Intervention de Marie-Hélène Des Esgaulx

Réunion du 15 février 2011 à 21h30
Débat sur le schéma national des infrastructures de transport — Orateurs inscrits

Photo de Marie-Hélène Des EsgaulxMarie-Hélène Des Esgaulx :

Ce débat sur le schéma national des infrastructures de transport, que nous attendions avec impatience, est, pour la représentation nationale, une occasion unique de s’exprimer sur des axes structurants pour la compétitivité de notre pays et le bien-être de nos concitoyens.

La nouvelle version de l’avant-projet, publiée au mois de janvier dernier, n’a pas substantiellement évolué par rapport à celle du 26 juillet 2010. Ses quatre axes sont réaffirmés, le cadre financier est mieux explicité et les engagements portant sur le mode routier ont été reconduits.

Je partage cette orientation dans la mesure où les projets sont ciblés, répondent à des préoccupations bien identifiées et légitimes de désenclavement territorial, de sécurité et de décongestion. Le mode routier demeure de toute façon marginal, recueillant moins de 8 % des investissements envisagés. Le report modal est donc une réalité.

De même, je souscris totalement à la stratégie selon laquelle la priorité doit être accordée à l’optimisation des réseaux existants avant toute extension éventuelle. Nous le savons, le réseau ferroviaire se révèle très vétuste en Île-de-France ainsi que sur certaines autres lignes, et le taux de renouvellement du linéaire routier est encore insuffisant. Se focaliser sur le seul développement des LGV serait un mauvais calcul économique, car plus la réfection du réseau existant est reportée, plus elle coûte cher. Et laisser se déliter un réseau dense, c’est aussi prendre le risque de créer de réelles incompréhensions chez nos concitoyens.

Compte tenu de mes attributions à la commission des finances, j’aborderai directement les perspectives financières et la soutenabilité budgétaire du schéma.

L’amélioration de notre réseau de transport est une nécessité économique et écologique, afin de favoriser la mobilité, la fluidité des échanges et les modes de transport moins polluants. Mais il est une priorité encore plus grande : le redressement de nos comptes publics. Nous devons avoir bien conscience que notre pays est un peu « sur la corde raide » et qu’il n’a plus les moyens, aujourd’hui pas plus que demain, de financer un programme d’infrastructures aussi extensif que nous pourrions le souhaiter. Il faut donc garder à l’esprit cette contrainte budgétaire, aussi désagréable soit-elle, et faire preuve de responsabilité dans nos ambitions.

Tout compris, donc en incluant les investissements de modernisation et de régénération, les projets du SNIT représenteraient 260, 5 milliards d’euros ; près du tiers de cette somme serait à la charge de l’État. Cependant, a priori, il ne s’agit pas d’une évaluation en coûts complets, intégrant les charges de personnel et de fonctionnement. De même, elle ne comprend pas le Grand Paris, dont les modalités de financement sont distinctes.

En outre, quel est le traitement des partenariats public-privé dans cette évaluation ? Plus précisément, la part relevant de l’État inclut-elle les loyers qu’il versera aux titulaires des contrats ? À défaut, cela implique de relever le montant de 85, 5 milliards d’euros mentionné dans le SNIT. Les partenariats public-privé ont de nombreux avantages, notamment celui d’atténuer la contrainte budgétaire infra-annuelle, mais ils ne sont évidemment pas gratuits.

Néanmoins, en se fondant sur l’hypothèse de l’avant-projet, la dépense budgétaire pour l’État s’élèverait en moyenne chaque année à 3, 42 milliards d’euros sur vingt-cinq ans. L’avant-projet visant une période de vingt à trente ans, j’ai retenu une durée intermédiaire, mais j’ai bien noté que, tout à l’heure, Mme la ministre a plutôt évoqué une période de trente ans. Quoi qu’il en soit, le montant est largement supérieur aux capacités actuelles de l’AFITF, dont le budget pour 2011 est de 2, 23 milliards d’euros. Selon un calcul approximatif effectué en fonction des données de 2011, il est en revanche couvert par le budget de l’AFITF et les autres dépenses d’intervention et d’investissement de l’État au titre du programme 203 sur les infrastructures et services de transports.

Il reste que les projections financières du SNIT posent immanquablement la question de la pérennisation et du volume des ressources de l’AFITF, donc du rendement de la future taxe sur les poids lourds et de l’augmentation de la redevance domaniale. La table ronde sur la taxe sur les poids lourds que la commission des finances organise demain permettra, je l’espère, de lever quelques interrogations.

Le budget de renouvellement du réseau assumé par RFF doit passer, quant à lui, à 1, 8 milliard d’euros en 2012, et il augmentera sans doute encore à l’avenir. Mais quelle en sera l’incidence sur les péages acquittés par la SNCF après 2012 ?

Le débat sur le réseau ferroviaire souhaitable à long terme est bien lié à la difficile équation du modèle économique de la SNCF et de RFF. Or celui-ci est actuellement compromis, même si l’on peut espérer qu’il ne s’agit que d’une transition difficile.

Pour conclure ces trop brèves observations, je constate que l’estimation du bilan financier du SNIT se veut honnête et prudente. S’il n’affiche pas, même de façon sommaire, les modalités de financement correspondantes, s’il n’assure pas le lien entre les projets d’infrastructures et les ressources financières adéquates, il a le mérite d’ouvrir le débat à partir de la vision de l’État.

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