Jean-Claude Peyronnet et moi-même vous présentons les crédits de la mission « aide publique au développement » (APD) qui comprend le programme 110, géré par le ministère de l'économie et des finances, et le programme 209, géré par le ministère des affaires étrangères et qui comprennent l'essentiel de l'aide programmable.
Les moyens de l'APD française sont préservés dans un contexte budgétaire extrêmement difficile. Les crédits de paiement de la mission « aide publique au développement » ont diminué de 5,7%, soit 2,9 milliards. Les autorisations d'engagement s'élèvent à 4,2 milliards, en augmentation sensible. Nous aurons donc du mal à atteindre les 0,7% du PIB que nous évoquons régulièrement. En dépit de cette diminution, l'aide publique française, au sens où l'entend l'OCDE, augmente de 4,3% pour s'établir à 10,3 milliards.
Cette préservation a été possible grâce à des annulations de dettes et des refinancements qui triplent en volume, passant de 607 à 1 579 millions. En outre, les financements innovants au profit du Fonds de solidarité pour le développement (FSD) augmentent : l'article 36 prévoit en effet une hausse de 12,7% de la taxe de solidarité sur les billets d'avion. Au cours des échanges que nous avons eus avec les ministres, nous avons fait part de nos craintes concernant cette taxe ; ils nous ont rassurés. L'article 31, quant à lui, prévoit l'augmentation de 10 à 15% de la part de la taxe sur les transactions financières. Nous avions déposé des amendements l'an dernier en ce sens et le Président de la République a confirmé cette orientation lors des Assises du développement. Je salue cet effort, surtout en raison du contexte budgétaire actuel.
L'engagement du Président de la République de doubler en cinq ans l'aide transitant par les ONG françaises se traduit par une augmentation de 9 millions des autorisations d'engagement et d'1 million pour le fonds d'urgence humanitaire. Les ONG saluent cet effort tout en considérant que cette augmentation n'est pas à la hauteur des enjeux. Néanmoins cela va dans la bonne direction et nous nous en félicitons.
La lisibilité des documents budgétaires s'améliore, ce qui facilite notre tâche de contrôle. Le document de politique transversale « Aide publique au développement » contient ainsi quelques améliorations, que nous avions demandées depuis longtemps. En revanche, des progrès restent à faire pour mieux évaluer les résultats, notamment pour ce qui concerne le Mali. Nous ferons des propositions concrètes.
Les canaux de transmission de l'APD sont réorientés vers l'aide bilatérale, qui était descendue à 66% en 2012 et qui devrait à nouveau atteindre 70%. Au Sahel, il faudrait abonder de 200 à 400 millions l'aide bilatérale pour répondre à la multiplicité des projets sur lesquels la France est attendue. Nous allons donc dans le bon sens.
L'année 2013 aura été particulièrement dense, en raison des premières Assises du développement qui ont duré six mois et qui ont été closes par le Président de la République. Diverses annonces ont été faites et le ministre du Développement a rencontré tous les partenaires afin de dégager des priorités. Après cette première phase de concertation, le Premier ministre a réuni, le 31 juillet, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID) qui n'avait pas siégé depuis 2007. Les orientations arrêtées sont celles que nous appelions depuis longtemps de nos voeux, notamment une meilleure convergence des objectifs du millénaire et de l'agenda du développement durable, la concentration de notre aide sur des partenariats différenciés et une meilleure cohérence de notre action en matière de développement. Enfin, il convient de mieux coordonner notre aide avec celle de l'Europe. Nous devrions travailler avec les Britanniques car leurs méthodes d'évaluation et de contrôle sont excellentes. Ils ont mis un terme à leur APD en Inde, estimant que ce pays n'en avait plus besoin.
Au-delà des vingt-huit objectifs listés, dont la plupart font consensus dans le milieu de la coopération, vos rapporteurs souhaitent que le gouvernement passe de la parole aux actes. Le futur projet de loi de programmation devra comporter des engagements chiffrés et éviter des notions vagues comme « le retour à bonne fortune » qui figure dans la loi de programmation militaire. Il conviendrait que des pourcentages soient fixés, surtout pour le Sahel, afin d'apprécier l'adéquation entre les engagements et la réalité. Le CICID estime que 85% des fonds de l'AFD doivent aller au sud Sahel, mais 115 pays sont concernés par cette aide, dont 90 pays qui ne se trouvent pas dans cette région du monde ! M. Peyronnet et moi-même siégeons au conseil d'administration de l'AFD : nous voulons que les crédits soient efficaces et que les politiques soient évaluées. Le futur texte devra hiérarchiser les objectifs de l'aide, définir une trajectoire financière compatible avec la situation de nos finances publiques, rapprocher les indicateurs des objectifs. Le ministre a eu la courtoisie de nous envoyer l'avant-projet de loi, nous y sommes sensibles.