° I-446 tend donc à augmenter le taux de 0, 2 point, pour le porter à 0, 4 %. Dans le même temps, il vise à affecter l’essentiel du surplus de recettes attendu à la solidarité internationale et à l’aide au développement, ainsi que s’y était engagé le Président de la République.

Quant à l’amendement n° I-445, il reprend le dispositif de l’amendement adopté par la commission des finances de l’Assemblée nationale lors de l’examen du présent projet de loi de finances, à l’initiative de son rapporteur général. Il consiste à assujettir à la taxe les transactions les plus rapides, donc les plus spéculatives, qui en sont aujourd’hui exonérées.

Alors que certaines déclarations ont pu, un temps, jeter le trouble, il nous semble important que la France réaffirme sans ambiguïté sa volonté d’avancer sur ce sujet, ce dont témoignerait l’adoption de l’un ou l’autre de ces amendements.

Nous n’oublions pas que, lorsque nous avions proposé, il y a quelques mois de cela, de mettre en place un reporting fiscal des banques pays par pays, il nous avait été objecté que nous mettrions ce secteur en grande difficulté. Peu après, nous apprenions que l’adoption de notre amendement volontariste avait fait bouger les lignes en Europe.

Nous considérons donc qu’il est de notre responsabilité de développer cet outil qu’est la taxe sur les transactions financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

L’amendement n° I-445, s’il était adopté, serait difficile à mettre en œuvre en pratique et conduirait à réduire considérablement la liquidité des actions échangées sur la place de Paris. Après avoir pris connaissance des difficultés qu’entraînerait ce dispositif, le rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, Christian Eckert, qui avait déposé l’amendement, l’a finalement retiré. C’est le même argument que j’utiliserai pour vous proposer de retirer cet amendement, ma chère collègue.

La commission demande également le retrait de l’amendement n° I-446, car le taux proposé pour la taxe sur les transactions financières nuirait à son assiette en réduisant le nombre de transactions, et l’affectation non plus de 10 %, mais de 50 % du produit au Fonds de solidarité pour le développement, ou FSD, grèverait le budget de l’État.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

L’adoption de ces amendements irait à l’encontre des objectifs que nous nous assignons : la taxation des transactions financières au sein de l’Union européenne.

Si nous exprimons notre réserve sur ces amendements, ce n’est pas parce que nous sommes timorés, mais c’est bien au contraire parce que nous sommes déterminés à faire aboutir la taxe sur les transactions financières. Je profite de notre débat pour le souligner, car, après des discussions sur ce thème à l’Assemblée nationale, des commentaires ont pu donner le sentiment que le Gouvernement se situait en retrait sur le sujet.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement s’investit pour la mise en place d’une taxe sur les transactions financières, engageant dans un même mouvement, et sous la forme d’une coopération renforcée, onze États de l’Union européenne. Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités au mois de mai 2012, on nous expliquait qu’il était impossible d’obtenir de l’Union européenne qu’elle autorise une démarche conjointe des pays qui la composent pour atteindre ce but. Le Président de la République s’est pourtant engagé sur cette voie, et Pierre Moscovici a défendu ce projet au sein des différents conseils des ministres compétents. C’est ainsi que nous avons réussi à convaincre onze États de signer une lettre par laquelle ils s’engageaient, avec nous, dans une coopération renforcée.

Imaginez que nous fassions aujourd’hui la preuve que nous menons dans notre propre pays des actions qui pourraient apparaître comme isolées ou orthogonales par rapport à nos efforts au sein de l’Union européenne, alors que nous sommes à l’avant-garde des négociations avec la Commission européenne pour la mise en œuvre de cette taxe : nous perdrions toute légitimité, toute crédibilité, lorsque nous dirions vouloir avancer avec les autres États intéressés, d’autant que ces derniers défendent souvent leur propre intérêt, lorsqu’il s’agit de définir les modalités de mise en œuvre de cette taxe.

Il y a une seconde raison à notre réserve. Nous ne pouvons pas mettre en place des dispositifs qui finiraient par affaiblir la seule place financière de Paris, au bénéfice de toutes les autres. M. le rapporteur général indiquait tout à l’heure que l’adoption de ces amendements pourrait poser un problème de liquidités sur la place financière de Paris, notamment pour les transactions en actions. Il faut savoir que ces dernières constituent 40 % du total des transactions parisiennes.

Avec l’instauration de ce type de dispositif sur la seule place financière de Paris, nous serions confrontés à un risque de transfert considérable d’activité vers d’autres places. Ce faisant, nous n’aurions en rien régulé les activités financières ni lutté contre la spéculation ; nous aurions simplement encouragé la spéculation sur d’autres places financières, heureuses bénéficiaires de dispositions que nous aurions prises seuls, à notre seul et unique détriment !

Pour ces deux raisons, parce que nous sommes déterminés à faire en sorte que la régulation concerne toutes les places financières, qu’elle soit mise en œuvre au sein de l’Union européenne, qu’elle soit efficace, et qu’elle se fasse non pas à notre détriment, mais au bénéfice de la remise en ordre de la finance dans l’Union européenne tout entière, le Gouvernement demande aux auteurs de ces deux amendements de bien vouloir les retirer. À défaut, il émettrait un avis défavorable.

M. Jean-Pierre Raffarin remplace M. Jean-Claude Carle au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Madame Kalliopi Ango Ela, les amendements n° I-445 et I-446 sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Kalliopi Ango Ela

Je retire l’amendement n° I-445, mais maintiens l’amendement n° I-446, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’amendement n°I-445 est retiré.

La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote sur l’amendement n° I-446.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Bocquet

Je m’apprêtais à indiquer que le groupe CRC soutiendrait les deux amendements. Puisqu’il n’en reste qu’un, nous le soutiendrons deux fois plus !

Cet amendement, en effet, s’inscrit pleinement dans la philosophie que nous portons dans ce débat.

Prétendre que le rapporteur général de l’Assemblée nationale n’avait pas vu les conséquences négatives qu’emporterait l’adoption de son amendement au moment de son dépôt nous laisse quelque peu sceptiques. À moins qu’il ne faille remettre en cause sa compétence, dont, pourtant, je ne doute pas un instant !

En tout état de cause, cela pose question, et je regrette que l’amendement adopté en commission des finances à l’Assemblée nationale ait ensuite été retiré, tout comme je regrette que le Gouvernement et la commission des finances du Sénat aient demandé aux auteurs de l’amendement n° I-445 de le retirer.

La taxe sur les transactions financières fait l’objet d’hésitations permanentes, récurrentes. Seuls onze États sur les vingt-huit que compte l’Union européenne se disent intéressés par sa mise en place. M. Moscovici, rejoignant en cela les propos tenus à l’instant par M. le ministre, indiquait récemment qu’il fallait avancer avec prudence, afin de ne pas désavantager la place financière de Paris. À ce rythme, je le crains, sa mise en place ne se fera pas suffisamment vite !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Ne prenez pas mal ce que je vais dire, monsieur Bocquet, mais, puisque notre discussion est sincère, je me permettrai d’être aussi franc que vous !

Je ne peux pas préférer les postures à l’efficacité. J’ai eu l’occasion de le souligner à propos de l’optimisation fiscale, certaines postures sont extrêmement avantageuses sur le plan médiatique - elles donnent lieu à de très beaux articles, où l’on vante la détermination de ceux qui les adoptent -, mais, en réalité, elles n’ont aucune efficacité et n’aboutissent à rien.

Vous ne pouvez pas dire que nous sommes pusillanimes, monsieur le sénateur. C’est nous qui avons défendu la taxe sur les transactions financières au plan européen ! Avec le ministre de l’économie et des finances, et alors que j’étais ministre chargé des affaires européennes, nous avons fait la tournée des capitales européennes, pour aller recueillir la signature des États encore réticents.

Par ailleurs, je le rappelle, à la fin de son mandat – au moment de la campagne présidentielle de 2012 –, le précédent Président de la République s’était empressé de remettre en place un droit de timbre, déjà appelé « taxe sur les transactions financières », qu’il avait pourtant supprimé au début de son mandat. Il considérait, en effet, qu’il était impossible de mettre en œuvre une telle taxe au sein de l’Union européenne, fût-ce sous la forme d’une coopération renforcée.

Qui donc a mené ce combat ? N’en déplaise aux commentateurs, c’est nous, et non le précédent gouvernement. Et nous avons réussi à obtenir que cette taxe soit mise en œuvre au titre d’une coopération renforcée, en allant arracher la signature de onze États.

Il apparaît, en outre, que ces sujets sont d’une certaine complexité.

Certains États se battent pour que le lieu de résidence, et non le lieu d’émission, préside à la taxation des transactions, ce qui se ferait au détriment total des intérêts de la France. On peut souhaiter la régulation de la finance et être soucieux des intérêts de son propre pays : ce n’est pas incompatible, monsieur le sénateur ! Je vous le dis, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes en train de gagner cette bataille.

On peut souhaiter, enfin, que la taxe sur les transactions financières ne pénalise pas les États endettés. Le groupe CRC a raison de se battre pour que les dettes souveraines n’étranglent pas les pays dont les peuples font des efforts pour le redressement des comptes publics, et pour éviter que l’austérité n’entraîne l’austérité. Un débat existe cependant, sur le fait de savoir s’il faut inclure les dettes souveraines dans l’assiette de la taxe sur les transactions financières. Le faire, c’est prendre le risque d’augmenter le coût de la dette pour les États endettés.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, il n’y a pas, d’un côté, la vertu, et, de l’autre, le vice ! Ces sujets exigent de nous détermination et pragmatisme, avec le souci des intérêts de notre pays et la volonté de mettre fin aux dispositifs spéculatifs. Ils obligent à mesurer à chaque instant l’efficacité de nos actes, au regard de nos objectifs.

J’ai eu l’occasion de tenir des propos similaires à l’Assemblée nationale, à propos de l’optimisation fiscale. Adopter des dispositions de lutte contre l’optimisation qui créent beaucoup d’incertitudes juridiques, ou qui affaiblissent la portée de notre action, c’est donner l’occasion à ceux qui se livrent à ces pratiques d’engager des procédures sans fin devant les tribunaux. Ils peuvent ainsi, tout le temps que durent ces procédures, continuer à optimiser, parce que les concepts juridiques fixés par la loi n’ont aucune efficacité.

