Intervention de Hervé Maurey

Réunion du 26 novembre 2013 à 14h30
Loi de finances pour 2014 — Article 24

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey :

L’article 24, qui concerne les ressources des collectivités locales, est particulièrement important pour notre Haute Assemblée.

En effet, et pour la première fois de notre histoire, il nous est proposé de réduire les dotations aux collectivités, notamment aux communes, qui plus est de manière significative.

La baisse sera de 1, 5 milliard d’euros en 2014 et, nous a-t-on annoncé, de même montant en 2015. Mme la ministre chargée de la décentralisation a en outre récemment laissé entendre que la tendance allait vraisemblablement se poursuivre sur les exercices budgétaires suivants.

Faisons un peu d’histoire.

Voilà trois ans, lorsque le gouvernement précédent a proposé de geler les dotations aux collectivités locales, ce furent des hurlements sur la gauche de l’hémicycle : on assassinait les collectivités locales ; on contraignait les élus locaux à augmenter les impôts ; on tuait l’investissement ; on transférait l’impopularité d’une hausse d’impôts que l’État n’osait pas assumer. Bref, c’était abominable !

L’année suivante, en 2011, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2012, la majorité du Sénat, qui était alors passée à gauche, donc dans l’opposition par rapport à un gouvernement qui, lui, n’était pas encore de gauche, rejetait la dotation globale de fonctionnement, la DGF.

Et l’année dernière, les mêmes élus de gauche, en tout cas les membres du groupe socialiste, trouvaient tout à fait normal de maintenir le gel qu’ils avaient condamné les années précédentes.

Nous voilà en 2013, et, avec le projet de loi de finances pour 2014, le gel se transforme en fonte ! D’ordinaire, un tel phénomène s’observe plus en météorologie qu’en finances publiques. §La baisse des dotations n’est pas anodine. Contrairement à ce que l’on tente de nous expliquer, elle devrait être de l’ordre de 4 % sur la partie forfaitaire de la DGF, qui, vous le savez, représente une part très importante des ressources des communes.

Qui plus est, il s’agit d’une baisse appliquée de manière aveugle : comme l’a souligné la Cour des comptes, la faculté contributive des différentes collectivités locales n’est nullement prise en considération.

Je dois dire, pour ne pas sombrer dans la démagogie, comme il s’en est trouvé pour le faire à une certaine époque, que nous pourrions comprendre cette baisse si, dans le même temps, le Gouvernement n’imposait pas de nouvelles charges aux collectivités. Pour ne pas être trop long, car on pourrait facilement multiplier les exemples de transferts de charges imposés aux collectivités, je n’en citerai qu’un, mais non des moindres : la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. Il sera demandé à des communes de prendre en charge cette réforme, qui coûtera à peu près 200 euros par enfant, ce qui aura une incidence très importante sur leur budget, alors même que l’on diminue leurs ressources.

Nous pourrions mieux comprendre cet effort s’il était partagé avec l’État. Or, en réalité, l’essentiel de l’effort budgétaire de l’État est supporté par les collectivités locales : quand on nous parle de 9 milliards d’euros d’économies, il s’agit essentiellement de dépenses qui augmenteront moins vite, sauf pour la dotation de l’État aux collectivités locales qui, elle, diminuera réellement.

Cela me semble difficilement supportable et entraînera de graves conséquences sur la vie des collectivités locales, notamment des communes. Cela se traduira à n’en pas douter par une augmentation de fiscalité : alors que le contribuable est déjà largement matraqué par l’État, il risque de l’être également par les collectivités locales en raison de la baisse des dotations. Je pense même que, chose inédite, certaines communes, peut-être pas dès le budget de 2014, mais les années suivantes, ne pourront plus équilibrer leur budget de fonctionnement.

Mes chers collègues, si l’on diminue les recettes dans le même temps que l’on augmente les dépenses, il arrivera nécessairement un moment où l’exercice deviendra tout simplement impossible !

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