Intervention de Jean-Noël Cardoux

Commission des affaires sociales — Réunion du 27 novembre 2013 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2014 — Mission « travail et emploi » articles rattachés 77 78 et 79 et compte d'affectation spéciale « financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » - examen du rapport pour avis

Photo de Jean-Noël CardouxJean-Noël Cardoux :

Je félicite tout d'abord le rapporteur pour son travail de fond et complet, tout en étant conscient des conditions difficiles imposées aux différents rapporteurs de la commission par l'agenda parlementaire.

S'agissant des contrats aidés, je constate le semi-échec des contrats de génération, comme l'a d'ailleurs reconnu le ministre, ce qui ne surprend pas mon groupe politique qui avait mis en garde contre certaines faiblesses du dispositif dès l'examen du texte au Parlement. La courbe des recrutements d'emplois d'avenir est certes ascendante, mais c'est au prix de pressions exercées par les services de l'Etat, et notamment les préfets et sous-préfets, sur les collectivités territoriales. Pour les avoir personnellement constatés, ces procédés me semblent un peu contestables... J'ai récemment entendu un responsable d'une mission locale indiquer, lors d'une réunion publique, qu'un emploi d'avenir revient à 7 000 euros par an dans le secteur non marchand, et à 14 000 euros dans le secteur marchand. Cette distorsion de base entre ces deux secteurs, que nous avions déjà soulignée, pointe le coeur du problème de la politique publique de l'emploi dans notre pays. Il y a en effet toujours cette crainte à l'égard du secteur marchand, alors que c'est là que se trouvent les principaux gisements d'emplois. Le ministre est d'ailleurs revenu sur sa position en ouvrant les emplois d'avenir, sous conditions, au secteur marchand. Il faut démystifier certaines approches en matière de politique de l'emploi et aller davantage vers le secteur marchand.

Malgré les apports de l'Assemblée nationale, le projet de loi de finances pour 2014 est un mauvais coup porté à l'apprentissage. Je regrette la disparition de la dotation globale de décentralisation. On transfère 300 millions de recettes de la TICPE vers les régions. Les montants des ressources actives qui seront affectées aux régions comme compensation de la disparition de la DGD seront-elles maintenues à moyen et long terme ? Le risque existe que l'apprentissage soit traité différemment dans les territoires selon l'approche retenue par les conseils régionaux.

Vous dites que la suppression des indemnités compensatrices de formation, prévue à l'article 77, est justifiée par les effets d'aubaine dans les grandes entreprises. Pour ma part, je ne vois pas ce qu'il y a de gênant quand un jeune décroche un emploi stable dans une grande entreprise à l'issue de son apprentissage... Vous évoquez une enveloppe de 430 millions d'euros, mais on ne sait pas exactement ce qu'elle compense. Pire, dans cette enveloppe figure une fraction de la TICPE, ce qui augmentera la pression fiscale. Vous utilisez en outre, pour boucher les trous, 50 millions d'euros du fonds de roulement du compte d'affectation spéciale. Par ailleurs, vous redéployez 264 millions d'euros essentiellement à partir des crédits du contrat de génération, ce qui prouve que ce contrat ne marche pas comme le Gouvernement l'entendait.

Il faut selon moi mettre à plat et rendre lisibles les aides à l'apprentissage, et surtout démystifier l'apprentissage auprès des enseignants, à l'instar de ce qui se passe en Allemagne. Il ne faut plus montrer du doigt l'apprentissage dans les collèges, car les métiers qui ont recours à cette forme d'alternance sont porteurs d'emplois. Le fonds du problème est psychologique à mes yeux.

Il est vrai que les élections des conseillers prud'homaux mobilisent peu les salariés et nécessitent une grande implication des services municipaux. Pour autant, je suis sceptique sur le projet de remplacer l'élection par une désignation - terme que je n'apprécie guère - fondée sur la représentativité des organisations syndicales et patronales. Sur quels critères pourrait-on établir la représentativité des syndicats par exemple, alors qu'ils sont actuellement débordés par des mouvements qui leur échappent ?

S'agissant du RSA, c'est un échec car l'incitation à reprendre une activité n'a pas fonctionné. Je plaide coupable car c'est la précédente majorité qui a institué ce dispositif. Il y aurait une réflexion à mener sur ce sujet, dans un cadre qui reste à déterminer, afin d'encourager les personnes qui acceptent de reprendre un emploi.

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