Alors, oui, on prend des poses, qui ont une certaine portée médiatique et peuvent susciter de l’intérêt. Mais, au final, l’efficacité est nulle.

Sur des questions de cette importance, monsieur le sénateur, il faut savoir combiner la volonté politique et l’efficacité !

Très bien ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-338, présenté par Mme Jouanno et M. Détraigne, est ainsi libellé :

Après l’article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième ligne de la deuxième colonne du tableau constituant le deuxième alinéa de l’article 575 A du code général des impôts, le taux : « 64, 7 » est remplacé le taux : « 66, 2 ».

La parole est à Mme Chantal Jouanno.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

J’ai déjà eu l’occasion de présenter un amendement identique dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il s’agit d’augmenter la taxe versée par l’industrie du tabac.

C’est un sujet d’actualité : les industries du tabac viennent de déposer leurs propositions d’augmentation de prix. Comme chaque année, ces propositions arrivent à peu près à la même période et font apparaître une augmentation de même proportion, ce qui laisse planer un soupçon d’entente illicite.

Par ailleurs, alors que les bénéfices des fabricants de tabac en France seraient de l’ordre du milliard d’euros, seuls 50 millions d’euros sont déclarés, grâce à un dispositif d’optimisation fiscale parfaitement légal.

Cet amendement vise donc à augmenter le droit de consommation sur le tabac de 1, 5 point, ce qui représente un rendement de l’ordre de 250 millions d’euros. Certes, l’industrie du tabac contribue à hauteur de 14 milliards d’euros au budget, mais son coût pour la collectivité est de 47 milliards d’euros.

Je ne doute pas que les industries du tabac menaceront de répercuter sur les prix cette hausse des droits de consommation, seule disposition légale à notre main, mais il vous appartient, monsieur le ministre, de ne pas céder, en ne signant pas l’arrêté d’homologation des prix du tabac.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L’amendement n° I-524, présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Baylet et Bertrand, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l’article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième ligne de la deuxième colonne du tableau constituant le deuxième alinéa de l’article 575 A du code général des impôts, le taux : « 64, 7 » est remplacé par le taux : « 66, 7 ».

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Cet amendement tend à augmenter de deux points – et non de 1, 5 point, comme vient de le proposer Mme Jouanno, mais ce n’est pas de la surenchère de notre part – les droits de consommation sur les tabacs. Il s’agit pour nous de mettre à contribution les fabricants de tabac, dont les bénéfices sont colossaux. Les impôts dont ils s’acquittent, en comparaison, sont bien faibles, du fait notamment de l’utilisation habile de divers montages d’optimisation fiscale, alors que le coût social des conséquences du tabagisme est estimé, en France, à 47 milliards d’euros.

Il s’agit donc de faire participer effectivement l’industrie du tabac à la prise en charge des conséquences du tabagisme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Si je voulais faire de l’humour, je pourrais dire que ces amendements sont satisfaits par tous ceux que le Sénat a précédemment adoptés et qui étaient déjà gagés par une hausse des droits sur le tabac, dont je rappelle qu’elle s’établit à plusieurs centaines de millions d’euros !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Les deux amendements visent à augmenter, l’un de 1, 5 point, l’autre, de 2 points, le droit de consommation sur les cigarettes.

Mais pourquoi seulement les cigarettes, et pas également les cigares – il y a beaucoup d’amateurs ici !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Je n’en sais rien, ma chère collègue ; je ne suis pas un connaisseur…

Quoi qu’il en soit, l’adoption de tels amendements pourrait déstabiliser le marché.

En application des articles 575 et 575A du code général des impôts, la fiscalité du tabac est complexe, avec une part spécifique et une part proportionnelle, notamment. Elle a déjà été réformée en profondeur par la loi du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Par ailleurs, l’effet sur les prix de détail ne doit pas être négligé. Le marché est aujourd’hui en équilibre fragile. D’ailleurs, les buralistes nous le rappellent régulièrement dans nos villages.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Il n’apparaît pas opportun d’augmenter le taux normal du droit de consommation dans un contexte de hausse liée à l’augmentation de 0, 4 point du taux de TVA au 1er janvier 2014. En effet, cet élément-là a vocation à être répercuté et il s’appliquera à tous les types de tabacs manufacturés.

Par ailleurs, la pression fiscale sur les tabacs va également augmenter mécaniquement, compte tenu du dispositif de la classe de prix de référence, tel qu’il est prévu à l’article 575 du code général des impôts.

Suite aux hausses successives de la fiscalité sur le prix de vente au détail des différents tabacs manufacturés ces dernières années, le marché a baissé en volume, et même en valeur pour la première fois cette année.

En 2013, sur les dix premiers mois de l’année, la baisse des ventes de cigarettes est historique, de l’ordre de 8 %. En valeur, le marché des cigarettes a régressé de 1, 5 % sur les dix premiers mois de l’année, par rapport à la même période de 2012.

Cette baisse en volume et en valeur a une incidence directe sur les recettes de la sécurité sociale. Tout accroissement supplémentaire de la pression fiscale risquerait d’augmenter davantage ces déséquilibres.

Enfin, le niveau de la fiscalité en France sur les produits du tabac est l’un des plus élevés au sein de l’Union européenne. Relever de 1, 5 point le taux normal du droit de consommation sur les cigarettes reviendrait, dans un marché ouvert et dépourvu de restrictions quantitatives à la circulation, à renforcer l’attractivité des pays limitrophes dans lesquels la fiscalité et le prix de vente sont moindres et à encourager tous les phénomènes de contrebande.

Pour ces raisons, le Gouvernement n’est pas favorable à ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote sur l'amendement n° I–338.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

L’augmentation des prix du tabac a bien eu un effet sur les volumes. Mais ces deux amendements n’ont pas pour objet d’augmenter les prix ; ils portent sur les droits de consommation.

Or, monsieur le ministre, puisque c’est vous qui signez l’arrêté d’homologation, vous n’êtes pas obligé de répercuter une hausse des droits sur les prix du tabac.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Madame la sénatrice, je veux à cet égard rappeler un élément extrêmement important, car certaines informations parues dans la presse sont erronées.

La signature de l’arrêté d’homologation est une compétence liée. Conformément en droit en vigueur, le ministre du budget signe l’arrêté décidé par les fabricants. Contrairement à ce qui se dit dans certains articles, ce n’est pas le ministre qui décide et qui fixe les prix.

J’espère que cela figurera bien au Journal officiel et que ceux qui écrivent régulièrement sur le sujet prendront connaissance de nos débats.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Mme Chantal Jouanno. Êtes-vous sûr que l’amendement n’est pas adopté, monsieur le président ?...

Sourires.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'amendement n° I–523, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l’article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la section 2 bis du chapitre 5 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale, il est inséré une section ainsi rédigée :

« Section …

« Contribution sur le chiffre d’affaires des entreprises de vente en gros de tabacs

« Art. L. 245 -6 -... – Il est institué au profit de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés une contribution des personnes mentionnées au 2° du I de l’article 302 G ainsi qu’aux articles 302 H ter et 565 du code général des impôts et des personnes qui leur fournissent des produits visés à l’article 564 decies du même code au titre de l’activité liée à ces produits.

« La contribution est assise sur le chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France au cours d’une année civile.

« Le taux de la contribution est fixé à 5 %. La contribution est exclue des charges déductibles pour l’assiette de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés.

« La contribution est versée de manière provisionnelle le 15 avril de l’année au titre de laquelle elle est due, pour un montant correspondant à 80 % du produit du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’année civile précédente par le taux défini au troisième alinéa. Une régularisation intervient au 15 avril de l’année suivant celle au titre de laquelle la contribution est due.

« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. »

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Cet amendement a le même objet que mon amendement précédent, même si la solution proposée est différente ; mais je persévère : peut-être connaîtra-t-il un sort moins funeste…

Il s’agit de mettre les fabricants de tabac à contribution en instituant une taxe sur leur chiffre d’affaires visant à financer la prévention et la prise en charge de la dépendance tabagique. Comme cette taxe porterait sur la vente en gros, elle ne devrait pas créer de distorsions de concurrence entre les cigarettes produites en France et les cigarettes importées.

Il nous paraît normal qu’une industrie responsable de plus de 60 000 morts par an, dont la moitié par cancer, participe au financement induit par les dégâts que son activité provoque.

Je le rappelle, le coût social du tabagisme est estimé, pour la France, à 47 milliards d’euros par an, soit environ 750 euros par habitant et plus de 3 % du PIB, dont 18 milliards d’euros de dépenses de soins.

Nous sommes loin de l’idée, malheureusement trop répandue, d’une taxation excessive du paquet de cigarettes qui susciterait des recettes fiscales couvrant très largement les coûts induits par la consommation du tabac.

Pour les seuls coûts de traitement des maladies liées au tabagisme, le déficit pour les comptes publics s’élève à 7 milliards d’euros environ chaque année.

Dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, le Gouvernement a procédé à un réaménagement de la fiscalité sur les tabacs. Une telle réforme va dans le bon sens.

Cependant, nous considérons qu’il faudrait aller plus loin. C’est ce que nous vous proposons avec cet amendement, qui recueillera, j’en suis certain, le succès qu’il mérite.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Je reprends les arguments que j’ai avancés tout à l’heure, d’autant que le dispositif envisagé, un taxe de 5 % sur le chiffre d’affaires, serait encore plus coûteux pour les fabricants de tabac.

En outre, et sans m’étendre sur les explications juridiques et techniques, l’adoption d’un tel amendement serait problématique du point de vue du droit communautaire, eu égard à la directive 92/12/CEE du Conseil relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Même avis !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'amendement n° I-499, présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Baylet, Bertrand, Collombat et Esnol, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l’article 23 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le quatrième alinéa de l’article L. 330-5 du code de la route est supprimé.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yvon Collin.

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

Cet amendement vise à mettre fin à une pratique tout à fait choquante : la vente par l’État à des tiers des informations nominatives figurant dans les pièces administratives exigées des automobilistes pour la circulation des véhicules.

En vertu de l’article 29 de la loi du 20 avril 2009 de finances rectificative pour 2009, l’État peut en effet communiquer ces informations, éventuellement contre le paiement d’une redevance. Je précise que ces informations peuvent être utilisées à des fins commerciales. Nous sommes donc face à une aberration, que je vous propose de corriger en adoptant cet amendement.

