Intervention de Bernard Cazeneuve

Réunion du 26 novembre 2013 à 14h30
Loi de finances pour 2014 — Articles additionnels après l'article 23 bis

Bernard Cazeneuve, ministre délégué :

L’adoption de ces amendements irait à l’encontre des objectifs que nous nous assignons : la taxation des transactions financières au sein de l’Union européenne.

Si nous exprimons notre réserve sur ces amendements, ce n’est pas parce que nous sommes timorés, mais c’est bien au contraire parce que nous sommes déterminés à faire aboutir la taxe sur les transactions financières. Je profite de notre débat pour le souligner, car, après des discussions sur ce thème à l’Assemblée nationale, des commentaires ont pu donner le sentiment que le Gouvernement se situait en retrait sur le sujet.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement s’investit pour la mise en place d’une taxe sur les transactions financières, engageant dans un même mouvement, et sous la forme d’une coopération renforcée, onze États de l’Union européenne. Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités au mois de mai 2012, on nous expliquait qu’il était impossible d’obtenir de l’Union européenne qu’elle autorise une démarche conjointe des pays qui la composent pour atteindre ce but. Le Président de la République s’est pourtant engagé sur cette voie, et Pierre Moscovici a défendu ce projet au sein des différents conseils des ministres compétents. C’est ainsi que nous avons réussi à convaincre onze États de signer une lettre par laquelle ils s’engageaient, avec nous, dans une coopération renforcée.

Imaginez que nous fassions aujourd’hui la preuve que nous menons dans notre propre pays des actions qui pourraient apparaître comme isolées ou orthogonales par rapport à nos efforts au sein de l’Union européenne, alors que nous sommes à l’avant-garde des négociations avec la Commission européenne pour la mise en œuvre de cette taxe : nous perdrions toute légitimité, toute crédibilité, lorsque nous dirions vouloir avancer avec les autres États intéressés, d’autant que ces derniers défendent souvent leur propre intérêt, lorsqu’il s’agit de définir les modalités de mise en œuvre de cette taxe.

Il y a une seconde raison à notre réserve. Nous ne pouvons pas mettre en place des dispositifs qui finiraient par affaiblir la seule place financière de Paris, au bénéfice de toutes les autres. M. le rapporteur général indiquait tout à l’heure que l’adoption de ces amendements pourrait poser un problème de liquidités sur la place financière de Paris, notamment pour les transactions en actions. Il faut savoir que ces dernières constituent 40 % du total des transactions parisiennes.

Avec l’instauration de ce type de dispositif sur la seule place financière de Paris, nous serions confrontés à un risque de transfert considérable d’activité vers d’autres places. Ce faisant, nous n’aurions en rien régulé les activités financières ni lutté contre la spéculation ; nous aurions simplement encouragé la spéculation sur d’autres places financières, heureuses bénéficiaires de dispositions que nous aurions prises seuls, à notre seul et unique détriment !

Pour ces deux raisons, parce que nous sommes déterminés à faire en sorte que la régulation concerne toutes les places financières, qu’elle soit mise en œuvre au sein de l’Union européenne, qu’elle soit efficace, et qu’elle se fasse non pas à notre détriment, mais au bénéfice de la remise en ordre de la finance dans l’Union européenne tout entière, le Gouvernement demande aux auteurs de ces deux amendements de bien vouloir les retirer. À défaut, il émettrait un avis défavorable.

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