Au demeurant, notre Haute Assemblée a déjà adopté à plusieurs reprises des amendements identiques. Je vous invite aujourd'hui à confirmer ce vote.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

La réutilisation des données du secteur public est prévue par la directive européenne du 17 novembre 2003.

Une telle possibilité de réutilisation s’inscrit pleinement dans le cadre de la valorisation du patrimoine immatériel de l’État. Elle est très encadrée, et le droit d’opposition des personnes est une garantie pleinement respectée. Ainsi, 35 % des personnes concernées ont exercé leur droit d’opposition à la réutilisation des données du système d’immatriculation des véhicules. Dans ce cas, aucune donnée personnelle les concernant n’a jamais été transmise.

Cependant, dans ce cadre très strict, l’État doit avoir la possibilité de percevoir des redevances lorsque la réutilisation de ces données est possible. Ces redevances sont affectées aux programmes « Administration territoriale » et « Conduite et pilotage des politiques intérieures ». Elles permettent le maintien en conditions opérationnelles et la modernisation des systèmes d’information et des équipements informatiques des préfectures et de l’administration centrale du ministère de l’intérieur, afin, notamment, d’héberger et de recueillir les données du système d’immatriculation des véhicules.

L’adoption de cet amendement aurait pour effet de réduire les recettes de l’État à hauteur des redevances perçues, soit un montant de 3, 8 millions d’euros. Pour cette raison, je ne peux y être favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 23 bis.

II. – RESSOURCES AFFECTÉES

A. – Dispositions relatives aux collectivités territoriales

I. – L’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En 2014, ce montant est égal à 40 123 544 000 €. »

II. – Le II de l’article 154 de loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa du B est ainsi rédigé :

« Pour le calcul des compensations de cotisation foncière des entreprises, le taux à retenir est le taux moyen pondéré des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunale issu de la fusion. Ce taux moyen pondéré est déterminé par le rapport de la somme des compensations versées aux communes membres au titre de l’année précédant la première année d’application des articles 1609 nonies C ou 1609 quinquies C du code général des impôts, dans leur rédaction en vigueur au 1er janvier 2011, et de la somme des bases exonérées ou des abattements appliqués au titre de l’année précédant cette même première année d’application. Lorsque les établissements publics de coopération intercommunale préexistants ne faisaient pas application des mêmes articles 1609 nonies C ou 1609 quinquies C, la somme des compensations versées aux communes membres au titre de l’année précédant la première année où la fusion a produit ses effets au plan fiscal est rapportée à la somme des bases exonérées ou des abattements appliqués au titre de la même année précédant la prise d’effet de la fusion. » ;

2° Au dernier alinéa du même B, les références : « des 2.1.2 et III du 5.3.2 » sont remplacées par les références : « prévues au 2.1.2, au III du 5.3.2 et au 11 ».

III. – A. – Les articles L. 2335-3 et L. 3334-17 du code général des collectivités territoriales sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre de 2014, les mêmes compensations, auxquelles sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, sont minorées par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

B. – Les articles 1384 B et 1586 B du code général des impôts sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :

« Au titre de 2014, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, est minorée par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

C. – Le dernier alinéa du IV de l’article 42 de la loi de finances pour 2001 (n° 2000-1352 du 30 décembre 2000) est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, est minorée par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

D. – Le septième alinéa du II de l’article 21 de la loi de finances pour 1992 (n° 91-1322 du 30 décembre 1991) est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, est minorée par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

E. – 1. Le dernier alinéa du A du IV de l’article 29 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l’égalité des chances et du A du III de l’article 27 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, est minorée par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

2. L’avant-dernier alinéa du III de l’article 7 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, les mêmes compensations, auxquelles sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, sont minorées par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

F. – Le dernier alinéa du IV de l’article 6 de la loi n° 2001-602 du 9 juillet 2001 d’orientation sur la forêt et le dernier alinéa du II de l’article 137 et du B de l’article 146 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux sont complétés par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, est minorée par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

G. – Le dernier alinéa du IV bis de l’article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986) est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, la même compensation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2008, 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, est minorée par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

H. – Le dernier alinéa du B de l’article 4 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 précitée, du III de l’article 52 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement des territoires et du B du III de l’article 27 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 précitée, le huitième alinéa du III de l’article 95 de la loi de finances pour 1998 (n° 97-1269 du 30 décembre 1997) et le neuvième alinéa du B du IV de l’article 29 de la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 précitée sont complétés par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, les mêmes compensations, auxquelles sont appliqués les taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013, sont minorées par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

I. – Le dernier alinéa du 2.1.2 et du III du 5.3.2 de l’article 2 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, ces mêmes compensations, calculées selon les modalités prévues à l’alinéa précédent, sont minorées par application des taux d’évolution fixés au titre de 2009, 2010, 2011, 2012 et 2013 et du taux de minoration prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

J. – Le dernier alinéa du I du III de l’article 51 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, le montant de la même dotation, à laquelle sont appliqués les taux d’évolution fixés pour 2011, 2012 et 2013, est minoré par application du taux prévu au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

K. – Le 8 de l’article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 précitée est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa du XVIII est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, cette minoration s’effectue par application à chacun de ces éléments, avant leur agrégation pour former la dotation au profit des départements, des taux d’évolution fixés au titre de 2011, 2012 et 2013 et du taux prévu pour 2014 au IV l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. » ;

2° Le dernier alinéa du XIX est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Au titre de 2014, cette minoration s’effectue par application à chacun de ces éléments, avant leur agrégation pour former la dotation au profit des régions et de la collectivité territoriale de Corse, des taux d’évolution fixés au titre de 2011, 2012 et 2013 et du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014. »

L. – Le II de l’article 154 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est complété par un I ainsi rédigé :

« I. – Au titre de 2014, les compensations calculées selon les A, B et C du présent II, mentionnées au III de l’article 24 de la loi n° … du … de finances pour 2014, et auxquelles sont appliqués, conformément au même article 24, le taux d’évolution résultant de la mise en œuvre du II de l’article 36 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 précitée et les taux d’évolution fixés au D du présent II au titre de 2009, au E au titre de 2010, au F au titre de 2011, au G au titre de 2012 et au H au titre de 2013 sont minorées par application du taux prévu pour 2014 au IV de l’article 24 de la loi n° …du … précitée. »

IV. – Le taux d’évolution en 2014 des compensations mentionnées au III est celui qui, appliqué au montant total à verser au titre de l’année 2013 pour l’ensemble de ces compensations en application du même III, aboutit à un montant total pour 2014 de 880 349 451 €.

V. – Le II s’applique à compter du 1er janvier 2013.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Maurey

L’article 24, qui concerne les ressources des collectivités locales, est particulièrement important pour notre Haute Assemblée.

En effet, et pour la première fois de notre histoire, il nous est proposé de réduire les dotations aux collectivités, notamment aux communes, qui plus est de manière significative.

La baisse sera de 1, 5 milliard d’euros en 2014 et, nous a-t-on annoncé, de même montant en 2015. Mme la ministre chargée de la décentralisation a en outre récemment laissé entendre que la tendance allait vraisemblablement se poursuivre sur les exercices budgétaires suivants.

Faisons un peu d’histoire.

Voilà trois ans, lorsque le gouvernement précédent a proposé de geler les dotations aux collectivités locales, ce furent des hurlements sur la gauche de l’hémicycle : on assassinait les collectivités locales ; on contraignait les élus locaux à augmenter les impôts ; on tuait l’investissement ; on transférait l’impopularité d’une hausse d’impôts que l’État n’osait pas assumer. Bref, c’était abominable !

L’année suivante, en 2011, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2012, la majorité du Sénat, qui était alors passée à gauche, donc dans l’opposition par rapport à un gouvernement qui, lui, n’était pas encore de gauche, rejetait la dotation globale de fonctionnement, la DGF.

Et l’année dernière, les mêmes élus de gauche, en tout cas les membres du groupe socialiste, trouvaient tout à fait normal de maintenir le gel qu’ils avaient condamné les années précédentes.

Nous voilà en 2013, et, avec le projet de loi de finances pour 2014, le gel se transforme en fonte ! D’ordinaire, un tel phénomène s’observe plus en météorologie qu’en finances publiques. §La baisse des dotations n’est pas anodine. Contrairement à ce que l’on tente de nous expliquer, elle devrait être de l’ordre de 4 % sur la partie forfaitaire de la DGF, qui, vous le savez, représente une part très importante des ressources des communes.

Qui plus est, il s’agit d’une baisse appliquée de manière aveugle : comme l’a souligné la Cour des comptes, la faculté contributive des différentes collectivités locales n’est nullement prise en considération.

Je dois dire, pour ne pas sombrer dans la démagogie, comme il s’en est trouvé pour le faire à une certaine époque, que nous pourrions comprendre cette baisse si, dans le même temps, le Gouvernement n’imposait pas de nouvelles charges aux collectivités. Pour ne pas être trop long, car on pourrait facilement multiplier les exemples de transferts de charges imposés aux collectivités, je n’en citerai qu’un, mais non des moindres : la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. Il sera demandé à des communes de prendre en charge cette réforme, qui coûtera à peu près 200 euros par enfant, ce qui aura une incidence très importante sur leur budget, alors même que l’on diminue leurs ressources.

Nous pourrions mieux comprendre cet effort s’il était partagé avec l’État. Or, en réalité, l’essentiel de l’effort budgétaire de l’État est supporté par les collectivités locales : quand on nous parle de 9 milliards d’euros d’économies, il s’agit essentiellement de dépenses qui augmenteront moins vite, sauf pour la dotation de l’État aux collectivités locales qui, elle, diminuera réellement.

Cela me semble difficilement supportable et entraînera de graves conséquences sur la vie des collectivités locales, notamment des communes. Cela se traduira à n’en pas douter par une augmentation de fiscalité : alors que le contribuable est déjà largement matraqué par l’État, il risque de l’être également par les collectivités locales en raison de la baisse des dotations. Je pense même que, chose inédite, certaines communes, peut-être pas dès le budget de 2014, mais les années suivantes, ne pourront plus équilibrer leur budget de fonctionnement.

Mes chers collègues, si l’on diminue les recettes dans le même temps que l’on augmente les dépenses, il arrivera nécessairement un moment où l’exercice deviendra tout simplement impossible !

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Mon collègue a fort bien résumé la situation. Je vais donc me contenter de compléter son propos.

La gauche réfléchirait donc au big-bang fiscal… Mais les collectivités sont-elles vraiment concernées par la réforme qui s’annonce ? Il faut reconnaître que le système, peu compréhensible et peu responsabilisant, est à bout de souffle. Monsieur le ministre, sommes-nous concernés par cette réforme ou s’agit-il d’une diversion ?

M. François Patriat proteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

L’opinion publique comme la presse considèrent aujourd'hui que l’ensemble des collectivités dévorent les crédits et les moyens. Ce jugement est malheureusement étayé par un certain nombre de statistiques.

Les régions ont augmenté leurs effectifs de 175 % en dix ans, sans avoir acquis de compétences nouvelles. Les intercommunalités ont accru leur personnel de 174 %. La communauté urbaine de Lille, que préside Mme Aubry, compte trente-deux vice-présidents. M. Fabius a quarante-cinq vice-présidents à Rouen. Évidemment, j’ai moins d’exemples d’élus locaux de l’opposition, puisque nous gérons peu de collectivités ou de communautés importantes. Quoi qu’il en soit, ces chiffres interpellent et alimentent la critique sur le coût du fameux « millefeuille ».

Il nous semble que l’effort demandé est tout de même important. Il traduit un véritable désengagement de l’État par rapport aux collectivités territoriales.

Permettez-moi un bref historique de la notion de « dotation ». Dans le mot « dotation », il y a l’idée de don. La dotation générale serait un don de l’État aux collectivités. Or, historiquement, ce n’est pas du tout cela. En réalité, lorsque la TVA a été créée et que toutes les taxes locales ont été fondues, on a décidé qu’une partie du produit de la TVA serait reversée aux collectivités. Ce principe a été quelque peu oublié et, selon les époques et les gouvernements, le rapport entre la TVA collectée par l’État et les sommes redistribuées aux collectivités a pu varier.

Aujourd'hui, nous sommes en quelque sorte gérés au fil de l’eau, et la méthode est, pour le coup, catastrophique. Comme mon collègue l’a excellemment souligné, nous sommes passés de 200 millions d’euros à 4, 5 milliards d’euros en deux ans. C’est un chiffre d’une tout autre ampleur. Dans le même temps, on multiplie les dépenses et les réformes, par exemple celle des rythmes scolaires.

Les collectivités, mes chers collègues, vous le savez tous, assurent près des trois quarts des investissements publics. Naturellement, elles risquent de voir leurs capacités d’investissement fortement réduites, ce qui se traduira inévitablement par une réduction des investissements : les sections de fonctionnement ne pourront plus produire le minimum d’autofinancement nécessaire pour réaliser les investissements.

L’article 24 illustre assez bien, monsieur le ministre, la philosophie générale de votre budget : il accompagne la récession, mais il ne la combat pas. Quand on se sert de cette façon de l’outil de l’investissement civil, cela pose un vrai problème. Les investissements que les collectivités ne pourront pas consentir auront une incidence sur les emplois de demain. Ce sont eux que vous condamnez en prenant de telles mesures !

Je ne résiste pas à la tentation de citer l’engagement n° 54 du programme de François Hollande §: « Un pacte de confiance et de solidarité sera conclu entre l’État et les collectivités locales garantissant le niveau des dotations à leur niveau actuel. » Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on est loin du compte !

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Une des raisons du malaise qui règne dans ce pays est l’écart entre les annonces de campagne et la réalité des actes.

Croyez-moi, les collectivités locales et leurs élus sont au cœur des enjeux économiques.

Monsieur le rapporteur général, vous vous indigniez à l’époque quand 200 millions d’euros étaient réclamés aux collectivités. « Cela entraîne, pour les élus locaux, disiez-vous alors, une totale incertitude quant à la capacité qu’ils auront demain de financer des projets d’investissement. La question du maintien d’un service public de proximité est donc posée. »

Vous vous inquiétiez, à juste titre : « si le Gouvernement ne prend pas conscience du besoin d’améliorer le financement des collectivités territoriales, je crains que nous n’allions au-devant de très lourdes catastrophes ».

Que pourrais-je ajouter, alors que l’effort demandé aujourd’hui est de 4, 5 milliards d’euros ?

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, cet article 24 lance le débat relatif aux collectivités territoriales. Il porte, d’une part, sur la baisse de la dotation globale de fonctionnement – 1, 5 milliard d’euros pour l’année 2014 – et, d’autre part, sur la fixation des enveloppes de compensation de la fiscalité locale, utilisées comme variables d’ajustement depuis de nombreuses années dans nos budgets.

Dans les deux cas, l’option choisie par le Gouvernement est celle de la réduction du concours apporté aux collectivités territoriales, désolante continuité que l’on devrait constater encore en 2015, voire au-delà, et dont les collectivités pâtissent, car elle pèse sur leur financement.

Je ne reviens pas sur les termes d’un débat que l’on connaît bien : il y aurait trop de communes, trop de cantons et d’établissements publics de coopération intercommunale, trop de départements ou de régions, et ce « trop » serait très lourd pour les finances publiques.

L’avenir serait à la métropole, cette structure pourvue de toutes les compétences et ayant réponse à tout, ou à presque tout. Quand notre collègue Francis Delattre laisse entendre que les collectivités territoriales ont trop de moyens à leur disposition, il tient un peu le même discours, même s’il demande ensuite que les dotations ne soient pas diminuées.

Mais aujourd'hui, l’avenir proposé par le texte aux collectivités locales, c’est surtout celui des économies.

On nous dit que les collectivités territoriales devraient prendre leur part du fardeau de la réduction des déficits publics. Or cela fait trente ans que les collectivités locales, devenues majeures depuis les lois de décentralisation, prennent largement leur part, et peut-être même plus que leur part, à la réduction des déficits publics.

En trente ans, les collectivités locales ont créé plusieurs centaines de milliers d’emplois, mais elles ont soutenu aussi l’économie des territoires. Elles ont également assuré une solidarité non négligeable.

On parle souvent au Sénat de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. Rappelons-nous, tout de même, qu’il a été demandé à cette caisse de faire preuve de solidarité à l’égard des caisses déficitaires. Au lieu de la mettre en situation d’améliorer le sort des retraités de nos collectivités, on nous a sollicités pour financer cette surcompensation, et nos cotisations ont augmenté !

Les collectivités locales supportent aujourd’hui la majeure partie des investissements publics – 70 % –, et nul ne doute que leur capacité d’autofinancement, née en particulier de la juste allocation des concours budgétaires de l’État, souffrira de la décision de réduire de 1, 5 milliard d’euros la DGF.

Je rappelle que les dotations qui nous ont été octroyées jusqu’à maintenant sont, pour une bonne part, des compensations d’anciennes fiscalités locales qui existaient autrefois.

Mme la présidente de Lille Métropole Communauté Urbaine, Martine Aubry, que M. Delattre a évoquée à l’instant, a publiquement regretté, lors du débat d’orientation budgétaire de son intercommunalité, le choix opéré par le Gouvernement de restreindre ainsi les concours de l’État aux collectivités locales, rappelant qu’elle était contre ces mesures quand c’était un gouvernement de droite qui les mettait en œuvre et que le fait que le Gouvernement ait changé ne les rendait pas plus admissibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

On retire 1, 5 milliard d’euros aux collectivités locales, alors même que l’on connaît parfaitement l’usage qu’elles peuvent en faire et, la même année, on laisse partir 9, 76 milliards d’euros au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, dispositif dont l’efficacité est loin d’être assurée…

Dans la dernière période, c’est le secteur public qui a créé le plus de valeur ajoutée, et non le secteur privé. Le secteur public a produit 18, 3 % de la valeur ajoutée de l’économie nationale en 2012, contre 17, 7 % en 2006, et le tiers secteur non marchand est passé, pour sa part, de 1, 6 % à 1, 8 % du total de la valeur ajoutée.

Le secteur marchand a augmenté de 23 milliards d’euros, quand le secteur public progressait de 28, 2 milliards d’euros et le tiers secteur non marchand de 3, 5 milliards d’euros de 2008 à 2012. C’est dire si, pour nous, le choix opéré par le Gouvernement est antiéconomique, un choix que rien ne justifie, surtout avec une reprise aussi fragile que celle que nous observons.

L’investissement local est un élément-clé de la relance économique. L’article 24, en l’état, affaiblirait les capacités économiques dans nos territoires et créerait des difficultés nouvelles pour atteindre les objectifs de sortie de la crise. C’est pourquoi nous sommes opposés à son adoption.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Gouvernement a donc décidé de diminuer drastiquement les dotations de l’État aux collectivités locales. Après deux années de gel, 4, 5 milliards de moins, cela fait beaucoup !

Néanmoins, il faut, pour avoir une vision exacte, examiner l’ensemble des autres dispositions du budget relatives aux collectivités locales, notamment l’article 58 et, surtout, l’article 58 bis, qui est extrêmement important. L’article 58 bis de la loi de finances initiale pour 2014 prévoit en effet expressément que l’État procédera à un prélèvement de 0, 35 point sur l’assiette des droits de mutation, que le département augmente ou non ces derniers.

Je ne vous reprocherai pas de diminuer les dotations de l’État vers les collectivités locales. Il me paraît normal que chacun prenne sa part dans la lutte pour le rétablissement des comptes publics.

En revanche, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas opérer de tels prélèvements sans réformer les structures locales. Quelle façon très particulière de faire les choses sans les dire ! Étouffer les collectivités locales plutôt que de les réformer n’est pas acceptable.

Je regrette fort que le Gouvernement ne fasse pas de vraies propositions. Si vous pensez que l’on ne peut plus fonctionner comme on l’a fait jusqu’à présent – peut-être est-ce vrai –, faites-nous des propositions de réforme qui soient cohérentes avec les montants de dotations que vous pouvez nous offrir.

Je reconnais bien volontiers que le Gouvernement a consenti un véritable effort pour les communes nouvelles. C’est bien, mais il n’y en a que douze dans le pays…

Permettez-moi de prendre un exemple chiffré pour illustrer les conséquences de cette politique purement financière et fiscale, qui n’est pas une politique globale de l’État en direction des collectivités locales.

L’année prochaine, le département du Rhône subira un premier prélèvement sur les DMTO de 17 millions d’euros au titre de la péréquation, puis un deuxième de 11 millions d’euros au titre de la nouvelle péréquation prévue à l’article 58 bis, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

… un troisième de 7 millions d’euros sur la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, un quatrième de 15 millions d’euros sur la DGF, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

… soit, au total, 50 millions d’euros en moins !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Si c’était la même chose qu’avant, il n’y aurait pas 50 millions d’euros de prélèvements en plus, madame Printz ! Il faut d’ailleurs encore ajouter 13 millions d’euros au titre de la CVAE, dont nous avons reçu hier la notification par les services de l’État : nos ressources se trouvent donc diminuées au total de 63 millions d’euros.

En regard, je pourrais dresser la liste des augmentations de charges que nous devons supporter. Sachez simplement que le RSA coûtera 40 millions d’euros de plus au département du Rhône. Par rapport à l’an dernier, il nous faut donc trouver 100 millions d’euros supplémentaires pour boucler le budget. Heureusement que c’est le dernier !...

Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas diminuer les dotations de l’État aux collectivités locales sans mettre en œuvre une réforme structurelle. Ce que je vous reproche, c’est de ne vous occuper que des comptes, et non de la réalité du terrain ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Yvon Collin

L’article 24 prévoit une diminution de la dotation globale de fonctionnement de 1, 5 milliard d’euros, au titre de la participation des collectivités locales au redressement des finances publiques. Cette réduction sans précédent a été entérinée par le pacte de confiance et de responsabilité conclu entre l’État et les collectivités locales en juillet dernier.

Il est d’ailleurs intéressant de souligner que, dans les soixante propositions du candidat Hollande, ce pacte était appelé « pacte de confiance et de solidarité » : le choix des mots en dit long sur la façon dont les collectivités locales sont désormais perçues !

Cela étant, les membres du groupe RDSE ne contestent pas le fait que les collectivités locales doivent contribuer au redressement des comptes publics. Cependant, comme pour l’ensemble des mesures fiscales, nous voulons que la répartition de cet effort soit véritablement juste et équitable, ce qui passe par la montée en puissance de la péréquation.

Or, monsieur le rapporteur général, quand je lis, à la page 326 de votre rapport, que « cette baisse de la DGF représente un effort important, mais qui apparaît supportable, d’autant plus qu’elle s’accompagne d’un renforcement de la péréquation, afin de soulager les collectivités les plus fragiles », je ne peux m’empêcher d’avoir quelques doutes, que vous allez certainement dissiper dans un instant.

De quoi parle-t-on quand on parle d’un renforcement de la péréquation ? Des 119 millions d’euros supplémentaires de péréquation verticale, qui sont à mettre en regard de la diminution de la DGF de 1, 5 milliard d’euros ?

Certes, la péréquation horizontale est renforcée par ce projet de loi de finances. Cela correspond à une demande constante des membres du RDSE. Toutefois, ce développement de la péréquation horizontale ne doit pas souffrir d’une excessive complexité, qui mettrait à mal sa mise en œuvre ; or, monsieur le ministre, la complexité me semble malheureusement une caractéristique trop souvent présente dans ce projet de loi de finances pour 2014.

Ainsi, l’article 73 renforce le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC, ce dont je me réjouis, mais il revoit aussi une nouvelle fois les critères d’attribution.

L’article 26, quant à lui, prévoit d’affecter aux départements les recettes des frais de gestion de la taxe foncière sur les propriétés bâties, soit 827 millions d’euros, de façon « péréquée ». Or les critères de répartition de la fraction « péréquée » de ces nouvelles ressources n’ont pas été définis en amont. Ils l’ont été au cours de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, par le biais d’un amendement du Gouvernement, ce qui me semble être, monsieur le ministre, une méthode assez problématique, d’autant qu’elle nous rappelle les mauvais souvenirs liés à la réécriture complète et en catimini, par l’Assemblée nationale, des articles du projet de loi de finances pour 2013 relatifs aux fonds de péréquation des DMTO et de la CVAE, alors que le Sénat ne pouvait plus se prononcer.

Cette année, à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a également fait adopter un article 58 bis qui crée un nouveau prélèvement, venant s’ajouter au fonds de péréquation des DMTO existant. Là encore, ce dispositif me semble excessivement complexe. En outre, les critères de répartition de ce nouveau fonds de péréquation ne sont pas définis, le texte renvoyant cela à un décret. Or priver le Parlement de la possibilité de se prononcer sur la répartition du produit de la péréquation horizontale me semble un choix extrêmement préoccupant.

Je considère donc, avec les membres de mon groupe, que la baisse de la DGF doit être compensée par une péréquation horizontale véritablement ambitieuse, dont les critères soient clairs et permettent de concourir effectivement à la réduction des inégalités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à M. Albéric de Montgolfier, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Monsieur le ministre, vous aimez beaucoup nous rappeler à la réalité des chiffres. Or cette réalité, nous la connaissons : 295, 2 milliards d’euros de dépenses inscrites au budget général de 2013 et 294, 5 milliards d’euros à celui de 2014, soit 700 millions d’euros d’économies. Pour les collectivités, la réalité des chiffres, c’est 1, 5 milliard d’euros de DGF en moins, pour la seule année 2014…

La question des dotations de l’État aux collectivités locales n’est pas taboue, et l’on a le droit de débattre d’une éventuelle modulation ou baisse, mais l’article 24, dont nous allons proposer la suppression, m’inspire trois critiques.

Premièrement, aucune modulation n’est prévue. Baisser la dotation de 5 %, ce n’est pas forcément la même chose selon qu’il s’agit d’une commune rurale ou d’une métropole. Le coup de rabot est aveugle, il touche de manière uniforme toutes les collectivités, sans tenir compte de leurs capacités financières et de leurs marges de manœuvre.

Deuxièmement, il n’est absolument pas tenu compte des efforts de gestion consentis par certaines collectivités ; là encore, la baisse de la DGF s’applique de manière totalement aveugle.

Troisièmement et surtout, il n’est pas tenu compte des charges nouvelles.

Lors d’une récente réunion du Comité des finances locales, j’ai demandé quel était le montant des dépenses nouvelles – largement d’origine réglementaire – mises à la charge des collectivités locales. Il m’a été répondu qu’il atteignait 2 milliards d’euros en année pleine, entre le financement de la CNRACL, la revalorisation du RSA, l’augmentation de la TVA, la mise en place de la réforme des rythmes scolaires, etc.

Nous comprenons bien qu’il y a un problème de recettes, de déficit du budget de l’État. J’ai une proposition à vous faire, qui ne coûte rien : nous pourrions peut-être accepter la baisse des dotations, à condition que vous reveniez sur toutes ces dépenses nouvelles. Revenez sur la réforme des rythmes scolaires – dont la mise en œuvre coûte quelques centaines de millions d’euros –, sur la revalorisation de 10 % du RSA, et nous pourrons alors discuter de la baisse des dotations. Sinon, pour les collectivités territoriales, ce sera la double peine : baisse des dotations et dépenses nouvelles. Nous savons tous qu’il en résultera une diminution de leur effort d’investissement, sachant que celui-ci représente 75 % des investissements publics réalisés dans notre pays. Des secteurs entiers s’en trouveront fragilisés, notamment le bâtiment et les travaux publics. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Je rappelle que le gouvernement précédent avait également prévu de les solliciter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

À la lecture des programmes d’un certain nombre de partis politiques, il apparaît qu’un effort continuera de leur être demandé s’il y a une alternance.

Il s’agit donc non pas de protester systématiquement contre la baisse des dotations, mais de voir comment les collectivités territoriales vont pouvoir s’adapter pour conserver néanmoins un élan, notamment en termes de capacités d’investissement.

Il me semble que le grand traumatisme, pour l’ensemble des collectivités territoriales, a été provoqué par les modalités de la suppression de la taxe professionnelle. La taxe professionnelle était peut-être un impôt complètement stupide, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

M. Jean Germain. Cela étant, on ne pourra pas longtemps diminuer de 1, 5 milliard d’euros chaque année les dotations aux collectivités territoriales.

Ah ! sur les travées de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

C’est pourquoi je suis de ceux qui considèrent que l’on doit aller plus loin dans la décentralisation et ne pas se contenter de moderniser l’action de l’État. Nous devrons alors prendre, les uns et les autres, nos responsabilités sur un certain nombre de sujets. J’ai déjà eu l’occasion de dire que, tant que l’on conservera la compétence générale aux régions, aux départements, quasiment à tout le monde, il ne faudra pas s’étonner de l’existence d’un certain nombre d’imperfections.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Germain

Je comprends l’action du Gouvernement mais, en même temps, je milite pour un nouvel acte de la décentralisation. Monsieur le ministre, je pense qu’il serait dangereux de méconnaître un certain mécontentement quant aux objectifs à moyen terme.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Sans être exhaustif, je voudrais revenir sur quelques-uns des sujets abordés par les différents intervenants.

Messieurs Delattre et de Montgolfier, vous avez indiqué qu’une diminution de 1, 5 milliard d’euros des dotations aux collectivités territoriales cette année condamnerait l’investissement. Je peux comprendre le raisonnement suivi, mais il ne me paraît pas de bonne foi, pour les raisons que je vais indiquer.

Permettez-moi de vous lire un article de presse en date du 17 décembre 2011 : « L’UMP risque d’aggraver son cas auprès des élus. Elle a annoncé, en présentant le chiffrage de son projet pour 2012, son intention de baisser de 2 milliards d’euros par an, soit 10 milliards sur l’ensemble du quinquennat 2012-2017, les dotations aux collectivités locales. »

C’est sur ce projet que votre candidat a fait campagne pour l’élection présidentielle ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

On vous en ressortira, des arguments comme celui-là !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Je comprends que cela vous agace, mais telle est la réalité !

Par ailleurs, aux termes de votre raisonnement, les dépenses de l’État diminuant de 1, 5 milliard d’euros tandis que les dotations aux collectivités locales baissent de 1, 5 milliard d’euros, l’État ne ferait donc finalement aucun effort, celui-ci reposant entièrement sur les collectivités locales.

Ce raisonnement n’est pas plus de bonne foi que le premier.

L’augmentation tendancielle des dépenses de l’État est de 7, 5 milliards d’euros par an.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Dans le même temps, nous réalisons – État et collectivités territoriales – 9 milliards d’euros d’économies, d’où une diminution de 1, 5 milliard d’euros de la dépense de l’État. Cette économie de 9 milliards d’euros est rendue possible par des efforts très importants consentis par l’État, au travers de ses administrations centrales, de ses opérateurs et de ses participations, ainsi que, je le reconnais, par les collectivités territoriales, à hauteur de 1, 5 milliard d’euros. Mais si, monsieur de Montgolfier, nous n’avions mis à contribution que les collectivités territoriales, les dépenses de l’État auraient non pas diminué de 1, 5 milliard d’euros, mais augmenté de 6 milliards d’euros ! En la matière, il faut donc être extrêmement précis, comme vous m’y invitiez avec raison.

Enfin, plusieurs intervenants, notamment MM. Mercier et Germain, estiment qu’il n’est pas possible de continuer ainsi sans engager une réforme en profondeur des collectivités territoriales et mettre en place un pacte sincère entre celles-ci et l’État.

Oui, nous diminuons de 1, 5 milliard d’euros la dotation globale de fonctionnement des collectivités locales, mais le pacte de confiance et de responsabilité vise à corriger les déséquilibres qui s’étaient accumulés depuis des années et faisaient l’objet de revendications récurrentes de la part des élus.

Monsieur Mercier, vous tenez toujours des propos rigoureusement exacts, avec le talent et la violente modération qui vous appartiennent. §Aussi n’hésitez pas à me corriger si ce que je vais dire n’est pas juste.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Trois dépenses contraintes des départements connaissent une augmentation très importante : le RSA, la PCH – la prestation de compensation du handicap – et l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie. Elles n’ont cessé d’évoluer de façon très dynamique, tandis que les dotations et les recettes fiscales des départements diminuaient, notamment les droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, dont on sait qu’ils augmentent beaucoup en période de croissance et baissent fortement en période de crise.

Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, des présidents de conseil général nous ont dit que, si nous ne faisions rien pour remédier à ce considérable effet de ciseaux, leurs départements ne pourraient plus faire face. Nous avons alors discuté avec les présidents de conseil général des moyens de commencer à rétablir la situation financière des départements. Cette réflexion a débouché sur la prise de deux dispositions.

En premier lieu, nous avons délégué aux départements 827 millions d’euros de frais de gestion adossés à des impôts locaux.

En second lieu, nous avons pris la décision, à votre demande, …

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

… d’ouvrir aux départements la possibilité de relever le taux des DMTO de 0, 7 point, pour le faire passer de 3, 8 % à 4, 5 %.

Un certain nombre de parlementaires et de présidents de conseil général ont estimé que ces mesures n’étaient pas suffisantes, eu égard à la mise en place de la péréquation, et qu’il fallait consolider l’ensemble. Pourtant, lorsque nous avons signé le pacte de confiance et de responsabilité avec les collectivités locales, à Matignon, le 16 juillet dernier, des présidents de conseil général, de droite comme de gauche, ont remercié le Gouvernement d’avoir pris ces mesures de correction, …

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

… qu’ils attendaient depuis longtemps. Il s’agissait à leurs yeux d’un progrès significatif, bien qu’encore insuffisant.

Pour ce qui concerne les régions, nous avons en effet, au terme d’une négociation là encore très longue, substitué à la DGD, la dotation générale de décentralisation, des ressources d’un montant équivalent. Mais, contrairement à la DGD, qui était depuis longtemps figée, ces ressources sont extraordinairement dynamiques, puisqu’elles augmentent annuellement de 4 % à 6 %.

Vous avez dit, monsieur Mercier, que l’on ne pouvait pas continuer à demander des efforts aux collectivités locales sans engager une réforme de structures.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Vous avez absolument raison ! Dans le cadre de l’élaboration du projet de loi de finances pour 2015, j’ai bien l’intention de formuler, avec Mmes Lebranchu et Escoffier, des propositions à cet égard. On doit pouvoir garantir aux collectivités locales qui mutualisent, se rassemblent et réalisent des efforts de gestion le maintien des dotations, voire leur augmentation, …

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

… tandis que les autres seraient davantage mises à contribution. En tant que ministre chargé du budget, je ferai en sorte que ces propositions soient structurelles, de manière que nous puissions aller plus loin dans les économies.

Voilà ce que je tenais à vous dire, non pas pour créer des polémiques, mais simplement pour rappeler la réalité des chiffres.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Mes chiffres sont tirés d’un document émanant de votre ministère !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Je n’ai pas les mêmes que vous, monsieur de Montgolfier. Le document en ma possession indique que le total des dépenses de l’État hors charge de la dette et pensions passera de 79, 4 milliards d’euros à 78 milliards d’euros en 2014. Il y aura donc bien une diminution de 1, 5 milliard d’euros environ. Je suis prêt à examiner le document dont vous disposez, monsieur le sénateur, et je vous dirai alors pourquoi nos chiffres diffèrent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je voudrais revenir sur quelques chiffres simples. N’étant pas vraiment capable d’entrer dans toutes les subtilités de M. le ministre, j’ai procédé à une banale règle de trois.

L’effort de 1, 5 milliard d’euros tient à une réduction de l’ensemble des concours de l’État aux collectivités territoriales, notamment de la dotation globale de fonctionnement. Concernant la DGF, la baisse est de 3, 6 %. Si l’on considère l’enveloppe normée, soit une base de 60 milliards d’euros, le recul est de 2, 5 %.

Pour 2013, l’ensemble des dépenses de l’État représente 371, 9 milliards d’euros. Si j’applique le ratio de réduction le plus modeste, à savoir 2, 5 %, la baisse devrait atteindre 9 milliards d’euros pour que l’effort soit proportionné à celui qui est demandé aux collectivités territoriales. Mais, monsieur le ministre, ces 9 milliards d’euros correspondent non pas à un freinage par rapport à une tendance, mais à des économies en espèces sonnantes et trébuchantes.

C’est là que nos raisonnements divergent. Vous dites additionner les efforts demandés à l’État et aux collectivités territoriales, mais il se trouve que, dans le cas de ces dernières, l’effort est une réduction des dotations, en espèces sonnantes et trébuchantes, …

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

… tandis que celui qui est demandé aux services de l’État correspond à un ralentissement de la progression. En d’autres termes, il s’agit d’une réduction par rapport aux services votés, pour reprendre l’ancienne terminologie budgétaire. Les décisions antérieures, la législation existante conduisaient à une augmentation de la dépense que vous réduisez de 9 milliards d’euros.

En termes nominaux, la réduction de l’ensemble de la dépense de l’État, transferts aux collectivités territoriales compris, n’est que de 1, 4 milliard d’euros, alors qu’elle devrait être de 9 milliards d’euros, si l’on voulait respecter la règle de la proportionnalité des efforts.

Oserai-je ajouter que ce chiffre de 1, 4 milliard d’euros est sujet à caution, parce qu’il provient d’une modification de la norme de dépenses sur laquelle je m’étais permis d’insister lors de mon intervention liminaire ? En effet, l’État a transféré –d’ailleurs opportunément – aux régions et aux départements des ressources qui étaient jusqu’à présent inscrites dans la norme de dépenses, pour un montant équivalent, de l’ordre de 1, 5 milliard d’euros.

Pardonnez-moi ce raisonnement simpliste, arithmétique, presque de cuisinière

Exclamations amusées.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Je vais m’en expliquer.

M. le président de la commission des finances considère que la diminution des dotations de l’État aux collectivités territoriales correspond à une réduction des dépenses de celles-ci. Eh bien non ! Nous diminuons certes de 1, 5 milliard d’euros les recettes des collectivités locales, mais leurs dépenses ont crû de 4 % à 5 % l’année dernière, pour un volume global de l’ordre de 200 milliards d’euros. Votre argumentation est très habile, monsieur Marini, mais elle ne correspond donc pas à la réalité !

M. André Reichardt proteste.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Monsieur le président de la commission des finances, il est donc faux d’assimiler une diminution des recettes des collectivités territoriales résultant d’une réduction de leur dotation globale de fonctionnement à une régression de leurs dépenses. À la vérité, ces dernières continuent d’augmenter.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

De surcroît, lorsque vous comparez l’effort des collectivités territoriales à celui de l’État, vous rapportez la baisse de 1, 5 milliard d’euros des dotations aux dépenses des collectivités territoriales hors endettement, tandis que vous rapportez l’évolution des dépenses de l’État à l’ensemble de celles-ci, charge de la dette et pensions comprises. Vous fondez donc votre comparaison sur des assiettes différentes.

Monsieur le président de la commission des finances, votre raisonnement est très habile, mais il ne tient pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

M. Charles Guené. À vrai dire, je suis un peu ennuyé, car la joute entre M. le ministre et M. le président de la commission des finances m’a enlevé l’un de mes arguments !

Exclamations amusées.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Nous savons que des efforts sont nécessaires, même si nous ne les envisageons pas de gaieté de cœur.

Le raisonnement de M. le président de la commission des finances m’a paru assez convaincant, mais il faut admettre, monsieur le ministre, que vous vous êtes vous aussi montré habile.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Ce n’est pas de l’habileté ; c’est la vérité !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Si nous reconnaissons que des efforts sont nécessaires, nous déplorons que le Gouvernement agisse sans concertation.

Par ailleurs, M. Germain m’a surpris : d’habitude si mesuré, il a prétendu que la réforme de la taxe professionnelle avait encore aggravé la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Guené

Si je demandais à M. le ministre son avis sur ce point, je ne suis pas sûr qu’il serait d’accord avec notre collègue. En tout cas, pour avoir suivi cette réforme de très près, je puis vous assurer que, s’il en est une qui a été préparée dans la concertation, c’est bien celle-là ! Du reste, le Gouvernement n’a pas trop à s’en plaindre : l’État acquittait une très large part de la taxe professionnelle, et il serait très embarrassé s’il devait encore assumer cette charge aujourd’hui !

À l’heure où l’on annonce une grande réforme fiscale, je crois que, dans ce domaine, nous avons fait notre part du travail, et je trouve un peu incongru que l’on nous en fasse le reproche.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Monsieur Guené, la réforme de la taxe professionnelle a fait l’objet d’une concertation si approfondie que nous avons tous appris son lancement un dimanche soir, à 20 heures, en regardant la télévision…

Applaudissementssur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Elle a été tellement bien préparée que le Parlement a dû la récrire totalement !

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Monsieur le ministre, il est exact que des réunions de concertation ont eu lieu, pendant plus d’un an, entre les départements et le Gouvernement.

Si les départements éprouvent un sentiment de déception, c’est parce que, à l’issue de la réunion de juillet dernier, il avait été envisagé de leur ouvrir la possibilité d’augmenter les droits de mutation à titre onéreux, mais sous la responsabilité de l’État, afin que celui-ci répartisse le produit du prélèvement supplémentaire dans le cadre d’une péréquation verticale.

Or, à présent, c’est une péréquation horizontale que le Gouvernement nous propose : un prélèvement serait opéré sur les départements bénéficiant des plus fortes recettes au titre des DMTO, au bénéfice de ceux qui sont moins favorisés. En termes d’euros sonnants et trébuchants, les départements ne s’y retrouvent pas forcément, d’où leur déception.

Pour reprendre le mot de M. le président de la commission des finances, j’ai fait ma cuisine pour préparer les orientations budgétaires de mon département.

La dotation de solidarité, qui s’élève au total à 476 millions d’euros, représente un prélèvement de 4, 2 millions d’euros pour un département moyen comme la Marne, le trentième de France pour la population.

Le transfert aux départements de 827 millions de frais de gestion des DMTO se traduira, pour la Marne, par une recette supplémentaire de 5, 5 millions d’euros.

Le relèvement du taux des droits de mutation à titre onéreux pendant deux ans devrait rapporter, d’après les informations dont je dispose aujourd’hui, 2, 3 millions d’euros après péréquation.

En faisant la somme de ces différents termes, il apparaît que mon département bénéficiera d’un surcroît de recettes de 3, 7 millions d’euros, mais les charges supplémentaires qu’il devra supporter – au titre des transports scolaires, du financement de la CNRACL ou du service départemental d’incendie et de secours, des cotisations des élus… – sont bien supérieures à ce montant, sans parler de l’augmentation de 1 % à 2 % par mois des dépenses liées au RSA, qui n’est pas du tout compensée. En 2012, dans mon département, il nous manquait 42 millions d’euros pour financer les allocations de solidarité, et ce chiffre sera beaucoup plus élevé cette année. L’an prochain, bien entendu, le compte n’y sera pas, les 3, 7 millions d’euros de recettes supplémentaires étant très insuffisants.

Les départements ne demandaient pas une compensation intégrale des allocations de solidarité, mais une prise en compte. Or les petits départements auront davantage de recettes, alors qu’ils ont moins de charges, tandis que les gros départements seront davantage ponctionnés qu’ils ne recevront de recettes : ils auront donc moins pour faire plus, sachant que le coût des allocations de solidarité s’accroît !

Dans ces conditions, monsieur le ministre, vos mesures de correction sont insuffisantes pour desserrer l’étau budgétaire des départements.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Monsieur le ministre, vous m’avez invité à vous corriger : amicus Cazeneuve, sed magis amica veritas !

Oui, vous êtes habile, très habile, trop même : vous venez, une fois de plus, de nous en faire la démonstration.

À vous entendre, nous n’avons rien compris à votre démarche. C’est un fait que je n’ai pas participé à vos réunions de concertation : il y manquait d’ailleurs des centristes pour rendre celle-ci un peu plus solide, un peu plus vraie. Mais vous avez choisi votre public ; c’est ainsi !

Vous avez constamment mélangé crédits budgétaires et péréquation.

M. le ministre délégué le conteste.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Quant au transfert aux départements des frais de gestion, la recette sera nulle pour le Rhône.

Monsieur le ministre, vous le savez bien, les prélèvements opérés au titre de la péréquation représentent des pertes de recettes pour nos collectivités territoriales, qui viennent s’ajouter à la réduction des dotations. Ne croyez-vous pas que nous sommes arrivés au bout de la péréquation telle que vous la pratiquez ? Croyez-vous que vous pourrez encore longtemps opérer des prélèvements sur certaines collectivités territoriales au profit d’autres ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Pour ma part, je crois que des réformes structurelles sont nécessaires.

L’année prochaine, monsieur le ministre, c’est M. Collomb qui dénoncera le montant des prélèvements opérés sur sa métropole au titre de la péréquation. Comme il est de votre parti, vous l’écouterez davantage que moi, encore que le pauvre ne soit guère écouté dans vos rangs !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

À la vérité, nous savons tous que nous sommes arrivés au bout de la péréquation. Cette année, plus de 50 millions d’euros auront été prélevés à ce titre sur le budget du département du Rhône.

Monsieur le ministre, pour que les dépenses des collectivités territoriales cessent d’augmenter beaucoup plus vite que celles de l’État, la solution la plus efficace serait que celui-ci cesse d’alourdir les charges des collectivités territoriales, comme il le fait en prenant des mesures en faveur des fonctionnaires de catégorie C, très nombreux dans les collectivités territoriales, ou en revalorisant le RSA deux fois par an.

Je m’arrête là, puisque j’importune manifestement M. le rapporteur général, lui qui parlait pourtant beaucoup quand il était dans l’opposition ! Cela étant, nous allons lui faire grâce de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances : il pourra ainsi se reposer !

Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Mes chers collègues, après avoir entendu le président du conseil général d’un des tout premiers départements de France, vous allez maintenant entendre celui du quatre-vingt-quinzième ou quatre-vingt-seizième…

Monsieur le ministre, vous avez mis en place une démarche courageuse, qui va permettre d’instaurer une vraie péréquation, en prélevant sur ceux qui ont le plus pour donner un peu à ceux qui ont le moins.

Certes, la péréquation exige des efforts de la part de certains. Vous avez réussi, en transférant aux départements 827 millions d’euros de frais de gestion et en instituant un prélèvement de 0, 35 point sur les DMTO – j’espère qu’il sera porté à 0, 7 point dans les années à venir –, à rééquilibrer les choses pour faire en sorte que le reste à charge par habitant s’inscrive dans une fourchette beaucoup plus raisonnable. Celui-ci variait en effet, selon les départements, entre 40 et 150 euros par habitant, voire davantage, ce qui n’était pas supportable.

Il est vrai que les gouvernements successifs ont pris des décisions certes généreuses et nécessaires, mais qui pèsent sur les budgets des départements. Je pense en particulier aux trois allocations de solidarité, le RSA, l’APA et la PCH.

Pour ma part, je salue l’effort qui a été fait. Il va dans le bon sens. Il faudra poursuivre dans cette voie, monsieur le président du conseil général du Rhône !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° I-111, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - L'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« Art. L. 1613-1. – À compter de l’année 2014, la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite dans la loi de finances pour l'année précédente d'un indice faisant la somme du taux prévisionnel, associé au projet de loi de finances de l'année de versement, d'évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année et de la moitié de la croissance prévue du produit intérieur brut marchand. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une hausse du taux de l’impôt sur les sociétés.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Cet amendement tend tout simplement à substituer au texte actuel de l’article 24 une définition plus générale de la progression de la dotation globale de fonctionnement, fondée sur la prise en compte de la hausse des prix à la consommation et de la croissance économique. Nous avons choisi de ne pas nous référer à la hausse des prix dits du « panier du maire », telle qu’elle fut calculée pendant un temps.

Cette formule n’a évidemment rien d’exceptionnel, puisque le texte que nous vous proposons est celui de la réforme Charasse de 1989, qui substitua la DGF à un prélèvement sur les recettes de TVA, en général adapté aux besoins dans le cadre du collectif de fin d’année.

Pour 2014, l’application de la formule que nous avons retenue aboutirait à une majoration de la DGF de 1, 75 % par rapport à 2013. Le montant de la DGF atteindrait ainsi 42 231 760 000 euros, selon le calcul que nous avons fait en préparant notre amendement à l’article 30. Une telle somme permettrait d’établir une juste répartition des ressources entre dotation forfaitaire, dotations de solidarité et péréquation.

Nous proposons par ailleurs d’abandonner la logique de l’enveloppe normée du pacte de stabilité ; il faudra bien s’y résoudre un jour. Cela fait en effet bientôt dix-neuf ans que, d’une manière ou d’une autre, les concours de l’État sont « encadrés » par le biais d’un présumé « pacte ». Le pouvoir d’achat des collectivités s’en trouve chaque année un peu plus réduit.

Que la croissance soit en panne ou non, que la récession menace ou que l’économie reparte, ces dix-huit dernières années ont été marquées par des coups de rabot successifs, qui n’ont pas permis, soulignons-le, de résoudre les problèmes d’inégalité de ressources entre collectivités.

Il faut sortir de cette situation : cet amendement appelle à une réflexion approfondie sur la place des collectivités locales dans la vie de la nation, sur les moyens qu’on veut leur donner et sur les missions qu’on leur confie.

C’est grâce à ses collectivités territoriales que la France a pu surmonter la crise de 2008 : il ne faudrait pas l’oublier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'amendement n° I-542, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 36

Remplacer le montant :

par le montant :

La parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Le présent amendement vise à dégager les marges de manœuvre budgétaires nécessaires à l’augmentation de 25 millions d’euros des crédits de la dotation de développement urbain, la DDU, et de 15 millions d’euros des moyens du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire. Il tend également à prendre en compte l’actualisation des montants de la dotation pour transfert de compensation d’exonération de fiscalité directe locale.

Afin de permettre la mise en œuvre de ces mesures destinées à renforcer le soutien aux territoires urbains sensibles et aux territoires ruraux, dans le respect des engagements réciproques de l’État et des collectivités inscrits dans le pacte de confiance et de responsabilité conclu le 16 juillet dernier, le présent amendement gage la perte de recettes induite pour l’État par les mesures précitées par une réduction du prélèvement sur recettes dit « des variables d’ajustement ».

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Sur l’amendement n° I-111, la commission a émis un avis défavorable, car il s’agit d’exonérer les collectivités territoriales de l’effort de redressement de nos comptes publics et d’augmenter la fiscalité pesant sur les entreprises, à hauteur de plus de 700 millions d’euros.

En revanche, la commission est favorable à l’amendement n° I-542, qui tend à tirer les conséquences de l’augmentation de la DDU et de la création du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Je comprends parfaitement, madame Beaufils, votre objectif. Cet amendement vise en réalité à indexer la DGF à la fois sur l’inflation et sur la croissance.

Son adoption aurait pour conséquence d’exonérer les collectivités territoriales de l’effort de redressement des comptes publics. Elle représenterait pour l’État un risque financier très important, pouvant atteindre, d’après les évaluations auxquelles nous avons procédé, 2, 2 milliards d’euros, ce qui, compte tenu des dépenses nouvelles engagées par le Sénat, est de toute façon hors de portée.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° I-111.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

La richesse produite par les collectivités territoriales est bien supérieure à ce qu’apporte aujourd'hui le secteur privé. Par conséquent, au travers de cet amendement, il s’agit tout simplement de renforcer une dynamique économique, ce qui pourrait permettre d’améliorer la situation budgétaire de l’État beaucoup plus efficacement que la réduction des moyens. En effet, la baisse des budgets d’investissement aura un effet négatif sur l’activité économique dans nos territoires. Il s’agit d’un élément très important.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

L'article 24 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'amendement n° I-292, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 24

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 2334-3 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° À compter de 2014, les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;

2° Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :

« - communes de 0 à 1 999 habitants ; ».

II. – Au second alinéa du 1° du I de l’article L. 2334-7 du même code, l’année : « 2011 » est remplacée par l’année : « 2014 » et le montant : « 64, 46 euros » est remplacé par le montant : « 79, 38 euros ».

III. – L’augmentation du prélèvement sur recettes résultant de l’application des dispositions ci-dessus n’est pas prise en compte dans l’évolution des concours de l’État fixée par l’article 13 de la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

IV. – L’augmentation du prélèvement sur recettes résultant de l’application des dispositions ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des taux d’imposition des plus-values à long terme visés à l’article 219 du code général des impôts.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Cet amendement reprend le texte d’une proposition de loi que nous avons défendue il y a peu.

Premièrement, l’équité nous amène à proposer de réduire la différence, devenue excessive, entre dotations urbaines et dotations rurales.

Deuxièmement, la démographie montre que, de 1999 à 2007, la population urbaine n’a augmenté que de 4, 6 %, contre 9 % pour la population rurale. Depuis la fin des années soixante-dix, le solde migratoire est devenu positif dans les campagnes et, depuis 2000, il en va de même pour le solde naturel.

Troisièmement, les possibilités de développement de l’économie, de l’agriculture et du tourisme sont sous-exploitées, faute de moyens, d’infrastructures de transports, ainsi que de visibilité et de stabilité de la politique agricole commune en matière de revenus agricoles.

Enfin, en termes de politique globale d’aménagement du territoire, la commune, de plus en plus menacée, demeure le meilleur pilier de la ruralité. La commune, échelon de proximité démocratique privilégié, assure la prise en compte des campagnes dans la gestion des affaires publiques.

Les charges de fonctionnement propres aux communes rurales sont multiples et justifient un effort significatif de rattrapage en matière de DGF. À cet égard, la mise en place des nouveaux rythmes scolaires coûtera en moyenne 150 euros par élève. Certes, cette charge nouvelle sera en partie compensée par le budget de l’État, mais cet apport, malheureusement, ne permettra pas de financer tous les moyens nécessaires. Toutes les communes rurales n’ont pas d’école, mais toutes ont des enfants scolarisés ; donc, elles devront payer !

La mise en œuvre du très haut débit d’ici à 2025 est une autre nouvelle charge d’un montant très élevé. Le très haut débit n’est pas rentable pour les opérateurs privés dans les zones rurales, d’où un coût moyen annoncé de connexion de 2 000 euros, dont 450 euros à la charge du bloc communal. Telle est la conséquence de l’abandon du grand service public des télécommunications, qui aurait pu être chargé d’assurer une couverture totale du territoire, sans discrimination.

La voirie et son entretien constituent une autre catégorie de charges, permanentes et importantes, propres aux communes rurales. Le coût est d’environ 25 000 euros par kilomètre rénové en enrobé. La circulation toujours plus intense des camions et des machines agricoles renforce la nécessité d’entretenir et d’adapter nos voiries.

Par ailleurs, les services publics sont en recul ou inexistants dans les collectivités rurales. C’est encore la commune qui doit mettre en place un « point contact » pour pallier la disparition de l’agence postale et des commerces.

Pour toutes ces raisons, il nous semble nécessaire de réajuster à la hausse la dotation forfaitaire des petites communes de moins de 2 000 habitants.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

La commission des finances est défavorable à cet amendement, qui remet en cause la participation des collectivités à la maîtrise des finances publiques. Une telle hausse de la dotation s’appliquerait de façon uniforme à toutes les communes les moins peuplées, quel que soit leur niveau de richesse. La péréquation est donc absente du raisonnement.

Lors de l’examen de la proposition de loi déposée par M. Gérard Le Cam et le groupe CRC, la commission des finances avait reconnu que les communes les moins peuplées rencontraient des difficultés financières. Elle avait toutefois estimé que cette question, tout à fait pertinente, méritait d’être examinée et réglée dans le cadre de la refonte de la dotation globale de fonctionnement. Une réflexion est engagée pour l’année 2014 et devrait permettre des évolutions dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, conformément à ce qu’a annoncé Mme Lebranchu.

Un groupe de travail sera mis sur pied à cette fin afin d’envisager des ajustements, cette question méritant effectivement d’être prise en considération. Toutefois, dans l’immédiat, la commission est défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

Le I de l’article L. 1615-6 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le taux de compensation forfaitaire est fixé à 15, 761 % pour les dépenses éligibles réalisées à compter du 1er janvier 2014. » –

Adopté.

Il est institué un prélèvement sur recettes de correction des calculs de versements de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle et des calculs de prélèvements et de versements au titre des fonds nationaux de garantie individuelle des ressources.

Ce prélèvement régularise, pour les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre identifiés par l’administration fiscale avant le 30 juin 2013, les montants de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle ainsi que le montant du prélèvement ou du reversement au titre des fonds nationaux de garantie individuelle des ressources, tels que définis aux 1 et 2 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, qui n’ont pu être rectifiés au titre des années 2011 et 2012 à l’issue des signalements effectués en application du 2 bis de ce même article 78.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

L'amendement n° I-13, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Compléter cet article par trois paragraphes ainsi rédigés :

II. – À l’avant-dernier alinéa du I du 1.4 de l’article 78 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, l’année : « 2012 » est remplacée par l’année : « 2013 ».

III. – À la seconde phrase du III de l’article 1640 B du code général des impôts, l’année : « 2012 » est remplacée par l’année : « 2013 ».

IV. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Le présent amendement vise à décaler d’un an, du 30 juin 2012 au 30 juin 2013, la date limite des redressements de taxe professionnelle pris en compte pour l’actualisation de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, la DCRTP, et du Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR.

L’article 37 de la loi de finances pour 2013 a modifié la date limite de prise en compte des redressements de taxe professionnelle de l’année 2010 pour l’actualisation de la DCRTP et du FNGIR, désormais fixée au 30 juin 2012.

Or certaines collectivités ont fait part de l’émission, après cette date, de rôles supplémentaires dont les montants peuvent s’avérer importants pour elles. C’est donc pour corriger cette situation que nous proposons, par cet amendement, de décaler d’un an, du 30 juin 2012 au 30 juin 2013, la date limite des redressements de taxe professionnelle pour l’actualisation de la DCRTP et du FNGIR.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué

Je voudrais d’abord rappeler pourquoi l’échéance du 30 juin 2012 a été fixée.

Par analogie avec le délai fixé pour les collectivités dont la DCRTP était évaluée à partir de la taxe professionnelle de 2009, le délai pour les collectivités utilisant la taxe professionnelle de 2010 dite « théorique », calculée à partir des rôles de la cotisation foncière des entreprises, a été fixé à dix-huit mois, soit au 30 juin 2012, par la loi de finances pour 2013. Ce délai répond donc à un souci d’équité.

Ensuite, d’autres arguments me semblent devoir être pris en compte.

Quatre années après l’entrée en vigueur de la réforme de la taxe professionnelle, en 2010, il est nécessaire de stabiliser les résultats de la réforme de la fiscalité directe locale. Pour affiner les montants de compensation, trois recalculs ont été effectués en 2011, en 2012 et en 2013. Il n’est pas possible de procéder chaque année à un recalcul : c’est une opération extrêmement lourde, tant pour les services de l’État que pour les collectivités, qui réduit d’ailleurs la prévisibilité des ressources de ces dernières.

Je tiens par ailleurs à souligner qu’un nouveau recalcul en 2014, qui serait nécessaire si votre amendement était voté, engendrerait des coûts estimés à 25 millions d’euros par an en régime de croisière. Ce recalcul devrait prendre en compte à la fois les ressources avant réforme et les ressources après réforme, et le sens de la correction ne peut être déterminé ex ante. Il ne se ferait donc pas forcément au bénéfice des collectivités territoriales.

Enfin, si je comprends la volonté de prendre en compte au mieux les ressources avant réforme, je crois nécessaire de stabiliser le dispositif et d’éviter un nouveau recalcul, dont l’incidence pourrait se révéler négative pour certaines collectivités territoriales.

Sous le bénéfice de ces explications, je vous demande donc, monsieur le rapporteur général, de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François Marc

Monsieur le ministre, je vous remercie de ces précisions.

La commission a considéré que, dans la mesure où des régularisations de DCRTP et de FNGIR ont été prévues en 2013 et où l’article 24 ter du présent projet de loi de finances permet de prendre en compte, dans les calculs, les erreurs signalées avant le 30 juin 2013 par les collectivités et les établissements publics de coopération intercommunale, il paraît cohérent que puissent être aussi pris en considération les rôles supplémentaires de taxe professionnelle au titre de l’année 2010 émis avant le 30 juin 2013.

C’est donc par souci de cohérence que la commission a déposé cet amendement : c’est l’ensemble des erreurs qui doivent être corrigées, sur tous les rôles supplémentaires de taxe professionnelle. Il s’agit d’assurer un traitement équitable pour l’ensemble des collectivités. Par conséquent, il est difficile à la commission de retirer cet amendement.

L'amendement est adopté.

L'article 24 ter est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Raffarin

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.